Judge Brett Kavanaugh, Dr. Christine Blasey Ford |
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tout en prenant lecture de l’article, cliquez sur le player sound cloud ci dessous:
Par:Herve Gilbert
Ce jeudi 27 septembre, durant l’audience du Comité
judiciaire du Sénat américain, le public a vu deux témoignages télévisés qui
ont été à la fois surprenants, émouvants, instructifs et bouleversants. C’est
une affaire qui continue de déchaîner les passions aux États-Unis. Quoi qu’il
en soit, cette audience du Comité judiciaire a été décrite par les journalistes
américains comme un grand moment historique. L’ affaire implique
Brett Kavanaugh, protégé de Donald Trump et candidat à la Cour suprême des
États--Unis, accusé par Christine Blasey Ford, d'agression sexuelle,
d'exhibitionnisme et de tentative de viol alors qu'elle avait seulement 15 ans.
Christine Blasey Ford |
Oscillant entre retenue et émotion, Christine Blasey Ford
a, pendant plus de quatre heures, raconté avec certains détails la
présumée agression sexuelle perpétrée , il y a 36 ans (en 1982),
par Brett
Kavanaugh, actuel candidat à la Cour suprême des États-Unis. Ce
dernier «l’avait prise par surprise» et avait essayé de la déshabiller,
a-t-elle relaté. Au cours de sa réplique, Kavanaugh s’est lançé dans une
volée verbale pathétique et violente, niant en bloc les allégations de Mme Ford
tout en qualifiant le processus de "cirque" et de "honte
nationale", sans manquer de s’en prendre aux sénateurs du Parti
démocrate qu’il a accusés de vouloir détruire sa réputation à travers un complot
calculé, en guise de vengeance pour les Clinton et aussi pour la perte des
élections de 2016.
Juge Brett Kavanaugh lors de son témoi- gnage devant le Comité judiciaire. |
Cette procédure dans un premier temps a eu des
retombées différentes de part et d'autre des mouvances politiques : les
supporters de Ford ont qualifié son témoignage de crédible et un nombre
important de femmes du pays avaient été touchées par le caractère poignant de
son témoignage. Quant aux supporters de Kavanaugh,
ils ont jugé que son intervention, quoique perçue comme défiante ou
belliqueuse, a réflété une colère juste face aux allégations de
l’accusatrice.
En résumé, on peut déduire que c'étaient deux dépositions
totalement contradictoires où Christine, d'une part, a déclaré être
à «100 % sûre » que Brett est celui qui l'a agressée, tandis que ce
dernier, d’autre part, a nié toute participation à cette tentative de
viol.
Sénateur Jeff Flake aprés avoir été confronté par les deux femmes. |
En effet, le sénateur républicain de l’Arizona
Jeff Flake, qui avait annoncé son intention de soutenir la candidature de Brett
Kavanaugh, a alors effectué un revirement complètement inattendu. L’un des
ascenseurs conduisant à la salle d’audience qu’avait pris Flake ne pouvait pas
se refermer. Car la porte était bloquée par deux jeunes femmes
qui ont interpellé le sénateur républicain sans ménagement pendant que les
caméras enregistraient la scène :
« Et la première femme, Ana Maria Archila, de
dire: Lundi, je suis allée à votre bureau. Je vous ai relaté l’histoire de
mon agression sexuelle. Ce que vous faites va permettre à quelqu’un qui a
effectivement violé une femme de siéger à la Cour suprême. Ce n’est pas
tolérable. Vous avez des enfants. Pensez à eux. »
Voir la video des deux femmes émues et larmoyantes confrontant le sénateur Flake dans l'ascenseur.
«Ne détournez pas votre regard, enchaîne la seconde,
Maria Gallagher, qui fait allusion à la position ambiguë de Brett Kavanaugh sur
l’avortement. Regardez-moi et dites-moi que ce qui m’est arrivé n’a pas
d’importance, que vous laisserez des gens comme cet homme entrer dans la plus
haute cour de justice du pays et dicter à tous les gens ce qu’ils doivent faire
de leur corps.» Perturbé, Sénateur Flake a écouté dans le plus grand silence.
Nul ne pouvait supposer le poids qu’allaient avoir ces
deux interventions. Mais quelques instants plus tard, avec l’aide de son
collègue démocrate Chris Coons (Delaware), le sénateur déclenchait un véritable
coup de théâtre. En échange de la promesse de son vote, il a obtenu un
sursis d’une semaine pour une enquête du FBI, enquête que les démocrates
demandaient en vain. La veille, en séance publique, Jeff Flake avait déjà
longuement fait état du malaise suscité par la procédure de confirmation,
invitant ses pairs à manifester du respect à la fois pour la personnalité de
l’accusatrice Christine Blasey Ford et celle de Brett Kavanagh. Alors que le
camp républicain se portait au secours de Brett Kavanaugh qui stigmatisant les
questions des démocrates qu’il a qualifiés de comploteurs, Jeff Flake se
contentait de déplorer à nouveau le climat de guerre civile qui déchirait le
tissu social du pays. Ce sénateur de l’Arizona, un des rares élus républicains
à exprimer son désaccord avec Donald Trump, quittera bientôt le Sénat. Prenant
acte du divorce avec les électeurs devenus des inconditionnels du président, il
a renoncé à se présenter à nouveau comme sénateur en novembre prochain. Son
initiative de vendredi sera peut-être l’un de ses derniers gestes de
parlementaire. Elle peut tout aussi bien conforter Brett Kavanaugh si le FBI se
révèle incapable de dire qui de l’accusé ou de l’accusatrice a dit la vérité
que mettre un terme aux ambitions du juge si la police fédérale raffermit la
thèse de Christine Blasey Ford. Dans les deux cas, Jeff Flake aura le sentiment
d’avoir accompli son devoir de parlementaire.
De toute façon, tout peut se résumer à une formalité pour
le Sénat dans une semaine, puisque le vote procédural de la commission
judiciaire sénatoriale a déjà été pris pour la poursuite de la nomination
de Kavanaugh devant tout le sénat. Et cela, après que la demande d’investigation
du FBI faite par le sénateur Flake ait été acceptée par le Comité judiciaire et
approuvée par le président Trump en fin de soirée.
Cette controverse sur la confirmation du juge
Kavanagh à la Cour suprême pèsera certainement très lourd sur les
élections de mi-mandat prévues pour le mois de novembre 2018.
Pour renchérir sur le commentaire de notre
fidèle lecteur (Eddy Cavé ) du Canada que nous venons juste de lire, nous
dirions pour conclure que l’affaire Kavanaugh-Ford a en quelque sorte tiré la
sonnette d’alarme (wake -up call) aux votants - surtout les jeunes et les
minorités- qui doivent prendre conscience que toute élection aux États-Unis a
des conséquences majeures et que chacun de leurs votes est important voire
nécessaire à leur participation de loin ou de près aux décisions
politiques de leur gouvernement, comme par exemple le choix d’un juge à la Cour
suprême, ont rappelé en ces moments chauds les analystes politiques et autres
personnalités comme Michelle Obama. En fait, l’ex-première Dame est en
train de se rendre de ville en ville afin d’encourager l’enregistrement de
futurs votants pour les élections de mi-mandat du 6 novembre 2018.
Herve Gilbert herve.gilbert@gmail.com
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