L'histoire des plantes médicinales remonte à l'aube de l'humanité. |
D’autres
personnes ont livré des témoignages similaires à l’efficacité de recettes
traditionnelles utilisées contre le coronavirus. Ces recettes ont fait le tour
des réseaux sociaux et replacent dans l’actualité la problématique de la
médecine traditionnelle en Haïti. Avec les faiblesses évidentes du système
sanitaire national, la médecine douce peut être l’ultime recours face à la
pandémie qui fait des ravages même dans les pays qui disposent de système de
santé efficace et sophistiqué. On ne peut pas réfuter objectivement l’hypothèse
qu’elle peut aider à sauver des vies en Haïti.
Il
reste cependant quelques médecins haïtiens qui rejettent encore d’un revers de
main la possibilité que des recettes traditionnelles soient efficaces. D’autres
se montrent beaucoup plus ouverts, mais préconisent la modération et la prudence
dans leur utilisation. Il se pose évidemment un problème de dosage. Comment
déterminer la quantité de chaque ingrédient de la recette ? Le mélange de
certaines feuilles n’est-il pas potentiellement dangereux ? Quels seraient les
effets secondaires ?
Ce
sont des questions préoccupantes et légitimes qui méritent des réponses
convaincantes de la part des professionnels du domaine. Mais ces questions ne
doivent en aucun cas sous-estimer l’importance de la médecine traditionnelle en
Haïti. La grande majorité de la population haïtienne est habituée à prendre du
thé pour soigner des maux. Elle ne semble nullement remettre en doute
l’efficacité de ces remèdes traditionnels. Malgré leur large utilisation, il
n’existe pas de programme national de recherche visant à établir la
scientificité de leur efficacité. Pas plus qu’il n’y a de programme
d’encadrement de leur usage..
Large aloe vera ou (Lalwa) en créole |
Gingembre ou (ginger) en anglais |
Le
Dr Jacques confirme que le mélange constitué d’ail, d’aloe vera, de gingembre et
de miel peut soulager grandement les maux provoqués par le coronavirus. Il
prescrit une petite cuillerée à café 2 fois par jour. Si l’on ne trouve pas de
miel, on peut, dit-il, utiliser du sirop de canne ou du rapadou. On constate que
ces éléments se retrouvent également dans la recette mentionnée au tout début.
Le médecin naturopathe et clinicien conseille de faire de la prévention à partir
des feuilles de palma-christi "maskreti" en créole). Il suffit d’en prendre
deux, d’y ajouter du miel et de les mélanger à partir d’un mélangeur (blender)
afin d’obtenir une demi-tasse à consommer pendant trois à cinq jours. C’est
comme un vaccin, rassure Dr Jacques qui préconise également de l’activité
physique comme mode de résistance au coronavirus.
Le
directeur général de Signal FM, Marcel Joseph, a également reçu un médecin qui
pratique de la médecine traditionnelle. Interrogée sur l’hécatombe que peut
engendrer le coronavirus en Haïti, Dr Chantale Pierre dit n’être pas du tout
paniquée parce que le traitement de la maladie se retrouve dans les racines et
les feuilles d’Haïti. Le médecin invite les dirigeants haïtiens et les
institutions impliquées dans la lutte contre la pandémie à utiliser les
connaissances de la médecine traditionnelle.
Cannelle ou (cinnamon) en anglais |
Elle
confirme toutefois qu’elle ne reçoit pas les personnes infectées, parce qu’elle
ne peut pas réaliser les tests de dépistage dans sa clinique. Elle conseille un
thé de trois feuilles de Nîmes chaque matin et chaque soir aux gens qui
ressentent une fièvre sévère et de la consommation de manioc comme prévention.
Ce tubercule, ajoute-t-elle, contient beaucoup de fer qui pourrait renforcer le
système immunitaire.
Dr
Pierre propose un mélange fait d’huile de palma-christi, de beurre margarine, de
tabac en poudre et d’alcool comme une friction contre la courbature provoquée
par le coronavirus. Elle a aussi mentionné l’efficacité du miel, du gingembre et
de l’oignon pour soigner le coronavirus. Les mêmes ingrédients que contient la
recette mentionnée au début. Elle a profité de l’émission pour fournir beaucoup
d’autres recettes traditionnelles pour différents types de maladie.
Muscade ou (nutmeg) en anglais |
Les
deux médecins découragent cependant la consommation de l’alcool et de la drogue
qui affaiblissent plutôt le système immunitaire et rendent plus vulnérable au
coronavirus. Contrairement à une croyance véhiculée au niveau de la population.
Ils encouragent la consommation de produits locaux biologiques aux dépens de
ceux importés, surtout les produits en conserve.
Dr
Junot Félix, spécialiste en système de santé, directeur général de la firme
Genesis et professeur à la Faculté de médecine et de pharmacie (FMP), croit aux
potentialités de la médecine traditionnelle. Au moment où il travaillait au
département de la Grand’Anse, il avait créé une Association des médecins
traditionnels qui avait organisé en 1989 une rencontre nationale au Rex Théâtre.
Mais la réussite de ces initiatives privées requiert un encadrement de l’État
haïtien qui fait encore défaut.
Girofle ou (clove) en anglais |
Il
faut quand même souligner la réalisation par la ministre de la Santé publique et
de la Population, Dr Marie Gréta Roy Clément, en date du vendredi 29 septembre
2017, au centre de convention et de documentation de la Banque de la République
d’Haïti (BRH), d’une conférence sur la médecine traditionnelle. Il s’agit, selon
les organisateurs, d’un effort vers la reconnaissance officielle de la médecine
traditionnelle en Haïti. Prenaient part à cette rencontre
sur la médecine traditionnelle des officiels du gouvernement, des personnalités
du monde médical scientifique et de la médecine traditionnelle, des
représentants de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), des partenaires en
santé, des membres de la société civile et de bien d’autres personnalités
intéressées par la problématique.
L’harmonisation des
médecines scientifique et traditionnelle permettra
à la population d’avoir accès à une plus large couverture en matière de soins de
santé. Le Dr Junot Félix pense qu’il faut profiter de la pandémie du coronavirus
pour repenser le système de soins et le système de santé en Haïti.
Miel ou (honey) en anglais |
Un
programme de recherche sur l’efficacité de la médecine traditionnelle pourrait
se faire en trois étapes. D’abord, il faudra identifier quelle feuille utiliser
pour quel type de maladie. Ensuite, analyser les propriétés de ces feuilles en
vue de comprendre pourquoi elles sont efficaces à traiter les maladies en
question. Et enfin, essayer de proposer un dosage approprié.
Un
important travail d’inventaire de ces savoirs traditionnels a été réalisé au fil
des années. On peut citer les trois tomes de l’ouvrage d’Arsène V.
Pierre-Noël et de Timoléon C. Brutus «Les plantes et les légumes d'Haïti qui
guérissent : mille et une recettes pratiques (1959, 1960, 1966)». Marilise
Neptune Rouzier, écrivaine, biologiste et ethnobotaniste, qui a longtemps
enseigné à la Faculté de médecine et de pharmacie (FMP) de l’Université d’État
d’Haïti (UEH), a publié quatre ouvrages sur la médecine traditionnelle en
Haïti : ''Petit guide médicinal du jardin'', Banque mondiale (1997); ''Plantes
médicinales d'Haïti : description, usages et propriétés'', Regain (1998)
(réédité en 2014 par les Éditions de l'Université d'État d'Haïti) ; ''La
médecine traditionnelle familiale en Haïti : Enquête ethnobotanique dans la zone
métropolitaine de Port-au-Prince'', Éditions de l'université d'État d'Haïti
(2008) ; ''Diabète et hypertension artérielle : Remèdes familiaux dans la région
de Port-au-Prince'', Éditions de l'Université d'État d'Haïti, (2012).
Rhum Barbancourt |
Marilise
Neptune Rouzier a publié avec Lise-Marie Déjean dans la Revue Perspectives Haïti
(vol. 1, no 3, décembre 2012) un article intitulé : «Médecine familiale, point
de jonction de la médecine traditionnelle et de la médecine conventionnelle ».
Elle a également codirigé avec le Dr Nancy Larco Noël le projet « Diabète et
hypertension artérielle : traitements familiaux dans la région de
Port-au-Prince ». Il convient de noter également les trois tomes de « Santé et
vitalité par les plantes médicinales » du Dr Berthony Jean-Charles. Feu agronome
François Séverin a, de son côté, publié « Plant ak Pyebwa tè d’Ayiti », qui est
d’une grande importance, sans oublier les travaux de Jean-Claude Delbeau a
publié en 1990 « Société, culture et médecine populaire traditionnelle».
Le
texte le plus ancien semble être celui de Baker, H. D. et Dardeau, W.
intitulé « Flore d’Haïti » paru en 1930 sous le patronage du Service technique
du département de l’Agriculture et de l’Enseignement professionnel. À cette
époque, il semble que l’État était beaucoup plus intéressé par cette
problématique. Il ne reste qu’à approfondir ces travaux en établissant la preuve
scientifique de l’efficacité des recettes traditionnelles et de proposer la
posologie appropriée pour chacune des recettes. On compte déjà au ministère de
la Santé publique et de la Population (MSPP) une Direction de la pharmacie, du
médicament et de la médecine traditionnelle (DPM/MT). Malheureusement cette
dernière composante y est très peu développée.
La
médecine traditionnelle prend de plus en plus d’ampleur à travers le monde. Elle
est très évoluée à Cuba, en Chine, au Japon et dans plein d’autres pays. Dans
les pays développés, elle gagne du terrain. Au Canada, à Montréal par exemple,
il existe des magasins spécialisés où l’on peut consulter un spécialiste de
plantes médicinales. À l’achat, il vous recommandera le dosage approprié. Il
s’agit là d’une fenêtre d’opportunités qui pourraient s’offrir en Haïti. Le pays
pourrait offrir des traitements à base de plantes à différentes maladies
chroniques au reste du monde. Il pourrait se faire une renommée internationale
dans ce domaine avec des retombées économiques significatives.
Par :Thomas
Lalime thomaslalime@yahoo.fr
Illustrations :HCC
Illustrations :HCC
ONE WORD: HOGWASH...
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