Le couple Macron sur scène le 25 avril lors de la victoire au 1er tour |
Il a 15 ans,
elle en a 39. Il est lycéen, elle est professeure de français et de latin au
lycée jésuite La Providence d’Amiens. Nous sommes au début des années 1990, sur
une scène de théâtre à Amiens. C'est le début de l'incroyable histoire d'amour
et de pouvoir entre Brigitte Auzière et Emmanuel Macron. Le jeune lycéen
participe à l’atelier-théâtre animé par la prof de lettres. Pour la représentation
de fin d’année, il apparaît grimé en épouvantail dans la pièce La Comédie
du Langage de Jean Tardieu. « Ah que c’est bon de renaître »,
déclame-t-il en écartant les bras et en levant les yeux au ciel.
Dans les
rangs du public, Brigitte Auzière est séduite par la prestance de l’adolescent. «J’ai
trouvé sa présence sur scène incroyable», se souvient-elle dans le
documentaire Macron, la Stratégie du météore réalisé par Pierre
Hurel.
Brigitte et
Emmanuel se rapprochent encore plus lorsqu’ils décident d’adapter une pièce
d’Eduardo de Filippo et de la mettre en scène ensemble. Cette collaboration
dure des mois. «Nous nous parlions de tout. L’écriture devint un prétexte.
Et je découvris que nous nous étions toujours connus […] Nous étions tous deux
inséparables malgré des vents contraires», raconte Emmanuel Macron dans son
livre Révolution. Il tombe amoureux d’elle, elle est «subjuguée
par son intelligence». Deux amants contrariés prêts à triompher de tous les
obstacles : l’histoire débute comme une comédie de Molière.
«Ce n’était pas un ado»
Tous deux
sont natifs de la capitale picarde, tous deux vivent dans un quartier huppé.
Brigitte née Trogneux a grandi dans une famille bourgeoise de chocolatiers ;
les parents d’Emmanuel Macron sont médecins. De l’union de Brigitte avec le
banquier André-Louis Auzière sont nés trois enfants : Sébastien, Laurence et
Tiphaine ; aîné d’une fratrie de trois, le jeune Macron est dans la même classe
que Laurence, la fille de sa future épouse.
«Il n’était
pas comme les autres, toujours avec les profs, toujours avec plein de livres.
Ce n’était pas un ado. Il avait un rapport d’égal à égal avec tous les adultes»,
rapporte Brigitte Macron dans le documentaire de Pierre Hurel consacré à son
époux.
Madame
Auzière coache cet élève surdoué, passionné de littérature, qui rêve de devenir
écrivain. Elle le pousse à passer le concours général de français et le
présente à un concours d’éloquence organisé par le Rotary Club. Il remporte les
deux avec succès.
«Je reviendrai et je vous épouserai!»
.
Avant de
partir, il déclare sa flamme à sa professeure de théâtre. « Vous ne vous
débarrasserez pas de moi, je reviendrai et je vous épouserai ! », lance-t-il à
la manière du héros stendhalien, Julien Sorel, qui promet d’arracher Madame de
Rênal aux bras de son mari.
Comme il
l’écrit sans son livre, Emmanuel Macron est «porté par l’ambition des
jeunes loups de Balzac». Lycée Henri-IV, hypokhâgne, khâgne, Sciences-Po,
l’ENA : seule Normale Sup’ manque à son parcours. Par deux fois, l’étudiant
échoue au cours d’entrée de la prestigieuse institution. «Il faut croire que
je n’étais pas fait pour ça», relativise-t-il des années plus tard. «La
vérité est que je ne jouais pas le jeu. J’étais trop amoureux pour préparer
sérieusement le concours. Le cœur et la raison sont incompatibles.»
Son premier
amour l’appelle chaque jour, continue de lui prodiguer des conseils et de
relire ses ébauches de roman. Elle divorce en 2006 et demande sa mutation à
Paris au lycée jésuite Saint-Louis de Gonzague. «Petit à petit, il a
vaincu toutes mes résistances. Avec patience», avoue celle qui est redevenue
Brigitte Trogneux.
Leurs amours
demeurent clandestines jusqu’au jour où le jeune énarque décide de présenter sa
compagne à ses amis lors du mariage du petit-fils de Simone Veil. La différence
d’âge entre les deux amoureux fait jaser les futurs hauts fonctionnaires, qui, selon
les auteures des Macron, se gaussent de «cette quinqua pas super
distinguée» au bras de leur camarade.
«Ne rien céder au conformisme»
Il est
facilement adopté par les enfants de sa femme, comme le raconte Tiphaine,
la plus jeune fille de Brigitte Macron, à BFMTV : «Quand il a décidé qu’il
allait se marier avec ma mère il est venu nous voir pour nous faire part de sa
décision. C’est un acte fort, il est quasiment venu nous demander sa main»
Emmanuel
Macron et Brigitte Macron ont conscience que leur couple n’est pas «normal» mais
ils «ne se vivent pas dans la différence», expliquent les auteures du
livre Les Macron. Au fil des couvertures de magazine, ils peaufinent leur
image : celle d’une famille moderne, où Emmanuel Macron tient à 39 ans le
rôle de jeune père des trois enfants de Brigitte et de très jeune grand-père de
ses sept petits-enfants.
«Emmanuel a
pris sa place naturellement dans la famille, sans brusquer les choses. Quand je
sortais trop tard, il m’engueulait gentiment en me disant: 'Sois cool, ta maman
s’inquiète'. Mes copines le trouvaient beau gosse, il y était insensible.
Brigitte et lui sont soudés comme personne», déclare Tiphaine Auzière, qui
a fait activement campagne pour son beau-père.
«Notre
famille, c’est mon socle de vie, mon rocher. Notre Histoire nous a inculqué une
volonté tenace de ne rien céder au conformisme, lorsque l’on croit avec force
et sincérité», écrit Emmanuel Macron dans Révolution.
«On ne travaille pas bien quand on
n’est pas heureux»
L’influence
de Brigitte Macron dans la construction intellectuelle du candidat à l’élection
présidentielle est décisive. La professeure de lettres conduit ses pas dans le
monde des livres que lui avait ouvert sa grand-mère. Stimule son esprit
critique aiguisé au contact du philosophe Paul Ricœur. Le présente à des
personnalités de la culture et des médias : Pierre Arditi, Erik Orsenna,
Stéphane Bern, François Berléand…
Mais elle se
défend d’être son Pygmalion. «Personne n’influence Emmanuel»,
assure-t-elle dans Les Macron. Leur relation semble fondée sur une stricte
égalité et réciprocité. «On a un fonctionnement de couple qui intrigue.
Emmanuel et moi, on part du principe que c’est mieux à deux. Et comme c’est
dur, on partage. Moi je trouve ça beaucoup plus sympa que d’être disjoints. J’aurais
du mal à vivre autrement», révèle Brigitte Macron.
Omniprésente,
elle suit son homme comme son ombre. Lorsque son mari est nommé ministre de
l’Économie en 2014, elle emménage à Bercy. Puis, en juin 2015, elle se met en
congé de l’Éducation nationale pour «se consacrer à plein-temps à son mari
et aux siens».
Lors d’un
reportage réalisé pour le Supplément de Canal +, la caméra capture
une réunion de travail au ministère de l’Économie et des Finances. Autour d’une
table, des conseillers ; à droite d’Emmanuel Macron, l’indispensable Brigitte. «Mon
épouse n’est pas dans mon cabinet, elle n’est pas payée par le contribuable
français», tient à préciser le jeune ministre qui souligne qu’elle passe
néanmoins beaucoup de temps avec lui car «son avis [lui] importe» et
qu’ «on ne travaille pas bien quand on n’est pas heureux».
«Un regard bienveillant mais critique»
Après la
démission de son mari du gouvernement, Brigitte Macron participe activement à
la création du mouvement En Marche ! Et voit les projecteurs se braquer sur
elle brutalement. Une semaine après la création du mouvement En Marche ! le
6 avril 2016, elle accorde une interview à Paris Match : leur rencontre, leur famille,
le nom de leur chien, elle se livre sans filtre. «Une bêtise», juge
Emmanuel Macron. Pas facile de passer des coulisses à l’avant-scène. De peur
qu’elle ne trébuche en pleine lumière, l’équipe du candidat encadre de près les
déclarations de sa moitié à la presse.
Devenu la
coqueluche des magazines, le couple, à qui la porte-parole d’En Marche !
Laurence Haïm conseille de se mettre en scène «comme les Obama», est
aussi la cible de nouvelles rumeurs.
Brigitte
Macron se dit «blessée» par les ragots qui prêtent à son époux
une relation amoureuse avec Mathieu Gallet, le patron de Radio France. Une
rumeur démentie publiquement par Emmanuel Macron lui-même.
Les Macron
doivent également endurer les railleries des commentateurs et des humoristes au
sujet de leur différence d’âge. Des plaisanteries aux accents
sexistes, lassantes et éculées : «une cougar à L’Élysée», «Barbie sénior»
«grand-mère sait faire un bon café»…
Durant la
campagne, Brigitte n’endosse pas de rôle politique officiel : aucun siège au
sein des comités politiques, pas de place dans l’organigramme d’En Marche !,
pas de bureau au QG de campagne du candidat.
Mais elle
est la conseillère indispensable à l’équilibre de son compagnon. «S’il ne
la voit pas pendant une heure, il l’appelle», observe François Patriat,
sénateur ex-PS et soutien d’Emmanuel Macron. Elle relit ses discours, l’aide à
poser sa voix, débriefe ses meetings avec lui.
«Elle porte
sur lui un regard bienveillant mais critique, elle ne lui laisse rien passer,
elle est très cash. Elle n’hésite pas à lui dire ‘ton livre me tombe des
mains’, ‘tu utilises des mots trop compliqués’», se souvient la journaliste de Gala Candice Nedelec.
Elle se
rend également aux rendez-vous qu’il ne peut pas caser dans son agenda.
Rencontre les associations. Discute avec des membres de la société civile. Lors
des déplacements sur le terrain, Madame Macron est appréciée pour son empathie
et sa simplicité. «C’est une femme très drôle, qui aime la vie, qui aime
rire, une accompagnante active qui a son mot à dire. C’est tout sauf une
potiche», confie Candice Nedelec.
«Elle aura
son mot à dire»
Le couple s'embrasse sur scène lors de la victoi re au premier tour le 25 avril dernier |
Caroline
Pigozzi, journaliste à Paris Match qui a interviewé plusieurs fois
Brigitte Macron, juge que «c’est une femme qui sait où elle va. C’est une
femme de caractère. C’est une femme de pouvoir pour l’homme qu’elle aime, pas
du tout pour elle. Elle ne veut pas se mettre en première ligne.»
Quelle Première
Dame Brigitte Macron sera-t-elle ? Lors d’un meeting le 8 mars au
théâtre Antoine à Paris, le candidat d’En Marche ! avait esquissé le rôle
public que tiendrait sa femme s’il accédait à l’Élysée : «elle aura à
ce moment-là ce rôle, cette place, cette exigence, pas dissimulée, pas derrière
un tweet ou une cachette».
«Elle aura son mot à dire sur ce qu’elle veut
être […] Elle aura une existence, elle aura une voix, elle aura un regard. Elle
l’aura dans l’intimité à mes côtés comme elle l’a toujours eu, mais elle aura
un rôle public parce qu’il en est ainsi et c’est une attente», a-t-il encore
détaillé sur TF1 le 27 avril. Les Français l’ont compris, ils devront
compter avec Brigitte, «la part non négociable» de leur nouveau
président
Source de référence :Ouest-france.fr
Source de référence :Ouest-france.fr
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