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Wednesday, July 2, 2025

ISTEAH-GRAND’ANSE dans la correction d’une insoutenable bévue

Le campus de l"ISTEAH au coeur du projet PIGRAN du GRAHN
à Génipailler, Milot, Haïti
 

Par Max Dorismond 

J’ai souvenance encore du premier livre que je m’étais procuré à mon arrivée au Canada dans les années 70, dans la première librairie visitée. Ce fut le best-seller d’Alain Peyrefitte : Quand la Chine s’éveillera… le monde tremblera. Un titre prémonitoire, à glacer aussi le sang, vendu à plus de 2 millions d’exemplaires. En ce temps-là, la pauvreté démesurée, la misère innommable, avaient croisé leurs jambes sur le cou de ces braves gens, tout droit sortis de la révolution de Mao Zedong, au point qu’au Québec, je m’en rappelle encore, on invitait les écoliers à compiler des cennes noires à envoyer à titre de dons aux petits Chinois. 

Quel message, en réalité, véhiculait ce titre accrocheur? Dans ses interviews de l’époque, Peyrefitte résumait son œuvre en quelques mots : Quand on impose l’enseignement obligatoire à tout un peuple, il est condamné à prospérer, à se dépasser, per fas et nefas! En effet, la scolarisation, qu’elle soit formelle ou informelle, est essentielle pour permettre aux individus de comprendre le monde qui les entoure, de développer leur esprit critique et de participer activement à la société. Justement, Mao y croyait et prescrivait l’instruction généralisée en mandarin1 à tous ses congénères. Et la preuve nous crève les yeux aujourd’hui! En moins de 50 ans, la Chine est connue comme la deuxième puissance au monde, après les USA. L’école mène à tout. Sans surprise, les petits Chintoks peuvent nous rendre la monnaie de nos piécettes. 

Laissons la Chine et regardons un peu chez nous. Qu’avons-nous fait après notre révolution en 1804?

Justement, le contraire des Chinois. Les rares institutions de langue française érigées dans la capitale étaient réservées à une élite prédatrice qui n’avait de bourgeoise que le rêve. La masse des damnés était parquée à la campagne pour cultiver la terre, comme auparavant, loin de toute instruction, en dehors des chemins de l’émancipation, d’où la frustration généralisée, la perte de confiance en son frère de combat, dans le Nouveau Monde naissant. S’ensuivit le résultat que nous partageons par les temps qui courent : un pays exsangue, dangereux, sans gouvernement, sans administration, embrayé en marche arrière pour le pire et l’exil en finalité, contribuant à l’anéantissement de la société. 

Pour sauver la mise, aujourd’hui, certains esprits éclairés, tels que le Dr Samuel Pierre et d’autres, dans une dynamique de rationalité, envisagent de fonctionner à l’envers de l’histoire pour doter la nation de moyens d'enseignement, où les laissés pour compte devraient bénéficier des avantages du télé-apprentissage (via internet). C’est ainsi que s’est installé ISTEAH2, dans plusieurs recoins du pays pour mettre l’excellence au service du bien commun, avec des cours de premier cycle (Bac), de maîtrise et jusqu’au niveau du doctorat, supportés par plus de 200 professeurs bénévoles à travers le monde. Car l’instruction joue toujours un rôle clé dans la réalisation du progrès. Elle fournit les outils nécessaires pour avancer et s’adapter aux changements.  

La Grand-Anse est la dernière étape, puisque toutes les localités de l’île sont presque toutes branchées. Et ce n’est pas tout. Comme la Cité du Savoir construite dans le Nord par le GRAHN3, le vaisseau amiral dont dépend l’ISTEAH, nous rêvons aussi d’une telle entité pour le GRAND-SUD, aux fins d’encadrer, avec cet outil d’ingénierie sociale, les petits surdoués qui s’ennuient dans l’arrière-pays. Voilà un lien qui renseigne sur la dernière collation des grades de l’ISTEAH le 31 mai dernier : https://lescientifique.org/haiti-forme-ses-cerveaux-51-diplomes-engages-issus-de-listeah 

Mme Nadia Lucien

Grâce à la bienveillance de certains Grand’Anselais et d’autres amis, nous avons pu réunir un pactole assez généreux pour concrétiser ce rêve dans le mortier du réel, en créant un espace d’émancipation intellectuelle et d’épanouissement égalitaire. Nous saluons, entre autres, l’apport de Mme Nadia Lucien, une femme d’affaires de la région, qui a mis sa propre demeure à notre disposition, moyennant des paiements symboliques. Nous lui disons mille fois : merci! 

Très bientôt, vous serez invités à participer à l’inauguration de l’implantation de l’ISTEAH à Jérémie. Une date vous sera fournie, de même qu’un lien Zoom pour tous ceux qui ne peuvent être sur place. 

Max Dorismond

 

–NOTES— 

1 — Le mandarin standard appelé Putonghua était activement promu comme langue commune pour unifier le pays, notamment dans l’éducation… Avant, la Chine utilisait plus de 500 dialectes.

2 — ISTEAH : «Institut des Sciences des Technologies et des Études avancées d’Haïti»

3 — GRAHN : «Groupe de Réflexion et d’Action pour une Haïti Nouvelle»

Wednesday, August 14, 2024

Le week-end de la Saint-Louis 2024 à Ottawa


Un groupe d’amis provenant principalement du collectif constitué en 2013 pour le renforcement des capacités de l’Hôpital et Saint-Antoine de Jérémie, puis pour l’aide d’urgence aux sinistrés de l’ouragan Mathiew, s’est mobilisé ces derniers temps pour entretenir la flamme de la Grand’Anse dans les cœurs des expatriés de cette région.  Il a dans cet esprit décidé de commencer dès cette année à réunir, ici à Ottawa, le plus grand nombre possible de Grand’Anselaises et de Grand’Anselais pour célébrer la Saint-Louis.

Connaissant l’engouement de cette tranche de notre diaspora pour la commémoration de cette fête patronale, le Comité a pris l’initiative de monter un programme varié d’activités pour ce week-end et de prendre sans tarder les dispositions appropriées. Si l’objectif premier est d’attirer à Ottawa cette année les expatriés désireux de revivre les joies de leur jeunesse à La Pointe, à Versailles, à Ma folie, etc., nous voulons à plus long terme commencer immédiatement une tradition de festivités pour le dernier week-end du mois d’août.

Étant donné que la Saint-Louis tombe cette année durant la fin de semaine nous avons étalé le programme d’activités sur trois jours. Le vendredi soir, il y aura une première rencontre informelle au restaurant du Multicultural Country Club de Vanier où l’ambiance sera à la fête. Le plat de résistance du programme du week-end sera le Grand Bal de la Saint-Louis est prévu pour le samedi 24 et commencera à 9 heures du soir. Le curé grand’anselais de la paroisse haïtienne de l’église du Sacré-Cœur nous a déjà promis de consacrer la messe du jour à la Saint-Louis. Donc, un programme bien rempli qui comportera les trois types d’activités qui portent les Jérémiens qui ont quitté la ville à y retourne chaque année à cette date : les retrouvailles toujours chaleureuses de l’avant-veille, la grande soirée dansante traditionnelle de la veille, la cérémonie religieuse du jour de la fête, habituellement suivie chez nous d’une majestueuse procession.

Dans le cadre de sa mission d’aumônier de la Communauté catholique haïtienne de l’Outaouais (CCHO), rattachée à la paroisse Sacré-Cœur d’Ottawa, le révérend Lin Éveillard  a spontanément inscrit au calendrier des activités  de la CCHA une messe solennelle qui sera consacrée à Saint Louis Roi de France le dimanche 25 août à partir de 12 h 30. Ce sera l’occasion pour les visiteurs venus de partout de clore dans la prière et la piété la traditionnelle saison de notre fête patronale.

Nous tenons à préciser que la soirée du samedi 24 sera animée par le jeune groupe ODAS PLUS, qui est en train de préparer un répertoire de chansons qui feront le bonheur des nostalgiques des divers groupes d’âge de notre diaspora. En outre, la grande vedette jérémienne Steve Brunache, l’ancien fondateur du groupe à succès Tonm-Tonm, sera de la programmation. Il nous a promis d’électriser carrément l’assistance avec ses nouvelles sonorités, son répertoire captivant et son inspiration toute grand’anselaise.

Le droit d’entrée au Grand Bal du 24 août est de 50 dollars à l’avance et à 60 dollars à la porte. L’entrée au restaurant est gratuite le vendredi soir, mais il y aura un léger cover charge pour les musiciens.

Les billets sont en vente dans les principales entreprises commerciales haïtiennes d’Ottawa et au Multicultural Community Club du 303 Kendall Ave, de Vanier, où se déroulera la soirée du 23 août. Pour toute information supplémentaire, composer un des numéros suivants : le : 613 291 1820; 613 720 1242;  343 201 1090; 613 862 7292

 

Pour le Comité :

Michel Paisible                       Yves Ali Michel    Georges Séraphin Eddy Cavé                                                                                                                              

Thursday, September 2, 2021

Proposition du GRAHN pour héberger victimes du séisme dans le grand Sud

Le dimanche 22 août  2021, le Groupe de réflexion et d’action pour une Haïti nouvelle (GRAHN-Monde), créé huit jours après le tremblement de terre du 12 janvier 2010, a tenu une rencontre virtuelle de réflexion portant sur le séisme qui a durement frappé le grand Sud, plus précisément les départements des Nippes, du Sud et de la Grand’Anse. Pendant quatre heures d’horloge et sans arrêt, les participants à cette manifestation patriotique et citoyenne ont échangé sur trois sujets d’importance : une analyse contextuelle du séisme et de ses conséquences sur les populations touchées ; les propositions concrètes pour venir en aide à ces populations qui risquent de s’enfoncer de manière irréversible dans la pauvreté extrême ; les défis de gouvernance auxquels le pays se heurte au cours des 35 dernières années et qui commandent une démarche de rupture pour arrêter cette descente aux enfers.

Une analyse contextuelle du séisme

Ce qui est ressorti clairement de cette analyse, c’est l’extrême vulnérabilité du pays face aux catastrophes naturelles et humaines, causée par un déficit notoire de gouvernance. Une gouvernance chaotique, voire médiocre, qui affaiblit continuellement l’État devenu incapable d’assurer la sécurité des vies et des biens. Dans le contexte du séisme qui a durement frappé le grand Sud, cette inefficacité grandissante de l’État s’est manifestée par son incapacité à faire respecter les lois et les normes de construction existantes. Cette réalité n’est pas différente dans les autres aspects de la vie nationale où des lois existent et ne sont pourtant pas respectées. Pire encore, elles sont violées quelquefois par les personnes qui avaient le mandat de les faire respecter.

Dans le cas des constructions anarchiques érigées sur l’ensemble du territoire haïtien, cela s’est fait dans la plupart des cas dans l’ignorance totale du schéma d’aménagement du territoire lorsque celui-ci existe. Plusieurs maisons sont construites dans des zones à hauts risques de natures diverses : risques sismiques mais aussi d’inondation dans le cas de fortes pluies saisonnières ou d’origine cyclonique. Comment demander à des populations démunies de prendre en compte de tels aléas sans aucun soutien, encadrement technique ou directive des représentants de l’État, dont les mairies ? Respecter des normes existantes exige des moyens financiers dont ne disposent pas toujours les ménages à faible revenu qui vivent dans nos communes et nos sections communales. Ces ménages sont donc obligés d’opérer un arbitrage douloureux entre leur survie à court terme – trouver un toit sous lequel héberger leur famille souvent nombreuse – et l’exigence de sécurité face aux éventuels risques mentionnés précédemment. Des risques qui sont pourtant bien réels !

Des actions concrètes et une proposition phare

Plusieurs propositions concrètes ont été faites pour accompagner les personnes désireuses de reconstruire leurs maisons détruites de manière plus sécuritaire. Une d’entre elles suggère de concevoir et de présenter sous forme de catalogue des maisons modèles prêtes à être construites, qui respectent les normes parasismiques et qui ne nécessitent pas la prise en charge par des professionnels non disponibles dans les régions isolées. Encore faut-il que les terrains sur lesquels ces maisons seront construites ou reconstruites ne se situent pas dans des zones à risque et respectent les règles de zonage ainsi que le schéma d’aménagement du territoire en vigueur. Cela passera certainement par une campagne nationale d’éducation afin de sensibiliser la population au danger de ne pas respecter ces règles. Il faut que l’État soit présent sur tout le territoire national afin de veiller au respect des normes de construction, et ce, de manière indiscriminée et sans complaisance. On a vu des ministres démis de leur fonction parce qu’ils ont voulu faire respecter la législation en vigueur en matière d’aménagement du territoire et de lieux de construction.

Nous le savons toutes et tous : le territoire haïtien est exposé à des risques de cyclones et de séismes, ce qui engendre des catastrophes à répétition qui mettent en danger la vie des populations exposées. Dans le meilleur des cas, les personnes sinistrées font face à des besoins de première nécessité tels l’eau potable, la nourriture, des trousses de premiers soins, des trousses d’hygiène, des abris provisoires, et j’en passe. Pourquoi ne pas aménager dans chaque département au moins un centre d’approvisionnement de secours facilement accessible, parasismique et résistant aux intempéries afin de faire face à la détresse humaine qui fait généralement suite aux séismes, aux cyclones et aux inondations ?

Quand une population a vécu coup sur coup des catastrophes comme le tremblement de terre de 2010, l’ouragan Matthew en 2016 et le séisme du 14 août 2021, elle a subi des traumatismes dont les traces sont le plus souvent invisibles et dont les séquelles se manifestent par des comportements pour le moins anormaux. D’où la nécessité de reconstruire l’être haïtien brisé, traumatisé et souvent en proie à des problèmes de santé mentale non soupçonnés et non pris en charge par la société ni l’État. Il faudrait créer des cellules de travail pour gérer les crises de ce genre, tirer des leçons pour l’avenir et planifier dans la longue durée. Nous devons admettre que le pays est exposé à des aléas sismiques et cycloniques qui doivent faire partie de notre réalité et de notre imaginaire de peuple. Nous devons donc nous préparer mentalement et structurellement à y faire face.

La proposition phare qui a été présentée et discutée à cette rencontre de réflexion demeure celle d’un projet consistant à reconstruire les habitats détruits par le séisme dans les trois départements concernés – Nippes, Sud et Grand’Anse – en respectant les deux exigences minimales suivantes : éviter les zones à risque sismique et cyclonique, et construire dans le strict respect des normes parasismiques et anticycloniques. Évidemment, un tel projet se concentre sur les résidences familiales et n’englobe pas les lieux de culte, les écoles, les établissements de santé, les édifices publics et les entreprises. L’idée en est qu’il faut d’abord héberger de manière convenable et sécuritaire les résidents des milieux touchés afin d’assurer la pérennité de ces communes et sections communales. De toute manière, les infrastructures collectives comme les lieux de culte, les écoles, les édifices publics et les entreprises ne s’érigent jamais dans les déserts, dans les endroits où il n’y a pas de vie, de résidences, de personnes qui y habitent. Néanmoins, un tel projet doit être mené dans le respect d’un plan d’aménagement urbain ou rural qui prévoit de la place pour ces infrastructures collectives.

Pourquoi doit-on faire cela ?

La capitale d’Haïti, Port-au-Prince, a été fondée en 1749 pour accueillir environ 250 000 personnes. Aujourd’hui, près de 3 millions de personnes y vivent ou survivent, avec une pléthore de bidonvilles qui pullulent ici et là dans tous les quartiers huppés ou non qui constituent la grande région métropolitaine. Résultat des flux migratoires qui ont débuté au cours des années 1960 avec les différentes manifestations politiques organisées par le pouvoir en place, des personnes venant des neuf autres départements géographiques du pays ont convergé vers Port-au-Prince et y sont restées dans l’espoir d’une vie meilleure. Ainsi naquirent les bidonvilles autour de la capitale qui n’était pas préparée à recevoir un tel flux migratoire. À cela s’ajoutent l’explosion démographique et la disparition des opportunités liées à l’agriculture dans les milieux ruraux, disparition causée par une ouverture irréfléchie du marché haïtien au commerce international. Les régions ont envahi la capitale qui est devenue progressivement la République de Port-au-Prince, avec les résultats socio-économiques que l’on connaît aujourd’hui : bidonvilles omniprésents, zones de non-droit qui entretiennent la terreur, insécurité généralisée, incivisme devenant mode de vie, rues et ruelles devenues infranchissables et sales, taux élevé de criminalité et de gangstérisme, baisse fulgurante de la qualité de la vie...

Imaginez ce que deviendrait Port-au-Prince si toutes les personnes sinistrées des trois départements, n’ayant plus de résidences dans leur patelin, basculées l’espace de quelques secondes dans la pauvreté extrême, sans perspectives de vie dans leur localité, décidaient de venir s’établir dans la capitale à la recherche de moyens de vivre, de résidence, d’emploi, de perspectives, d’espoir. Cette éventualité constitue une vraie menace pour la capitale qui pourrait avoir à faire face à un afflux sans précédent de migrants en quête d’un mieux-être et fuyant l’extrême pauvreté.

Il y a une recette bien connue des pays qui veulent combattre la pauvreté et relever leur économie, surtout en période de récession économique ou après une catastrophe naturelle ou humaine. C’est la conception et l’exécution de grands projets d’infrastructures dont une des finalités est de relancer l’économie et de créer massivement des emplois. Selon la Direction générale de la protection civile (DRPC), en date du 18 août 2021, « 137 000 familles ont été touchées dans les départements du Sud, de la Grand’Anse et des Nippes. Près de 61 000 maisons ont été détruites et plus de 76 000 ont subi des dommages dans les trois départements les plus touchés, laissant des milliers de personnes sans abri et entraînant un besoin urgent de solutions pour un hébergement d’urgence ». 

Un projet de construction-réhabilitation de 140 000 résidences familiales dans les communes et les sections communales pourrait relancer l’économie de ces régions, créer des dizaines de milliers d’emplois de différentes natures dans ces régions et dans le reste du pays, augmenterait les compétences et le savoir-faire des jeunes techniciens locaux, favoriserait l’émergence de nouveaux consommateurs et de nouvelles entreprises pour répondre aux besoins de ces derniers, appliquerait de manière efficiente la théorie de la percolation souvent perçue comme socle conceptuel du paradigme de l’aide internationale. Ce serait l’occasion de mobiliser les jeunes des écoles professionnelles et des universités de la région dans un mouvement de citoyenneté participative. Bref, il s’agit d’un projet mobilisateur qui emploierait au maximum les ressources locales afin de créer des emplois dans les régions dévastées, de redonner espoir à ces populations en détresse et de permettre aux départements sinistrés de se relever durablement.

Est-ce faisable ?

Sur le plan technique, c’est un projet tout à fait faisable. Les compétences, l’expérience et le savoir-faire sont disponibles au pays et ne demandent qu’à être mobilisés.

Sur le plan économique, les retombées pour l’État sont évidentes : relance de l’économie haïtienne qui est en chute libre depuis au moins les quatre dernières années avec des taux de croissance négatifs et des taux de chômage constamment à la hausse enfonçant ainsi les jeunes dans le désespoir. Il est bien connu que la construction est un secteur important qui contribue grandement à la croissance économique d’un pays, et ceci, de manière quasi instantanée.

Sur le plan financier, l’enjeu est de taille. Il faut trouver les sources et la stratégie de financement. Mais, avant toute chose, quel serait le montant nécessaire ? Le GRAHN est en train de réaliser depuis 2016, à Génipailler, troisième section communale de Milot, dans le Nord du pays, le projet Pôle d’innovation du grand Nord, PIGraN – Cité du savoir, combiné à un autre projet de Village de la Cité du savoir en partenariat avec food For the Poor. Il a donc les prix réels de construction en milieu rural lorsqu’une gestion rigoureuse est pratiquée, pour avoir construit de 2016 à 2021 plusieurs édifices de différentes tailles, dont les prix varient entre 8 000 et 1 million de dollars américains. Forts de ces expériences, en demeurant dans la sobriété et avec un système efficace d’approvisionnement en matériaux surtout locaux, nous estimons grosso modo qu’un minimum de 1,7 milliard de dollars américains serait nécessaire pour réaliser ce projet, sans compter les apports supplémentaires de capitaux provenant des ménages plus aisés aspirant à des maisons plus haut de gamme.

Résidence de gardien dans la Cité du savoir à Génipailler (coût de construction : 8 000 dollars américains)

Bureau d’ingénierie de la Cité du savoir à Génipailler (coût de construction : 25 000 dollars américains)

La nécessité de repenser la gouvernance du pays

Le troisième volet de la rencontre de réflexion du GRAHN portait sur la gouvernance globale du pays au cours des trois dernières décennies. Un des points forts de l’échange qui a été soulevé à plusieurs reprises, c’est la mainmise de forces obscures sur l’État et ses institutions, une sorte d’État dans l’État qui contrôle une bonne partie des sources de revenus de la République, rendant ainsi l’État incapable de fournir des services de base à la population. Cela est à la fois cause et conséquence du désengagement de l’État qui apparaît de plus en plus faible, voire inexistant, en tout cas incapable de faire respecter la loi, de protéger la population contre les atteintes à la vie et à la liberté de déplacement des citoyennes et citoyens à travers le pays.

Tout cela se trouve aggravé par une corruption devenue endémique qui se manifeste au plus haut niveau de l’État mais qui n’épargne aucune couche de la société : pouvoir exécutif avec les différents scandales de détournement et de dilapidation des fonds publics, pouvoir législatif avec des parlementaires qui marchandent leurs prérogatives d’instance de contrôle du pouvoir exécutif, pouvoir judiciaire incapable de rendre la moindre justice et qui entretient consciemment ou non l’impunité. À ce titre, il convient de mentionner que, tout en restant un fléau à combattre vigoureusement, ce n’est pas la corruption en elle-même qui nous inquiète, c’est plutôt la garantie d’impunité dont jouissent les personnes qui l’entretiennent et qui s’y adonnent : corrupteurs et corrompus. Le pays est devenu invivable pour presque tout le monde justement à cause de cette garantie d’impunité. L’enquête se poursuit toujours… sans jamais aboutir ! C’est donc à se demander : À quoi sert un pouvoir exécutif qui ne gouverne pas ? À quoi sert un pouvoir législatif qui ne contrôle pas et qui adopte très peu de lois ? À quoi sert un pouvoir judiciaire qui ne rend pas justice ?

Ces questions donnent à penser que la plupart de nos élus ne sont pas à la hauteur de leurs tâches et des attentes placées en eux, même s’ils ont cette fâcheuse habitude de s’appeler des « hommes d’État ». Et cela n’a rien à voir avec le niveau d’instruction de ces personnes. Cela a plutôt à voir avec leur degré d’intégrité, leur niveau de sens éthique, leur degré de moralité, leur sens des responsabilités envers les électeurs qu’ils représentent, leur degré de patriotisme, leur niveau de compréhension du rôle qui leur est assigné, leur propension à se mettre au-dessus des lois de la République, leur attachement trop fort aux privilèges dus à leur rang sans aucun souci de résultats pour la nation. Il est résulté de tout cela un pays qui a nettement perdu le contrôle de sa destinée, avec une majorité d’institutions devenues inexistantes, dysfonctionnelles ou inopérantes. Voilà donc le résultat de 35 ans d’une transition démocratique qui n’a pas dit son dernier mot !

Puisqu’il faut appeler les choses par leur nom, cet échec collectif n’a pas de quoi nous rendre fiers, même si nous n’avons pas joué de rôle actif dans la gouvernance du pays. Les oppositions politiques doivent au moins reconnaître qu’elles n’ont pas joué le rôle constructif de contre-pouvoir que l’on était en droit d’attendre d’elles au cours des 35 dernières années, avec une capacité de propositions inspirantes et pragmatiques pour la nation. Au contraire, nous avons assisté à un long exercice de dogmatisme et d’intransigeance qui, lui aussi, n’a pas permis d’arriver à un compromis acceptable et nécessaire au déblocage du pays. « Que le pays crève, mais je maintiens ma position. Car je suis convaincu d’avoir raison. » Voilà ce à quoi, impuissant, le pays a assisté, particulièrement au cours des quatre dernières années ! Personne ne veut rien céder à personne… jusqu’à ce que le Blanc débarque et prenne officiellement le contrôle de tout.

Il est vraiment temps que toute cette comédie cesse. C’est la vie de 12 millions de personnes qui est en jeu. La société civile doit sortir de sa léthargie et entrer en scène. Elle s’était remise candidement entre les mains d’armateurs amateurs qui ont conduit le bateau au naufrage dont nous sommes à la fois les témoins et les victimes. Une conférence nationale ou yon chita pale ansanm – appelons-la comme on veut – devient alors incontournable. D’abord comme démarche de thérapie collective pour tenter de vider des contentieux historiques qui fragmentent et fragilisent la société haïtienne, mais surtout pour esquisser les contours d’un projet commun de nation dont nous avons du mal à accoucher. Ce n’est certainement pas là une panacée, mais plutôt une quête de réconciliation du pays avec lui-même en vue d’un nouveau départ vers plus de justice, d’équité, d’éducation, de progrès et de lumière. Après avoir été un apôtre de la liberté des peuples opprimés de l’humanité, nous devons cesser d’être la risée du monde.

Pour conclure : une énième opportunité à ne pas laisser passer

À l’intersection de la physique statistique et de la physique mathématique, la théorie de la percolation étudie les caractéristiques des milieux aléatoires et s’applique notamment en science des matériaux pour formaliser les propriétés d’écoulement dans les milieux poreux. Elle tente de répondre, entre autres, à la question informelle suivante : imaginons que l’on place de l’eau dans un creux au sommet d’un matériau poreux. Quelle est la probabilité qu’il y ait assez de canaux communiquant entre eux pour que cette eau réussisse à atteindre la base de la pierre ?  Transposée dans le domaine de l’aide internationale et dans le contexte du séisme du 14 août 2021, la question pourrait se reformuler comme suit : comment faire pour que l’aide internationale qui pourrait être débloquée au profit des familles sinistrées atteigne la base, c’est-à-dire les nouveaux sans abri du grand Sud ? Il y a là une opportunité, celle de reconstruire sur des bases plus résilientes et plus sécuritaires, trois départements d’un pays très exposé aux risques de catastrophes naturelles. Si nous réussissions ce projet commun, nous reprendrions confiance en nous-mêmes collectivement, ce qui nous permettrait de répéter l’expérience lorsqu’un tel malheur frappera une autre région du pays. 

Une fois de plus, Haïti se trouve à la croisée des chemins, comme elle l’a été déjà dans notre histoire récente en 1986, en 1990 et en 2010. À ces trois occasions, nous avons raté le virage conduisant vers la concrétisation des espoirs que nous avions légitimement nourris. N’ayons pas peur de le dire, ces trois occasions manquées se sont muées en cauchemars pour le pays. Les forces saines du pays en sont sorties exsangues, plus abattues que jamais. Allons-nous perdre une fois de plus cette énième opportunité qui se présente à nous aujourd’hui ?

Déjà se pointent à l’horizon les vieux démons qui nous ont toujours hantés. En particulier celui de la division, mais qui est en fait une éternelle crise identitaire. Après 217 ans d’indépendance acquise dans l’union qui a fait la force, nous semblons ne pas savoir qui est haïtien et qui ne l’est pas, sur fond d’exclusion à peine voilée. « Entèl se milat, Intèl se nèg nwè, Entèl se nèg andeyò, entèl se nèg dyaspora, entèl se Siwo-libanè, entel se Jwif », tout cela entaché chaque fois d’une connotation négative qui demeure source de stigmatisation et qui sert de prétexte d’exclusion. Où est la citoyenneté dans tout cela? Où est l’allégeance à la nation et à la République dans tout cela ? Où est l’exigence du vivre-ensemble dans tout cela ? Où est la quête d’une plus grande justice sociale dans tout cela ? Nous sommes manifestement devant un problème mal posé, ou mieux encore devant une situation qui mérite d’être reproblématisée comme clé d’accès à une société moderne accordant des chances égales à toutes et à tous, sans égard aux origines sociales ou à la couleur de la peau. Voilà un sujet central qui devrait être débattu en toute sérénité et avec hauteur dans une conférence nationale!

Dans la plupart des pays démocratiques où s’est posé ce problème, il a été abordé et résolu grâce à des politiques publiques qui ont été imaginées, conçues et mises en place par des dirigeants résolument animés de la volonté politique nécessaire pour y parvenir. Dans cet ordre d’idées, il y a lieu de mentionner le roman biographique du philosophe français Paul Nizan intitulé Antoine Bloyé, qui aborde ce qu’il appelle « la trahison de classe » et qui soulève la question de savoir comment changer de classe sans trahir les siens et se trahir, comment faire pour que les opprimés d’hier ne deviennent pas les oppresseurs de demain. C’est la responsabilité des élites d’un pays de créer une société qui ne fait pas que reproduire les classes sociales, une société qui favorise la mobilité sociale ascendante en donnant des chances égales à toutes et à tous, et en promouvant le mérite, la compétence, la redistribution, la solidarité et l’empathie.

Pour terminer, il n’est pas superflu de rappeler qu’Haïti est née dans l’oppression et contre l’oppression. Le plaidoyer qui est fait ici est celui d’une citoyenneté ouverte qui bannit toute forme d’oppression, d’où qu’elle vienne, une citoyenneté qui s’accompagne à la fois de droits et de devoirs, une citoyenneté qui deviendrait la base du vivre-ensemble et le socle sur lequel refonder la nation. Ce sont les valeurs promues par le GRAHN dans sa quête d’une « Haïti nouvelle fondée sur le droit, le partage, la solidarité, l’éducation, le respect de l’environnement et le culte du bien commun ».

Samuel Pierre

Thursday, May 14, 2020

Pestel, une commune mise à l’écart pour ses luttes

La pêche, l'agriculture et le commerc sont les principales ressources de Pestel


Pourquoi une telle attitude du président Jovenel Moïse envers la commune de Pestel en dépit de ses promesses remontant à sa visite le 4 mai 2018? Serait-il une nonchalance? Poursuit-il la logique historique visant à mettre Pestel à l’écart de tous les projets de développement? Ou encore nos élus n’ont-ils pas leur responsabilité en ce qui a trait?

Ce sont autant de questions qui divisent les Pestelois. De l’avis de certaines gens, la commune ne lui représente pas une menace réelle; et pour d’autres il serait une trahison ou encore les séances du pays "lock" ont une part de responsabilité. Elles ont toutes une portée intéressante dans la réflexion. Pour moi, la non-prise en charge de son développement par ce gouvernement en place ne date pas d’aujourd’hui. Elle est peut-être victime de sa position géographique, mais cette thèse parait trop simpliste pour l’accepter. La nonchalance de la plupart de nos dirigeants est un facteur à considérer.

Pestel se compose princiaplement de collines et d'un climat tro
pical. C'est un endroit difficile d'accès en voiture. Certains visi
teurs y vont lors de la fête de la mer chaque année.                   
Pestel, située dans la Grand’Anse du pays, est élevée au rang de commune depuis 1843 au lendemain de sa participation dans la lutte causant le départ de Jean Pierre Boyer au pouvoir. En dépit de son potentiel agricole et écotouristique, elle est créditée d’un manque à gagner énorme en termes de développement. Le retard dont elle accuse est historiquement lié à un vaste complot de l’État contre la commune souvent orchestré par certaines de Jérémie.

Historiquement, Pestel a été toujours été une zone de rébellion. On se rappelle la participation des anciens d’abord au côté de Jean Baptiste Perrier dit Goman (1807-1820), ensuite au côté de Jean Jacques Acaau en 1843, dans la lutte contestant l’hégémonie des élites de Port-au-Prince. On se rappelle également le mouvement des Piquets dans les mornes de Pestel contre les projets antinationaux de plusieurs gouvernements. Nous avons passé tous ces règnes sans l’intervention de l’État central. Ce fut un siècle de développement perdu, voyez-vous! Il importe de rappeler qu’en trois fois l’économie de la ville fut passée à flamme par des incendies orchestrés par l’État central. Ça a été un manque à gagner énorme.

De 1843 à date, Pestel n’a pas connu de très grands chantiers de développement. Toutefois, on retient quelques réalisations de certains présidents effectuées sous base de compromis politique et de relations de camaraderie.
 
Malgré sa nature enchanteresse, Pestel est un endroit de séche
resse où ses habitants voyagent à travers d'autres communautés
à la recherche d'eau potable.                                                        
On se souvient que Sténio Vincent a fait construire une école nationale, un dispensaire, une citerne communautaire, et la première manche de la percée du Tronçon de route reliant carrefour zaboka à Pestel; sous la présidence de Magloire, deux écoles nationales étaient construites, la seconde manche du tronçon de route fut réalisée. Toujours est-il, Henry Namphy nous a permis d’avoir l’ancien réseau électrique et il a contribué à certains degrés dans la construction du bâtiment du lycée. René Préval a quand même réalisé quelques interventions dans la commune.

Par contre, durant le règne des Duvaliers, la commune fut tombée dans l’oubli. Pas même une pierre n’a été posée. Ce n’est qu’au cours de cette époque, le commerce florissant que connut Pestel devient au point zéro puisque les commerçants sous prétexte de complot contre Duvalier furent contraints d’aller vendre leurs rêves ailleurs. Pestel fut encore victime sous le second mandat de Préval et de celui de Michel Martelly.

Les critiques arguant que Pestel est négligée dans le budget national sous prétexte qu’elle n’apporte rien en termes de recettes fiscales sont de loin une réalité.

Fête de la mer à Pestel en voilier 

Dès sa genèse à 1990, Pestel a rapporté du gros dans l’économie nationale. Il est rapporté par l’écrivain Semexant Rouzier que dans les années 1850 à 1890, Pestel produisit 650.000 livres de café. Le port faisait le plein de cargaisons, exportant entre dix et quinze mille sacs de café l’an et en retour importait de Port-au-Prince et de Kingston des marchandises diverses.
Grâce à la spéculation du café, Pestel accusa en 1921/22 une recette fiscale de 1.815,98 gourdes ; l’année suivante, elle s’éleva à 2.783,40 gourdes, en 1923/24 à 4.404,91 gourdes et en 1924/25 à 5.909,85 gourdes. Pareillement en 1954, quand la marmite se vendait à 42 gourdes, l’économie de la zone florissait davantage. Le café rapporta dès lors mensuellement environ un million de gourdes. À ce sujet, l’ancien inspecteur fiscal Vidal Saint-Louis confie à quelqu’un que, grâce au commerce de café, la commune était dans les années 70-80 l’une des communes qui rapportèrent à l’État une grande part du budget national.

Par rapport à tout ce qu’elle a rapporté dans les anciens budgets nationaux, faut-il se demander pourquoi le problème de l’eau de Pestel n’a pas été une préoccupation des différents gouvernements qui se sont succédé. De plus, comment se fait-il que le tronçon de la route carrefour zaboka Pestel n’ait encore été asphalté?

Pour finir, même si Pestel ne contribue plus dans l’économie nationale, mais l’État a une dette envers elle puisque dans les années où elle rapporta du gros à l’État ce dernier ne lui retourna pratiquement rien sous forme de services. Ainsi l’on se demande si le président Jovenel Moïse va relever ce défi historique qui l’attend.

James St Germain
Sociologue, professeur de philosophie

Illustration :HCC

Wednesday, July 12, 2017

Un autre mapou d’Haïti vient de tomber…

Jean-Claude Fignolé
24 mai 1941 - 11 juillet 2017
L’écrivain, le professeur, homme politique et philosophe, Jean-Claude Fignolé, né le 24 mai 1941 à Jérémie est décédé ce mardi 11 juillet, à l’âge de 76 ans des suites d’une complication cardiaque, avons-nous appris. Grande figure de la littérature haïtienne, Jean-Claude Fignolé a créé, avec René Philoctète et Franckétienne, le mouvement littéraire « Spiralisme ».
Jean Claude Fignolé parle de son rôle de fondateur  du spiralisme...
Essayiste et nouvelliste , Jean-Claude Fignolé aura encore longtemps marqué la littérature haïtienne contemporaine à travers  ses oeuvres  comme le célébrissime récit « Les possédés de la pleine lune (1987)  »,  et Aube tranquille (1990), considérés comme des œuvres majeures de la littérature haïtienne. Il a également écrit d’ autres romans comme : Une heure pour l’éternité, paru en 2008.

Après avoir suivi des études de droit, d’agronomie et d’économie, il devient critique d'art au Centre d'art de Port-au-Prince, journaliste – notamment au Petit samedi soir dans les années 1970 – critique littéraire, enseignant et co-fondateur du collège Jean Price Mars avec René Philoctète et Victor Benoît.

Vers  les années 1980, Jean-Claude Fignolé retourne à son petit village des Abricots dans la Grand'Anse où Il apporte une aide essentielle aux habitants de son bercail. Il les assiste dans un travail de développement de première nécessité (reboisement, éducation, santé, constructions routières, agriculture).

De 2007 à 2012, il est maire de ce village et est président de l’Association des maires de la Grand'Anse (AMAGA). De 1990 à 2000, on le retrouve observateur et commentateur dans le journal  Le Nouvelliste où il tient la rubrique « Rompre le silence » dont les analyses politiques font découvrir la laideur d'un pays cloué dans son échec. En 2010, après le séisme en Haïti, il vient en aide à des milliers de rescapés.  Il est membre  de la direction du collège Jean-Price Mars – qu'il a fondé avec René Philoctète et Victor Benoît –, participe au développement touristique de son île et prononce des conférences. 

Ces dernières semaines ont été particulièrement pénibles pour nous tous. Nous avons  perdu trois  grands écrivains de notre espace grand'anselais en un mois: Claude Pierre, Serge Legagneur et Jean-Claude Fignolé.

Nous conserverons précieusement l’ombre de ces mapous qui nous ont faussé compagnie à quelques jours d'intervalle.

En cette douloureuse circonstance, le staff d’Haïti Connexion Network  présente ses sincères condoléances à la famille Fignolé. Nos affectueuses pensées accompagnent ces chers disparus.

Pour HCN

Herve Gilbert

Monday, March 7, 2016

Le révérend prêtre Eddy JULIEN s’est retiré !

Très chers amis,
Eddy Cavé
À la demande de notre ami Pèpè Smith, je vous transmets le texte de souvenirs qu’il vient de terminer pour saluer le révérend prêtre Eddy Julien, qui fut pour lui un frère aîné, un guide, un mentor.

À la différence de Pèpè, beaucoup plus jeune que nous deux, je me suis lié d’amitié avec Eddy Julien dès l’âge de 5 ans, à mon arrivée à l’école Frère Paulin  de Jérémie, aujourd’hui disparue. Dans la classe du vénéré professeur Séjour Cajoux, nous étions trois Eddy le jour de la rentrée des classes : Eddy Julien, Eddy Lévêque, Eddy Cavé. Au terme du cycle des études primaires, nous étions encore ensemble tous les trois, sans avoir jamais eu la moindre discussion. Ni dans les salles de classes, ni sur la cour de l’école ni sur les terrains de jeux avoisinants.

Eddy Julien s’étant orienté dès le départ vers la prêtrise, il a suivi un cheminement complètement différent de celui des deux autres Tokay,  mais qui a été marqué par des nombreux croisements, qui furent autant d’occasions de fort agréables réminiscences. La dernière fois que nous nous sommes tous rencontrés, c’était  à Long Island en décembre 2009, à la sortie de mon livre de souvenirs De mémoire de Jérémien. Eddy Lévêque avait organisé pour la circonstance un souper qui réunissait, en plus des trois Tokay, Frédéricq Cadet, que nous appelions Dak, Jean-Claude Chassagne, de passage à New York, Donald Ferdinand et quelques amis non-jérémiens.

Ce fut pour moi un moment de rêve, chargé d’émotions et de signification. Je n’ai malheureusement pas encore retrouvé le fichier électronique des photos prises ce soir-là, mais je suis certain de les avoir.

Plus de cinq ans se sont passées et nous n’avons communiqué depuis lors que par personnes interposées. Dans l’intervalle, plusieurs des amis d’enfance nous ont devancés dans l’éternité, notamment Yves Bijou en 2014, Dieffen Azor et Serge Picard en 2015. Je suis en train de consigner les souvenirs de cette génération dans un livre qui sort cet été et qui aura sûrement pour titre En pensant aux amis disparus. J’ai bon espoir de retrouver d’ici là les photos retraçant le parcours d’Eddy et celles prises à New York…          

Je dois partir pour assister à une messe que l’ami commun Hugues Lamour fait chanter ce midi à la paroisse haïtienne du Sacré-Cœur à Ottawa pour le repos de l’âme de ce grand Jérémien.  Nous en reparlerons.

Eddy JULIEN s’est retiré!
Par Pierre-Michel Smith
Miami, le 5 mars 2016
Sa dépouille retourne le 10 mars 2016 à la terre dont elle est tirée. Eddy appartient au patrimoine de cette ville, à la Grand'Anse tout entière. Tout jeune, petit séminariste de Maznod, par ce don de simplicité digne, par cette attention aux autres, accueillante, embrassante, il a su acquérir la sympathie. Il était la source.  Tout un réseau d’autres jeunes s’y ravitaillaient. Chez lui une petite bibliothèque où la lecture de Saint-Exupéry, Emmanuel Mounier, de l’Abbé G. Courtois, François Mauriac, Charles Péguy, Teilhard de Chardin, du Chanoine Jacques Leclercq ennoblit l’esprit et le guide vers les hauteurs et les profondeurs. En ce temps-là, la jeunesse de Jérémie ignorait la fièvre de la possession, contrairement à celle d’aujourd’hui. Le souci était ailleurs. L’argent et le confort ne sauraient la combler.

J’étais en 7e au Collège Saint-Louis de Jérémie quand Willy Saint-Elmé, Guy Dupoux, Edwin Madiou, Eddy Julien ont donné mon nom au père Péron pour m’inscrire en 6e au Petit Séminaire de Camp-Perrin. Les trois premiers se sont évanouis longtemps déjà. Il restait le chef d’orchestre Eddy Julien, zélé, actif, dont le rôle consistait à obtenir l’accord des autres en vue du bien commun. C’était le début d’une amitié sans trêve entre cet homme et moi. Il fut pour moi un maître et un grand maître; un homme très doux, très puissant, toujours maître de lui : tout ce qu’il y a d’humain et tout ce qu’il y a de divin.

À la fermeture inattendue et brutale du Grand Séminaire des Jésuites de Turgeau (P-au-P) par François Duvalier, Eddy est revenu à Jérémie enseigner au Collège Saint-Louis, puis aider dans les paroisses des alentours. Ensuite, ce fut le débouché inespéré pour les séminaristes d’aller continuer au Canada avec le Père Parent chez les Volontas DEI. Les études théologiques terminées, Eddy a requis une année de réflexion. Il est nommé en charge de la Maison des Volontas dans le quartier populaire de Bolos, une agglomération pleine de déchéances et de laideurs, un micro-pays authentique où vivent des gens modestes, pauvres, des petits, des enfants qui sont le nombre et la force et l’avenir de notre pays. Il rassemble chaque semaine les jeunes des ghettos avoisinants pour leur ouvrir tous les chemins de l’esprit, de l’espoir, de la réussite. Être pauvre pour lui ne devrait pas être un handicap social, un obstacle à certaines filières d’éducation, à divers métiers sans oublier l’accès aux soins. Il a passé une année dans ce milieu à porter parole, à être visible partout, à rendre témoignage.
Père Julien (G) et Pierre Michel Smith
Après cette expérience, Eddy est ordonné prêtre à l’église Saint-Louis de Jérémievers 1965. À 25 ans, il lui est confié immédiatement la paroisse des Irois, sans prêtre auparavant. Il s’y est installé dans deux petites pièces sans eau, sans électricité, sans meubles, sans latrine. Débordant d’énergie et d’idées nouvelles, grâce aussi à la générosité de Madame Armand, de Port-au-Prince, qui l’avait comme adopté, il a monté une structure solide: une église, un presbytère, un atelier de couture, des jeux pour les jeunes. Il en a fait une bourgade de gaieté, pleine de vie, d’animation. Sa vie, une vie simple, presque austère. Sa foi est un roc.

Son principal souci: comment mobiliser les gens, organiser la population sans avoir á mendier l’aide étrangère; comment faire adhérer ce monde á un projet collectif d’auto-développement, un développement auto-géré. Il ne veut pas seulement gaver le paroissien de chants, de liturgie. Il veut également s’occuper de son corps mal nourri, malingre, malade, squelettique et nu.
À la fin des études dentaires, avant de partir pour le Canada, Eddy Julien m’invite à rendre á la Cité un peu de ce que j’ai reçu gratuitement du pays, à soigner cette population qui n’a jamais connu de dentiste. La séduction est extrême: faire un peu d’argent, faire un peu de bien. Les gens m’ont attendu á la queue leu leu aux Irois, à l’Anse d’Ainault, à Dame-Marie. Dans les mornes, à dos de bête, Gérard Jean-Juste fraîchement ordonné prêtre me servant d’assistant, on allait à travers des chemins de crête, étroits entre deux précipices, au-devant des paysans.
Un beau jour, Eddy m’est arrivé comme ça au Canada, il n’est plus aux Irois. Quel choc!  « Et ce beau travail d’amour, à force d’ordre, de prudence, de patience, d’économie, lui ai-je dit? Et ce groupe de jeunes qui t’accompagnent, cette famille unie, cette solidarité inexprimable entre les gens du groupe, cette atmosphère de tendresse, de fraîcheur et de calme? Tout s’est-il émietté? » Connaissant l’autre versant de mon frère Eddy, j’ai deviné dans mon cœur qu’il s’est brouillé avec l’Évêque ou le Supérieur. Autant une grande passion contre l’injustice humaine, autant une sainte horreur de toute autorité au-dessus de lui, surtout quand cette autorité a l’air dure, écrasante, distante, méfiante. Rebelle, libre, indépendant quand il acquiert la certitude d’une vérité, il s’y maintient coûte que coûte.
D’une sensibilité à fleur de peau, dis-je, il est vite écorché, vif. Et quand cela arrive, orgueilleux, il freine la circulation des idées. Il peut devenir un homme de marbre qui a la froideur, l’impassibilité du marbre, qui peut refuser à un ami tout contact, toute relation jusqu’à la connivence d’un sourire, qui ne dit même pas quelque chose de beau comme bonjour.
Eddy est resté longtemps à Ottawa aux études avant de retourner une nouvelle fois dans la Grand’Anse pour s’impliquer dans une nouvelle aventure à Léon, s’élancer à la conquête de nouvelles tâches et de nouvelles responsabilités. Servir est un souci constant, une préoccupation constante chez lui. Il s’y est donné corps et âme, s’est surpassé et s’est crevé. Après plus d’une décennie de soins et d’amour prodigués à Léon, il est revenu la santé chancelante, fragile à New York. Il exerce le sacerdoce à Long Island avant de tomber malade et de partir la semaine dernière dans d’horribles conditions de misères et de souffrances.
La veille de son retour à Jérémie, novembre dernier, pour attendre la fin, j’ai passé avec lui deux heures chez sa cousine Jacqueline Clerville; entre deux vieux amis de toujours, une amitié fraternelle dont la loyauté et la dignité ne se sont jamais démenties. Deux heures de grâce, câlines, réchauffantes qui apaisent sa tristesse inexprimable. On se souvient de tout avec ardeur, avec une bouffée de joie indescriptible. Là, j’ai compris que c’était le temps pour lui de dire adieu au ciel, à la terre, aux oiseaux et aux fleurs.
Eddy Julien n’est pas seulement un homme de terrain, un homme d’action, de foi ardente, d’un dévouement sans limites aux causes qu’il croit bonnes. C’est aussi une âme poétique, une intelligence cultivée, un esprit éclectique, fin, aéré, perçant. Il écrit des choses belles et profondes. La lecture de ses écrits, l’exercice de sa pensée prodiguent d’ineffables délices comme tout ce qui participe de l’intelligence. Ses rapports, ses articles, ses lettres sont des écrits incroyablement beaux, merveilleusement raffinés dans l’ordre du cœur. Un homme sans aucune infatuation, mais doué de ressources insoupçonnables. Il est regrettable qu’il n’ait pas écrit et publié à profusion comme son camarade de Séminaire Laënnec Hurbon.
Je ne sais vraiment quel hommage rendre à l’humanisme et à l’engagement de cette personnalité incontournable qui fait partie des restes de cette gigantesque race d’hommes qui s’éteignent en Haïti homme par homme et pour toujours et qui, remarquables pour la plupart, ne sont jamais devenus célèbres.

SALUT ET ADIEU, vieux frère.

Dr Pierre Miche Smith
Pierre Michel Smith DMD- M.D. pms161@yahoo.com
Miami, Montréal

Tuesday, February 2, 2016

HAITI: DE BELLES PERSPECTIVES DE DÉVELOPPEMENT POUR LA GRAND-ANSE

Par Mérès Weche
Membre de la   SOCIÉTÉ D'AIDE À L'ÉDUCATION, À L'ENVIRONNEMENT ET AU DÉVELOPPEMENT (SAEED)

Mise en contexte
 Carnival Glory lors de son mouillage
dans le port de Bahamas.              
Les idées qui m'ont toujours habité depuis des années, relatives au développement de la Grand-Anse, sont renforcées ces derniers temps après une tournée que j'ai faite en croisière dans les Petites et Grandes Antilles, du 09 au 16 janvier 2016. Que ce soit aux Bahamas, aux Iles Vierges, aux Iles Turques et à Puerto Rico, j'ai pu faire des comparaisons et réalisé que nous avons l'impérieux devoir de mettre nos ressources naturelles en valeur, car elles sont largement compétitives. Nous avons la capacité de rattraper le temps perdu, car nos offres d'évasion touristique sont enchanteresses par rapport à ce que j'ai vu. Ce qui a davantage retenu mon attention à Grand Turk, c'est que le personnel d'accueil et de service est en grande partie haïtien; je n'ai pas eu à m'efforcer de parler anglais, car j'avais le créole à la portée de l'oreille et de la bouche.

Mon approche, au cas par cas
Une rue de la ville de Dame-Marie
Sans vouloir délaisser d'autres régions de la Grand-Anse, telles que Dame-Marie, Anse d'Ainault, les Irois et Bonbon, qui ont un grand potentiel touristique non exploité, je me limite pour l'instant aux Arrondissements de Corail et de Pestel, que je connais mieux et où j'ai déja entamé des discussions d'ordre familial et local pour des espaces d'exploitation touristique. 

A-  Intérêt pour Beaumont.-
a) Il y a environ six mois,  j'ai entrepris une démarche de jumelage auprès de la ville de Beaumont Alberta au Canada, en faveur de Beaumont Haiti, qui fait partie du cercle des 62 Beaumont dans le monde, dont le siège est en Belgique. 
Beaumont (Grand'Anse) ,la route
 nationale traverse la ville.            
Bientôt, une importante décision sera prise en conseil à Beaumont Alberta pour supporter un projet de bibliothèque à Beaumont Haïti. C'est avec la collaboration de l'organisation Grand-Anselaise SAEED (Société d'aide à l'Éducation, à l'Environnement et au Développement), basée à Montréal, que ce projet est mis en chantier. Cette bibliothèque moderne, qui aura pour siège la résidence presque centenaire de la famille Weche, située en plein centre de la rue principale de Beaumont, gèrera deux centres de lecture (genre maison de la culture), respectivement dans les sections communales Mouline et Chardonnette dont les routes de pénétration sont actuellement en voie de réfection par deux fils de la commune: l'entrepreneur Philippe Étienne et le Député nouvellement élu, Anouce Bernard. 

Tous les navires de croisière, hormis,
les plus petits ont une piscine à bord.
b) La section communale Mouline en particulier, se distingue par sa grotte précolombienne, d'une profondeur appréciable, et ses extraordinaires chutes qui n'attendent que d'être mises en valeur par ceux et celles qui se sentent concernés par la prise en charge des patrimoines naturels de cette fraiche région réputée pour la qualité de son café (the haitian blue) récemment catalogué par des experts internationaux. Le Festival du Café de Beaumont dit  Festi-Café, initié en 1999, assorti d'un rallye auto-moto, devra être réédité au cours de l'année 2016, à l'occasion de l'inauguration de la bibliothèque dédiée au général Alexandre Dumas. C'est curieux que le Sud-est (Jacmel) se soit doté avant La Grand-Anse (Jérémie) de sa ``Bibliothèque aux trois Dumas``; raison pour laquelle Beaumont a emboìîté le pas.

c) Toujours à Beaumont, il existe dans la localité de Bélance, des grottes et un captage d'eau datant de la période coloniale, situé non loin des ruines de l'habitation de M. de Bélance dont un grand poète de la région porte le nom. Une enclume remontant à la  colonie de Saint-Domingue a été trouvée dans le dit captage, en 1999, par les édiles d'alors de la commune de Beaumont. C'est une pièce de musée d'une valeur inestimable.

 B- Intérêt pour Corail,  Pestel, Roseaux et Jérémie
Pestel - une crique servant 
au cabotage.                       
a) Corail doit son nom à un polype marin dont le squelette calcaire est exploité en bijouterie pour ses teintes variées du blanc au rouge. Élevée au rang de paroisse en 1799, cette ville, une des plus anciennes du pays, et dont une tranche d'histoire, communément appelée ``l'incident de Corail``, remonte à la fameuse guerre du Sud, entre Toussaint et Rigaud.  À ce moment-là, 29 Noirs et 1 Blanc furent asphyxiés dans une prison peinte à la chaux vive. Les murs, malgré repeints, de ce bâtiment situé à l'entrée de la ville,   ont beaucoup à conter sur les événements historiques survenus dans La Grand-Anse.

Vua aérienne de Corail
b) Entre Corail et Pestel (ville remontant au temps de la flibuste)  se trouvent les iles Cayemites , Les Basses, et de beaux ilots au sable blanc tels que Anse-Blanche et Zile-Lay. Au temps de la Marina de Madame Christiane Papillon et de la croisière locale de son neveu Roro, ces plages et côtes poissonneuses, étendues sur des kilomètres, offraient aux estivants de joyeuses escapades en mer, dignes du tourisme alternatif que privilégient bien de visiteurs étrangers, par souci de proximité avec les cultures locales.

service en 2003                   
Au point où nous en sommes avec le tourisme haïtien, qui n'est plus de masse depuis quelques années, le charme naturel de la Grand-Anse constitue une heureuse alternative aux offres d'évasion mises en train par le Ministère concerné, pour relancer l'industrie touristique en Haïti. Qu'on songe, en particulier, à la Fête de la Mer à  Pestel qui fut l'occasion pour nombre de nos compatriotes de se payer à peu de frais des sorties enchanteresses hors de l'atmosphere trépidante de Port-au-Prince. 

Le pont sur la rivière des Roseaux
(construit en 1997)
c) Roseaux, c'est la ville d'Antoine Langomye, grand devin dont la proverbiale réputation dépasse les limites territoriales haïtiennes. Le lieu de résidence d'un patrimoine humain de cette envergure devrait pouvoir attirer des visiteurs tant nationaux qu'internationaux, de manière à faire de cette charmante ville un pôle d'attraction touristique. De plus, cette longue plaine des Gommiers, que borde une plage de sable fin, est propice à une station balnéaire peu commune dans la Caraïbe. 

C – Jérémie, le gros morceau
Vue de l'Anse d'Azur et ses coraux
a) Mises à part les plages d'Anse d'Azur, de Bonbon et d'Anse-du-Clair, sans oublier Laye du côté de Dame-Marie, qui sont également propices à l'exploitation touristique, Jérémie, la ville-mère de la Grand-Anse présente des particularités qui la placent, sur le plan patrimonial,  au rang de grandes cités du monde comme Puebla au Mexique et Saint-Petersburg en Floride dites villes-musée.

En considérant ce que représentent dans la littérature haïtienne des auteurs tels que Jean Brierre, Émile Roumer, Etzer Vilaire, Regnor Bernard, Raymond Chassagne, pour ne citer que ceux-là, ainsi que des musiciens de la trempe de Georges Clérié, Serge Villedrouin, Antime Samedi, Numa Roumer et Louis Laurent, leurs anciennes résidences devraient être considérées comme des patrimoines bâtis, répertoriés et classés dans les annales historiques de la ville, portant chacune une plaque distinctive.

Vue de la baie de l'Anse d'Ainault
C'est précisément ce devoir  de mémoire envers Jérémie qui m'a porté, il y a quatre ans, à multiplier démarche sur démarche auprès de la Mairie de Villers-Cotterêts en France, pour obtenir les documents nécessaires à l'édification du musée Césette et Alexandre Dumas, qui verra le jour en cette année 2016. En effet, une trentaine de pièces importantes sont mises à notre disposition, comprenant: portraits, ordonnances militaires, correspondances, lettres d'écrous, manuscrits, attestations, jusqu'aux cheveux du général. 

Pour rendre possible l'inauguration du musée en août 2016, un grande exposition d'oeuvres d'art est prévue à l'Hôtel Marriott de Port-au-Prince d'où partira une caravane vers Jérémie. C'est sous la forme d'un pont Québec-Haiti que cet événement aura lieu, car il réunit déjà près d'une vingtaine de peintres, photographes, écrivains, danseurs, musiciens et poètes, auxquels se joindront deux conférenciers, spécialistes des Dumas, venus de France, ainsi que des artistes de la scène en provenance du Bénin.
    
D- Portée touristique, compétitivité dans la Caraïbe
Mérès Weche à bord du
Carnival Glory.             
L'expérience que j'ai faite dans les Grandes et Petites Antilles, particulièrement à Grand Turk, au cours de cette croisière à bord du Carnival Glory, m'autorise à dire, sans risque de me tromper, que nous pouvons largement rattraper le temps perdu si nous nous mettons, non seulement à penser pays, dans son intégralité, mais aussi à mettre le cap sur la formation professionnelle de proximité, car, je ne cesse de le répéter, la grande majorité du personnel d'accueil et de service dans les destinations touristiques visitées sont d'origine haïtienne. J'ai encore en mémoire ce que m'a dit un chef de bar à Grand Turk:  ``Ou se Ayisyen, epi w ap fe m gaspiye 2 ti mo angle m konnen an konsa!...``    

E- Perspectives pour la Grand-Anse
Une offre extrêmement intéressante m'est faite, au cours de cette croisière, par une importante compagnie de construction de maisons préfabriquées, pour des résidences en bordure de plage, ou des bungalows dans les parages, à des prix très compétitifs. Il suffit que les espaces prévus à cet effet soient légalement disponibles, pour que, en accord avec les pouvoirs en place,   des dispositions d'investissement soient mises en branle.

En attendant l'atmosphère de paix tant souhaitée au pays, nous gardons contact avec ces investisseurs éventuels, pour enfin nous engager dans l'entreprise de désenclavement de la Grand'Anse.
 
Mérès Weche
Membre de la SAEED

wechemeres@yahoo.com