Carl Gilbert cggilb@yahoo.com
Nelson Mandela |
C'est le président sud-africain Jacob Zuma qui a annoncé ce décès survenu vers 20:50 ( heure locale). La télévision aux Etats-Unis a vite fait d'honorer la vie de Mandela qui était devenu le premier président noir de l'Afrique du sud après qu'il eût passé 27 ans en prison pour avoir combattu l'apartheid, ce système politique de domination et de ségrégation de la minorité blanche en ce même pays.
Haiti Connexion Network prend plaisir à publier l'article ci-dessous en guise d'hommage à un homme qui appartient maintenant à l'histoire mais qui restera pour toujours un symbole d'abnégation, d'amour, de pardon pour son pays et le monde entier.
Le parcours en bref de ce homme qui a voué son existence à la lutte contre le régime raciste de l'apartheid...
Nous sommes au début de la deuxième moitié du 20e siècle. Un vent révolutionnaire souffle sur l’Afrique…1960, l’année des grands bouleversements. L’Afrique est en ébullition. Le courant indépendantiste traverse le continent et le mouvement prend de l’ampleur de jour en jour. Particulièrement les pays du Sud de l’Afrique, où l’apartheid fait des ravages, sont chauffés au blanc! Depuis quelques temps de jeunes leaders noirs sont projetés au-devant de la scène, à la faveur des événements.
Kwame N'Krumah |
Parmi eux, Kwame N’Krumah au Ghana (indépendant en 1957), Se kou Toure en Guinée (indépendant en 1958), les hommes du Groupe « Conscience Africaine » et de l’ABAKO (l’association des Bakongo). D’un côté, l’Afrique du Sud est en première ligne, avec Walter Sisulu, Oliver Tambo et Nelson Mandela et de l’autre la colonie belge se fait entendre…
Au Congo, la bataille entamée depuis 1958 se poursuit avec acharnement. Les hommes du MNC (Mouvement National Congolais) sont en première loge. Nous citons : Joseph Kasavubu, le fameux Patrice Lumumba auxquels se joindra Joseph Mobutu Sese Seko. Ils sont en plein dans cette bataille qui va les immortaliser, particulièrement Lumumba, avec beaucoup d’autres qui vont défier les belges qui n’entendent pas perdre leur pouvoir et surtout leurs privilèges et leurs intérêts. Le pays est transformé en un véritable champ de bataille où les indépendantistes affrontent les conservateurs belges et leurs suppôts. Bientôt ça va commencer par mal tourner avec les Kantagais (Moïse Tschombé et Godefroid Mamongo). Et comme l’a dit Frantz Fanon : « En 1960, l’Afrique a la forme d’un pistolet dont le Congo est la gâchette ».
En Afrique du Sud, les hommes de l’ANC (le Congrès National Africain) mènent la danse. Créé en 1912 pour combattre l’apartheid l’ANC est entré fort dans la lutte. Nelson Mandela est avec eux. Il s’active à combattre la ségrégation raciale sur tous les fronts. À l’instar de Toussaint Louverture qui était en guerre tantôt contre la France, tantôt contre l’Espagne, tantôt contre l’Angleterre, tantôt en accord avec eux pour obtenir la liberté des noirs, Nelson Mandela, tantôt s’approprie les revendications de la masse noire exploitée et humiliée (91 à 93% de la population). – Il incarne même la révolution puisqu’on le trouve à la tête de la lutte armée après l’interdiction de son mouvement en 1960, – tantôt il collabore avec les blancs selon les circonstances, toujours pour défendre les noirs. Mais il est d’abord un activiste. Arrêté en 1962 puis libéré, il est de nouveau arrêté puis condamné à perpétuité en 1964. De sa prison, il a continué à mener la lutte contre les Afrikaners, aves les hommes de l’ANC.
Si l’Afrique du Sud s’est retirée de l’Union Sud Africaine, en 1961, et s’est transformée, par un référendum, en république indépendante, cela n’a pas mis fin pour autant à l’apartheid. Aussi la lutte s’est amplifiée avec l’arrestation et la condamnation de Mandela.
Sekou Toure |
Il ne se fait pas de doute que Mandela est de la race des Zoulous. Il n’a jamais lâché prise même quand il a été laissé tomber par des partisans et même par sa femme. Quand, après 1966, Balthazar Johannes Vorster et Peter Botha poursuivent la politique d’apartheid, Nelson Mandela, qui est toujours en contact avec les militants de l’ANC, donne ses instructions et communique sa nouvelle stratégie pour des attaques en bonne et due forme. Ainsi, en 1976 de graves émeutes secouent SOWETO et vont se reproduire jusqu’en 1985-1986 quand les émeutes antiapartheid font de nombreuses victimes. Le gouvernement déclare alors l’État d’urgence et fait déchainer la violence de la répression. Ce qui est condamné par plusieurs pays du globe.
En 1988, l’Afrique du Sud conclut un accord avec l’Angola et Cuba qui entraîne un cessez-le-feu en Namibie. En 1989, Frédérick De Klerk succède à Peter Botha à la tête du pays. Il est plutôt un modéré. En 1990, il met en œuvre une politique d’ouverture vers la majorité noire : Il légalise les organisations antiapartheid, il libère enfin (après 27 ans de réclusion) Nelson Mandela, qui est accueilli comme un héros national.
Peter Botha entame alors des négociations directes avec l’ANC et abolit la ségrégation raciale dans les lieux publics. Une victoire totale pour les combattants de la liberté et de l’égalité. En 1991, les trois dernières lois régissant l’apartheid sont abolies.
Peter Botha |
Nelson Mandela, devenu, à sa sortie de prison Vice-président de l’ANC, est élu Président de l’ANC (1991-1997). Il change de stratégie. Au terme des négociations difficiles engagées en 1990, une constitution intérimaire est adoptée en novembre 1993 sous l’impulsion conjointe de Frédérick De Klerk et de Nelson Mandela.
10 Décembre 1993: Nelson Mandela (G) et F. de Klerk (D) posent avec leur médaille du prix Nobel de la Paix et leur diplôme à Oslo. |
En 1994, la première élection multiraciale est organisée à l’issue de laquelle Nelson Mandela est élu Président de la République (1994-1999) et choisit De Klerk comme son vice-président. Un gouvernement d’Unité nationale est formé, ce qui a permis à l’Afrique du Sud de retrouver sa place dans le concert des nations. Deux années après une nouvelle constitution est votée (1996). Alors, De Klerk et le parti National quittent le gouvernement.
Le processus de démocratisation entamée avec De Klerk s’est approfondi avec le gouvernement de Mandela et continue encore son chemin en Afrique du Sud avec les gouvernements successifs… Si la vision de Toussaint Louverture était d’obtenir la liberté des Noirs, Nelson Mandela, lui, sa vision était d’abolir la ségrégation raciale et de conduire aussi son peuple à la liberté et à l’égalité. Deux hommes d’Afrique traversés par les mêmes sentiments et hantés par un même rêve, une même vision. Même s’ils ont empruntés des chemins différents : Toussaint, la diplomatie surtout – Mandela la lutte armée d’abord. Mais tous les deux connaissaient le maniement des armes. En demandant à De Klerk de rejoindre son gouvernement, Mandela s’est révélé aussi un fin stratège et un grand diplomate.
Aujourd’hui, l’Afrique du Sud est devenue une synthèse de mondes en partage. La nation devient un lien de rencontre pour l’intelligentsia, nous dit l’historien camerounais Achille Mbembe. « Et l’Afrique du Sud est comme un lieu ou s’invente un futur pour le continent, un futur « afropolitain ». Tout cela grâce à Nelson Mandela du haut de ses 95 ans, même si le pays souffre, comme Haïti, d’une panne de l’imagination.
Article soumis par Le Novateur.
F. De Klerk |
Mandela s’est même converti plus tard en supporteur de l’équipe de rugby des blancs, le « Springbok » dont il portait le maillot le 24 juin 1995 lors de la finale de la Coupe du Monde avec la Nouvelle Zélande. Il voulait ainsi montrer aux noirs comme aux blancs que la réconciliation est obligatoire. C’était un coup de maitre, à la surprise générale, d’un dirigeant de consensus qui a su gagner le cœur de la minorité blanche tout en étant adulé par la masse noire. Donc, que ce soit l’arme de la dialectique, de la stratégie ou de la diplomatie, que ce soit, la dialectique des armes, ils étaient bien armés.
Tous les deux, ils ont mené le même combat, avec les mêmes armes, pour atteindre le même but. Cependant si Toussaint a connu la prison, comme Mandela, il n’a pas eu sa chance d’en sortir vivant pour terminer son œuvre. Heureusement, Dessalines, Christophe, Capois et les autres étaient là pour le faire à sa place.
Président Barack Obama et Président Jacob Zuma lors d'une rencontre officielle en 2013. |
Tout compte fait, Nelson Mandela l’icône mondiale de la réconciliation raciale, le Madiba du clan royal des Thembus, de la tribu des Xhosas, et le Premier des Africains -, s’est révélé le Toussaint Louverture des temps modernes. Raison de plus pour avoir une pensée spéciale pour lui dans nos prières. Que son âme repose en paix !
Article soumis par Le Novateur.
Une adaptation de Hervé Gilbert, pour Haiti Connexion Network. Cet article peut-être reproduit mais crédit doit être donné en plein comme indiqué ici.
L'Histoire de Nelson Mandela en 57 minutes
Le cauchemar de Mandela
Le cauchemar de Mandela
Simple Minds - Mandela Day
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ReplyDeleteDe Jean Mathurin de la TRIBUNE DE LIBRE OPINION
ReplyDeleteMandela !
L'un des géants et l'une des plus grandes figures du 20e siècle vient de partir.Mandela,c'est l'homme exceptionnel qui a défié la vie par sa persévérance,son opiniatreté,sa témérité et la mort par son endurance. Mandela,c'est l'inspiration de tous les peuples de la terre
et son souvenir va nous habiter toute la vie.
JM