Le retour au bercail des prisonniers expulsés par les USA |
Par Max Dorismond
La Covid-19 frappe durement.
Les États-Unis en profitent pour remettre à leurs parents les délinquants
notoires, qui croupissaient dans leurs prisons depuis des lustres. Bonsoir et
bon baiser de l’Oncle Sam! Bonjour tristesse, via ces colis
encombrants, pour les pays destinataires!
C’est ainsi que, chez
nous, on en reçoit à chaque quinzaine. Les aéronefs de la compagnie Swift Air, nolisés
par ICE, (Immigration and Customs Enforcement), pour la circonstance, les débarquent, à qui mieux mieux sur le sol
d’Haïti, sans autre forme de procès. Quand on se raffole de piment, les pépins
viennent toujours avec. Tant pis pour la langue gourmande!
Voyons de plus près! En premier
signe de respect pour certains de ces personnages hauts en couleur, covid-19
oblige, ils sont logés dans des hôtels cinq étoiles. Une marque distinctive
d’appréciation qui les dotera d’ailes et d’audace, tout en leur conférant une
certaine notoriété.
Ériger le pont en jouant
sur les thématiques polarisantes de la société.
À voir ces caravanes
morbides traverser sans sirène les rues de la capitale, j’ai le triste
pressentiment qu’un de ces quatre, un de ces tristes revenants ira jusqu’à
nourrir le désir secret, tout à fait singulier, de parvenir au timon des affaires
du pays.
À beau mentir qui vient de
loin, dit l’adage, même si ce lointain se trouve à une heure de vol de Port-au-Prince,
les réseaux sociaux ne chôment point. Ils s’acharnent à dessiner le plumage de tous
ces oiseaux de mauvais augure, sans aucune réserve et avec beaucoup
d’appréhension. Mais, après cette quarantaine providentielle, le rêveur
impénitent, habitué à pédaler avec le vent dans la face, s’active, sans
scrupules, à tâter le terrain, à évaluer toutes les possibilités sur le parcours
des éventuelles étapes d’une carrière présidentielle en gestation.
Des prédécesseurs avaient
déjà fait école et balisé le sentier. On les retrouve aujourd’hui, surtout à la
Chambre des Députés, au Sénat et dans certaines directions administratives,
mais pas encore à la présidence. Or, dans l’histoire de la Nation, que nous
avions bien étudiée au secondaire, le Procès de la Consolidation1 sous Nord Alexis, du 20 mars 1903 au
25 décembre 1904, mettait en scène trois célèbres « consolidards »
qui avaient connu la prison pour escroquerie. Ils se sont retrouvés, quelques
années plus tard, dans le fauteuil présidentiel. Citons, entre autres, les
sieurs Cincinatus Leconte, Tancrède Auguste et Vilbrun Guillaume-Sam. Donc, la
nation a déjà roulé à contre-courant, avec des souvenirs électrisants et
motivants. Par conséquent, le Rubicon ne sera aucunement difficile à
franchir. Ce sera un jeu d’enfants, teinté d’une espèce d’optimisme rayonnant.
Haïti, l’île de toutes les
opportunités, pays laxiste où le mot « impossible » ne figure
nullement dans le dictionnaire, lui ouvre tout grands ses bras. Revenant de la
prison des États-Unis où, par la grâce du temps, il a maîtrisé quelques facettes
de la langue de Shakespeare, à titre d’unique conquête, il n’hésitera point à
s’en servir pour impressionner ses interlocuteurs, en introduisant de temps à
autre, un zeste d’anglais mâtiné de « slang » des bas-fonds de New York.
Il est le maître qui harangue, pour le moment, la foule d’une audience
imaginaire, pour contrer les mauvaises langues, qui doutent de sa culture et de
sa formation. Engoncé dans des costumes hors climat, il se dédie au jeu
prédestiné, en se délectant, avec une assurance gauche, dans un rôle de chef
suprême : voix grave et nasillarde, pas trop éclatante, au point que
l’interlocuteur doit être toute ouïe, pour montrer son intérêt aux propos du
maître de céans.
Comédien dans l’âme, et
connaissant déjà l’élasticité morale de ses congénères pour le pouvoir et
l’argent, il ne lésine point avec le ballon pour laisser deviner à ses hôtes les
promesses des fleurs, aux fins de s’assurer de leur allégeance, le moment venu.
En posant les jalons de sa
marche vers le sommet
Le transplanté reste sur ses
gardes et épie tous les faits et gestes autour. Pour débuter, il impose le
black-out sur son passé. En second lieu, il organise ses «Baz». Les
anciens escadrons, mieux armés, sont de retour et placés en réserve de la République.
Ces « Baz2 » constitueront
au début, les messagers qui apporteront l’offre
finale qu’on ne pourra guère refuser : « Plomo o plata3 », le plomb ou l’argent.
Ce sera à vous de choisir. Cette force de frappe sera le fer de lance du clan.
Dans les médias, nul n’aura
le droit de parler du passé criminel de ce distingué sire, ni ne mentionnera
son séjour dans les geôles de l’Oncle Sam. Vous aurez deux choix : celui
de fermer votre gueule et votre ordinateur, ou d’écrire des textes de
complaisance, en racontant dans vos colonnes des mensonges à blanchir le
diable. Vos émissions ou vos articles seront vides de sens, cousus de fil blanc
et humidifiés à l’eau de rose.
Et le temps passe et
repasse… Aucun juge n’oserait perpétuer ou prolonger le jugement américain,
pour lui mettre le grappin dessus et le placer à l’endroit précis où il devrait
être. Aucun n’oserait, voyons donc! Sinon, le procès des Petro-Cari-beurres
serait déjà entamé. Haïti étant ce qu’elle est, notre poulain a déjà vite
compris qu’il a obtenu le feu vert et que les portes de l’enfer ne prévaudront
jamais contre lui.
Et le temps va, tout s’en
va! La jeunesse innocente et puérile va rentrer dans la danse. Notre virtuel
candidat sera invité, à titre de commanditaire, à parrainer les distributions
de diplômes des Universités connues, à couper les rubans lors des premières
pour des œuvres inaugurales…etc. Entretemps, le peuple sans mémoire chante et
danse, au rythme des vaccines, les prouesses inventées de ce Messie ressuscité
que « le pays attendait ». Situation que je peux définir, par
cette allégorie, comme l’écrit Shaul Tchernichovsky4, dans un très beau poème : l’homme
est « l’empreinte du paysage de sa naissance ».
Ainsi va la vie chez nous!
Rien n’a changé et rien ne changera sous le ciel d’Haïti, qui sera toujours,
toujours bleu. Toutefois, permettez que je ferme la parenthèse avec cette diatribe
du célèbre panafricaniste et activiste, Kémi Seba5 : « Quand on marche avec le
diable, on finit toujours enchaîné »
Bienvenue futur dictateur!
La tradition continue!
Max Dorismond
NOTE
1 – Procès de la consolidation : Réf. : « Le coin
de l’histoire » de Charles Dupuis.
2 – Baz : Expression créole : « clan, gang,
équipe, base » le plus souvent à caractère délétère.
3 – Plomo o Plata : Expression de menaces consacrée par
Pablo Escobar un célèbre
trafiquant colombien de cocaïne à la tête du
cartel de Medellin durant les années 80.
4 – Shaul Tchernichovsky : Poète russe composant en langue
hébraïque. Il est considéré comme
l’un des grands poètes de l’hébreu. Il
avait immigré en Palestine en 1931. Il a été fortement
influencé par la culture de la Grèce
antique.
5 – Kémi Séba : Militant panafricaniste qui lutte pour une
Afrique-Unie. C’est un activiste
anticolonialiste et essayiste. Né à
Strasbourg, en France, il est considéré comme un
suprémaciste noir. Débatteur
électrisant, il n’a pas sa langue dans sa poche. Il a déjà voyagé
deux fois en Haïti.
oui .. depuis DES MOTS pour nous consoler , viennent de plus en plus des reflexions . certaines plus profondes que les autres pour nous reveiller de la letargie de la consolation . mais ou est la SOLUTION DANS L ACTION ( VITA ES IN MOTU ) les examples vivant sont d un autre pouvoir sinon on continuera a bruler de plus de feux que l on allumera ,
ReplyDeleteJn Le Capitaine
Texte bien étoffé, tres exressif, d une lecture fluide et informative. C est le genre d écriture qu il nous faut ces jours-ci pour démeler nos écheveaux et comprendre que meme si la barriere a été déclarée fermée, les chevaux rouges l ont déja franchie aux frais de la République étoilée. En attendant les SÉLECTIONS.
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