Pour
célébrer la Journée internationale de la femme
PAR Eddy
Cavé eddycave@hotmail.com
La Journée internationale de la femme est pour
moi l’occasion de sortir des oubliettes de notre histoire douze femmes hors du
commun qui ont, par leur courage et leur ténacité exemplaires, contribué à
modifier le cours de notre histoire. L’occasion, aussi et surtout, de rendre
hommage à ces héroïnes de la guerre de l’Indépendance que le sexisme a presque effacées de la mémoire collective.
Je limiterai cet hommage à des extraits de mon
prochain livre intitulé Autour de la
signature de l’Acte d’indépendance d’Haïti. À l’origine, ce livre devait
porter sur la fin tragique des principaux signataires de ce document, mais, en
prenant plus intensément conscience de certaines tares de notre société, dont le
sexisme et les réflexes d’exclusion en général, j’ai décidé d’en élargir le
cadre. C’est ainsi que j’y ai ajouté la section « À bas le sexisme, vive nos
héroïnes » d’où j’ai tiré ces extraits.
1.
Zabeth, l’esclave rebelle inconnue
Le professeur Roger Petit-Frère décrit Zabeth
comme « une esclave marronne irréductible, qu’on fouette et torture après une première
fuite en marronnage, à qui on coupe une première oreille après sa seconde
sortie et qui repart encore, à qui on coupe cette fois un bras quand elle est
reprise à sa troisième fuite et qui récidive en repartant quand même une
quatrième fois pour se voir couper finalement un jarret. »
Pour le professeur Charles-André Julien, Zabeth
est « le cas individuel extrême de refus instinctif et indomptable de
l’esclavage colonial, un cas d’insoumission native…»
2. Victoria
Montou, dite Toya, morte en 1805
Victoria Montou, morte en 1805 |
Connue sous le nom de Tante Toya dans le
milieu des dépositaires de la tradition orale haïtienne, le nom Victoria Montou
figure rarement dans les écrits des historiens traditionnels. Toya serait née au
Dahomey où elle portait le nom d'Adbaraya Toya. C’est en arrivant à
Saint-Domingue qu’elle a reçu celui de Toya Montou.
Les
historiens et documentalistes contemporains s’accordent pour dire que Toya
était la mère adoptive de Dessalines et qu’elle a joué un rôle capital dans sa
formation générale et son orientation militaire. C’est elle qui lui aurait appris à manier le
couteau, le sabre et le fusil. Quand, en juin 1805, Toya tombe malade, Dessalines dira au médecin appelé
à son chevet : « Cette femme est ma tante, soignez-la comme vous
m'auriez soigné moi-même. »
Le jour
de la mort de Toya, Dessalines confie à sa femme : « Victoria est morte ! Je
n’ai maintenant que vous, vous seule près de moi, ma chère Claire ». L’héroïne
a eu droit à des funérailles nationales, et sa dépouille sera suivie de huit
grenadiers et de l’impératrice Marie-Claire Heureuse.
Sanite Bélair (1781-1802)
Sanite Belair |
Sanite
Bélair était un lieutenant de l’armée de Toussaint Louverture, mais elle est
surtout connue comme l’épouse du général Charles Bélair, neveu de Toussaint. Elle
apparaît ainsi comme une victime du
sexisme de notre société et de la jalousie des généraux créoles qui enviaient
leur sort. L’historien J.-C. Dorsainvil est allé jusqu’à affirmer que c’est
elle qui, par ambition, a poussé son mari à la sédition.
Jusque dans la mort, Sanite Bélair sera victime
du sexisme. La commission militaire qui écouta l’accusation portée contre le
couple condamna Charles à être fusillé, Sanite à être décapité. Au moment de
l’exécution, elle exhorta son mari en mourir en brave et refusa qu’on lui bande
les yeux. S’opposant de toutes ses forces à ce que les bourreaux placent son
cou sous la guillotine, Sanite obligea le commandant du peloton d’exécution à
la faire fusiller elle aussi. Sa participation aux combats et le courage
qu’elle a manifesté devant ses bourreaux et le peloton d’exécution font d’elle une des plus grandes héroïnes de
notre histoire.
4. Euphémie Daguilh
S’il fallait un
seul exemple pour illustrer le sexisme avec lequel nos historiens traitent les
femmes de cette époque, ce pourrait être celui d’Euphémie Daguilh. Présentée
comme une concubine de Dessalines qui coûtait très cher à l’État, Euphémie Daguilh a plutôt été, dès le début de sa relation avec l’empereur, une sorte de
garde-malade qui passa des nuits entières à son chevet durant une maladie
survenue aux Cayes. Selon Guerdy Préval, il s’est développé par la suite, entre les deux, une relation amoureuse qui a
emmenée Euphémie Daguilh jusqu’aux portes de Santo Domingo avec l’Empereur
durant la campagne de l’Est. On la verra alors soigner les blessés avec une
compassion et un dévouement remarquables.
Si les apôtres de Jésus ont pu faire passer Marie Madeleine
pour une ancienne prostituée jusqu’à ce que le Pape Jean-Paul II intervienne en
personne, en 1969, pour corriger les
faits, il n’y a pas lieu de s’étonner de la sévérité des jugements formulés sur
Euphémie.
5)
Marguerite Pageot
Connue sous le nom de
Madame Pageot, Marguerite Pageot est la femme qui, au péril de sa vie, a évité
à Dessalines le sort de Toussaint Louverture en octobre 1802. Madame Pageot
était, alors la servante de l’abbé Videau, attaché à la paroisse de la
Petite-Rivière de l’Artibonite. La tête du Général Dessalines avait été mise à
prix et, de concert avec cet abbé, l’adjudant général Huin l’invita à déjeuner
au presbytère pour l’emprisonner. Le scénario de l’arrestation projetée était identique
à celui de l’arrestation de Toussaint par le général Brunet.
Ignorant tout du danger qui le guette, Dessalines se rend au
rendez-vous et s’apprête à se mettre à table avec ses hôtes. Mais la servante
qui a entendu toutes les conversations décide de lui sauveur la vie. Et la
voilà qui, à force de signes et de regards chargés de sens, fait comprendre à
Dessalines qu’il va être arrêté.
Dessalines se tourne alors brusquement, prétend avoir vu une
fumée dans la montagne, saute sur son
cheval et se sauve. Se voyant perdu, il répond à l’invitation de Pétion et
passe dans le camp de l’insurrection. C’est ainsi qu’il s’engagera à fond avec
ce dernier dans la création de l’Armée indigène et la guerre de l’Indépendance.
6)
Marie Claire-Heureuse Félicité Bonheur (1758-1858)
Si, à la différence des héroïnes dont nous
venons de parler, le nom Claire Heureuse est connu de toutes et de tous, cela
ne tient ni à un rôle de combattant, ni à celui d’impératrice. Claire Heureuse
est surtout connue comme une femme de cœur dont la grande sensibilité à la
souffrance humaine a fait, selon le mot de Thomas Madiou, « la première
infirmière connue de l’histoire.» Voici comment cet historien relate la
présence de Claire-Heureuse au siège de Léogane en 1803 :
« Claire-Heureuse tira de l'angoisse, de la mort, des centaines
de vieillards, de femmes et d'enfants. Elle alluma le feu sous des trépieds
improvisés, éplucha les légumes elle-même..., on la vit déballer des caisses de
médicaments et panser, avec l'aide de ses amies de Léogane, de nombreux blessés
de guerre ».
À la mort de Dessalines, Christophe et Pétion ne firent absolument rien
pour aider l’ancienne impératrice à subvenir à ses besoins. Après l’annulation,
par le Sénat en 1807, des contrats de fermage passés entre l’État haïtien et
l’empereur, Claire Heureuse sombra dans la gêne. C’est seulement après la
révolution de 1843 qu’elle reçut une pension de 100 gourdes par mois. Elle vécut donc, jusqu’à son décès, de la
générosité des âmes charitables de son entourage.
7. Marie-Jeanne
Lamartinière
Marie-Jeanne était l’épouse de l’officier mulâtre et chef de
brigade Lamartinière avec qui elle a laissé des souvenirs impérissables à la
Crête-à-Pierrot. Durant le siège de cette place, qui a duré du 17 février au 24
mars 1802, elle a joué un rôle comparable à celui que Sanite Bélair aura dans
son sillage aux côtés du général Charles Bélair. Au sujet de sa participation aux opérations
de défense du fort assiégé, Madiou a écrit sur elles ces paragraphes qui ne
cessent de provoquer l’admiration :
« À la fois, lavandière, colporteuse, soldate
et aide de camp de son mari, le chef de brigade Lamartinière, Marie-Jeanne « venait affronter la mort sur les
remparts. Une ceinture d’acier, à laquelle était suspendu un sabre, entourait
sa taille. Sous la pluie des projectiles, elle allait d’un bout à̀ l’autre des
remparts, tantôt distribuant des cartouches, tantôt aidant à̀ charger les
canons et encourageant les combattants de la voix. Et lorsque l’action devenait
plus vive, crânement elle se précipitait au premier rang des soldats et jouait
de la carabine avec un entrain endiablé.»
Sa mémoire a été vilipendée à partir de 1957
quand le candidat à la présidence François Duvalier s’est mis à appeler des
Marie-Jeanne les plus enthousiastes de ses partisanes. Heureusement que, par la
suite, la population préféra appeler des
fiyèt lalo les miliciennes en gros
bleu qui la terrorisaient.
8) Catherine Flon
Chaque année, le nom de Catherine Flon est sur
toutes les lèvres quand vient le temps de célébrer la création du Drapeau, puis
il retombe dans l’oubli. À part quelques
articles de journaux et les beaux discours de circonstance des personnalités
politiques du jour, personne ou presque ne parle vraiment du personnage. On se
contente de souligner l’importance du geste qu’elle a posé en confectionnant le
premier drapeau du pays. Qui était-elle? Qu’est-ce qu’elle a fait d’autre par la
suite? De quoi et comment a-t- elle vécu? C’est bien triste à dire à dire. Cela
intéresse très peu de gens,
Dans ses enquêtes de terrain, le documentaliste Jacques René a
eu la confirmation que Catherine Flon était la filleule de Dessalines et de la
prêtresse Grann Gitonn. Elle était
une modeste couturière et vivait dans le quartier défavorisé de Nan Mérotte où la famille existe encore.
On ne connaît ni les dates de sa naissance et de sa mort ni le lieu de sa
sépulture. Jacques René a pourtant retrouvé au cimetière de l’Arcahaïe le
tombeau de Jacques Flon, frère de Catherine Flon.
Eddy Cavé eddycave@hotmail.com
Eddy Cavé eddycave@hotmail.com
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