Discours d'Etzer Vilaire à la mémoire des héros de l'Indépendance, de Charlemagne Péralte... 

Tuesday, November 6, 2018

À la rencontre de Shango

La version audible est disponible en cliquant sur lien suivant: 

Par Jacques Casimir (Pasteur D"Amoulio)                                                                              

Shango 
(peint par Camila Santo)
Avant-propos : celui qui est né aveugle n'a jamais vu la lune, cela ne veut pas dire que la lune n'existe pas. Le philosophe chinois Lao Tseu, eut à dire ceci au VIe siècle avant J-C : « L'homme n'est pas le seul animal qui pense, il est le seul qui pense qu'il n'est pas un animal.» Ces paroles furent reprises plus-tard par les philosophes européens. Après avoir publié le cours le maître des eaux en deux parties, nous avons reçu beaucoup de questions à connotations mystiques et religieuses. À tous ces lecteurs vaudouïsants et croyants de toutes sortes qui nous écrivent, il faut contacter les hommes d'église, les prophètes et les religieux de tout acabit pour répondre à vos questions. Le travail de l'historien conséquent est de révéler les faits et de faire tomber des mythes avec des preuves valables et vérifiables basées sur des documents et des archives historiques à l'appui. Notre travail n'est pas religieux, notre démarche est historique.

Nous allons en pays Shango pour comprendre nos traditions, pour savoir qui nous sommes pour pouvoir nous relever et regarder vers l’avenir avec assurance et espoir. Aucun homme ne peut avoir confiance en lui-même et se considérer comme acteur de son histoire et du développement de son pays s’il ne se reconnaît pas dans sa culture, s’il n’est pas fier de son identité. 

L'historien et Ancien ministre de l'instruction publique, Beaubrun Ardouin, Disait ceci :« L'avenir des peuples dépend souvent de la manière dont on présente leur passé » Les étrangers qui ont écrit notre histoire diabolisent nos proverbes, et ils ont tout essayé pour nous faire rejeter notre mémoire. Si les mots ont un sens, l'historien conséquent se doit de remonter le temps, aller à la source de nos adages, pour apporter une nouvelle vision des choses, pour qu'enfin le passé puisse éclairer l'avenir.
En créole haïtien nous répétons depuis des siècles cette citation sans vraiment savoir l’origine de ce que nous disons :« Si ou manje lajan shango, wap peye shango .» Traduction (si tu prends ou tu voles l'argent de shango tu le paieras avec les conséquences). On finit toujours par payer shango.

D’où vient le mot Shango? 
Shango, est connu en Afrique comme le dieu du tonnerre et de la foudre, principalement chez les Yoruba du Nigeria et dans tout le Bénin. Il est représenté avec le symbole de la double  hache qui indique que la vie est toujours à double tranchants. Il n'y a pas un homme qui ne craint pas la foudre, surtout quand le tonnerre gronde. Il faut dire qu'il y a presque autant d'histoires distinctes concernant la naissance et la filiation de Shango qu'il y a de clans de la tribu Yoruba.

Le grand voyageur et géographe tangérois Ibn Battuta, séjourne au Mali en 1352-1353, il visite Tombouctou, et laisse une passionnante description de son périple. Il note les progrès et les techniques de navigation enseignés à l'Université de Tombouctou, l'organisation sociale et juridique et l'effort mis sur l'alphabétisation du peuple, pour pouvoir lire le livre saint, le Coran. D'autres documents plus anciens retrouvés à Tombouctou parlent de Shango, le percepteur de taxes de son Excellence, sa Majesté Aboubakar Bakari Empereur du Mali, qui avait toujours le dernier mot et les moyens pour faire payer les citoyens l'impôt dû à l'empire. Comment s'y prenait-il ? Ce document n'explique pas son modus opérande. Le prélèvement des taxes de l'empire du Mali était une mesure sociale pour la redistribution des richesses. Dans les périodes de bonne récolte, une partie des taxes prélevées aux plus riche était redistribuée aux plus pauvres. Dans les années de mauvaises récolte,une partie des taxes prélevées était donnée aux agriculteurs pour compenser leur manque à gagner. C'est le premier système de couverture sociale connu plusieurs siècles avant l'émancipation de l'occident *

L'historien d'origine syrienne, Shihab al-Din al-Umari,1300-1349, après Mahomet, nous apporte cette réponse dans ses écrits, il raconte ceci :« les chefs traditionels s'assuraient que tout le monde paie au village, pour que Shango puisse percevoir les impôts. Il inspirait la crainte et la peur.» Est ce que c'est pour cela que son nom n’apparaît pas dans la tradition Orale des griots du Mali ? Mais seulement dans les archives anciennes de Tombouctou conservées encore aujourd'hui et écrits en langue arabe. Le grand voyageur, chroniqueur, historien et géographe du Xe siècle, Ibn Hawqal, lui aussi décrit l'organisation sociale de l'Empire du Mali et sa brillante façon de percevoir les impôts sans faire allusion à Shango, à une époque où l'Empire du Mali avec sa longue frontière avec l'Algérie faisait parti du Maghreb. **

Shango, Xangô, Sango, Sangoma: dépendant de l'endroit en Afrique où vous vous situez, ces mots ont en apparence des significations différentes pour finalement tous converger vers le divin. Sangoma: en Afrique du Sud, ce mot veut dire l'autorité religieuse, le guérisseur, celui qui soigne les maladies physiques et spirituelles, le médiateur, l'autorité dans les villages.

Voici les preuves qui démontrent l'importance des Sangomas dans la société sud-africaine. La compagnie publique d'électricité Eskom, offre depuis 1997 à ses quelque 40 000 employés la possibilité de choisir entre les deux systèmes de santé et rembourse les soins chez le Sangoma. Dans les années 1970, le Sangoma Khotso Sekhuntsha, avait accumulé une fortune en vendant un médicament qui, bien avant le Viagra, prétendait renforcer le potentiel sexuel des hommes âgés. Les autorités avaient saisi la potion magique pour l'analyser, mais aucun scientifique n'avait été en mesure de déterminer la composition exacte du remède miracle. Pour beaucoup de sud-africain, il est reconnu comme le père et l'inventeur du Viagra moderne.

Le 25 mars 2017, le ministre de l'enseignement supérieur de l'Afrique du Sud, Blade Nzimande, a annoncé l'ouverture d'une école de Sangoma pour encadrer la profession. Dans ce pays, une grande majorité de la population de toutes origines ethniques consulte régulièrement les Sangomas, pour des conseils, des traitements ou pour la divination, des fois à crédit. Selon la tradtiion, nul n'oserait avoir une dette impayé auprès d'un ou d'une Sangoma. ***

Au Congo et en langue Lingala, le mot Sango veut dire nouvelle et a toute son importance dans notre démarche. Sango nini=Quelle nouvelle   sango malamo = Bonne nouvelle Sango mabé=mauvaise nouvelle. Dans le cas qui nous intéresse, le mot sango veut dire aussi prêtre. En Haiti, sango se prononce Chango..

Quand Shango est-il arrivé en Haiti ? 
Dès le début de la traite des noirs, les esclaves étaient mal nourris et volaient énormément leurs maîtres. Comme les banques n'étaient pas choses courantes à l'époque, il fallait trouver une solution pour se prémunir du vol. Une grande partie des biens des colons étaient gardés par l'église. Déjà en Afrique, le Sango (prêtre) faisait parti de la haute hiérarchie sociale et il était aussi très respecté. Personne n'osait voler le Sango sans s'attirer les foudres de Shango, le dieu du tonnerre et la malédiction des sangos (prêtres) et depuis la nuit des temps, on répète cette phrase en langue.

Lingala :« Koyiba mbongo ya Sango te ezali bilakeli mabe.» Traduction (IL ne faut pas voler l'argent du prêtre cela porte Malheur.) C'est cette croyance qui a longtemps gardé les esclaves loin du pillage des églises pour récupérer et participer équitablement aux biens acquis par les colons par la force de leur travail.

Tout homme déraciné de force de sa terre, de sa famille, de ses repères et de ses dieux arrive dans le nouveau pays où il est soumis avec un vide, et cela, les colons l'ont très vite compris. Ils comblent cet égarement en faisant la guerre à la culture et aux croyances des esclaves, en le forçant à adopter le dieu blanc. Mais très rarement, ils incitent les déportés à conserver certaines croyances quand cela sert leurs intérêts. Pour se prémunir du vol, ils ont encouragé la croyance de Shango et plus-tard, pour piller les mines d'Haïti, ils ont encouragé la croyance dans le maître des eaux. ****

Au Brésil, il est représenté par la couleur rouge et blanche, il est associé dans la religion catholique à Saint Jean-Baptiste ou Saint-Jérôme. C'était une façon camouflée de continuer d'honorer cette divinité sous le couvert de la religion des blancs. Le chiffre sacré de Shango est  6, son symbole est le OSHE (ou hache à double tranchant), représente  aussi une justice rapide et équilibrée. Sa domination est de la sexualité masculine et la vitalité de l'homme, en général. Il est propriétaire de la Bata (3 tambours à deux têtes), ainsi que les arts de la musique, la danse et des divertissement. Shango peut également être déduite, à certains égards, comme la personnification de l'essence de la « stratégie » (à la fois logique et la passion étirée et façonnée précisément à atteindre un certain but).Shango est vénéré comme un dieu du tonnerre et des conditions météorologiques ; au brésil et dans le Candomblé Ketu (sous le nom de Xangô); comme la très puissante loa Nago Shango; à Cuba, Porto Rico et le Venezuela. Dans la Santeria de Cuba, il est l'équivalent catholique de Saint-Barbe, il est  représenté par un déguisement  traditionnel et la divinité connue sous le nom Changó. *****

L'Orisha de Trinidad et Tobago, également connue sous le nom de Shango, est une religion syncrétique antillaise originaire d'Afrique Noire et très influencée par le catholicisme romain. Ses racines se trouvent dans la religion Yoruba, tout comme le Vaudou et le Quimbois. L'Orisha de Trinidad incorpore des éléments du baptême spirituel et cette proximité entre l'Orisha et le Baptême spirituel a conduit à l'utilisation du terme « Baptiste Shango » pour désigner les membres de l'une ou de l'autre des deux religions. L'anthropologue James Houk décrit L'Orisha de Trinidad comme un « complexe religieux afro-américain », incorporant des éléments des religions ancestrales d'Afrique de l'Ouest, du christianisme  (catholicisme romain et protestantisme), de l'hindouisme, et de la Kabbale de la Trinité (une pratique ésotérique dérivant de la mystique Kabbale européenne).

En 1989, le président de Trinidad et Tobago: Arthur Napoleon Raymond Robinson, plus connu sous le Nom de A.N.R. Robinson, a invité le chef spirituel de la religion yorouba du Nigeria, fondement de la religion Orisha, à visiter Trinidad-et-Tobago, la religion Shango a gagné en reconnaissance et on assiste à une augmentation constante du nombre de ses pratiquants. 


Selon la tradition, au Nigeria, au Bénin, au Brésil, à Cuba et au Vénézuela, on invoque Shango pour demander justice, pour terrasser ses ennemis, surtout quand on n'est pas coupable, en échange des demandes de faveur à Shango, il faut faire un promesse une fois le voeu se realize  il faut tenir sa promesse, payer. Est-ce  que c'estpour cela qu'en Haiti, il est la divinité vaudou le moins invoqué ? ******

Nous venons de vous présenter une partie du parcours historique de Shango, nous n'avons pas de mise en garde- à-vous faire. On ne peut pas s'en sortir on finit toujours par le payer. SIW dwé shango wap péyé Shango .Il est impératif si tu dois à Shango, tu paies. A bon entendeur Salut !
À chaque fois que vous lancez cet avertissement vous perpétuez la tradition plusieurs fois millénaires de vos ancêtres et vous vous ancrez solidement dans votre culture, par ce que maintenant vous savez l'origine de ce que vous dites.

Si tu ne sais pas qui tu es n'importe qui peut te citer et tu obéiras à n'importe quoi. Désormais, nous savons qui nous sommes n'importe qui ne pourra plus nous citer et nous n'obéirons plus à n'importe quoi.( Parole et citation de Jacques Casimir (Pasteur D'Amoulio) Amen



Recherche No JCAS-111-310

Jacques Casimir (Pasteur D'Amoulio)

Bibliographie
* 1) Sources: ces informations se basent sur le témoignage de l'empereur Kangou Moussa. successeur de l'empereur Aboubakar Bakari en l'an 1312, recueilli par Ibn Amir Hajib au 14e Siècle, lors du célèbre pèlerinage de l'empereur Kangou Moussa en Egypte.2) RÉF: Auteur : Ibn Battuta Titre :Le Pays des Noirs (1357), Anthropos, réédité en 1969 Paris )
** 1) RÉF: Auteur Shihab al-Din al-Umari  Titre: l'encyclopédie Masalik AL-Absar ( Shihab al-Din al-Umari, historien d'origine syrienne années 1300-1349 après Mahomet (les manuscrits Arabe de la collection  Scheffer dont quelques exemplaires se trouvent à l'institut de monde arabe à Paris) 2)RÉF:  Auteur : Ibn Hawqal  Titre :l'orient et le Maghreb médieval (Le témoignage d'Ibn Hawqal sur le Maghreb et une partie de l'Afrique médiévale.

***1)Sources :Auteure Maria Malgaradis Titre :les « sorciers » sortent de l'ombre en Afrique du Sud, les guérisseurs auront le même statut que les médecins.( publication du journal Libération du 2 septembre 1998 France) 2) Sources: Recherche pharmacologique de l’hôpital Groote Shuur, afin d'étudier et de populariser les médicaments confectionnés par les Sangomas. 3) Notes (Groote Shuur, est le célèbre hôpital du Cap où a eu lieu la première greffe cardiaque réussie sur un être humain par le professeur Christian Barnard le 3 décembre 1967.  

**** 1)RÉF: Auteur Pompée Valentin de Vastey (le Baron de Vastey Titre : Le système colonial dévoilé 2)Voir ,notre cours en deux parties Titre Le maître des eaux.
*****1) RÉF:Auteur :Roger Bastide, Titre  :Les Amérique noires : les civilisations africaines dans le nouveau monde. 2) Sources Ibadan University of Nigeria (The universe of gods of Nigeria a sociological study of beliefs 1951) L'université d'Ibadan est la plus ancienne du Nigeria. 

****** 1) RÉF: Auteur: James T. Houk Titre ; Spirits, Blood and Drums : The Orisha Religion in Trinidad 2) Sources Rapport du colloque de l"Unesco. Les survivances des traditions religieuses africaines  dans les Caraïbes et en Amérique latine du 20 novembre 1985 3) Sources Visite du chef spiritual des Yoruba à Trinidad et Tobago rapportée par les journaux, Trinidad Guardian et le Tobago Pillar, avril, mai 1989.


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