Par
Max Dorismond Mx20005@yahoo.ca
Max Dorismond |
Quand on a le
contrôle de l’assiette au beurre, c’est très difficile de ne pas se graisser
les doigts, à moins qu’on soit doté d’une moralité en béton armé.
En effet, quant à promulguer ou à ratifier
des lois au service de la nation, pourquoi ne pas se servir en premier lieu? Servons-nous d’abord ! semblent se dire
les parlementaires haïtiens. Dans leur optique, SERVIR, qu’on le veuille ou
non, est un verbe qui se conjugue seulement et simplement à l’impératif. A la publication des émoluments
de nos élus, des chiffres faramineux à
donner le vertige, les médias s’en étonnent et sur les réseaux sociaux, on
balance de l’épithète avec un enthousiasme malsain. Vu la situation infâmante
du pays, la misère répugnante, le laxisme ambiant, etc…, les montants totalisant
« 2 160 000,00 Gdes, annuellement
» par sénateur, à titre de salaire, selon le Nouvelliste 1,
« sont ahurissants ». Selon
d’autres sources, le budget de fonction par Sénateur est en fait de 144 000,00$
US, l’équivalent de 1 440 000,00 dollars haïtiens ou 7 200 000,00 Gdes. C’est
une cascade de chiffres à confondre les sceptiques. En 2011, le Sénateur Edo Zenny maintenait
que leur salaire mensuel était de 10 000, 00$ US 2. Comment un
pays qui ne produit rien, ne perçoit presque pas d’impôt, peut se payer ce luxe?
Ces élus sont-ils en train de souffler sur les braises de l’impatience.
Segment d'une séance au Parlement haitien en 2016
En pataugeant dans cette richesse
insolente et inopinée, en métamorphosant leur statut de pauvres en millionnaires,
l’espace d’un claquement de doigts, ces « chevaliers de l’ombre » sont automatiquement immunisés et demeureront
insensibles à la misère de la collectivité. Étant riches, ils n’ont point
besoin de compter sur l’État pour l’éducation de leurs enfants, les soins
médicaux, etc… Ils peuvent se les procurer sans aucun souci. Ce faisant, ils
s’éloignent de la masse de la population et perdent l’empathie qu’ils ont pu
ressentir pour elle en d’autres temps. D’où l’absence d’idées novatrices, de
débats constructifs et la dérive de la nation vers l’abîme. D’ailleurs plusieurs
clichés sur le net illustrent le comportement fossilisé de ces élus oisifs et
irresponsables, tantôt en bataille rangée, tantôt roupillant dans leur fauteuil,
en pleine séance officielle au Parlement, où il ne leur manque que l’oreiller.
Des parlementaires
pèlerins
Des parlementaires haïtiens roupillant dans leur fauteuil en pleine séance officielle.(Cliquer pour agrandir) |
Outre ce magot, les parlementaires ont
attaché d’autres cordes à leur arc et font flèche de tout bois pour augmenter
la dîme. Prétextant soumettre d’autres projets d’intérêts publiques, en
pèlerins avertis, ils sonnent le tocsin et passent la sébile pour arrondir la
bourse. Toujours, selon Le Nouvelliste, « Chercher des fonds dans les administrations, au Palais national, à la
Primature, dans les entreprises publiques et auprès des particuliers sont des
« du plus » qui s’ajoutent aux largesses du budget officiel 3 ».
Cette invitation directe à la corruption, au point de vue éthique, porte un
joli nom: la collusion. Souffrant déjà d’un grave déficit de sympathie
dans la population, ce comportement hors norme ne les met point à l’abri de
critiques féroces amplement méritées. Il leur faut beaucoup d’intelligence
collective pour comprendre que leur avenir est lié à la façon dont évolue le
reste de la nation. Au fil de l’histoire, c’est une vérité que les prédateurs
ont toujours fini par apprendre, trop
tard.
La tenue vestimentaire du député Gracia Delva durant l'une de ses campagnes électorales pour devenir sénateur. |
Le député Arnel Bélizaire circulant dans une manifestation populaire avec un arme de guerre |
Au delà de
l’arithmétique politique
Face à cette déliquescence, les cloches de l’envie ne tardent pas à faire entendre leur écho et, ceci, avec raison. Les édiles réclament le même traitement que les parlementaires. Et, ils ne sont pas les seuls. Tous les autres fonctionnaires de l’État, les professeurs, les médecins, les policiers, etc…, en rêvent également. Et si on ne remédie pas à cet appel des sirènes, ce traitement inéquitable dénoncé va ensuite créer de nouvelles distorsions qui mineront davantage l’efficacité des institutions toujours en déficit de résultat. Ce qui revient à dire que les employés pourraient, par simple calcul, utiliser cet humour populaire de l’ère Soviétique pour maintenir une grève anonyme, à savoir « Ils font semblant de nous payer, nous faisons semblant de travailler 6 ».
Face à cette déliquescence, les cloches de l’envie ne tardent pas à faire entendre leur écho et, ceci, avec raison. Les édiles réclament le même traitement que les parlementaires. Et, ils ne sont pas les seuls. Tous les autres fonctionnaires de l’État, les professeurs, les médecins, les policiers, etc…, en rêvent également. Et si on ne remédie pas à cet appel des sirènes, ce traitement inéquitable dénoncé va ensuite créer de nouvelles distorsions qui mineront davantage l’efficacité des institutions toujours en déficit de résultat. Ce qui revient à dire que les employés pourraient, par simple calcul, utiliser cet humour populaire de l’ère Soviétique pour maintenir une grève anonyme, à savoir « Ils font semblant de nous payer, nous faisons semblant de travailler 6 ».
Appréhensions et
prédictions
(Photo le Nouvelliste) |
Le parlementarisme
de chez-nous
Dire qu’autrefois, le titre de parlementaire
était auréolé de gloire et octroyé prioritairement à des notables, professeurs,
avocats, médecins et autres intellectuels, qui s’étaient signalés à l’attention
de leurs commettants par leur contribution à l’élévation de la communauté et de
la Nation. C’était presqu’un sacerdoce, du bénévolat où l’option
d’enrichissement était quasiment absente. Ces personnages avaient pour devoir et
mission de grandir l’humanité à hauteur de rêve. Mais, nos parlementaires
actuels, entretenant des rapports incestueux avec le pouvoir et l’argent, nous déçoivent
énormément à hauteur de frustrations et de déceptions.
Note:
2 - Haïti - Politique : Le salaire
d’un Sénateur est de 10,000 US par mois !
4 –
Expression de Karl Marx dans Le Capital,
rapportée par Thomas Piketty dans « Le
Capital au xxi em siècle. P. 27
5 - La Grande Fracture - Les sociétés
inégalitaires et ce que nous devons faire pour les changer. (Joseph E.
Stiglitz) Prix Nobel d’économie. P.127.
6 – Ibid.
P.131
L'un des combats de Boxe au parlement haïtien
Un ministre « agresssé» par le député Arnel Bélizaire
Un ministre « agresssé» par le député Arnel Bélizaire
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