Le président américain Donald Trump lors de son premier discours de politique générale devant le Congrès, au Capitole à Washington, le 28 février 2017. |
Plus présidentiel que
jamais, Donald Trump a tenté de livrer mardi soir devant le Congrès un message
d’espoir et d’optimisme. Sans pour autant lever les inquiétudes et
l’imprécision autour de son agenda politique.
1) Son meilleur
discours
«J’ai le
sentiment que ce soir, Donald Trump est devenu président des Etats-Unis». La
réaction de Chris Wallace, l’une des figures de la chaîne conservatrice Fox
News, quelques minutes après le discours du président, illustre la performance
réalisée par ce dernier devant le Congrès. Républicains comme démocrates,
Donald Trump a pour une fois mis tout le monde d’accord : ce discours est
sans conteste le meilleur de sa présidence. Sans doute aussi le meilleur depuis
son entrée dans la course à la Maison Blanche, il y a près de deux ans.
Melania Trump, la première dame des Etats-Unis |
Yvanka et son époux Jared Kushner |
2) Main tendue… sans succès
A plusieurs reprises, Donald Trump a tendu la main vers les élus
démocrates. «Pourquoi
ne pas joindre nos forces ? Démocrates et républicains devraient travailler
ensemble et s’unir pour le bien de notre pays, et pour le bien du peuple
américain», a-t-il lancé. «Le temps des combats futiles est derrière nous», a-t-il
ajouté un peu plus tard, dans une volonté de rassembler une nation profondément
divisée, notamment sur sa personne. Dans la salle, les démocrates lui ont
pourtant réservé un accueil glacial.
A quelques rares exceptions près, les élus du parti d’opposition
sont restés assis, visages fermés, bras croisés, pendant que l’autre moitié de
l’hémicycle, occupée par les élus républicains, applaudissait à tout rompre.
Pour marquer leur désaccord profond avec le président, une quarantaine d’élues
démocrates étaient vêtues de blanc, couleur symbolisant la défense des droits
des femmes. Dans un ultime désaveu, la plupart des démocrates ont quitté les
bancs du Congrès sans applaudir aussitôt après la fin du discours, laissant les
républicains offrir au président une dernière «standing ovation». Cette rupture
avec la tradition, symbole de la profondeur des divisions, n’a pas échappé à
Donald Trump.
3) Un moment poignant
Cela restera comme le moment fort de ce discours, le seul où
démocrates et républicains ont affiché leur unité. Comme le veut le tradition,
le président avait invité plusieurs personnes à assister à son discours. Parmi
elles : Carry Owens, la veuve de Ryan Owens, soldat des forces spéciales
tué fin janvier dans une opération américaine contre Al-Qaïda au Yémen. «Ryan est
mort comme il a vécu : un guerrier et un héros, combattant le terrorisme
et protégeant notre nation», a d’abord lancé Donald Trump. L’assistance
s’est levée pour applaudir Carry Owens, assise à la droite d’Ivanka Trump, la
fille du président.
Carryn Owens (à gauche de Yvanka Trump) |
4) Le diable se cache dans les détails
Quelques heures avant son discours, Donald Trump avait confié à
des journalistes qu’il était prêt au «compromis» sur le sujet sensible de
l’immigration. D’après CNN, le président américain aurait laissé entendre qu’il
n’était pas opposé à la régularisation d’une partie des quelques onze millions
de personnes vivant aux Etats-Unis en situation irrégulière. Cette apparente
inflexion politique avait été accueillie avec scepticisme par les démocrates,
avec attention par les républicains modérés et avec une certaine consternation
chez les plus conservateurs, catégoriquement opposés à toute régularisation.
Ceux qui espéraient des détails lors du discours au Congrès ont
été déçus. Certes, Donald Trump a esquissé les contours d’un système
d’immigration «basé sur
le mérite», prenant l’exemple du Canada et de l’Australie. Les Etats-Unis
doivent «abandonner
le système actuel d’une immigration peu-qualifiée», a-t-il
lancé. Certes, il a dit croire qu’une «réelle réforme positive de l’immigration» était
possible, à condition de se concentrer sur l’emploi des Américains, la sécurité
et le respect des lois. Confiant, il a même appelé démocrates et républicains à
«travailler
ensemble» sur ce sujet. L’hypothèse semble toutefois très peu probable.
Et hormis ses promesses répétées de construire «un grand mur» avec le
Mexique et d’expulser les «membres
de gangs, les trafiquants de drogue et les criminels», il a été
plutôt avare en détails.
Pour le reste, Donald Trump a réitéré ses engagements de
campagne : remplacer Obamacare par quelque chose de «moins
cher» et «meilleur», réduire massivement les impôts, renforcer
l’armée, éradiquer l’Etat islamique, investir 1000 milliards de dollars dans un
vaste plan de rénovation des infrastructures. Tout cela a un coût et sur la
question du financement, Donald Trump est toujours resté discret. La bataille
s’annonce rude avec un Congrès républicain largement allergique à la dépense
publique.
5) Rassurer les alliés
Donald Trump a peu parlé de politique étrangère. Mais il a
prévenu : sur la scène diplomatique, aussi, ce sera l’Amérique d’abord. «Mon
travail, ce n’est pas de représenter le monde. Mon travail, c’est de
représenter les Etats-Unis d’Amérique». Une phrase sortie tout droit du
manuel nationaliste et protectionniste de son conseiller Steve Bannon. Alors
qu’il avait qualifié l’Otan «d’obsolète», loué le Brexit et prédit la désintégration
de l’Union européenne, Donald Trump a cherché à rassurer. «Nous
soutenons fortement l’Otan», a-t-il dit, tout en répétant que les alliés
des Etats-Unis «au sein
de l’Otan, au Moyen-Orient ou dans le Pacifique» devaient
«remplir
leurs obligations financières» et «payer leur juste part du coût» des opérations
militaires.
Après avoir soufflé le chaud et le froid ces derniers mois,
critiquant l’interventionnisme militaire américain tout en s’entourant de
militaires et en proposant une hausse historique de près de 10% du budget du
Pentagone, Donald Trump a tenu à répéter qu’il n’était pas belliciste. «Nous
savons que l’Amérique se porte mieux lorsqu’il y a moins de conflits», a-t-il
insisté. «L’Amérique
est disposée à trouver de nouveaux amis, à forger de nouveaux partenariats,
lorsque nos intérêts partagés s’alignent. Nous voulons l’harmonie et la
stabilité, pas la guerre et le conflit. Nous voulons la paix, partout où elle
peut être trouvée», a conclu Donald Trump.
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