De Barack Obama à George W.
Bush, en passant par sa fille Meghan, les hommages au défunt sénateur
républicain ont sonné comme un désaveu en creux de l’Amérique de Donald Trump.
John McCain
l’avait voulu ainsi. Atteint par un mal qu’il savait incurable, le sénateur
républicain de l’Arizona, décédé le 25 août, candidat malheureux à
l’investiture républicaine de 2000, puis à l’élection présidentielle de 2008,
avait souhaité que ses adversaires d’alors, George W. Bush et Barack Obama, se
chargent d’un hommage qui transcende les tranchées partisanes et rappelle les
Etats-Unis à leurs valeurs.
La famille du sénateur John McCain devant la cathédrale
lors de l'arrivée de la dépouille mortelle . |
Alors que le pays
est la proie de divisions fiévreusement attisées par le locataire de la Maison
Blanche, la cérémonie de samedi s’est transformée en défense vibrante de « l’Amérique
de John McCain » qui, selon la fille du disparu, Meghan
McCain, « n’a pas besoin d’être grande à nouveau », le
slogan de campagne du milliardaire en 2016, « parce qu’elle
l’a toujours été ». Une tirade accueillie par des
applaudissements, rares en pareille circonstance.
Son prédécesseur
républicain George W. Bush (2000-2008), opposé à M. McCain lors de la primaire
de 2000, a quant à lui rappelé qu’il «
reconnaissait toujours que ses opposants étaient malgré tout des patriotes et
des êtres humains ». « Il aimait la liberté avec la passion
d’un homme qui a connu son absence », a-t-il poursuivi, en référence à la captivité de l’ancien
pilote de chasse au Vietnam. Sur le chemin de la cathédrale, le cortège funèbre
a fait halte brièvement au Monument aux anciens combattants du Vietnam, où sa
veuve, Cindy McCain, a déposé une gerbe à la mémoire des soldats tombés durant
la guerre.
Donald
Trump était donc le grand absent du jour à la cathédrale de Washington. Il a
dépêché à la cérémonie son plus proche collaborateur, le général John Kelly,
ainsi que son ministre de la défense, Jim Mattis, et son conseiller à la
sécurité nationale, John Bolton. Pendant la cérémonie, il a joué au golf dans
l’un de ses clubs, avant de multiplier les tweets sans aucun rapport avec
le sénateur.
L’ancien sénateur et ancien pilote de chasse sera inhumé dimanche lors d’une cérémonie privée à l’Académie navale d’Annapolis, non loin de Washington, dont il fut dans les années 1950 un élève turbulent et indiscipliné, se signalant déjà par son anticonformisme et son franc-parler.
Obama incisif
Assurant que son
père lui avait conseillé de montrer combien elle était « forte »au
moment de s’exprimer depuis la chaire de la cathédrale de Washington, elle
s’est montrée encore plus limpide. « Nous sommes réunis ici pour
pleurer la grandeur de l’Amérique, pas la rhétorique bon marché d’hommes qui ne
s’approcheront jamais du sacrifice qu’il a volontairement donné, ni son
appropriation opportuniste par ceux qui vivaient dans le confort et les
privilèges », a-t-elle dit, rapprochant le sort de l’ancien
prisonnier de guerre au Vietnam (McCain) de celui qui avait évité à cette
époque la conscription (Trump) avant de dénier à John McCain le statut de héros
pendant sa campagne présidentielle en 2016.
L'ancien président américain Barack Obama rend hommage à son adversaire de 2008 lors de la cérémonie funéraire. |
Ni Trump ni Palin
La
semaine d’hommages à John McCain suit un ordonnancement qu’il avait lui-même
décidé. Mort le samedi 25 août à 81 ans dans son Etat de l’Arizona, après une
année de combat contre un cancer du cerveau, il avait fait savoir qu’il ne
souhaitait pas que Donald Trump assistât à ses obsèques. Pas plus que Sarah
Palin, sa colistière de l’élection présidentielle perdue de 2008, dont il écrit
dans le dernier tome de ses Mémoire regretter le choix.
Aux
yeux de ses amis, républicains comme démocrates, John McCain incarnait une
tradition politique radicalement opposée à celle de Donald Trump. « Héros
américain », fils et petit-fils d’amiraux, il fut prisonnier et
torturé pendant la guerre du Vietnam, avant d’entamer une carrière de
trente-cinq ans au Congrès.
« L’Amérique de John McCain n’a pas besoin
de retrouver sa grandeur »
Meghan McCain lors de son éloge à la cathédrale |
Dans
son discours d’hommage à son père, Meghan McCain n’a pas mâché ses mots envers
ceux qui l’avaient critiqué, visant en creux l’actuel locataire de la Maison
Blanche : « Nous sommes rassemblés pour célébrer la mort
de la grandeur américaine, la vraie, et non pas la rhétorique bon marché de
ceux qui ne s’approcheront jamais du sacrifice auquel [John McCain] a
consenti. » « L’Amérique de John McCain n’a pas besoin de retrouver
sa grandeur car l’Amérique est toujours grande », a-t-elle ajoutée, en
référence au slogan trumpien « Make America Great Again »
(« rendre à l’Amérique sa grandeur »).
L’hommage de 10 000 personnes
L’ancien
secrétaire d’Etat Henry Kissinger, 94 ans, ainsi que des amis parlementaires
de John McCain, se sont également exprimés lors de cette cérémonie organisée à
la cathédrale de Washington, qui est à la fois le siège du diocèse épiscopalien
et l’un des plus grands édifices religieux du pays. Parmi les porteurs du
cercueil de John McCain, grand critique du régime de Vladimir Poutine, figurait
aussi l’historien et dissident russe Vladimir Kara-Murza.
Meghan McCain délivrant son hommage à la Cathédrale de Washington
Vendredi, plus de 10 000 personnes étaient venues
s’incliner devant sa dépouille lors d’une première cérémonie d’hommages au
Capitole, marquée par la présence, digne et stoïque, de sa mère Roberta McCain,
106 ans, au côté de sa veuve Cindy McCain, et de leurs sept enfants.
L’ancien sénateur et ancien pilote de chasse sera inhumé dimanche lors d’une cérémonie privée à l’Académie navale d’Annapolis, non loin de Washington, dont il fut dans les années 1950 un élève turbulent et indiscipliné, se signalant déjà par son anticonformisme et son franc-parler.
Sources combinées:
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