Hier
encore, certains congénères, surtout les prédateurs du pouvoir, les candidats
en attente d’un poste quelconque en Haïti, se congratulaient sournoisement en
leur for intérieur, lors du départ pour l’exil d’un potentiel concurrent, ou
mieux, d’un éventuel emmerdeur. Dans leur tête, c’est un autre empêcheur de
danser en rond qui vient de traverser la porte de Gorée1, la Porte du voyage sans retour.
Heureusement,
grâce à la technologie, ils se sont royalement encornés dans leur
hallucination. Le boomerang vient de les frapper en pleine face, car l’exilé
est toujours là. Physiquement il est parti mais, par la magie du web, il est
omniprésent et tient mordicus à se prononcer sur l’avenir de son pays abandonné
sous la pression d’une incurie latente. La porte de Gorée est morte de sa belle
mort.
En
effet, depuis trois jours, l’invitation à la réunion du GRAHN avait été lancée
et fixée pour la soirée du mercredi 16 octobre 2019 à 20:00. Les ordinateurs,
les téléphones cellulaires ou autres interfaces étaient mis à disposition pour
établir le lien. Ce n’est pas la première fois qu’une réunion par
Visio-Conférence se tient au niveau du GRAHN pour discuter des affaires courantes.
Mais celle-ci est assez spéciale, puisqu’elle concerne Haïti et sa descente irréversible
en direction de l’enfer. L’heure extrêmement grave invite au sacrifice.
Gorée - La porte du voyage sans retour |
Plus de 80 personnes étaient
reliées via l’Internet. On remarquait tout le monde devant son écran. Citons
pour exemple, le Dr. Charles Tardieu à P-au-P, le professeur Ludovic Comeau à
Chicago, Charlot Lucien à Boston, le révérend père Romel Eustache à Mirebalais,
le professeur Jean Moisset à Québec, le professeur Kénel Délusca en mission à
Saint-Kitts, le Dr. Samuel Pierre, Édith George et Max Dorismond à Montréal, pour ne
citer que ceux-là. Les branches européennes étaient absentes en raison du
décalage horaire, à part le président de GRAHN-France en séjour aux USA. Il
était 2:00 du matin en France et en Suisse.
La réunion par Visio-Conférence
Le
but premier de cette rencontre, via l’ordinateur ou le téléphone de chacun,
c’était de faire le point sur le document intitulé « La Passerelle »
ou « Déclaration de sauvetage national » pour sortir, ou mieux,
pour sauver Haïti des flots tumultueux qui menacent de l’engloutir.
C’est
un document phare extrêmement détaillé et supporté par quasiment 107 associations
et groupuscules évoluant sur le terrain en Haïti. Si la conviction est de la
partie, voilà un projet susceptible d’encadrer toute action positive pour Voyé
Haïti Monté2.
Gorée: La dernière maison des esclaves
En partance pour l’Amérique
|
L’objectif
premier de « La Passerelle », advenant une démission présidentielle,
c’est d’offrir à la nation un encadrement éclairé pour éviter le chaos et l’enlisement
de l’île, pour 25 années encore, dans le même katiouboumbé3 national d’aujourd’hui. En conséquence, elle
souligne que « le retrait de l’équipe dirigeante actuelle devrait être
organisé de façon à protéger les institutions républicaines, éviter le
gaspillage des ressources publiques et prévenir un déchoucage4 généralisé qui ne pourrait qu’accroître la
misère du peuple haïtien et retarder le développement économique du pays… ».
Certains
points de la discussion ont retenu mon attention. Le Professeur Samuel Pierre a
précisé que le GRAHN est un corps apolitique, un Think-Tank, qui, depuis
sa fondation, émet des propositions et publie des documents et des ouvrages
qu’aucun gouvernement n’a daigné feuilleter ou écouter. Le GRAHN n’a jamais
endossé aucun pouvoir établi, préoccupé plutôt à œuvrer à long terme, pour une Haïti
nouvelle, avec un haïtien tou nèf, un individu altruiste,
désintéressé et rassembleur, avec une conscience nationale à toute épreuve
travaillant au bien-être de ses congénères. Le Professeur déclara
péremptoirement, « tout comme nous l’avons été sans relâche depuis 9 ans et
9 mois, nous continuerons sans relâche d’accompagner le pays vers un changement
durable avec la même conviction et la même détermination ».
Gorée - La dernière porte |
Une
autre intervention intéressante concerne la Constitution haïtienne que d’aucuns
voudraient changer. En réponse, le Dr. Comeau précisa que « c’est une
bonne constitution qu’il a récemment relue. Si elle était appliquée dans son
essence, les prédateurs du Parlement n’auraient jamais pris le pouvoir en otage
en mettant le pays sous coupe réglée, en siphonnant les caisses des
institutions au gré de leur fantaisie et de leurs caprices ». Ce fut
une discussion encourageante qui a remis les pendules à l’heure
En effet, cette salutaire
réunion a balisé les chantiers pour inviter nos futurs gouvernants à la
transparence. Ils sont condamnés à changer leur système de fonctionnement, leur
structure de gestion ou le « Système » tout court, où
l’ambiguïté des uns et la rapacité des autres nourrissent la confusion de
l’esprit.
Partir, pour
l’exilé, n’est plus un adieu à Haïti mais, un Au revoir. Messieurs les
prédateurs, vous vous êtes trompés de siècle. Vous vous êtes trompés de rêve. La
diaspora vous épie, le monde vous regarde aller. Avec l’intelligence
artificielle, le monde est un livre ouvert. Vous êtes condamnés à évoluer avec
une once d’humanité. Le temps du gestionnaire-prédateur est presque terminé.
Vous ne pouvez plus voler, piller, ruiner et cacher le magot dans les jarres des
paradis fiscaux comme avant: L’œil de Caïn vous épie matin et soir.
Max
Dorismond Mx20005@yahoo.ca
Note
-1 : Gorée ou l’île de Gorée est à la fois une île de l’océan Atlantique
Nord située dans la baie de Dakar et l’une des 19 communes du Sénégal. C’est
sur cette île qu’on gardait prisonniers les esclaves qui devraient être
déportés en Amérique. C’est un symbole de la mémoire de la traite négrière.
Elle est appelée « la porte du voyage sans retour ».
Note
– 2 : Voye Haïti monté : Sortir le pays de son impasse. Aider le pays
à progresser.
Note
– 3 : Katiouboumbé : expression créole qu’on peut traduire par
désordre total ou conflagration générale.
Note
– 4 : Déchoucage : Expression créole qu’on peut traduire par
déraciner, sortir brutalement de sa place
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