La pêche, l'agriculture et le commerc sont les principales ressources de Pestel |
Pourquoi une telle
attitude du président Jovenel Moïse envers la commune de Pestel en dépit de ses
promesses remontant à sa visite le 4 mai 2018? Serait-il une nonchalance?
Poursuit-il la logique historique visant à mettre Pestel à l’écart de tous les
projets de développement? Ou encore nos élus n’ont-ils pas leur responsabilité
en ce qui a trait?
Ce sont autant de
questions qui divisent les Pestelois. De l’avis de certaines gens, la commune
ne lui représente pas une menace réelle; et pour d’autres il serait une
trahison ou encore les séances du pays "lock" ont une part de responsabilité. Elles ont
toutes une portée intéressante dans la réflexion. Pour moi, la non-prise en
charge de son développement par ce gouvernement en place ne date pas
d’aujourd’hui. Elle est peut-être victime de sa position géographique, mais
cette thèse parait trop simpliste pour l’accepter. La nonchalance de la plupart
de nos dirigeants est un facteur à considérer.
Pestel se compose princiaplement de collines et d'un climat tro pical. C'est un endroit difficile d'accès en voiture. Certains visi teurs y vont lors de la fête de la mer chaque année. |
Pestel, située dans la
Grand’Anse du pays, est élevée au rang de commune depuis 1843 au lendemain de
sa participation dans la lutte causant le départ de Jean Pierre Boyer au
pouvoir. En dépit de son potentiel agricole et écotouristique, elle est
créditée d’un manque à gagner énorme en termes de développement. Le retard dont
elle accuse est historiquement lié à un vaste complot de l’État contre la
commune souvent orchestré par certaines de Jérémie.
Historiquement, Pestel a
été toujours été une zone de rébellion. On se rappelle la participation des
anciens d’abord au côté de Jean Baptiste Perrier dit Goman (1807-1820), ensuite
au côté de Jean Jacques Acaau en 1843, dans la lutte contestant l’hégémonie des
élites de Port-au-Prince. On se rappelle également le mouvement des Piquets
dans les mornes de Pestel contre les projets antinationaux de plusieurs
gouvernements. Nous avons passé tous ces règnes sans l’intervention de l’État
central. Ce fut un siècle de développement perdu, voyez-vous! Il importe de
rappeler qu’en trois fois l’économie de la ville fut passée à flamme par des incendies
orchestrés par l’État central. Ça a été un manque à gagner énorme.
De 1843 à date, Pestel
n’a pas connu de très grands chantiers de développement. Toutefois, on retient
quelques réalisations de certains présidents effectuées sous base de compromis politique
et de relations de camaraderie.
Malgré sa nature enchanteresse, Pestel est un endroit de séche resse où ses habitants voyagent à travers d'autres communautés à la recherche d'eau potable. |
On se souvient que
Sténio Vincent a fait construire une école nationale, un dispensaire, une
citerne communautaire, et la première manche de la percée du Tronçon de route
reliant carrefour zaboka à Pestel; sous la présidence de Magloire, deux écoles
nationales étaient construites, la seconde manche du tronçon de route fut
réalisée. Toujours est-il, Henry Namphy nous a permis d’avoir l’ancien réseau
électrique et il a contribué à certains degrés dans la construction du bâtiment
du lycée. René Préval a quand même réalisé quelques interventions dans la
commune.
Par contre, durant le
règne des Duvaliers, la commune fut tombée dans l’oubli. Pas même une pierre
n’a été posée. Ce n’est qu’au cours de cette époque, le commerce florissant que
connut Pestel devient au point zéro puisque les commerçants sous prétexte de
complot contre Duvalier furent contraints d’aller vendre leurs rêves ailleurs.
Pestel fut encore victime sous le second mandat de Préval et de celui de Michel
Martelly.
Les critiques arguant
que Pestel est négligée dans le budget national sous prétexte qu’elle n’apporte
rien en termes de recettes fiscales sont de loin une réalité.
Fête de la mer à Pestel en voilier
Dès sa genèse à 1990,
Pestel a rapporté du gros dans l’économie nationale. Il est rapporté par
l’écrivain Semexant Rouzier que dans les années 1850 à 1890, Pestel produisit
650.000 livres de café. Le port faisait le plein de cargaisons, exportant entre
dix et quinze mille sacs de café l’an et en retour importait de Port-au-Prince
et de Kingston des marchandises diverses.
Grâce à la spéculation
du café, Pestel accusa en 1921/22 une recette fiscale de 1.815,98 gourdes ;
l’année suivante, elle s’éleva à 2.783,40 gourdes, en 1923/24 à 4.404,91
gourdes et en 1924/25 à 5.909,85 gourdes. Pareillement en 1954, quand la
marmite se vendait à 42 gourdes, l’économie de la zone florissait davantage. Le
café rapporta dès lors mensuellement environ un million de gourdes. À ce sujet,
l’ancien inspecteur fiscal Vidal Saint-Louis confie à quelqu’un que, grâce au
commerce de café, la commune était dans les années 70-80 l’une des communes qui
rapportèrent à l’État une grande part du budget national.
Par rapport à tout ce
qu’elle a rapporté dans les anciens budgets nationaux, faut-il se demander
pourquoi le problème de l’eau de Pestel n’a pas été une préoccupation des
différents gouvernements qui se sont succédé. De plus, comment se fait-il que
le tronçon de la route carrefour zaboka Pestel n’ait encore été asphalté?
Pour finir, même si
Pestel ne contribue plus dans l’économie nationale, mais l’État a une dette
envers elle puisque dans les années où elle rapporta du gros à l’État ce
dernier ne lui retourna pratiquement rien sous forme de services. Ainsi l’on se
demande si le président Jovenel Moïse va relever ce défi historique qui
l’attend.
James St Germain
Sociologue,
professeur de philosophie
Illustration :HCC
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