Par Max Dorismond
Ces visages que cache la crise en Haïti... Photo (Radio Canada) |
L’histoire est remplie de ces
exemples où le bourreau retrouve soudainement son humanité face à la pauvre et
innocente victime, condamnée pour avoir osé dire: «Basta».
Ces gens vivent déjà en enfer, pourquoi les tuer 2 fois ? |
Dans la conjoncture présente, on
spécule, on gargarise sur le cas de ces bizarres
de mercenaires, ces extraterrestres tombés du ciel. Même
les contractants soutiennent que c’était eux la cible. On se perd en
conjectures. Des insignifiants qui sont plus à blâmer qu’à féliciter n’hésitent
pas à ajouter leurs noms dans la liste des gens à abattre. Tous essaient de se donner
de l’importance, afin de se positionner sur l’échiquier, en cas de vacances
présidentielles. Leur cible, n’est pas nécessairement le pouvoir, ni le
bien-être de leurs frères, mais précisément la caisse mirobolante avec ses
espèces sonnantes et trébuchantes.
Dans ma réflexion, je me mets dans
la peau des mercenaires. Ils arrivent
dans le pays et leurs premiers regards croisent les yeux d’éléments faméliques,
prêts à vendre leur corps et ce pour quelques piécettes. Décharnés, désossés,
la bouche muette, de jeunes enfants, des fillettes qui tendent la main,
espérant obtenir de l’étranger nouvellement débarqué, une menue monnaie. Après
quelques pas, autour d’eux, l’amoncellement de détritus dégageant une odeur
pestilentielle et la cohorte de mouches, viennent troubler la vue et la
respiration de ces visiteurs impromptus. Les
maisonnettes bancales, les tentes en toile qui protègent des familles
contre le soleil et non la pluie, les enfants décharnés au ventre enflé et les
cheveux roux dénotent une carence de vitamine. Une cargaison de porcs se
délecte dans cette masse putride de déchets à la recherche de quelques
malpropretés pour assouvir une intenable faim. C’est une vision de l’enfer sur
terre.
Les clients font la queue devant un magasin de propane à la faveur d'une accalmie. |
À chaque pas dans la ville, la
conscience des étrangers rentre en conflit avec leurs propres valeurs. Même si
ce sont des machines dressées pour tuer,
même s’ils en ont l’habitude, ils viennent de découvrir, pour une fois, qu’ils
sont aussi des êtres humains. Les slogans des jeunes manifestants, la plupart
encore adolescents, qui crient leur famine, leur exploitation sans nom, la
violence sauvage des prédateurs, le vol sans équivalence dans le monde de
l’argent de Petro Caribe, ne font pas d’eux, des révolutionnaires, des
socialistes, comme certains prétendent.
À la rencontre de ce peuple bon
enfant qui manifeste en chantant leur cause, sans assassiner les riches
exploiteurs qui les ont réduits à l’état de mendiants, de sous-hommes, de moins
que rien, les mercenaires ont préféré jouer la comédie en se présentant à la
banque Nationale un dimanche, pour éveiller les soupçons et se faire arrêter
comme des bambins. Une façon de réclamer la cagnotte promise sans livrer la
marchandise. Yo pa égaré!
La police nationale ne possède
que des tire-pois. Elle n’a aucune gloriole à tirer de cet évènement. À vaincre sans péril, on triomphe sans
gloire. Devant la quantité d’armes remises par ces contractants, les petits
poliçons de chez-nous n’étaient pas en mesure d’y faire face. Devant la bande à
Arnel, qui baladait avec leurs armes depuis la région de Grand-Ravine
(Martissant), son fief, jusqu’à
Pétion-Ville, ces gendarmes n’avaient joué que le rôle de figurants, se cachant
derrière les maisonnettes pour se soustraire de la vue du maître du sérail, en
promenade. Quelle serait leur attitude devant l’arsenal de ces étrangers qui
savaient d’avance qu’ils arrivaient en terrains conquis pour une balade
tropicale sous les étoiles?
Heureusement, leur cœur de père
a eu le dessus et a tranché à la vue d’une
jeunesse affamée, délaissée, abandonnée, qui manifeste pour réclamer un
peu de compassion, parce qu’ils en ont marre de souffrir, de fuir pour se
métamorphoser en esclaves au Chili ou aux États.
Donc, comme les Polonais, Ces mercenaires ont préféré déchirer le
contrat et ne pas perpétrer ce crime qui les aurait marqués au fer rouge, la
vie durant. Ils ont connu l’Irak, l’Afghanistan et autres, face à des
combattants décidés qui ne font jamais de cadeau. Demandez aux Français, aux
Russes et aux Américains. Ils vous donneront des nouvelles.
La crise politique menace la sécurité alimentaire en Haïti |
Mais cette fois, ce sont de
pauvres innocents, des enfants exploités qui ne réclament rien, qu’un peu de
mieux être. Ils ne méritent pas la mort. Devant cette île surpeuplée avec ces
rues toujours congestionnées, si ces jeunes devraient se comporter comme les
kamikazes du Moyen-Orient, le carnage serait quotidien. Il n’y aurait pas assez
de bras pour ramasser les cadavres.
Non! Ces pauvres ne méritent pas
de telle condamnation. Ils ne méritent pas le titre de terroristes aveugles. Ils
ne doivent pas mourir avec une balle à la tête. Ils méritent de vivre. On s’est
trompé de condamnés.
Or, telle que j’envisage la fin
de cette comédie, si les mercenaires étaient accusés aux États-Unis pour cette
histoire, je doute qu’ils ne brandissent à titre de défense, cette notion de grandeur
d’âme pour avoir trahi par humanité les commanditaires du crime avorté, ils gagneraient
le procès haut la main. Et s’ils se mettent à table pour détailler les
« causés », le monde entier pourrait entonner en chœur avec Trump, le
refrain que nous connaissons tous : « Haïti est vraiment un pays de … »
Citation de Blaise Pascal:" l'homme n'est ni ange ni bête et le MALHEUR veut que qui veut faire l'ange fait la bête "
ReplyDeleteDans ce texte Max Dorismond avait démontré avec brio justement le contraire. À savoir :"l'homme n'est ni bête ni ange et le BONHEUR veut que qui veut faire la bête fait l'ange
Pierre Jacques Ferdinand
Réflexion très percutante monsieur Max. Chapeau !
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