Discours d'Etzer Vilaire à la mémoire des héros de l'Indépendance, de Charlemagne Péralte... 

Monday, December 30, 2024

Les figures marquantes de 2024 à travers le monde

Google Translater for Website

Click on the dropdown button to translate.

Translate this page:

You can translate the content of this page by selecting a language in the select box.

Vous pouvez traduire cet article dans la langue de votre choix dans la case de sélection

Les figures marquantes de 2024 à travers le monde
Depuis 2008, Haïti Connexion Network s’est imposé comme une référence incontournable en mettant en place une tradition annuelle visant à identifier et honorer les personnalités du monde entier qui se sont distinguées par leurs contributions remarquables dans leurs domaines respectifs. Lancée à l'origine sur notre forum Yahoo Groups, cette initiative novatrice a rapidement gagné en notoriété, inspirant d'autres médias et organismes.

Nos sélections, parfois enrichies d'analyses éditoriales, s’appuient sur les événements marquants de l’année, qu’ils soient positifs ou négatifs, et évaluent l’impact de ces figures sur la société dans son ensemble. À travers cette démarche, nous invitons chacun à forger sa propre opinion sur ces choix. Voici, selon nous, les personnalités qui ont façonné l’année 2024.


Politique :

Donald Trump

Donald Trump, ancien président des États-Unis (2016-2020) et figure controversée sur la scène politique américaine, a de nouveau marqué l’actualité internationale en remportant une victoire écrasante face à Kamala Harris lors de l’élection présidentielle de novembre 2024. Malgré ses démêlés judiciaires, incluant une condamnation pour crime fédéral, Trump a réussi à mobiliser une base électorale solide, bien que sa réélection laisse une large partie de l’électorat perplexe et profondément divisée.


La Haute Cour de Justice des États-Unis a joué un rôle déterminant dans cette élection en lui accordant une immunité judiciaire controversée. Cette décision, perçue par de nombreux observateurs comme discutable, soulève des interrogations sur l’impartialité et l’équité du système judiciaire américain, établissant un précédent préoccupant pour l’avenir de la justice dans  ce pays.


Porté par une détermination inébranlable, Donald Trump s’apprête à entamer son second mandat le 20 janvier 2025, promettant une présidence qui s’annonce déjà comme un phénomène paradoxal, accentuant les fractures au sein de la société américaine.

Bachar el-Assad

Bachar el-Assad
Le départ inattendu de Bachar el-Assad, président de la Syrie depuis 2000, marque un tournant décisif dans l’histoire contemporaine du pays. Ayant hérité du pouvoir après le décès de son père, Hafez el-Assad, qui avait dirigé la Syrie pendant trois décennies, Bachar a été contraint de quitter le pays après la capture de Damas et de son palais présidentiel par les forces rebelles

La déposition de Bachar el-Assad, suite à la capture de la capitale, marque la fin d'une dynastie autocratique qui a dominé la Syrie pendant plus de cinquante ans.

Haiti: Dominique Dupuy,

Dominique Dupuy
Dominique Dupuy, ex-ministre des Affaires étrangères du Conseil de gouvernement de Transition (CPT) – une instance de facto composée de neuf membres, marquée par de nombreuses controverses – a joué un rôle clé dans la promotion de l’image d’Haïti sur la scène internationale, malgré le fait qu’Haïti traverse l’une des crises socio-politiques les plus aiguës de son histoire.

Madame Dupuy s’est particulièrement illustrée par sa dénonciation  des  déportations massives et jugées illégales de ressortissants haïtiens en République dominicaine. Elle a également refusé de répondre favorablement à une invitation officielle des autorités dominicaines pour assister à l’investiture d’Abil Nader, une décision qui a provoqué des tensions au sein du CPT, notamment parmi ses membres affiliés à l’idéologie lavalassienne. Selon une source officielle, le président dominicain aurait même exprimé, auprès du gouvernement de facto, son souhait de voir Madame Dominique démise de ses fonctions.

Malgré son engagement nationaliste, elle n’a pas été reconduite à son poste après la révocation du gouvernement dirigé par le Premier ministre Gary Conille. Le CPT, cette hydre à neuf têtes largement rejetée par la majorité des Haïtiens, compterait, selon une enquête menée par la Direction de la Police Judiciaire (DPJ), plusieurs membres impliqués dans des affaires de corruption, ce qui a amplifié les critiques à son encontre.

Sport :

Simone Biles
Simone Biles : La gymnaste américaine a réalisé un retour triomphal aux Jeux olympiques de Paris 2024, remportant plusieurs médailles et consolidant son statut de légende de la gymnastique. 
Armand Duplantis
Armand Duplantis : Athlète suédois, il a battu le record du monde de saut à la perche lors des Jeux olympiques de Paris 2024, confirmant sa domination dans la discipline. 

Faith Kipyegon
Faith Kipyegon : Coureuse kényane, elle a remporté son troisième titre olympique consécutif au 1500 mètres, marquant l'histoire de l'athlétisme. 
En 2024, plusieurs personnalités haïtiennes se sont distinguées par leurs actions et leur engagement, tant sur la scène nationale qu'internationale. Voici quelques-unes de ces figures marquantes

Philippe-A Metellu

Philippe-Abel Metellus : Judoka de 34 ans, il a porté le drapeau haïtien aux Jeux Olympiques de Paris 2024, après avoir remporté la médaille d'argent à l'Open d'Afrique d'Abidjan, consolidant sa position parmi les meilleurs judokas haïtiens. 

Christopher Borzor
Christopher Borzor : Sprinteur haïtien, il a brillé sur les pistes internationales en 2024, notamment aux Jeux Olympiques de Paris, renforçant la présence d'Haïti dans les compétitions d'athlétisme. 

Lynnzee Brown

Lynnzee Brown : Gymnaste artistique haïtiano-américaine, elle a représenté Haïti aux Jeux Olympiques de Paris 2024, marquant une étape importante pour le pays dans cette discipline. 

Technologie :

Arthur Mench
Arthur Mensch : Cofondateur de Mistral AI, il a levé 385 millions d'euros, faisant de son entreprise un leader européen de l'intelligence artificielle. 

Médias et Culture :

Swann Perissé
Swann Perissé : Humoriste engagée, elle utilise sa plateforme pour sensibiliser aux enjeux environnementaux et féministes, notamment à travers son talk-show "Y'a plus de saisons". 

Maghla
Maghla : Streameuse influente, elle a élargi son impact en participant à des événements tels que la Paris Fashion Week et en s'engageant dans des initiatives caritatives comme le Z Event.

Paloma Moritz
Paloma Moritz : Journaliste responsable du pôle écologie chez Blast, elle est une voix majeure dans la sensibilisation aux questions environnementales et sociales. 

Éducation et Société :

N B. Lallahom
Nadim Bel Lallahom : Président de Diversidays, il œuvre pour l'égalité des chances en utilisant le numérique comme levier d'inclusion pour les jeunes issus de milieux modestes. 

Youssef Badr
Youssef Badr : Magistrat et fondateur de l'association La Courte Échelle, il facilite l'accès des étudiants de milieux modestes aux professions juridiques en les mettant en relation avec des professionnels du droit. 

Musique et Culture :

Eric Adams
Yves J Fanfan
Tabou Combo : Groupe légendaire haïtien fondé en 1968, Tabou Combo a été honoré en 2024 par le maire de New York, Eric Adams, pour ses contributions exceptionnelles à la musique caribéenne et son influence mondiale. 

Fabiola Shyne
Fabiola Shyne : Chanteuse haïtienne née et ayant grandi en France, elle a marqué l'année 2024 par sa musique, bien que beaucoup pensaient qu'elle était originaire de la Guadeloupe ou de la Martinique. 

Culinaire :

C.J. Irantus

Carline Jeanne Irantus : Experte haïtienne en art culinaire, elle a piloté la structure Saveur Créole 509 et a participé à la première édition du Marché des Arts, mettant en avant les spécialités culinaires haïtiennes sur la scène internationale. 

Vilains de l’année

Les véritables vilains de l'année 2024 sont ces "gangs à cravate," ces élites corrompues qui, de connivence avec certains membres de la diaspora haïtienne, sponsorisent les gangs armés responsables de la terreur qui s'abat sur la population haïtienne. Nous nourrissons l'espoir que la Police nationale d'Haïti, en collaboration avec l'armée, parvienne à trouver les moyens nécessaires pour endiguer ce fléau. Il est impératif que les auteurs de ces actes odieux, ainsi que leurs complices, soient traduits en justice et répondent pleinement de leurs crimes.

Haiti Connexion Network (HCN) 

C’est aussi une coutume de choisir parmi nous du réseau Haiti Connexion des individus qui ont marqué leur passage sur cette plate-forme.

Michel Legagneur
Ghislaine Gilbert
C’est ainsi que nos choix se sont portés cette année sur trois personnes ayant pour noms Ghislaine Gilbert, Michel Legagneur et Jean Rico Louis.

Ghislaine ou Gigi et Michel ont travaillé ensemble pour produire respectivement des superbes productions vidéographiques et des articles très informatifs sur des styles de vie et le climat.

Jean Rico Louis

Car ces deux sujets sont cruciaux pour la survie de notre passage  sur la Planète Terre. Quant à Jean Rico, il s’est révélé sur le réseau HCN comme un extraordinaire prolifique analyste politique qui nous fait appréhender de fond en comble la conjoncture haïtienne.


En conclusion, l'année 2024 a été marquée par des personnalités qui ont laissé une empreinte indélébile dans divers domaines à travers le monde. Que ce soit en politique, en sport, en culture, en technologie ou encore en musique, ces figures ont influencé l'actualité et façonné les événements qui ont jalonné cette année. Leur engagement, leurs actions et leurs réussites ont non seulement marqué leurs secteurs respectifs, mais aussi la société mondiale dans son ensemble.

Nous remercions nos fidèles lecteurs à travers le monde pour leur soutien continu et leur attention. En cette période de transition, nous vous adressons nos vœux les plus chaleureux pour une nouvelle année pleine de succès, de prospérité et de nouvelles inspirations. Que 2025 soit synonyme de nouvelles découvertes et d'opportunités pour chacun d'entre vous.

Pour HCN

Herve Gilbert

Contributeurs:Carl Gilbert et Max Dorismond





Sunday, December 29, 2024

Tant qu’il existera des pays à détrousser…

« Plus rien ne m’étonne –(De Tiken Jah Fakoly) – Ils ont partagé le monde »

 

Par Max Dorismond

On se perd en conjectures, on s’interroge sur l’objet de cet ensauvagement de notre terre natale, sur la crise qui rapetisse l’île comme une peau de chagrin. Ceux qui sont en moyens partent pour l’exil en catastrophe.  Haïti crie famine. Les gangs fédérés, mieux armés que les forces de l’ordre, grugent les territoires. Ils sont à la porte du pouvoir et ne pensent même pas à en bénéficier. Et pourtant, plusieurs jouissent déjà d’une certaine immunité. Pourquoi??? 

À entendre quelques quidams déclarer que des mines de cobalt, de coltan, d’uranium, de plusieurs milliards de dollars, excitent les prédateurs internationaux ou les États malveillants, comme les définit un animateur du web, on se meurt de rire. 

Vraiment, mes frangins ne saisissent pas la triste réalité. Si le territoire valait 10 centimes, certains fous du pouvoir l’auraient vendu « nan fè nwa », depuis des lustres, aux pays intéressés. La Reynolds Mining avait exploité la bauxite à Miragoâne pour des cacahuètes. «En l’espace d’environ 40 ans, plus de 14 millions de tonnes partent vers Corpus Christi au Texas. Le gouvernement “empochait” d’abord 20 cents US puis 1,29 dollar US par tonne métrique de bauxite1». Le jour où un ministre compétent avait tenté de redresser la barre, il fut traîné dans la boue par le même gouvernement qu’il servait.  

La seule petite mine d’or de Grand-Bois, proche de la frontière dominicaine, à peine rentable, fut confiée pour exploitation à la compagnie canadienne Sainte-Geneviève pour des vétilles. Non, ne nous illusionnons point, il n’y a aucun gisement payant en Haïti. S’il y en avait, ces prédateurs auraient fait comme en 1885, à Munich, quand ils se sont partagés l’Afrique au gré de leur fantasme. Ce sera toujours le même scénario. Écoutez la chanson de cet artiste engagé, Tiken Jah Fakoly, magnifiée en 2024 : «Ils ont partagé le monde ». Ça vaut le détour. 

Les hélicoptères américains débarquent dans tous les coins d’Haïti à longueur de journée. Leurs hommes fouillent et emportent leur butin en chantant. Personne n’ose poser de questions. Bouches cousues, ni vu, ni connu! 

Depuis l’occupation de 1915, Haïti a complètement perdu sa souveraineté. Ces rapaces sont des hypocrites. C’est ce qu’ils font tous en Afrique et ailleurs.  Tu possèdes quelques gouttes de pétrole, ton chien est mort. Coup d’État à répétition, attaques terroristes, etc. Souvenons-nous des plus sensas : Saddam Hussein, Mouammar Kadhafi… Nos présidents ont toujours été choisis par l’Oncle Sam depuis lors, et ce jusqu’à nos jours. Tous ceux qui rêvent du pouvoir sont déjà candidats au jeu du « Pwen fè pa ». Si tu t’appelles Aristide, tu le deviendras plus tard. 

Parlant d’Aristide, c’est là que tout a commencé. Ce dernier, sincère dans ses intentions de redresser la nation, croyant en la bonté des hommes, ignorant tout de la conjoncture macabre, se présenta tout feu tout flamme, en voulant changer l’ordre des choses. Il alla jusqu’à réclamer l’inénarrable réparation estimée à 22 milliards de dollars volés par la France. Démarche fielleuse que l’Amérique et l’Europe ne sauraient laisser tomber dans l’oreille des déshérités, pour ne pas réveiller les descendants des victimes encore endormis qui peuplent leur continent. 

Par conséquent, les ambassadeurs des pays interpellés avaient reçu l’ordre de sauter en 4e vitesse pour dégommer l’ancien prêtre. Ce qui fut fait le temps de dire ouf! D’ailleurs dans la présentation de Tiken Jah Fakolly, le cas d’Aristide a été mentionné : « Si tu ne quittes pas Haïti / Moi je t’embarque pour Bangui ». 

Cette incartade ne passa point inaperçue. Avec le panafricanisme à la mode par les temps qui courent, avec les Kémi Séba, les Nathalie Yamb, les Franklin Nyamsi… et autres, l’Afrique, avec un contingent d’une nouvelle jeunesse instruite, s’éveille de son long cauchemar, menace de se libérer du joug de ses éternels pilleurs pour voler de ses propres ailes. 

Les Afro-Américains, avec les mouvements de type « Black Live Mater », sont sensibilisés à l’idée de réparations pour les crimes de l’esclavage. Les Antilles, La Guyane, Mayotte…, les 16 contrées francophones de l’Afrique, avec la monnaie de singe imprimée à Paris, mieux connue sous l’appellation de Franc CFA, qui fait la fortune de la France, ne devraient pas être influencées par cette visée astronomique de sommes mirobolantes. La perte du Mali, du Burkina-Fasso, du Sénégal, du Tchad, vient de sonner le glas pour la France. Cette dernière, qui pousse plus loin que ses fesses, n’a nullement l’intention de déchirer son décor de carton-pâte et de papier-mâché pour se convertir en pays du tiers monde. Elle ne nous fera point de cadeaux. C’est une nation qui vit sur du vent. Les ex-colonies françaises sont toutes, indistinctement, les plus pauvres. C’est l’histoire de « la grenouille qui veut se faire aussi grosse que le bœuf 3 ».

 D’ailleurs, ce n’est pas la première fois qu’Haïti leur met des bâtons dans les roues en suscitant d’autres mouvements de libération. Souvenons-nous du Congo de Patrice Lumumba. Devenu indépendant, le président s’avisa de faire venir les Haïtiens pour enseigner aux nouveaux libres. Il paya cette audace de sa vie. Il fut disséqué et liquéfié dans de l’acide le 17 janvier 1961. 

En 2015, à la Martinique, le président français François Hollande, de bon cœur, pensant faire plaisir aux Antillais, leur annonça que la France allait rembourser sa dette à Haïti. Vite, on a failli fermer les micros. Martelly, un invité, a failli tomber de sa chaise. Michaëlle Jean y était.  Selon Jean-François Lisée, « Les gens pleuraient. Les chefs d’État africains présents versaient des larmes. C’était immense ». « Un miracle, après tout ce temps2 ». Mais hélas, ce n’était qu’un mauvais rêve, une éructation! Le Quai D’Orsay s’est empressé de déclarer qu’il s’agissait d’un lapsus, d’une erreur d’expression. Le président voulait dire : dette morale. 

Cependant, tous les prédateurs savent qu’un jour viendra où ils devront faire face à la musique. Avec l’omniprésence des réseaux sociaux, les demandes de réparation seront plus lancinantes et ils ne pourront y échapper. En attendant, ils font flèche de tout bois pour discréditer Haïti, pour ralentir l’aiguille de l’horloge. Ils démontrent son ingouvernabilité, par la pression des gangs. Ces derniers ont leur droit d’entrée dans les ambassades. Nous ignorons la promesse qu’on leur a faite, mais ils sont en confiance et détruisent tout sur commande. Les institutions sont obsolètes. Rien ne fonctionne. Les jeunes quittent le pays par grappes. C’est le sauve-qui-peut! 

En créant l’anarchie chez nous, ils veulent prouver à tout un chacun que les Nègres n’ont pas le sens de la gestion pour piloter un pays. Sous la direction de ce spécimen, c’est le chaos assuré. Il faut insérer dans leur esprit cet axiome que le blanc est le maître en qui ils doivent toujours avoir confiance. Pour cela, on doit radier, dans la tête du spectateur noir, l’idée que l’Haïtien s’était libéré du joug de l’esclavage de lui-même. Que ce fut un accident de l’Histoire! Haïti est devenue la risée du monde. C’est le seul pays à être dirigé par 9 présidents en même temps.  

Passant à la vitesse supérieure, avec l’accord tacite de certains « intelligents » de la région, Haïti est devenue le terrain préféré des dealers de drogue. Des armes de guerre ont été distribuées à des jeunes. Paradoxalement, il est interdit à l’État de s’en procurer. Stratégiquement, Port-au-Prince est encerclée. On assassine et on kidnappe les pauvres. On incendie à qui mieux mieux. Aucune institution ne fonctionne. La corruption gangrène la société. L’insalubrité a une île. C’est la crise omniprésente. C’est la galère, tandis qu’à côté la Dominicanie se la coule douce! 

Dans les journaux, sur les réseaux sociaux, à la télé, etc, les nouvelles sont ahurissantes. À chaque fois qu’un référendum pour l’autodétermination se met en branle dans une des possessions pressurées par les nations malveillantes, le sempiternel et nébuleux avertissement se répète sous cape : « voulez-vous devenir comme Haïti? ». Les néo-colonisés qui ne regardent que Tik-Tok se retrouvent encore piégés dans leur propre rêve! Voilà pourquoi, tant qu’il existera des pays à détrousser, Haïti continuera à être dépeinte comme l’enfer sur terre. Toutefois, les exploiteurs ne paient rien pour attendre. La marche de la réparation est bien enclenchée. Ce n’est qu’une question de temps! 

Max Dorismond


- Note –

1 – Christine Mathurin

2 – Jean-François Lisée  Journaliste – « L’étranglement français d’Haïti » - Le Devoir.

3 – Une fable de La Fontaine.

Jimmy Carter : Un Champion de l'Humanité et Ami d'Haïti

James Carter
Le 39è président des États-Unis


Par Hervé Gilbert

Par l’intermédiaire de notre plateforme, Haiti Connexion Culture, nous saluons la mémoire de Jimmy Carter, 39e président des États-Unis, un véritable ami d’Haïti et un homme d’une rare humanité, qui vient de nous quitter à 100 ans. Il est jusqu'ici le premier ex-président des États-Unis à avoir atteint cet âge vénérable. Après John F. Kennedy, il demeure l’un des rares présidents démocrates à avoir manifesté un intérêt sincère et une profonde empathie envers Haïti. Bien que son mandat ait été relativement court, il a marqué une période de l’histoire où l’idéal humanitaire prévalait sur les calculs politiques.

Le rôle de Carter face à la dictature haïtienne
Sous la présidence de Jimmy Carter, Haïti connut un assouplissement relatif de la dictature de Jean-Claude Duvalier, un régime marqué par la répression et la peur. Bien que limité, cet assouplissement représentait une lueur d’espoir pour un peuple accablé depuis des décennies. Fidèle à ses principes de défense des droits humains, Carter envoya Andrew Young, alors ambassadeur des États-Unis auprès des Nations Unies, pour exhorter Duvalier à respecter les droits fondamentaux des Haïtiens. Andrew Young, figure respectée du mouvement des droits civiques, incarna une politique étrangère centrée sur la justice sociale, un engagement rare et précieux pour Haïti.

La crise des otages en Iran et son impact politique

Cependant, la présidence de Carter fut aussi marquée par la crise des otages en Iran, un événement qui a eu un impact considérable sur sa popularité. En 1979, 52 diplomates et citoyens américains furent pris en otage à l'ambassade des États-Unis à Téhéran par des militants iraniens. L’échec de l’opération militaire pour les libérer et la prolongation de cette crise pendant 444 jours ont fragilisé sa position sur la scène politique. Malgré les efforts diplomatiques constants de Carter pour résoudre la situation, cette humiliation internationale a contribué à ternir son image et à alimenter une perception d’impuissance, qui, associée à des difficultés économiques internes, mena à sa défaite lors de l’élection de 1980 face à Ronald Reagan.


L'héritage contrasté de ses successeurs démocrates

Malheureusement, cet engagement humanitaire ne fut pas poursuivi par ses successeurs. Bill Clinton, souvent présenté comme un ami d’Haïti, prit des décisions aux conséquences désastreuses pour le pays. Ses politiques commerciales, notamment la suppression des tarifs douaniers sur les produits agricoles importés, ruinèrent l’agriculture locale et plongèrent des milliers de familles dans la précarité. De plus, l’action de la Fondation Clinton après le séisme de 2010 a souvent été critiquée pour son manque de transparence et ses résultats limités.


Joe Biden, quant à lui, a aggravé la crise sécuritaire en Haïti par son inaction. Tandis que le pays sombrait dans le chaos, il détourna son attention, consacrant des milliards de dollars à la guerre en Ukraine, tout en négligeant la détresse d’un pays voisin.

Même Barack Obama, premier président afro-américain des États-Unis, a déçu les attentes. Bien qu’Haïti soit la première république noire du monde, il n’a jamais visité le pays durant ses deux mandats, préférant se rendre à Cuba. Ce choix, accueilli avec tiédeur par Raúl Castro, a laissé un goût amer, notamment chez ceux qui espéraient un rapprochement symbolique avec Haïti.


Jimmy Carter, 39è président des États-Unis, a vu se succéder de nombreux présidents au cours de sa vie

Il convient de rappeler de manière concise et précise que c'est sous la présidence de Jimmy Carter que l'aide financière à Haïti, suspendue depuis le gouvernement de John F. Kennedy, a été rétablie. Cette reprise faisait suite à l'engagement de Jean-Claude Duvalier de tenir des élections démocratiques, une promesse faite à l'administration de Carter. Il convient toutefois de souligner que la suspension initiale de cette aide par Kennedy constituait une réponse ferme à la présidence à vie instaurée par Françcois Duvalier, perçue comme incompatible avec les principes démocratiques.


L’héritage intemporel de Jimmy Carter

Jimmy Carter demeure un modèle de leadership moral et humanitaire. Sa vision d’un monde plus juste et son engagement envers les plus vulnérables contrastent fortement avec l’indifférence et les actions nuisibles de ses successeurs. Il a montré qu’un dirigeant pouvait allier puissance et compassion, même dans un contexte international complexe.


Pour Haïti, il reste le symbole d’une époque où les droits humains et la dignité des peuples figuraient au cœur des priorités de la Maison-Blanche. Son héritage, empreint de solidarité et de justice, doit inspirer les générations futures et rappeler que l’action politique n’atteint sa véritable grandeur que lorsqu’elle est au service de l’humanité.


Herve Gilbert


Tuesday, December 24, 2024

JÉRÉMIE DE NOUVEAU EN DEUIL

Par Eddy Cavé,





Ottawa, le 22 décembre 2024

En cette fin d’année 2024 où le pays tout entier tombe graduellement au pouvoir des gangs armés, Jérémie aurait pu laisser l’impression d’avoir été épargnée si le mauvais temps ne s’était pas mêlé de la partie. Les éboulements, les crues des rivières environnantes et le déchaînement des forces de la nature ont vite fait d’emporter ce qui restait d’espoirs en cette saison de grande tristesse. Mais ce n’était pas tout.

Après les lourds bilans du séisme de 2010, de l’année d’épreuves 2017, de la période de la COVID-19 et après la traversée de l’icône Maurice Léonce, Jérémie et sa diaspora se retrouvent de nouveau en train de pleurer cinq figures très attachantes : Jacques Saint-Surin, Éric Alexis, Jean Gérin Alexandre, Jankit Cayemitte et Luce Vincent Marthol. Cinq incarnations d’honorables traditions familiales et régionales qui ont laissé tour à tour leur empreinte partout où ils sont passés. 

Maurice Léonce

De Maurice Léonce, je ne pourrai rien dire de nouveau ni d’original après le concert d’éloges qui a marqué la semaine de son décès. Les multiples hommages dont il a été l’objet et les funérailles grandioses que sa ville lui a données appartiennent aujourd’hui à l’histoire de Jérémie et de toute la Grand ’Anse. Je me contenterai donc de référer mes lectrices et lecteurs aux reportages de Kadhafi Noël, disponibles sur Youtube, et aux pages émouvants qu’Hervé Gilbert a publiées dans son très beau magazine en ligne Haiti Connexion Culture durant la semaine des funérailles. La photo ci-contre de Maurice a été prise par moi à Jérémie en février 2007, au lendemain des funérailles de mon beau-frère, le Dr Jean Martineau.

Les disparus de décembre 2024

Jacques Saint-Surin posant avec Enrico Macias

Commençons avec Jacques Saint-Surin. Poète et peintre de naissance, Jacques était aussi un touche-à-tout capable de remplacer au pied levé n’importe quel membre absent d’une association culturelle ou d’une équipe de travail quelconque. Il a ainsi fait ses débuts dans le journalisme avec les jeunes du périodique Assotor où il s’occupait de typographie et de composition. Son ami d’enfance Hervé Gilbert a rappelé dans les termes suivants une partie des souvenirs l’héritage qu’il a laissé : 

Jacques s’inscrivait au sein d’une fratrie remarquable. Feu Ronald, l’aîné, était un éducateur de renom ; Éric, un passionné du ballon rond, brillait dans le sport ; et Alex, mon camarade de classe et actuel PDG de Radio Méga, s’est illustré dans la radiodiffusion. Ensemble, les frères Saint-Surin partageaient un profond engagement dans le scoutisme, un cadre où se forgeaient leur altruisme et leur esprit de solidarité. Jacques, par son leadership naturel, renforçait ce lien familial et collectif. […]

Jacques ne se limitait pas à la poésie. Son œuvre picturale, en parfaite symbiose avec son écriture, ouvrait des perspectives nouvelles, où les formes et les couleurs dialoguaient avec les mots. Ses toiles, empreintes de profondeur et d’émotion, reflétaient l’âme vibrante d’Haïti et témoignaient de son engagement indéfectible envers son pays. À travers elles, il a légué un patrimoine artistique d’une richesse incomparable (Haïti Connexion Culture, 5 déc. 2024). 

Bien que Jacques ait toujours rêvé de voir Jérémie consacrée comme un des hauts-lieux de la poésie et de l’art en Haïti, c’est à l’étranger, notamment à Chicago, qu’il a donné pleinement sa mesure. Outre son recueil de poésie Entre le ciel et l’abime, il a publié un grand nombre de poèmes sur sa page Facebook et laissé une riche collection de peintures où s’affirment sa grande maîtrise du pinceau, son sens inné des couleurs et du détail, ainsi que sa sensibilité de poète jérémien. On le voit ci-contre à Paris, en compagnie de son idole Enrico Macias (Collection Haïti Collection Culture)

Éric Alexis
Vient ensuite Éric Alexis, économiste formé à l’Université d’Ottawa dans les années 1970 et revenue au pays en 1983 mettre ses connaissances au service de la patrie commune. Il retourna alors à la Banque centrale où il avait fait ses débuts. Je l’y ai retrouvé en 1986, après le renversement de la dictature, puis, en 1997, durant une mission d’un mois remplie à titre de rédacteur-conseil auprès de la Haute direction de l’institution. Compétent, consciencieux, réservé et rude travailleur, Éric ne laissera que de bons souvenirs parmi ses patrons et ses collègues quand il partira dans le cadre d’une opération de restructuration. J’ai su par la suite qu’il faisait le va-et-vient entre Port-au-Prince et la Floride.

Eric Alexis
Photo (Courtoisie de Renée Alexis

Éric a grandi à Jérémie chez son oncle Agnus Alexis qui cumulait les fonctions de notaire et de directeur de l’École professionnelle de La Source. Il était le petit-fils de l’opulent propriétaire terrien Valérius Alexis, plus connu sous le sobriquet de Chabin, qui possédait une grande guildive entre Marfranc et Tessier. Éric appartenait également à la grande famille des René qui a donné, entre autres personnalités de renom, le fiscaliste et ancien sénateur Vallès René; l’ancien Collecteur des Contributions de Jérémie Rochel René; le dynamique fondateur et propriétaire de la compagnie de transport Dieu qui décide Eddy René. Cette nombreuse famille a également donné un grand nombre de personnalités féminines de grande envergure qui ont perdu le nom René par le mariage. C’est notamment le cas de l’économiste Edwidge Lafleur Bayas qui se définit sur sa page Facebook comme « une mordue de politique et de culture et une épicurienne ».

De son premier mariage, avec Bleuette Dimanche, Éric a eu à Ottawa une fille, Béatrice, et un fils, Philippe. J’étais très proche de cette famille et c’est ainsi que j’ai conduit Bleuette à l’autel le jour du mariage. Ma fille Johanne, alors âgée de quatre ans, apporta les bagues des mariés. Le couple habitait alors mon quartier, à Vanier, et je garde un affectueux souvenir de cette époque.

Jean Gérin Alexandre

Ce mois de décembre 2024 a également été marqué par la disparition soudaine, pour moi du moins, de Jean Gérin Alexandre.  Originaire de Beaumont, comme notre ami défunt Mérès Wèche, Gérin a été une des belles figures du journalisme haïtien.  Jusqu’à son décès, le 12 décembre 2024, il était l’un des animateurs de l’émission Matin Caraïbes, diffusée sur Radio Télévision Caraïbes. Il avait été au préalable le directeur de l’Information de cette chaîne.   La dernière fois que je l’ai rencontré, c’était en 2017, un samedi matin où j’allais fiévreusement participer à l’émission très courue Ranmase de Jean Monard Métellus.   Gérin m’avait accueilli avec sa chaleur habituelle et il avait pris le temps de me parler des défis de la profession de journaliste en Haïti. Nous ne nous sommes pas revus par la suite.

Entre Mérès et Gérin, en juin 2011
dans son bureau à Radio Caraïbes

J’ai connu Jean Gérin en 1990 durant ses études en communication à l’Université Saint-Paul d’Ottawa. En novembre de la même année, il partait pour Haïti afin d’aller couvrir, pour la chaîne d’État américaine PBS, les élections qui allaient porter Jean Bertrand Aristide au pouvoir. Il s'acquitta avec brio de sa mission et, dès notre première conversation sur ce sujet, je trouvai qu’il avait tout pour réussir dans le journalisme : une grande curiosité, la maîtrise de la plume, le goût de l’aventure, l’enthousiasme, la curiosité et surtout le courage. Le programme une fois bouclé, il retourna au pays et travailla jusqu’à son décès avec l’équipe de Patrick Moussignac. Une carrière bien réussie, malheureusement écourtée par un destin où les plantes n’ont pas tenu les promesses des fleurs.

Les mauvaises nouvelles continuent

Jean Cayemitte

J’étais encore plongé dans les souvenirs évoqués par ces décès quand m’est parvenue la nouvelle du départ de Jean Cayemitte, que nous appelions affectueusement Jankit dans le village-quartier de Nan Goudwon. Mon père et ma mère l’aimaient comme un fils et, quand vint pour moi le temps d’aller au lycée et d’entrer dans l’adolescence, c’est à lui et à Éric Pierre (Bòs Ko) qu’ils demandèrent de guider mes pas. C’est donc Jankit qui m’a appris à conduire une voiture, à douze ou treize ans, et Éric qui m’a appris à nager, à chasser au « fistibal » et au fusil à plomb. Ils m’ont également initié au plongeon, à la danse, à l’équitation. Sans parler des passe-temps comme les jeux de cartes, le Ludo, les dominos, le foot, etc. Serge Legagneur devait m’initier à la poésie, à la littérature et à la séduction. Paix à leurs âmes.

Jankit

Jankit s’étant orienté très jeune vers la mécanique, il m’a enseigné un tas de petites choses qui m’aident aujourd’hui encore à sortir d’un mauvais pas sur les routes. Je salue bien bas sa mémoire. Et le hasard a fait qu’en entrant à la Banque Nationale en 1962, j’ai été pris en charge par ses deux frères aînés Jojo et Hervé qui m’y avaient devancé. Notre maison n’étant séparée de celle des Cayemitte que par une seule maison, celle des Cadet, j’ai grandi sous l’influence de cette famille comme si j’étais un petit frère. Je garde encore un souvenir ému de Néné, de Wawal, de Ninette, de Liliane et de Tonton Volna,  dont la bonne humeur était proverbiale. Quant à Madan Volna, c’était une perle que le quartier adorait. 

Avec les mariages de Jankit avec Suzelle, d’Hervé avec Cosette, de Liliane avec Énock Bernadel, c’est toute la vie de quartier qui allait se transformer. Jojo épousa la voisine limitrophe Florelle Cadet, tandis que ma sœur Monique, mariée à Jean Martineau, revenait à la maison familiale où naîtront mes neveux Philippe, Patrick (le créateur de Zenglen) et Dominique. La génération d’enfants issus de ces mariages a maintenant franchi le cap de la cinquantaine, et je suis heureux de constater qu’ils sont restés soudés les uns aux autres en dépit de la distance et du temps qui passe.

L’émigration s’est mise de la partie avec l’instauration d’une dictature féroce au pays, la présidence à vie, les persécutions politiques... et, aujourd’hui, la nostalgie.   Sur la photo ci-contre de 1950 où Jankit (dernier à droite, debout) était encore le seul survivant, on revoit Maurice Léonce (debout au milieu); le célèbre gardien de but à casquette Éric Pierre (assis au milieu). À sa droite, Hervé Cayemitte et le superbe athlète Jean Alcide. À sa gauche, l’inoffensif Gérard Guilbaud exécuté durant les tueries de la fin de l’été 1964 et dont le seul crime était d’avoir épousé une des sœurs de Milou Drouin. Derrière lui, un joueur non identifié et l’ancien chef scout Robert Samedy.  Le joueur debout entre Maurice et Jankit est Raymond Girault. La récupération de cette photo m’a plongé au plus profond de la nostalgie de temps des fêtes.    

Une autre perte qui a secoué la diaspora jérémienne en ce mois de décembre 2024 a été celle de Luce Vincent Martol qui vivait à Chicago depuis plus de 50 ans. Svelte et grande de taille dans son jeune âge, Luce était surtout connue comme la fille de Madan Phalante, une centenaire qui a donné cinq enfants au pays, dont  le Dr Pierre Vincent et trois autres filles, Marie, Raymonde,  Évelyne.

Luce avait une fille, Angie, qui a fait une bonne partie de ses études en Haïti et qui s’était fait un point d’honneur d’entretenir à Chicago sa culture et son identité haïtiennes. Une vingtaine d’années après l’avoir rencontrée à New York lors de la première communion d’un des enfants de sa nièce Josie, je me souviens encore de l’impression qu’elle avait faite sur les cousins venus du Canada. Elle était d’une amabilité exemplaire et évitait soigneusement de mélanger l’anglais, le français et le créole, comme on le fait spontanément aux États-Unis…

Les autres sœurs de Luce étaient Éveline, la seule survivante aujourd’hui, Raymonde  et Marie. Décédée elle aussi, Raymonde avait épousé Fritz Bellevue et a eu trois enfants. Quant à Marie, l’aînée de la famille, elle avait épousé Louis Mayas, instituteur comme elle, et elle suivit le chemin tracé par sa mère, Man Pha, en créant une nombreuse famille : trois garçons, Brennard, Lionel et Patrick et quatre filles, Bernadette, aujourd’hui disparue, Jocelyne, Suzie et Josie.  Les liens de famille entre les Cavé, les Vincent et les Mayas étant très étroits, j’ai toujours profité de mes voyages aux États-Unis pour les visiter, tant à Chicago qu’à New York. Je suis donc bien placé pour témoigner du vide que la disparition graduelle de cette longue famille jérémienne crée dans notre diaspora.

En faisant le grand départ à un moment où le pays est engagé dans un processus apparemment irréversible d’autodestruction,  le patriarche Maurice Léonce et nos amis  Jacques Saint-Surin, Éric Alexis, Jean Gérin Alexandre, Jankit Cayemitte et Luce  Vincent Martol  nous invitent à une introspection bien douloureuse. Les six ont vécu en diaspora et trois d’entre eux sont retournés sur la terre natale, où ils ont assisté, impuissants, à la descente aux enfers actuelle.

Un regard vers le passé

Maurice Léonce est peut-être le seul des six disparus de l’automne 2024 à avoir frôlé la réalisation de ses rêves de jeunesse et d’expatrié en donnant aux jeunes de sa ville de grandes possibilités d’avancement et de bonnes raisons d’espérer. Quant à Jean Gérin, le journaliste de combat, et à Éric, l’économiste qui, à la fin des années 1970, rêvait avec moi de développement autocentré sur le campus de l’Université d’Ottawa, ils ont vu s’estomper graduellement leurs rêves d’un avenir grandiose au fil des décennies. Vivant à proximité des « territoires perdus », ils avaient, en cette fin d’année, toutes les raisons possibles de perdre leurs illusions. En outre, ils n’ont même pas eu droit aux soins minimums de santé qui étaient la norme au pays dans leur jeune âge. Ils ont été fauchés pendant la période actuelle de folie où des bandits lourdement armés incendient des marchés publics, des écoles, des lieux de culte et même … des hôpitaux. De quoi se demander si le retour au pays natal a jamais été le meilleur choix sur le long terme.

Les grandes questions du jour

En tournant le dos paisiblement à la patrie commune, n’avons-nous pas tous contribué, en tant qu’expatriés, à la gigantesque débâcle d’aujourd’hui ? N’avons-nous pas laissé le champ libre aux hordes de corrompus et d’incompétents qui se sont succédé au pouvoir après le renversement du régime qui nous a contraint au départ dès les années 1960 ? Nous pouvons répondre de différentes façons à ces questions, sans toutefois avoir de certitudes. Il y  a également lieu de poser les mêmes questions au sujet des tenants de la lutte armée. Qu’ils soient de gauche ou de droite, la plupart de ces irréductibles ont payé de leur vie leurs choix idéologiques ou leur amour de la terre natale. Tandis que certains ont été torturés, exilés ou exécutés dans les prisons des Duvalier, d’autres sont tombés au combat en véritables héros.

Dans l’opposition de gauche, Jacques Stephen Alexis, du Parti d’entente populaire,  Gérald  Brisson, Alix Lamauthe, Raymond Jean-François, Ti- Bob Désir, les frères Adrien et Daniel Sansaricq, du Parti unifié des communistes haïtiens (PUSCH), sont morts en héros. Il en est de même des militants de l’opposition traditionnelle comme Milou Drouin et Marcel Numa exécutés en novembre 1964 à l’entrée du cimetière de Port-au-Prince ou des frères Fred et Renel Baptiste qui ont ouvert, pendant la même année, un front anti-Duvalier dans le Sud-Est. Tous ces combattants sont entrés dans l’histoire en véritables héros, mais, 60 ans après leur disparition brutale, le sacrifice de ces nombreuses vies suscite encore de douloureuses interrogations : Y avait-il alors d’autres options ? Dans l’affirmative, quelles étaient-elles ? Est-ce que la fuite en avant qu’est l’émigration silencieuse de masse est appelée à se poursuivre ?

Jacques Stephen Alexis saluant Mao Tse Toung,Gérald Brisson
à Moscou et Adrien Sansaricq à Cuba dans les années1960

Les décès en cascade survenus en cette fin d’année 2024 sont pour nous une occasion de nous rappeler qu’il y a exactement 60 ans, la guérilla des Treize de Jeune Haïti servait de prétexte à une terrible vague d’arrestations arbitraires et d’assassinats à Jérémie. Il y avait quatre Jérémiens parmi les combattants, Milou Drouin, Marcel Numa, Géto Brière et Gusley Villedrouin, et la répression fut terrible. On se rappellera qu’il n’y avait aucun Sansaricq parmi les rebelles, mais que 13 des 27 personnes exécutées appartenaient à cette famille. Difficile à comprendre au premier coup d’œil.

Milou Drouin       Marcel Numa      Fred Baptiste   

Dans le Sud-Est, l’infiltration des frères Fred et Renel Baptiste à partir de la République Dominicaine donna également lieu à des massacres en série que la population n’est           pas prêt d’oublier. Dans le Nord, les hommes de l’ancien général Léon Cantave à Mont-Organisé et ceux de Butcher Philogène à Ouanaminthe causèrent de lourdes au régime, mais celui-ci eut finalement gain de cause.

Dans le climat d’agitation déclenché par l’infiltration des militants du PUCH après l’exécution sommaire, en juin 1967, de ces 19 officiers, le gouvernement entreprit dans la Grand’ Anse une chasse à l’homme qui fit énormément de victimes innocentes. Outre des opposants réputés et très connus comme l’avocat Alphonse Bazile, Marcel Laforest, Dominique Luc, Jean-Claude Alexandre, Maurice Février, qui ont disparu en prison, de nombreux paysans anonymes ont été passés par les armes. Simplement soupçonnés de complicité avec les communistes ou accusés sans preuves. En 1986, l’évêque de Jérémie, Mgr Willy Romélus Romulus, faisait poser une pierre tombale en leur mémoire au Carrefour Gatineau, dans la paroisse de Guinaudée, lieu des arrestations et des massacres. La dictature a alors frappé beaucoup plus fort qu’en 1963 et en 1964. Que leurs âmes reposent en paix!

Alphonse Bazile  Dominique Luc   Adrien Sansaricq

Pour aucune raison, nous ne devons perdre de vue le fait que Jean Gérin Alexandre et Éric Alexis sont décédés au pays par faute de soins médicaux adéquats et à un moment où l’on incendie des hôpitaux. À un moment où le pays est coupé du monde extérieur pour un lapse de temps indéterminé.

De quoi demain sera-t-il fait?

L’avenir est encore plus sombre aujourd’hui qu’il était quand nous avons déserté et que ces deux amis faisaient le choix de retourner au bercail. Que faire aujourd’hui face à l’effondrement programmé de la nation commune ? J’ai beau chercher, j’ai beau crier au secours et scruter l’horizon, je ne trouve nulle part de raisons valables d’espérer. Je ne vois aujourd’hui aucune issue à ce drame national qui a toutes les apparences d’une conspiration internationale réalisée avec la complicité de puissants acteurs de l’intérieur. Seuls me viennent à l’esprit ces vers de « La mort du loup » où Alfred de Vigny martèle avec force :

Gémir, pleurer prier est également lâche.
Fais énergiquement ta longue et lourde tâche
Dans la voie où le Sort a voulu t'appeler,
Puis, après, comme moi, souffre et meurs sans parler. » 

***Addendum ***

Paulette Siméon Aly
dans son jeune âge

Le présent article avait déjà été rédigé et distribué quand la nouvelle du décès de Paulette Siméon Aly nous est parvenue. Cette disparition s’ajoute aux malheurs qui ont frappé la diaspora jérémienne au cœur de la période des fêtes de fin d’année 2024. Il était donc impensable pour nous de ne pas l’associer aux réflexions suscitées par cette douloureuse période.

Institutrice de carrière, Paulette était la fille aînée de l’ancien maire de Jérémie  Dante Siméon et de son épouse Lecksinzca Bourdeau. Plus connue sous le sobriquet de Kèkètte, Paulette  était suivie de Wilfrid Siméon, devenu maire è son tour  dans les années 1970, et de deux sœurs, Rosie et Yanick. 

Kèkète laisse dans le deuil son mari Lécène Aly, une fille, Nagela, un fils, Maxèle, et plusieurs enfants, petits-enfants et arrière petits-enfants.  Ses funérailles seront chantées à l’église Sainte-Béatrice de Laval, au Québec,  le samedi 28  décembre en cours.