Les porte-drapeaux lors de la cérémonie d'installation du nouvel état-major de l'armée d'Haïti. |
Non-productivité et chantage éhonté
Tous les économistes sont unanimes à
répéter que le pays doit augmenter sa production agricole et manufacturière
tout en accroissant ses exportations pour pallier à la dérive de sa monnaie,
devenue des « zorèy bouriks » selon la malice populaire. Il doit
stimuler la création d’emplois et endiguer sa démographie galopante. Tout est
importé : les matières premières, les biens de première nécessité. Les
pays voisins y trouvent
leur beurre, et Haïti s’enfonce de
plus en plus dans le néant. Dépendante de l’aumône internationale et de sa diaspora, nul
n’arrive à conjurer cette sordide vocation. C’est une nation sous perfusion.
Quelques officiers de la nouvelle armée d'Haïti |
Au lieu d’écouter les conseils des humbles,
elle s’endette jusqu’au cou pour plaire à des maîtres-chanteurs de la classe
des nantis qui ne rêvent d’une armée que pour
quatre importantes raisons : 1 – Contrôler le pouvoir à leur guise. 2 –
Perpétuer la contrebande. 3 – Instrumenter le chantage. 4 - Casser les reins de la masse qui en a marre
de leur crapulerie. Si on oublie son passé, nul ne peut prendre sa revanche sur
l’histoire et l’idiotie. Les forces occultes se frottent déjà les mains
d’aise. Elles n’attendaient que cet
escadron des ténèbres, cet instrument incontournable pour faire chanter les
imprudents.
Piste
de solutions entre mille
Dans l’actuelle conjoncture, la gouvernance
aurait intérêt à faire preuve de rationalité dans l’utilisation de ces milliers
de chômeurs instruits. Au lieu de les armer, les barbariser et les abêtir, elle
ferait mieux de les humaniser, en invitant Jovenel à investir dans des
machineries ou des instruments aratoires, à créer des écoles techniques dans
l’agroéconomie, à chausser ses bottes de laboureur des terres et des esprits.
Ce serait le plus bel héritage à inscrire dans l’histoire de la production
nationale, en guise de suite à la « Caravane
du changement ». Et la nation lui en saurait gré.
Un
Président imperméable aux leçons quotidiennes
Président Jovenel saluant le commandant de bataillon lors de la parade militaire du 18 novembre 2017 au Cap-Haitien |
En lisant les journaux d’Haïti, le
Nouvelliste et Haïti-Liberté, de la semaine écoulée, j’avais pris connaissance
de la sainte colère piquée par Jovenel Moïse lorsque la France, ou plutôt la
compagnie française « Total SA » lui a retourné le chèque soutenant
sa commande de 500
000 gallons d'asphalte pour finir les routes déjà entamées. Sous la combine
des arnaqueurs locaux, la commande du président à 1,85$ le gallon a été annulée
en raison du non-achat à 3,99$ du produit entre les mains des contrebandiers de
Port-au-Prince.
Humilié, M. Moïse a réuni son Conseil des
Ministres et ce dernier a octroyé désormais au gouvernement la primauté sur
toute commande de matières premières : asphalte, mazout et tous les
dérivés du pétrole. Ce qu’un arrêté du journal officiel, Le Moniteur du 12 janvier,
confirme en ces termes : « Il
est impérieux de prendre toutes les mesures pouvant contribuer à l’amélioration
des conditions de vie de la population à cause du caractère stratégique des
produits et dérivés du pétrole, ainsi que ceux liés aux gaz naturels3 »
18 novembre 2017 - Cap-Haïtien |
Autrefois, au temps où l’armée défaisait
les rois, cette clique sournoise aurait soudoyé les militaires et un coup
d’État aurait envoyé le Premier citoyen sur les bancs de l’exil pour avoir osé
jouer dans les plates-bandes des vrais maîtres du pays. Ces derniers ont
simplement joué aujourd’hui, à visage découvert, pour humilier Jovenel. Mais,
demain, avec cette armée toute neuve,
composée d’une jeunesse toxique, qui n’a jamais eu d’autres exemples à ses yeux
que des prédateurs toujours très vite sur leurs patins, la pieuvre tentaculaire
ne passera point par quatre chemins. Elle présentera
au président, actuel ou à venir, un passeport pour l’exil et une menotte en
fer, « cet instrument céleste que
portaient les souverains d’Espagne aux heures des grandes cérémonies4
». Et ce sera la fin des Mohicans!
Chaque
pantalon a sa mesure et son tailleur
En Haïti, à chacun son
prix! Tous attendent l’appel du rapace qui va les rétribuer pour la sale
besogne, pour semer le chaos et déstabiliser l’ordre établi. Ils sont toujours
prêts. Ce sont de vrais scouts. Selon la règle prépondérante du milieu, vous
êtes nommés le matin, dans l’après-midi, vous roulez déjà carrosse et le
lendemain, sans gêne et sans reproche, vous vous offrez des petits châteaux des
contes de mille et une nuits. « Yo
pa egare ». Donc, ces jeunes
soldats, ces petits héritiers de la gabegie, et les anciens sadiques qui les
coiffent, se voient déjà riches. Ils seront simplement des petites marionnettes
dédiées entre les griffes des riches
d’Haïti, qui n’hésiteront nullement à concrétiser grassement leur rêve
secret, sur un plateau vert, au moment choisi. En créant ce nouveau corps
d’armée, le gouvernement vient d’hypothéquer la paix, la stabilité, la sécurité
et le retour de sa diaspora investisseur, en ajoutant à la somme des doigts
dans le pot de confiture, 5000 à 10 000
affamés de plus. C’est brillant!
J’éprouve un certain malaise avec cet Exécutif qui
fonctionne comme un véritable Don Quichotte, sans une miette de pouvoir. Omniprésent,
il s’anime comme le diable dans l’eau bénite pour montrer sa bonne foi. Mais,
pardieu! Les As du Législatif le font
déjà chanter, contrôlent toutes les institutions et mangent à tous les
râteliers. Les nantis siphonnent
la taxe et profitent des franchises douanières. Toute une clique s’amuse et
mange allègrement « à bouche que
veux-tu ». Le voilà, aujourd’hui
encore, commettre l’irréparable, en dressant un autel à l’armée, sur lequel la
Pieuvre nationale le sacrifiera, le jour venu, pour avoir écouté le chant des
sirènes.
Alors Haïti, disons adieu à la démocratie
naissante, adieu à
l’espoir bafoué, adieu aux prémices de liberté retrouvée, adieu aux élans de
stabilité! Définitivement, les deux
pieds de notre terre natale sont rigidifiés dans la m… le mot de Cambronne.
Note 1 - : « Les Assassins Financiers sont des
professionnels grassement payés qui escroquent des milliards de dollars à
divers pays du globe. Ils dirigent l’argent de la banque Mondiale, de l’Agence
américaine du développement international (U.S. Agency for International
Development – USAID) et d’autres organisations « humanitaires »
vers les coffres des grandes compagnies et vers les poches de quelques familles
richissimes qui contrôlent les ressources naturelles de la planète. Leurs armes
principales :… les élections truquées, les pots-de-vin, l’extorsion, le
sexe, le meurtre. Ils jouent un jeu vieux comme le monde, mais qui a atteint
des proportions terrifiantes en cette époque de mondialisation ».
« Je sais de quoi je parle… car j’ai été moi-même un assassin financier »
(John Perkins – Auteur de : Les
Confessions d’un Assassin Financier)
Note 3 - : Src. Le journal « Le Moniteur » du 12 janvier 2018.
Note 4 - : Phrase célèbre prononcée
par l’officier espagnol Alonso de Ojeda, lors de « l’arrestation » par ruse du Cacique indien Caonabo, à
Hispañola (St_Domingue). Ce dernier fut invité à prendre place sur la croupe du
cheval de Ojeda avec une menotte aux bras, une « façon élégante » de rencontrer le chef, Christophe Colomb, qui
se ferait un plaisir de le recevoir. Ce fut pour sa perte.
No comments:
Post a Comment