Par Eddy Cavé, edddynold@ gmail.com
Ottawa, le 12 décembre 2020
En essayant la semaine dernière de trouver des photos pour illustrer mon plus récent livre, qui traite de la mort tragique des principaux signataires de l’Acte de l’Indépendance, j’ai fait une découverte déconcertante. Je savais, comme tout le monde, que le général de brigade et signataire de l’Acte de l’indépendance Laurent Férou avait été inhumé au Fort Marfranc, à une dizaine de kilomètres de Jérémie, mais je pensais que le tombeau était encore intact. Voici ce qui en reste :
Tombeau du général Férou photographié le 10 décembre 2020 (Photo - Abbé Mey Joseph) |
Faute d’avoir une
photographie de ce héros qui a libéré la
Grand’Anse deux mois avant la chute de Vertières, j’ai demandé à des amis
vivant à Jérémie de me faire avoir quelques photos de son tombeau. En moins de 24
heures, les réponses sont venues et elles m’ont déchiré le cœur.
La tombe du général Laurent Férou devant laquelle je me prosterné si souvent dans mon jeune âge est toujours plantée au centre du Fort Marfranc, mais elle est maintenant méconnaissable. Aujourd‘hui, elle passerait facilement pour un bloc de ciment recouvert d’une plaque de céramique ou tout au plus pour le lieu de repos d’un « grand don ». Heureusement que les vieux du village sont là pour renseigner l’étranger de passage sur les exploits du héros qui y sommeille..
La grande
différence aujourd’hui, c’est que cette tombe a été recouverte de carrés de céramique blancs posés à
l’initiative d’une âme charitable, la religieuse sœur Laurette Pierre, qui désirait, de sa propre initiative, la protéger
de la fureur des intempéries. Et pourtant, l’Institut de sauvegarde du
patrimoine national (ISPAN) a
visité les lieux à plusieurs reprises et même publié de nombreuses photos du
site, dont celles reproduites ici.
Quand on pense que les restes de Jean-Jacques Dessalines
sont encore enfouis sous les décombres de l’ancien Cimetière intérieur de
Port-au-Prince, Place Sainte-Anne, à proximité de la carcasse du cheval de son
aide de camp Charlotin Marcadieu, on est
presque tenté deconsidérer le général Férou comme un privilégié. Dans les deux
cas, l’indifférence des élites dirigeantes, l’irresponsabilité, l’inconscience
et l’indécence des autorités sont inacceptables. Il faut absolument un sursaut
de patriotisme et de fierté nationale pour freiner ces dérives.
J’invite également les médias à contribuer à la
sensibilisation du public à ce problème d’envergure nationale et à appuyer
cette initiative citoyenne.
Il est aujourd’hui de notre devoir de donner une
sépulture décente à ce Libérateur de la
Grand’Anse. Nous devrons par la même occasion consigner par une épitaphe
appropriée sa contribution décisive à la victoire sur les Français en 1803.
Crions d’une seule voix : Halte à l’incurie ! Arrêtons la dérive qui a
permis que le tombeau d’un Père fondateur de la Patrie se désintègre ainsi dans
l’indifférence générale.
Les
prochaines étapes
J’ai alerté et sondé la semaine dernière des amis historiens et des proches déjà sensibilisés à la question, et l’idée a été accuillie avec enthousaisme. Le révérend père Jomanas Eustache, curé de la paroisse de Numéro Deux et directeur de l’École de droit de Jérémie, a déjà commencé à explorer sur place la faisabilité d’un petit projet d’érection d’un tombeau à la hauteur du Personnage. Cet ami a déjà fait ses preuves dans la gestion de projets d’envergure en dotant sa paroisse d’une église grandiose. Avec un tel soutien initial, ce petit projet a toutes les chances de se concrétiser rapidement. Dans le premier cercle des amis historiens, les promesses de soutien sont venues sprontanément et elles ont été suivies par celles de citoyennes et de citoyens des horizons les plus divers. Je compte annoncer bientôt la création du collectif qui sera chargé de recevoir les dons et de mener le projet à terme.
En dressant un petit monument, si modeste soit-il, à la
mémoire de ce natif des Côtaux qui a fait de la Grand’Anse sa terre d’adption,
nous témoignerons de notre reconnaissance envers un citoyen de grande valeur
qui s’est sacrifié pour nous léguer une patrie. En même temps, nous susciterons
un intérêt pour Marfranc qui a beaucoup à offrir au tourisme local.
Après avoir figuré sur la carte des fortifications,
Marfranc pourra ainsi devenir à la fois un
lieu de mémoire et une escale intéressante des circuits du tourisme local.
Merci Eddy pour ce cours d’histoire
ReplyDeleteJe n’ai rien dans mes souvenirs qui me rappellent avoir étudié quelque chose sur le sud. La seule citation qui me reste en tête, je crois, c’est la célèbre phrase de Dessalines qui marmonnait ceci: « Après ce que je viens de faire dans le sud, s’ils ne se révoltent pas, c’est qu’ils ne sont pas des hommes ». Demande-moi, dans quelle bataille dans le sud? À Quelle razzia avait-il participé? Je l’ignore.
Par conséquent, mon vieux, tu viens de faire oeuvre utile en rafraîchissant notre mémoire rabougrie avec ce cours d’histoire dans notre patelin.
C’est magnifique. Toutes mes félicitations.
MaxD
Est-ce-qu'on me dire la date de la creation de Marfranc, merci
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