Discours d'Etzer Vilaire à la mémoire des héros de l'Indépendance, de Charlemagne Péralte... 

Sunday, September 30, 2018

Cour suprême des États-Unis: un compte-rendu de l'affaire Brett Kavanaugh - Christine B. Ford

Judge Brett Kavanaugh, Dr. Christine Blasey Ford

Pour ceux qui veulent entendre la version audible tout en prenant lecture de l’article, cliquez sur  le player sound cloud ci dessous:


Par:Herve Gilbert

Ce jeudi 27 septembre, durant l’audience du Comité judiciaire du Sénat américain, le public a vu deux témoignages télévisés qui ont été à la fois surprenants, émouvants, instructifs et bouleversants. C’est une affaire qui continue de déchaîner les passions aux États-Unis. Quoi qu’il en soit, cette audience du Comité judiciaire a été décrite par les journalistes américains  comme un grand moment historique. L’ affaire implique Brett Kavanaugh, protégé de Donald Trump et candidat à la Cour suprême des États--Unis, accusé par Christine Blasey Ford, d'agression sexuelle, d'exhibitionnisme et de tentative de viol alors qu'elle avait seulement 15 ans.

Christine Blasey Ford
Oscillant entre retenue et émotion, Christine Blasey Ford  a, pendant plus de quatre heures, raconté avec certains détails la présumée agression sexuelle perpétrée , il y a 36 ans  (en 1982),  par Brett Kavanaugh, actuel candidat à la Cour suprême des États-Unis.  Ce dernier  «l’avait prise par surprise» et avait essayé de la déshabiller, a-t-elle relaté. Au cours de sa réplique,  Kavanaugh s’est lançé dans une volée verbale pathétique et violente, niant en bloc les allégations de Mme Ford tout en  qualifiant le processus de "cirque" et de "honte nationale", sans manquer de s’en prendre aux sénateurs du  Parti démocrate qu’il a accusés de vouloir détruire sa réputation à travers un complot calculé, en guise de vengeance pour les Clinton et aussi pour la perte des élections de 2016. 

Juge Brett Kavanaugh lors de son témoi-
gnage devant le Comité judiciaire.         
Cette procédure  dans un premier temps a eu des retombées différentes de part et d'autre des mouvances politiques :  les supporters  de Ford ont qualifié son témoignage de crédible et un nombre important de femmes du pays avaient été touchées par le caractère poignant de son  témoignage. Quant aux supporters de Kavanaugh, ils ont jugé que  son intervention, quoique perçue comme  défiante ou belliqueuse, a réflété une  colère juste face aux allégations de l’accusatrice.  

En résumé, on peut déduire que c'étaient deux dépositions totalement contradictoires où Christine, d'une part, a déclaré  être à «100 %  sûre » que Brett est celui qui l'a agressée, tandis que ce dernier, d’autre part,  a nié toute participation à cette tentative de viol.

Sénateur Jeff Flake aprés avoir été
confronté par les deux femmes.       
En effet, le  sénateur républicain  de l’Arizona Jeff Flake, qui avait annoncé son intention de soutenir la candidature de Brett Kavanaugh, a alors effectué un revirement complètement inattendu. L’un des ascenseurs conduisant à la salle d’audience qu’avait pris Flake ne pouvait pas  se refermer. Car la porte était  bloquée par deux jeunes femmes qui ont interpellé le sénateur républicain sans ménagement pendant que les caméras enregistraient la scène : 

« Et la première  femme, Ana Maria Archila, de dire: Lundi, je suis allée à votre bureau. Je vous ai relaté l’histoire de mon agression sexuelle. Ce que vous faites va permettre à quelqu’un qui a effectivement violé une femme de siéger à la Cour suprême. Ce n’est pas tolérable. Vous avez des enfants. Pensez à eux. »


Voir la video des deux femmes émues et larmoyantes confrontant le sénateur Flake dans l'ascenseur.
«Ne détournez pas votre regard, enchaîne la seconde, Maria Gallagher, qui fait allusion à la position ambiguë de Brett Kavanaugh sur l’avortement. Regardez-moi et dites-moi que ce qui m’est arrivé n’a pas d’importance, que vous laisserez des gens comme cet homme entrer dans la plus haute cour de justice du pays et dicter à tous les gens ce qu’ils doivent faire de leur corps.» Perturbé, Sénateur Flake a écouté dans le plus grand silence.

Nul ne pouvait supposer le poids qu’allaient avoir ces deux interventions. Mais quelques instants plus tard, avec l’aide de son collègue démocrate Chris Coons (Delaware), le sénateur déclenchait un véritable coup de théâtre. En échange de la promesse de son vote, il a obtenu un sursis d’une  semaine pour une enquête du FBI, enquête que les démocrates demandaient en vain. La veille, en séance publique, Jeff Flake avait déjà longuement fait état du malaise suscité par la procédure de confirmation, invitant ses pairs à manifester du respect à la fois pour la personnalité de l’accusatrice Christine Blasey Ford et celle de Brett Kavanagh. Alors que le camp républicain se portait au secours de Brett Kavanaugh qui stigmatisant les questions des démocrates qu’il a qualifiés de comploteurs, Jeff Flake se contentait de déplorer à nouveau le climat de guerre civile qui déchirait le tissu social du pays. Ce sénateur de l’Arizona, un des rares élus républicains à exprimer son désaccord avec Donald Trump, quittera bientôt le Sénat. Prenant acte du divorce avec les électeurs devenus des inconditionnels du président, il a renoncé à se présenter à nouveau comme sénateur en novembre prochain. Son initiative de vendredi sera peut-être  l’un de ses derniers gestes de parlementaire. Elle peut tout aussi bien conforter Brett Kavanaugh si le FBI se révèle incapable de dire qui de l’accusé ou de l’accusatrice a dit la vérité que mettre un terme aux ambitions du juge si la police fédérale raffermit la thèse de Christine Blasey Ford. Dans les deux cas, Jeff Flake aura le sentiment d’avoir accompli son devoir de parlementaire.

De toute façon, tout peut se résumer à une formalité pour le Sénat dans une semaine, puisque le vote procédural de la commission judiciaire sénatoriale  a déjà été pris pour la poursuite de la nomination de Kavanaugh devant tout le sénat. Et cela,  après que la demande d’investigation du FBI faite par le sénateur Flake ait été acceptée par le Comité judiciaire et approuvée par le président Trump en fin de soirée.

Cette controverse  sur la confirmation du juge Kavanagh à la Cour suprême pèsera certainement  très lourd sur les élections de mi-mandat prévues pour le mois de novembre 2018.

Pour renchérir sur  le commentaire de notre fidèle lecteur (Eddy Cavé ) du Canada que nous venons juste de lire, nous dirions pour conclure que l’affaire Kavanaugh-Ford a en quelque sorte tiré la sonnette d’alarme  (wake -up call) aux votants - surtout les jeunes et les minorités- qui doivent prendre conscience que toute élection aux États-Unis a des conséquences majeures et que chacun de leurs votes est important voire nécessaire  à leur participation de loin ou de près aux décisions politiques de leur gouvernement, comme par exemple le choix d’un juge à la Cour suprême, ont rappelé en ces moments chauds les analystes politiques et autres personnalités comme Michelle Obama. En fait,  l’ex-première Dame est en train de se rendre de ville en ville afin d’encourager l’enregistrement de futurs votants pour les élections de mi-mandat du 6 novembre 2018.


Herve Gilbert herve.gilbert@gmail.com

Wednesday, September 26, 2018

PETROCARIBE, UN TROU SANS FONDS ET SANS FOND


Par Eddy Cavé
Ottawa, ce 24 septembre 2018

    Eddy Cavé      Fréderic Boisrond
Je viens de lire avec joie le très bel article intitulé « PetroCaribe, un trou sans fonds » de Frédéric Boisrond, l’auteur bien connu au Québec d’Au nom du peuple et du fric et du sain d’esprit. Je remercie vivement les nombreux amis qui me l’ont envoyé de partout ces deux derniers jours.

Excellente analyse, comme celles auxquelles nous a habitués ce jeune auteur que j’ai eu le grand bonheur de présenter le mois dernier au public d’Ottawa. C’était à l’occasion d’une journée du livre organisée par Mosaïque Interculturelle, et il nous avait parlé avec brio des relations haïtiano-américaines.

Bel esprit d’un raffinement peu commun, écrivain passé-maître dans l’art des jeux de mots, Frédéric a donné à PetroCaribe la définition la plus pittoresque que j’aie retenue : UN TROU SANS FONDS. Avec ou sans la lettre S, PetroCaribe est en effet  un trou où nos dirigeants ont englouti près de 4  milliards de dollars en une dizaine d’années.

Pour poursuivre la réflexion commencée par Frédéric, j’aimerais ajouter quelques commentaires à l'article. Ils portent sur ce qui m’est apparu dans un premier temps comme une sorte de laxisme ou une apparente crédulité des Vénézuéliens à l'endroit des Tèt Kale: En poussant un peu plus la réflexion, j’ai eu tendance à y voir un choix peut-être délibéré. Mes réflexions porteront pour cette raison sur deux périodes : la période Chavez et l’après-Chavez. 
La période Chavez
Michel Martelly et Laurent Lamothe au Venezuela
Quand Michel  Martelly et Laurent Lamothe ont commencé à gaspiller les fonds de PetroCaribe, au vu et au su de tous, y compris de la mission diplomatique vénézuélienne en Haïti, les dirigeants vénézuéliens n'ont rien fait pour les inviter à respecter leurs engagements. Ils se sont contentés de se balader avec eux en guayabera comme des enfants naïfs bernés par de vieux malins. Ils devaient pourtant savoir que non seulement le pouvoir avait été remis à ces populistes de droite par la Secrétaire d’État Hilary Clinton en personne, mais aussi que ces dirigeants s'appelaient eux-mêmes, sans la moindre gêne, des bandits légaux.

Il n'est pas interdit de penser que le désir d'aider Haïti était tel chez l’équipe de Chavez qu’elle préféra fermer les yeux et continuer à déverser son pétrole dans les ports de ce pays frère. Il n’est pas impossible non plus qu’elle ait délibérément choisi, pour des raisons stratégiques, de s’infiltrer dans la relation privilégiée existant entre les États-Unis et leurs créatures haïtiennes. Le genre de triangle où l’amour, la haine et l’intérêt font nécessairement bon ménage.


Une autre excuse qu’on pourrait trouver au Venezuela, c’est que, tard venu dans la coopération internationale, il n’avait pas encore appris les règles du jeu. Le Canada est passé par là dans les années 1970 quand l’équipe de Paul Gérin-Lajoie, le premier président de l’ACDI, a commencé à sillonner la francophonie (Afrique de l’Ouest, Haïti, etc.) et à financer des projets d’envergure sans mettre en place les mécanismes de contrôle appropriés.

À l’époque, j’étais étudiant en coopération internationale à l’Université d’Ottawa et les faux-pas de la jeune diplomatie canadienne dans l’aide publique au développement faisaient régulièrement l’objet de nos discussions en atelier. Le Canada était alors le dindon de bien des farces, finançant des projets bidon par-ci et par-là. Refusant également d’appuyer des projets extrêmement prometteurs pour la simple raison que les montants étaient trop petits pour pouvoir figurer dans les statistiques de l’aide publique au développement exprimées en millions de dollars. Gaspillage inimaginable pour une pensée saine, hier comme aujourd’hui!

À cet égard, il convient de rappeler l’échec monumental du Projet de développement rural intégré de la plaine de Petit-Goâve (DRIPP) en Haïti. Ce projet phare de l’ACDI a dû être abandonné en cours d’exécution dans les années 1970 parce que le gouvernement haïtien n’honorait pas ses engagements et que les Canadiens, nouveaux venus dans ce jeu macabre, se faisaient continuellement avoir sur le terrain. Une quarantaine d’années plus tard, le Venezuela s’est lassé prendre au même piège, sans toutefois pouvoir prétexter l’ignorance ou l’absence de précédents.


Les États-Unis sont également passés par là dans les années 1950. Les mésaventures qu’ils ont connues à ce chapitre dans le Sud-Est asiatique  ont été racontées dans un roman politique qui fit sensation durant la décennie suivante : The Ugly American, publié en  français sous le titre Le vilain américain. . On en a d’ailleurs tiré un film très instructif. Cette autocritique de la diplomatie américaine des années 1950 a inspiré un tas de correctifs et d’initiatives au gouvernement Kennedy par exemple, notamment la création du Peace Corp et de l’Alliance pour le progrès.

À la décharge du Venezuela, on pourrait alléguer que, dans le cadre d’une opération de solidarité Sud-Sud, il était permis de préjuger de la bonne foi et de l’intégrité du partenaire. Mais cela me paraît trop facile dans ce cas d’espèce. Comment un pays aussi proche que le Venezuela a-t-il  pu accepter, au mépris des principes les plus élémentaires de gouvernance, d’intendance et d’imputabilité, de continuer à injecter des centaines de millions de dollars dans un trou sans fond  comme l’Haïti des années 2010? « Un trou sans fonds » aussi, pour reprendre le mot d’esprit de Frédéric Boirond? En toute franchise, cela échappe à mon entendement. Sauf si l’on évoque l’hypothèse d’un choix stratégique délibéré. Dans ce cas, toutes les données du problème changent.

Ce qui est très amusant ici pour certains, c’est que nos filous du duo Lamothe-Martelly sont parvenus à jouer sur deux tableaux pendant cinq ans, bernant les Américains avec de belles protestations d’amour et ensorcelant les Vénézuéliens avec de vulgaires tours de passe-passe. Apparemment, ils n’y ont vu que feu. La tenue vestimentaire et les larmes de crocodiles des dignitaires haïtiens aux funérailles de Chavez ont fait le tour de la planète, pendant que, dans leur for intérieur, ils se mouraient surement de rire.

Dans cet ordre d’idées, je ne puis m’empêcher de penser aux calculs très astucieux de François Duvalier qui a toujours toléré l’existence de mouvements communistes clandestins au pays et qui a même eu en son sein des têtes d’affiche réputées communistes comme Dadou Berrouët, les frères Blanchet,  Roger Mercier, etc. Le calcul était d’avoir un mouvement communiste assez fort pour faire peur aux Américains, mais trop faible pour menacer la survie de son régime.

À preuve, le fameux « cri de Jacmel » en 1959, par lequel le dictateur naissant menaçait de passer à l’Est si le grand voisin laissait crever son peuple; son revirement dans les négociations de Punta del Este qui ont abouti à l’expulsion de Cuba de l’OEA en 1962; les massacres de Cazale et l’écrasement du Parti unifié des communistes haïtiens (PUCH) en 1969. Cette évocation de la méthode François Duvalier amène à une question fort intéressante : les mamours que les Tèt Kale, héritiers du duvaliérisme, font au régime Chavez ne sont-elles pas une variante des manigances de la politique continentale du vieux manipulateur? Si tel était le cas, il faudrait bien dire : Pitit Tig se tig.

L’ironie de ce spectacle n’a pas échappé aux journalistes haïtiens, comme le montre le compte rendu illustré des funérailles de Chavez publié sur le site de Radio Télévision Caraïbes sous le titre «  Martelly et Lamothe en chemise rouge « chaviste » à Caracas :
 Aux funérailles d’Hugo Chavez. À droite le ministre haïtien des Affaires étrangères
« Le duo Martelly/Lamothe, dont l’ancrage idéologique se situe nettement à droite, est à la tête de la délégation officielle devant représenter Haïti à la cérémonie funèbre aux côtés de représentants du monde entier. Le ministre des affaires étrangères, Pierre-Richard Casimir, le Sénateur Maxime Roumer et le Député Abel Descollines ont également fait le voyage. »

2) L’après-Chavez
Les observateurs de la scène politique étaient en droit de penser que, Chavez parti, les nouvelles autorités vénézuéliennes allaient s’assurer du respect des modalités du contrat de prêt.  C’est exactement le contraire qui s’est produit. Non seulement elles n’ont posé aucun acte en ce sens, mais l’ambassadeur Canino Gonzales accrédité en Haïti a affirmé d’un ton péremptoire que les fonds étaient bien gérés. Il a ainsi indiqué implicitement la nécessité d’élargir l’enquête pour y inclure les officiels vénézuéliens qui ont participé à la mise en place du mécanisme en Haïti, ainsi que les firmes vénézuéliennes qui ont exécuté un certain nombre de contrats gré à gré au pays durant les dix dernières années.

Dans un article publié dès le 13 décembre 2013 sur le site LE MONDE DU SUD // ELSIE NEWS, nous lisons ce qui suit :

« Pedro Antonio Canino Gonzalez, ambassadeur du Venezuela en Haïti, trouve que les fonds PetroCaribe sont bien gérés par les Tèt kale.».
Dans la recherche d’une tentative d’explication de cet empressement à dédouaner les responsables haïtiens, certains journalistes de la presse parlée sont allés jusqu’à se demander s’il n’y avait pas, du côté vénézuélien, une certaine complicité avec les dirigeants haïtiens.

Une fois de plus, le peuple haïtien s’est retrouvé seul.  Enfermé dans le triangle formé pas  les trois bailleurs de fonds que sont le  Venezuela,  l’USAID et le duo FMI-BID,  Haïti a continué de nager dans la corruption et de s’enfoncer à vue d’œil  dans l’extrême pauvreté. Pour les États-Unis, qui ont remis le pouvoir à Martelly, Haïti est un territoire sur lequel ils n’ont que des droits, tandis que les deux grandes institutions financières du continent y voient un simple terrain de chasse, un laboratoire d’expérimentation de leurs politiques de crédit.
Quant au Venezuela, qui pourrait être, comme Cuba, un allié dévoué et désintéressé, il semble complètement insensible au fait que ce sont les  générations haïtiennes de demain qui auront la lourde tâche de rembourser les fonds engloutis dans ce trou sans fond  par suite de sa tolérance à l’endroit d’un gouvernement gangrené par la corruption. Dans le brouhaha des voix qui s’élèvent pour dénoncer le scandale PetroCaribe, on entend de plus en plus de gens affirmer qu’Haïti ne saurait être tenu de rembourser l’intégralité de la dette si une enquête menée selon les règles de l’art apportait la preuve de complicités du côté du créancier.
À cela s’ajoute une tentative d’explication politique qui ne manque pas de pertinence. Pour certains, notamment l’auteur de l’article d’Elsie News, le Venezuela  voit en Haïti une colonie des États-Unis qu’il peut aider à se rebeller et sur lequel il veut laisser sa marque. Rien de plus. Que ce pays utilise les pétrodollars à des fins de développement ou à des fins d’enrichissement illicite, cela n’aurait pour lui aucune importance. Après tout, au risque d’encourir la colère du grand patron, Haïti n’a-t-elle pas exprimé publiquement sa solidarité avec le Venezuela lors des deux  tentatives d’expulsion de ce pays de l’organisation hémisphérique.
Par ailleurs, dans sa politique extérieure d’improvisations constantes et d’aberrations, Haïti a continué à repousser les avances de la Grande Chine et à entretenir avec Taiwan un flirt incompréhensible  en dehors des schémas de la corruption.
Dans le même temps, la République Dominicaine avale du terrain. Elle investit les fonds de PetroCaribe dans des activités lucratives de développement, rembourse ses dettes et signe avec la Grande Chine. Et ce qui est chez nous « un trou sans fonds et sans fond » est pour elle une manne qu’elle a su fructifier et qui produit déjà des dividendes.
Je termine en empruntant une réflexion à l’article précédemment cité tiré d’ELSIE NEWS : 

« Dans cette lune de miel Venezuela/ USA/Haïti, l'unique perdant reste et demeure le peuple haïtien, lequel n'a aucun contrôle […] dans le choix et la gestion des programmes d'USAID ni dans l'investissement  ou la comptabilité de l'argent de PetroCaribe. » 

***
Impossible de conclure sans penser au procès de la Consolidation que le vieux général Nord Alexis a réalisé contre vents et marées en 1903 et qui tient lieu maintenant d’unique précédent et de source d’inspiration. En ce moment où le pays est une fois de plus menacé d’explosion et de disparition, c’est dans une courageuse remise des pendules à l’heure que nous devons rechercher notre rédemption et notre rémission. Et cela, seul un procès équitable, impartial et techniquement bien mené permettra d’y parvenir. Sinon, nous n’avons aucune chance de sortir de ce trou sans fond et sans fonds.





Cour suprême : Brett Kavanaugh, le candidat de Trump dans la tourmente

Juge Brett Kavanaugh
Le juge que Donald Trump souhaite nommer au sommet du pouvoir judiciaire américain, ainsi que la femme qui l’accuse d’agression sexuelle, doit être auditionné ce jeudi.

Christine  Blasey  Ford
Nouvelle période de turbulences pour Donald Trumpet. Nouveau feuilleton qui passionne les États-Unis. Christine Blasey Ford, une prof de fac de 51 ans qui accuse d’agression sexuelle le juge Brett Kavanaugh, candidat du président américain à la Cour Suprême, doit être auditionnée ce jeudi par les membres de la commission judiciaire du Sénat. Ce sera ensuite au tour du magistrat conservateur de 53 ans (qui fait face à d’autres accusations similaires par une autre femme) de passer sur le gril face aux sénateurs.

L’enjeu est énorme car il s’agit d’intégrer l’échelon le plus élevé de la hiérarchie judiciaire américaine, dont un siège est vacant depuis la démission surprise d’un juge « modéré ».
Pourquoi ces auditions ont-elles lieu ?

Le vote de confirmation de Brett Kavanaugh à la Cour Suprême était prévu jeudi 20 septembre. Mais il a été reporté le temps d’organiser l’audition de Christine Blasey Ford. Cette femme accuse le juge et un de ses amis d’agression sexuelle, alors qu’ils étaient complètement ivres, au début des années 1980. Le magistrat, qui dément en bloc, a aussitôt demandé à être également entendu pour « défendre son honneur ». Tout comme il nie les accusations d’inconduite sexuelle lors d’une autre soirée étudiante, portées par une autre femme, Deborah Ramirez.

Quel est le calendrier ?
Convoquée dans un premier temps le lundi 24 septembre, Christine Blasey Ford a changé de stratégie et a demandé la semaine dernière que le FBI se saisisse du dossier avant toute audition, laissant planer le doute sur sa présence au Sénat. Nouveau revirement 48 heures plus tard : elle accepte de témoigner à condition d’avoir plus de temps pour se préparer. Après plusieurs jours de tractations, son avocate et les sénateurs se sont mis d’accord le week-end dernier sur le principe d’une audition ce jeudi.

Quels sont les scénarios possibles ?
Si Christine Blasey Ford n’apporte pas de preuves nouvelles, « ce sera parole contre parole et les sénateurs républicains se diront On l’a écoutée mais on ne peut pas condamner Kavanaugh là-dessus », anticipe l’historien spécialiste des Etats-Unis Corentin Sellin. Le vote de confirmation pourrait alors intervenir très vite, peut-être même dès vendredi. En revanche, si Christine Blasey Ford révèle des documents compromettants, la position du juge sera très difficile à tenir.

Ce serait un véritable camouflet pour Trump, qui soutient mordicus « son » candidat. Le président américain, qui a été accaparé en début de semaine par l’Assemblée générale de l’ONU, a même laissé entendre que les faits ne seraient pas si graves vu qu’aucune plainte n’avait été déposée. Ce qui a suscité une tempête d’indignations de victimes d’agressions sexuelles sous le mot-clé « 
#WhyIDidntReport » (« Pourquoi je n’ai pas porté plainte »).

Pourquoi le contexte électoral est-il crucial ?
Des élections de mi-mandat se tiennent dans moins d’un mois et demi aux Etats-Unis. Or le Sénat, à très courte majorité républicaine, pourrait éventuellement basculer du côté des démocrates, tentés du coup de faire traîner la nomination du nouveau juge. L’enjeu : empêcher que la Cour suprême bascule vers une majorité beaucoup plus conservatrice sur des sujets comme l’avortement.

« Le fait que Blasey Ford ait demandé une enquête du FBI puis tergiversé avant l’audition va dans le sens des démocrates qui multiplient les procédures d’obstruction », pointe Jean-Eric Branaa, maître de conférences à l’université Assas. Trump a lui-même dénoncé « un jeu de dupes » orchestré par ses opposants.

Est-ce à dire que l’accusatrice est forcément instrumentalisée par les démocrates ? Le spécialiste des Etats-Unis nuance : « Une audition est aussi très compliquée pour elle car elle risque d’être jetée en pâture en public. »

LE PRÉCÉDENT DU JUGE THOMAS
Justice Clarence Thomas
L’histoire se répète… En 1991, le juge Clarence Thomas est accusé de harcèlement sexuel par Anita Hill, une ancienne collègue universitaire, à quelques jours du vote qui doit valider sa nomination à la Cour Suprême. Dans le tourbillon médiatique de l’époque, la commission judiciaire du Sénat décide d’entendre la jeune femme alors âgée de 25 ans. L’audition est regardée par 20 millions de téléspectateurs, un record !

Sauf qu’Anita Hill ne parvient pas à étayer ses accusations face aux sénateurs qui n’hésitent pas à la questionner sans ménagement. « Elle était sortie du bois au dernier moment et ça lui a été beaucoup reproché, sa crédibilité a été remise en cause », souligne l’historien Corentin Sellin. Thomas est finalement nommé à la Cour Suprême, comme attendu, neuf jours après la révélation de la plainte. Il y siège toujours 27 ans plus tard et pourrait donc être bientôt rejoint par Brett Kavanaugh.

Source : Le Parisien

Tuesday, September 25, 2018

Bill Cosby condamné à une peine de 3 à 10 ans

Bill Cosby a été écroué au tribunal de Norristown,  en
Pensylvannie le 25 septembre 2018.                          
L'acteur américain Bill Cosby a été condamné aujourd'hui à une peine de trois à dix ans d'emprisonnement pour agression sexuelle par un juge de Pennsylvanie, dans le nord-est des Etats-Unis. Au prononcé de la peine, qui devra être exécutée à l'isolement, le comédien de 81 ans, reconnu coupable par un jury en avril, n'a pas réagi lorsqu'il a été condamné à une peine de trois à dix ans d'emprisonnement pour agression sexuelle.

Bill Cosby pourra formuler une demande de libération conditionnelle après au moins trois ans de détention, requête qui sera examinée par une commission spéciale. Si elle est rejetée, sa requête pourra être renouvelée, mais l'acteur sera susceptible, si toutes ses demandes sont rejetées, de passer dix ans en prison au total.

Dès le prononcé, le principal avocat du créateur et héros du "Cosby Show" a indiqué qu'il allait faire appel et demandé que son client soit laissé en liberté sous caution dans l'attente de l'examen de cet appel. Le magistrat Steven O'Neill a rejeté la demande de la défense, qui souhaitait que le comédien soit laissé libre sous caution dans l'attente de l'examen de son appel. Le comédien a donc été placé en détention immédiate.

Avant le prononcé de la peine, la défense avait déjà déposé un recours pour demander que Bill Cosby puisse effectuer sa peine assigné à résidence, auquel le ministère public avait répondu en assurant que le condamné n'était pas éligible à cette forme d'exécution de la peine. Cette peine de 3 à 10 ans est sensiblement inférieure aux 30 années de réclusion criminelle qu'encourait initialement Bill Cosby.

La victime, Andrea Constand, agressée sexuellement en 2004 au domicile de l'acteur, a refusé de s'exprimer après l'audience, mais était aux côtés du procureur Kevin Steele lors d'une conférence de presse.

La demande faite par la défense a été rejetée par le magistrat. Immédiatement après, Bill Cosby est sorti menotté de la salle d'audience, en bras de chemise et portant ses célèbres bretelles.

"Nul n'est au-dessus des lois", avait dit le juge lors de la lecture de son jugement. "Personne ne devrait être traité différemment."

Bill Cosby lors de son arrivée le 25 septembre au tri
bunal Norristown en Pensylvannie.                           
"M. Cosby va très bien", a assuré son porte-parole, Andrew Wyatt. Il "tient bien le coup", et "sait que Dieu veille sur lui. Il sait que ce sont des mensonges."

Andrew Wyatt a indiqué que la défense allait former de nouveau recours pour contester des points de la procédure.

Avant le prononcé de la peine, la défense avait déposé un recours pour demander que Bill Cosby puisse effectuer sa peine assigné à résidence, auquel le ministère public avait répondu en assurant que le condamné n'était pas éligible à cette forme d'aménagement de la sentence.

Cette peine de 3 à 10 ans est sensiblement inférieure aux 30 années de réclusion criminelle qu'encourait initialement Bill Cosby.

Les trois chefs d'accusation ayant été réunis en un seul, l'octogénaire ne risquait, au maximum, plus que 10 ans de prison.

Un tournant pour le #MeToo ?
Même si l'acteur va sans doute faire appel, c'est une étape de plus dans la descente aux enfers qu'il connaît depuis 2014.

"Je voulais 30 ans", a déclaré, à la sortie du tribunal, Chelan Lasha, qui affirme avoir été agressée sexuellement par Bill Cosby et avait témoigné lors du procès. "Mais je suis très heureuse de savoir que M. Cosby va passer du temps en prison, qu'on peut l'atteindre, comme il nous a atteintes."

Respecté, adulé même par certains, primé, bardé de diplômes honorifiques, riche, il y a encore trois ans, Bill Cosby demeurait l'une des figures morales les plus importantes de la communauté noire aux Etats-Unis.


Quelques segments en vidéo de Bill Cosby laissant le tribunal après son verdict

Depuis, plus de soixante femmes sont sorties de leur silence pour raconter leur agression sexuelle présumée commise par le "père de l'Amérique", entré dans les foyers du monde entier en 1984 sous le nom de Cliff Huxtable, patriarche du "Cosby Show".

Les faits allégués étaient anciens et un seul dossier, passé lui-même à un cheveu de la prescription, a fait l'objet de poursuites pénales, celui d'Andrea Constand.

"Durant des décennies", Bill Cosby "s'est caché derrière un personnage, le Dr Cliff Huxtable", a déclaré le procureur du comté de Montogmery, Kevin Steele, lors d'une conférence de presse.

"C'était de la fiction", "mais beaucoup de gens croyaient que c'était ce qu'il était vraiment."
"Bill Cosby a finalement été démasqué et nous avons vu le véritable homme alors qu'il était emmené en prison."

Cette peine est un premier jalon d'importance pour les mouvements #MeToo et Time's Up, même si Bill Cosby a été inculpé en décembre 2015, deux ans avant l'éclatement de l'affaire Weinstein.

Il faudra cependant attendre l'issue du procès d'Harvey Weinstein, dont la date n'est pas encore connue, pour savoir si le vent a vraiment commencé à tourner sur le terrain judiciaire.

A ce jour, mis à part Harvey Weinstein, aucun des hommes de pouvoir mis en cause depuis un an n'a fait l'objet de poursuites judiciaires.

Selon le réseau national des victimes de viols, d'agression sexuelle et d'inceste (RAINN), à peine plus de 2 % des plaintes pour viol aboutissent à une condamnation.

Sources combinées 

Monday, September 24, 2018

PETROCARIBE… UN TROU SANS FONDS


Ce texte de Frédéric Boisrond, l'auteur bien connu au Québec, mérite d'être lu. Un article intéressant et savoureux !

En avril 2001, Hugo Chavez, le Président du Venezuela, a débarqué à Québec en grande pompe. Il était en mission. Il était venu empoisonner la vie de Bill Clinton. Le Président américain avait un ambitieux projet pour le continent. Si Hugo Chavez était venu jouer au plus fort la poche, c’est parce qu’il avait une alternative bien assemblée, bien huilée, prête à carburer, à mettre sur la table. PetroCaribe ne pouvait être autre chose qu’un fantastique moteur de développement dont Haïti serait le principal bénéficiaire. Mais, sans surprise, la machine s’est enrayée… en Haïti.

Frédéric Boisrond
En décembre 1994, à Miami, lors du premier Sommet des Amérique, Bill Clinton avait proposé la création de la Zone de libre-échange des Amériques (ZLEA). La démocratie était une condition non-négociable. Cuba, dirigé par Fidel Castro, sous embargo américain, était le seul exclu. Le deuxième sommet avait lieu en avril 1998 au Chili, soit quelques mois avant l’élection de Hugo Chavez.

Devenu Président du Venezuela le 2 février 1999, Hugo Chavez s’était présenté à Québec pour le troisième Sommet des Amériques. Il n’avait pas encore mis les pieds dans la ville qu’il avait exigé l’intégration de Cuba dans la ZLEA. Si les Américains ont dit non, c’est parce que cela aurait signifié la levée automatique et sans conditions de leur embargo. Libre à vous de croire que Hugo Chavez ne pouvait souhaiter une meilleure réponse.

Malheureusement pour Bill Clinton, Hugo Chavez avait fini par convaincre trop de monde que la ZLEA serait un rappel de ce qu’ils avaient subi hier, un petit quelque chose que jadis, l’autre appelait la Doctrine Monroe. Persuadé que les Américains voulaient faire main basse sur le continent, le Président du Venezuela, avait déclaré que c'est plutôt Mar Del Plata serait le tombeau de la ZLEA. Mission accomplie!

Autre atout dans le jeu de Hugo Chavez, entre le premier et le quatrième Sommet des Amériques, les citoyennes et citoyens de plusieurs pays d’Amérique latine dont le Brésil, l’Argentine et la Bolivie, avaient confié le pouvoir à des Socialistes. Même s’il y a eu 8 sommets à ce jour, dont le dernier à Lima (Pérou) en avril 2018, depuis le sommet de Québec, si vous n’avez plus jamais entendu parler de la ZLEA, c’est parce qu’elle a effectivement fait patate.

Pendant ce temps, avec l’envoi de médecins, d’ingénieurs et de travailleurs spécialisés, entre autres, en Haïti, en République Dominicaine et à la Grenade, Fidel Castro avait, depuis belle lurette, enclenché l’exportation de sa révolution socialiste dans la région. Au fond, il a, avec son opération charme-utilité, ajouté du carburant pour accélérer le virage à gauche en Amérique latine.

En Hugo Chavez, Fidel Castro avait trouvé son héritier idéologique, le fils spirituel qu’il n’attendait plus. Hugo Chavez était un Socialiste pur et dur, mais un Socialiste qui avait les moyens de ses ambitions. Il était à la tête d’un pays riche. Pour neutraliser une fois pour toutes, la Zone de libre-échange des Amériques, Fidel Castro, l’idéologue et Hugo Chavez, le grand argentier, ont déployé leur alternative à la ZLEA; L’Alliance Bolivarienne pour les Amériques (ALBA).

L'ALBA est une organisation qui s’était donnée pour mission de créer une zone de coopération économique qui ciblerait tous les pays du continent. Le Canada, les États-Unis et le Mexique (ALENA) n’étaient pas invités. Ne vous faites surtout pas d’illusion. L'ALBA n’est pas une autre de ces patentes pour les grands gueulards de la gaugauche contrariée. Oh non. Loin de là!

L'ALBA, ce n’est pas de l’aide internationale. C’est de la «grosse-business». Ce n’est pas de la charité. C’est du commerce international. Ce n’est pas l’aumône. C’est ce que hier, au centre, on appelait, le Capitalisme à visage humain. Hugo Chavez, plus jeune et moins fatigué que Fidel Castro mais tout aussi charismatique, avait pris le leadership du mouvement.

L'ALBA devait permettre au Venezuela et à Cuba de trouver des partenaires économiques. Pour y parvenir, il fallait aider d’autres pays à développer leur potentiel de commercialisation. Aujourd’hui, ça s’appelle le «Trade Capacity Building». Hier, un peu plus au Nord, après la Deuxième Guerre mondiale, ils appelaient ça le Plan Marshall.

Quand Hugo Chavez est devenu Président du Venezuela, il a hérité de 302 milliards barils de pétrole, soit la plus importante réserve au monde. La ALBA devait permettre à son pays de tirer le maximum de ses réserves en offrant à ses clients, des avantages inégalables pour ainsi vendre en quantité dans un cycle où les prix étaient très élevés.

Grâce à la manne pétrolière, entre 1999 et 2011, au Venezuela, la mortalité infantile était passée de 19,15% à 13,95%. L’espérance de vie avait augmentée de 2 ans. C’est tout simplement phénoménal. Selon les données de la Banque mondiale, le revenu per capita qui, en 2004, était de 3 060$ a été catapulté en 2012, à 12 460$. Du jamais vu! Le Venezuela était devenu tellement riche, qu’il pouvait se permettre de vendre son pétrole à crédit, du crédit à très long terme.

Le PetroCaribe Cooperation Agreement est la pièce maîtresse de l'ALBA. Au plus fort du programme, 18 pays avaient signé l’accord. Mis en place le 29 juin 2005, le PetroCaribe Cooperation Agreement est le résultat d’une agressive stratégie de développement de marché pour écouler les produits pétroliers vénézuéliens. Cet accord avait fait du Venezuela, au grand désarroi des pétrolières américaines, le premier exportateur de pétrole du continent.

Mécontentes, les pétrolières américaines, dont Exxon Mobil et Chevron, avaient vu dans cette stratégie une concurrence déloyale. Quand, en 2008, elles ont pompé 2,4 millions de dollars dans la campagne électorale de Barack Obama, elles s’attendaient en retour à ce qu’il ait le courage d’étrangler l’économie du Venezuela. Pour ne rien laisser au hasard, elles ont allongé 902 000$ à l’équipe de campagne de John McCain. Elles n’ont pas pris de chance.

Le principal avantage pour les clients de PetroCaribe, c’est la transformation d’une partie de la facture en une dette à long terme à taux préférentiel. Pour le Venezuela qui est en moyen, cette démarche permettait de fidéliser sa clientèle quitte à reporter les revenus de l’État. 

Sauf que pour développer cette zone de coopération économique, pour donner un peu d’air à Cuba, des règles strictes sur l’utilisation des fonds accumulés dans la dette à long terme, ont été imposées aux clients. Mais ça, c’était trop demander aux dirigeants haïtiens.

En 2005, lorsque le PetroCaribe Cooperation Agreement a été lancé, Haïti en était exclu parce qu’après un autre coup d’État contre Jean-Bertrand Aristide, le pays était dirigé par le gouvernement provisoire et illégitime de Alexandre Boniface. Le scrutin de 2006 a permis le retour à un autre semblant de démocratie représentative par l’élection de René Préval.

Le 14 mai 2006, René Préval a quitté le balcon du Palais national d’où venait de se dérouler la cérémonie d’assermentation pour son deuxième et dernier mandat. Dans son bureau, il était attendu par le Vice-Président du Venezuela, José Vicente Rangel, pour signer l’adhésion d’Haïti au PetroCaribe Cooperation Agreement.

Condition inscrite dans l’accord, les transactions doivent passer par une agence de l’État. Depuis ce jour, c’est le Bureau de Monétisation des Programmes d’Aide au Développement (BMPAD), qui achète les produits vénézuéliens et qui les revend aux entreprises privées. Ces dernières ont 30 jours pour acquitter la totalité de leurs factures auprès de la BMPAD.

Le BMPAD a 90 jours pour payer 40% de la facture aux Vénézuéliens. Le solde, soit 60% de la facture, constitue une dette à long terme payable sur 25 ans à un taux de 1%. Avec l’argent accumulé, le BMPAD a l’obligation de créer un fonds de développement. C’est ça le Fonds PetroCaribe… un fonds de développement.

Est-ce que je vous ai dit que PetroCaribe est un fonds de développement? D’accord! Je voulais juste m’en assurer. 

Le Fonds PetroCaribe n’est pas une fantaisie. C’est une condition imposée par l’ALBA, à tous les pays qui participent au PetroCaribe Cooperation Agreement. Je comprends votre déception. Vous croyiez que le Fonds PetroCaribe était le résultat d’un autre coup de génie des dirigeants haïtiens. Mais non! Retenez votre déception et vos frustrations. Vous allez en avoir besoin dans un autre tantôt. 

Par obligation contractuelle, Haïti, comme tous les autres pays, s’était engagé à faire de son Fonds PetroCaribe, un levier de développement qui vise en priorité, la réduction de la faim et de la pauvreté. Il est clairement inscrit dans le PetroCaribe Cooperation Agreement que les Fonds PetroCaribe doivent permettre aux pays membres de financer des coopératives de travailleurs, des petites et des moyennes entreprises qui présentent des projets pour atteindre l’autosuffisance alimentaire. Au-delà des valeurs socialistes, ce qu’il faut voir dans cette obligation, c’est le développement d’une industrie agroalimentaire.

À cela, il faut ajouter que les signataires du PetroCaribe Cooperation Agreement savaient parfaitement qu’il s’agit d’un projet d’enrichissement collectif et de coopération économique. Ils savaient qu’il y aurait de nouvelles connexions aériennes et de nombreuses infrastructures pour faciliter la transformation et la libre circulation des marchandises entre les pays membres.

Vous ne serez pas étonnés d’apprendre que du groupe de 18 signataires du PetroCaribe Cooperation Agreement, Haïti faisait figure d’enfant pauvre et de canard boiteux. Tous les signataires savaient qu’aucun pays de la région n’avait plus besoin de PetroCaribe qu'Haïti. Aucun pays n’avait plus besoin de relever le niveau de vie de ses habitants qu'Haïti. Aucun.

Les Bahamas avec 22 312 US$ étaient les champions pour le revenu per capita. Haïti fermait la marche avec des revenus de 819 US$. Incluant Haïti, c’est 12,4% de la population totale des pays membres de PetroCaribe qui souffrait de malnutrition. Haïti, pris isolément, affichait un taux de 51.8%. Haïti avait tout à gagner.

Tout a été mis en place pour permettre aux Haïtiennes et aux Haïtiens de sortir de la misère et de la pauvreté. Mais, ce pays a tout perdu. Haïti a raté le rendez-vous le plus important de son histoire contemporaine… Un rendez-vous avec le développement. Le destin a voulu que ce pays soit, une fois de plus, dirigé par des cancres avaricieux.

Des dirigeants haïtiens ont fait basculer cette formidable opportunité de développement qui devait donner à Haïti une relative indépendance face à l’aide internationale. Confortables dans le court-termisme, ils ont fait fi d’une clause capitale du PetroCaribe Cooperation Agreement. C’est le non-respect de cette clause qui a causé le dérapage.

En faisant semblant de ne pas savoir ce qui était évident, les dirigeants haïtiens ont confirmé leur amateurisme, leur mépris pour leurs concitoyennes et leurs concitoyens et leur incapacité de résister à la tentation de faire la poloche pour pouvoir s’en mettre plein la patoche, la valoche et la popoche.

Je refuse de croire que les dirigeants haïtiens ne savaient pas que la répartition de la dette (court terme; 40% et long terme; 60%) sur les achats d’asphalte, de mazout, de diesel, de gazoline et de kérosène, changerait du tout au tout quand le prix du baril de pétrole passerait sous les barre de 40$. Ils avaient l’obligation de savoir ce qu’ils ne pouvaient même pas faire semblant de ne pas voir.

Cette clause clairement inscrite dans le PetroCaribe Cooperation Agreement dit que lorsque le prix tombe sous 40$ le baril, le taux d’intérêt monte à 2% et le terme est ramené à 17 ans. De plus, et c’est ça qui est le plus dommageable, la proportion qui doit être payée en 90 jours pouvait se hisser jusqu’à 95%. N’importe quel crétin qui aurait coulé son cours sur la Gestion des risques, se serait empressé pour proposer des modalités afin de contrer les risques financiers associés au non-respect de cette clause.

Puisque Edward Murphy vous avait appris que tout ce qui peut aller mal finira par mal aller au moment où ça peut vous faire le plus mal. A partir de septembre 2014, le prix du baril de pétrole, après avoir passé 40 mois au-dessus de 100$ a débuté une chute vertigineuse qui l’a amené, en février 2016, à un prix aussi bas que 32,69$. Comme prévu dans l’Accord, entre 30$ et 39,99$ le baril, le BMPAD devait payer 75% de ses factures en 90 jours. Donc, il ne lui restait que 25% à placer dans le Fonds PetroCaribe.

Concrètement… Lorsque la BMPAD achetait 10 000 unités et que le baril était à 100$, sur une facture de 1 million de dollars, c’est 600 000$ qui pouvaient être placé dans le Fonds PetroCaribe. Quand le prix a chuté à 32,69$ le baril, la facture pour la même quantité étant de 326 900$ et puisque la proportion à mettre dans le Fonds PetroCaribe passait à 25%, la nouvelle rentrée d’argent était de 81 725 $.

Maintenant, imaginez le drame auquel serait confronté le pays si la quasi-totalité des fonds accumulés, avait été dépensée. Vous pouvez arrêter d’imaginer. C’est exactement ce qui est arrivé. Vous pouvez arrêter de chercher. Vous venez de trouver le cœur du scandale PetroCaribe.

Le Fonds PetroCaribe a été utilisé comme s’il s’agissait d’un Ponzi, le type de caisse d'entraide connu en créole sous les appellations de (Men et de Sòl) . Comme il est coutume dans ces montages frauduleux, les dirigeants haïtiens ont pigé dans le fonds tout en étant convaincus qu’il y aurait toujours des nouvelles rentrées d’argent. À leur compréhension, la source serait intarissable. Oui mais… Pour que leur Ponzi fonctionne, il aurait fallu que le prix du baril de pétrole soit stable, ou mieux encore, qu’il soit en hausse constante.

J’en veux pour preuve que, le 31 mars 2016, Haïti avait, envers le Venezuela, une dette accumulée de 1,8 milliards de dollars. Mais, il y avait dans les coffres du Fonds PetroCaribe, la modique somme de 13,4 millions de dollars. Vous ne serez pas étonnés si je vous annonce que ce pactole était insuffisant pour faire des versements sur la dette.

Pour cause, de juillet 2015 à janvier 2016, Haïti était incapable de faire un seul versement sur sa dette à long terme. Donc, Haïti s’est mis à acheter à crédit, d’un pays qui ne demandait pas mieux que de vendre à crédit. C’est ainsi que des dirigeants haïtiens, avec leurs tactiques mafieuses, ont fait du programme qui devait sortir les Haïtiennes et les Haïtiens de la pauvreté, celui qui pourrait les enfoncer dans l’extrême-pauvreté.

Dans un premier temps, le gouvernement de René Préval avait accumulé une dette à long terme de 295 millions de dollars. Après le tremblement de terre du 12 janvier 2010, Hugo Chavez avait autorisé l’effacement de cette dette. Au-delà des malversations qui aurait pu être faites sous le régime de René Préval, Haïti s’était replacé à la case départ. Notez cependant qu’après ce séisme, René Préval est resté au pouvoir pendant 14 mois et qu’il a continué à accumuler des dettes et à dépenser sans compter.

Et puis, le 14 mai 2011, Haiti s’est fait imposer un leader incompétent, mal préparé, évaporé, grotesque et inconséquent qui ne se distingue que par sa vision étroite et de très courte portée. Michel Martelly, le Président illégitime d’Haïti, était avant tout l’architecte de la stratégie du Kité kompa mache,  une méthode de gestion basée sur l’improvisation, le laisser-faire, la gestion sans plan, le vol à vue… Non, non, non. Ce n’est pas ce que j’ai dit. Pour moi, un vol à vue c’est comme piloter un avion sans trop savoir où on va. Mais bon! Vous avez le droit de penser ce que vous voulez. Mais ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit. J’veux pas d’troubles!

Anyway! J’ai déjà trop parlé. Tant qu’à faire… Awoye donc! Nou lan mal, nou lan mal nèt!!!

Le vol à vue, tant dans sa définition littéraire que littéral, a été confirmé par la Cour supérieure des comptes et du contentieux administratif.  Dans son rapport pour l’exercice 2014-2015, l’instance qui est chargée du contrôle administratif et juridictionnel des recettes et des dépenses de l’État, avait rappelé que le Fonds PetroCaribe constituaient «un prêt bilatéral, obtenu à un taux préférentiel, et qui invite, ou plutôt devrait inviter, à la prudence quant à sa gestion».

Si la Cour des comptes avait fait cette mise en garde c’est parce qu’elle avait constaté, qu’au cours de cette même année fiscale, le gouvernement de Michel Martelly avait, à deux reprises, puisé dans le Fonds PetroCaribe pour financer des projets non prévus dans le budget, pour s’acquitter d’obligations non-justifiées ou encore, pour dégager des crédits dont les affectations étaient imprécises. Si ce n’était que ça!

À la page 82 du rapport de 2014-2015, la Cour des comptes affirme que tout pouvait porter à croire que les Fonds PetroCaribe avaient été utilisés comme un petit budget dans le budget national pour exécuter les priorités du Président et de son gouvernement. La Cour des comptes, qui elle aussi ne veut pas de trouble, n’a pas osé dire le Fonds PetroCaribe avait été utilisé comme s’il s’agissait de la caisse privée du Président. La Cour des comptes n’a pas voulu dire que Michel Martelly faisait ce qu’il voulait dans ce pays. Voilà le problème de ce pays!

Quand on regarde la liste des projets répertoriés par la Cour des comptes, on constate que plus de 90% des fonds a été dépensé dans des projets d’infrastructures. À moins que j’aie la berlue, Il me semble que je vous ai dit, redit et répété que le Fonds PetroCaribe est, par obligation contractuelle, un fonds de développement… de développement d’une industrie agroalimentaire. C’est bien ce que vous aviez compris? D’accord. Je voulais juste m’en assurer.
Maintenant, attachez-vous. Ça va fesser dans le dash!

Pendant que Michel Martelly dépensait à qui mieux-mieux dans de l’asphalte, du béton, de la brique et du mortier, les dirigeants de la Jamaïque, du Belize et de la Guyane qui avaient compris que le Fonds PetroCaribe est un prêt pour le développement qui doit être remboursé, ont réussi à tirer le maximum de profit du PetroCaribe Cooperation Agreement sans mettre leur pays dans le trou.

Pendant que Michel Martelly installait des lampadaires… En Jamaïque, le Président Bruce Golding, qui avait surement réussi son cours de Gestion des risques,  déclarait que les réserves générées par PetroCaribe représentaient un prêt consenti par le Venezuela et que ces sommes faisaient partie de la dette nationale. Il avait demandé que l’argent soit placé pour générer des revenus d’intérêts. C’est à partir des intérêts qu’ont été financés les projets retenus dans le cadre du National Development Plan of Jamaica.

Pendant que Michel Martelly dépensait 15 449 903$ pour construire le viaduc Delmas/Nazon… Au Belize, le gouvernement, à partir de ses réserves PetroCaribe, avait injecté 9,95 millions de dollars dans la création d’une banque populaire. Le National Bank of Belize, a permis de financer des micro-projets dans le domaine agroalimentaire avec pour objectif d’augmenter l’offre de produits locaux afin de réduire la pauvreté. Comme par hasard, les exportations de produits agroalimentaires sont passées de 322,23 millions de dollars en 2010 à 513,65 millions de dollars en 2013.

Pendant que Michel Martelly dépensait 8,2 millions pour son programme d’infrastructures sportives… En Guyane, avec leurs réserves PetroCaribe, le gouvernement a acheté du Venezuela, plus de 20,000 tonnes d’urée. Ce fertilisant à base de pétrole, a été distribué aux riziculteurs. Cette stratégie a permis d’augmenter la quantité de riz disponible sur le marché national au point où la Guyane est devenue un pays exportateur de riz. Et c’est là que ça va vous faire le plus mal.

Chaque année, la Guyane repaye une partie de sa dette au Venezuela, en lui versant 210 000 tonnes de riz. En créole le principe derrière cette stratégie qui respecte au pied de la lettre tous les objectifs du PetroCaribe Cooperation Agreement, s’appelle; «Se grès kochon’an ki kwit kochon’an».

Pendant ce temps en Haïti… Laurent Lamothe, qui était Premier ministre sous le régime de Michel Martelly, faisait la vanesse. Confiant de son bilan, il se gargarisait à raconter son exploit qui se résume à la construction de 25 stades. Il était convaincu, le pauvre, que jouer au football réduirait la pauvreté et la faim. Personne n’avait jugé bon de lui rentrer dans le sinoquet que faire du sport creuse l’appétit.

Pendant ce temps en Haïti… L’argent du Fonds PetroCaribe a été gaspillé dans la réalisation de projets électoralistes, cosmétiques et insignifiants. Ça, c’est sans compter que le clan de Michel Martelly avait pris soin de mettre ces sommes à la portée des fraudeurs, des corrompus et des poches profondes des «Petits-amis» de son régime… ces affameurs sans scrupule.

Imaginez si Haïti avait adopté la même stratégie que la Jamaïque. Les pillards et les vauriens, les siphonneux et les malandrins auraient pu s’en mettre plein la calebasse à partir des intérêts ou d’autres Retours sur investissements (ROI) sans toucher au capital, sans endetter la prochaine génération de citoyennes et de citoyens du pays le plus pauvre de l’hémisphère Nord.

Imaginez l’impact de la stratégie adoptée par le Belize sur un pays dont le taux de chômage dépasse 60%. Imaginez ce que ça aurait changé dans la vie de ses 2,5 millions de personnes qui continuent à vivre sous le seuil de la pauvreté et qui s’apprêtent demain, à faire connaissance avec l’extrême-pauvreté.

Imaginez l’impact de la stratégie adoptée par la Guyane sur un pays dont 51,8% de la population ne mange pas à sa faim, un pays où le riz représente 30% du panier de provision des familles.

Quand tout allait mal au Venezuela, quand les pétrolières américaines avaient fini par remporter leur bataille, après que le Président Nicolas Maduro a fait une généreuse contribution à la mise en faillite de son pays, il avait proposé au gouvernement de Michel Martelly de rembourser une partie de sa dette, avec des denrées alimentaires.

Cette demande n’était ni farfelue, encore moins improvisée. Si cette demande a été faite par Nicolas Maduro, c’est parce que logiquement, à ce stade-là de la mise en place de l’accord, Haïti devait être un acteur sur le marché de l’exportation agroalimentaire.

Pendant que vous continuez à faire rouler votre imagination, sachez que le 7 septembre 2018, en pâmoison, le Président Jovenel Moïse, l’héritier idéologique, le fils spirituel fabriqué de toutes pièces par Michel Martelly pour garantir son impunité, a fièrement annoncé qu’il avait autorisé le BMPAD, l’agence qui gère les Fonds PetroCaribe, à importer 12 mille tonnes de riz vietnamien.

C’est maintenant que vous devriez exprimer les frustrations et les déceptions que vous aviez mises en réserve dans le premier tantôt de tantôt. Si ça ne vous décourage pas, si ça ne vous met pas en colère, si ça ne vous indigne pas… j’aurais perdu mon temps à vous raconter tout ça pour absolument rien.

Malheureusement, entre votre imagination et la réalité, il y a un monde, un monde de corrompus, d’avares, de ti-vicieux, de mazettes, de sans-gênes, de grangous et d’aloufas. Entre votre imagination et la réalité, il y a un pays où l’impunité est reine, où des voyous et des andouilles confirment leur immunité par leur arrogance et en insultant tous ceux qui osent se permettre de questionner leurs bilans.

Dans votre réalité, il y a Michel Martelly, le condescendant, l’insolent, l’irrévérencieux Bandit légal, celui qui se croit tout permis, celui qui dit qu’il n’a de comptes à rendre à personne, celui qui devient plus sauvage quand on lui demande de faire le décompte, celui qui tente de vous faire peur pour tenter de vous faire taire.
La peur vient de changer de camp pour celui qui prétendait n’avoir peur de rien.

Michel Martelly ne peut plus se taire. C’est maintenant à lui d’expliquer comment il s’y est pris pour pousser Haïti dans une crise plus profonde que celle dont devait le sortir le PetroCaribe Cooperation Agreement.
(sic)

Source: Fréderic Boisrond
http://fredericboisrond.com