Le ridicule, ça fait grandir les cons. À preuve, nous avons trois présidents |
Par Max Dorismond
Qui a gagné, qui a perdu? Ce célèbre refrain de notre barde national, Guy Durosier, vous révèle-t-il quelques souvenirs dans la vie d’un couple séparé en phase de réconciliation. Justement, qui a gagné, qui a perdu aujourd’hui ? Mon frère, mon cousin, mon voisin ! Mais voyons, il me ressemble. Donc, c’est axiomatique : c’est encore moi, c’est encore nous, c’est encore Haïti. Cette terre de rêve qui hante notre sommeil a reculé d’un quart de siècle.
Ici, comme je l’avais écrit antérieurement, il n’est plus question de président, de X ou Y. Faut transcender la politique partisane, refroidir nos envies pour nous dépasser et aller plus loin encore, plus loin que l’histoire, pour redessiner la Nation espérée, en toute priorité. Il nous reste seulement cinq minutes avant la frontière du désespoir. Cinq minutes pour éviter la folie collective. Commençons par la refondation du pays en remaniant la « Loi Mère », objet de toutes les dérives. D’ailleurs, rien ne nous empêche de rebattre les cartes et repartir à neuf.
Nous avons le devoir de regarder, d’analyser, de soupeser toutes les propositions de sortie de crise déposées sur la table pour défier le diable. Ce ne sont nullement des fous qui les ont pondues, mais bien des consanguins, doués de jugement. Des humains, qui rêvent de rédemption, de paix, de progrès, pour un pays souffreteux, qui ne vit que d’espoir et d’assistances.
Nous sommes tous d’une Nation, qui devient la risée du monde, un symbole d’exemple universel à éviter, imposé sciemment par l’exploiteur à la conscience de tous les déshérités de la terre, en guise d’insigne, à titre d’avertissements, pour bloquer, miner, annihiler leurs rêves de délivrance. On les culpabilise avec l’image d’une Haïti dépendante, squelettique, rabougrie, sous-développée, idiote et niaiseuse. Une Nation qui s’entredévore. Quelle honte! Quelle déchéance, pour un peuple qui a chamboulé le sinistre objectif du capitalisme naissant.
À titre de métaphore,
utilisons, pour converser entre nous, la voix de Guy Durosier, dans sa célèbre interprétation de « Je reviens te chercher ». C’est exactement ça
la réalité : « Qui a gagné, qui a perdu/ On ne sait rien, on ne
sait plus / On se retrouve les mains nues/ Mais après la guerre…/ Il nous reste
à faire la paix... »
Quoi de plus éloquent que la paix des braves! Tout est sur la table. Ne soyez pas vindicatifs. Le courroux est ingrat et ne tue que son maître. Plusieurs ont fanfaronné pour faire peur à l’autre. Que de bruits, que de vociférations! Et après, c’est le silence mortifère d’une nation en déroute. La queue entre les jambes, on retourne dans son coin, les couilles molles, pour ronger son frein.
Bousculons la routine, dialoguons, trouvons la clé de notre irrévérence. Ne cherchons nul coupable, sinon on finirait avec le pays en prison. Enlevons le zipper devant le voile qui nous obscurcit la conscience. Prenons place à la table. Soupesons chaque détail en frères de sang, et non en compétiteurs.
Aliénés mentalement sous les coups de boutoir des ennemis de la nation depuis 215 ans1, victimes du syndrome colonial, nous ne nous rendons pas compte de notre glissade vers la déchéance. Étant aveugles par destination, nous nous sommes trompés d’adversaires en nous en prenant à nous-mêmes.
Allons, réveillons-nous, sa2pristi ! Il est encore temps. Assoyons-nous et détaillons ou analysons les raisons, les causes de nos déchirements, pour y installer des garde-fous, aux fins d’éviter de tels débordements, de tels esclandres, de tels énervements, à doubler le profit de ceux qui ont investi dans notre immaturité.
Bousillons leur programme. Nous ne sommes point des incompétents. Des preuves sonores habillent encore l’histoire. C’est un sophisme. Ils prêchent le faux pour obtenir le vrai. Ne leur offrons plus ces délices. Laissons-les rêver en couleur. Ressaisissons-nous. Donnons une dernière chance à la chance. Il reste une lueur d’espoir : c’est nous !
Réservons-nous ce droit et ce devoir de retoucher la Constitution, une fois pour toutes, en utilisant les conseils les plus pertinents, glanés à droite et à gauche, par écrit, à l’oral. C’est un besoin viscéral. Nos frères, éparpillés partout autour du globe, en ont vu du pays et sont prêts à partager leurs voix et leur mémoire. Nos paysans ou campagnards, qui ont vécu loin de nos tumultes citadins, ne sont pas sans ressources, et peuvent apporter leur grain de sel dans la recette nationale. Tous ou presque tous, doivent contribuer de leurs expériences et réflexions sur 215 années d’échecs pour relancer la machine.
Point n’est besoin de détailler ici le programme à venir. Les propositions fleurissent là, sous « l’arbre à palabre ». Il nous suffit de cueillir les fruits pour préparer un cocktail de passion et de raison avant de déguster le plat de résistance de la Constitution, qui sera digéré sans crainte de constipation. Car, nous ne voulons plus revivre ces « déchouquages2 » décapants, ces pays-lock déroutants, cette dualité asphyxiante, ces chantages de parlementaires, ces dictatures infamantes, ces siphonnages du trésor public, cette corruption endémique, cette insécurité déstabilisante, ces déchirements fraternels perturbants, ces fuites de notre jeunesse vers des ailleurs hypothétiques.
Attelons-nous vite à la tâche ! Pour maintenir la flamme, gardons simplement à l’esprit que les grandes décisions naissent souvent dans le fracas des dissensions !
Max Dorismond
NOTE
1 – 215 ans : Date calculée à partir de la mort du libérateur, J-Jacques Dessalines en oct. 1806.
2 – Déchouquage :
terme créole emprunter des bucherons. Il vient du mot « dessoucher »,
c’est-à-dire, enlever la partie basique de l’arbre qui reste dans la terre.
Dans notre créole, c’est une allégorie, une expression métaphorique violente,
utilisée pour déstabiliser un adversaire, surtout en politique
Félicitations M. Dorismond pour ce beau texte! Malheureusement les concernés ne vont pas le lire afin de faire un examen de conscience. Je pense qu'ils sont complètement inconscients tant ils sont aveuglés par le pouvoir. J'ai toujours dit qu'il y a trois handicaps majeurs entravant tout progrès en Haïti: La constitution de 1987, les politiciens haïtiens dans la majorité des cas et la bourgeoisie haïtienne
ReplyDeleteC'est cette constatation qui handicape les progressistes de chez-nous. Si une partie s'en fout des idées avancées, ou les regarde comme des chiens de faïence, le bateau n'irait nulle part. C'est bien dommage.
ReplyDeleteComme toujours ton article est excellent, réaliste. Tant mieux pour ceux qui peuvent l'apprécier et tant pis pour ceux qui gardent leurs œillères ne regardant que droit devant eux.
ReplyDeleteLa situation de notre pays reste toujours inquiétante pour ceux qui s'y intéressent encore.
Je dois avouer que, Aristide et Jovenel Moïse m'ont profondément déçue.
Mon père n'avait qu'une idée en tête : celui qui doit sauver ce pays, sortira de la paysannerie. À cette époque de nombreux petits gars de la campagne commençaient à faire des études dans les centres urbains. Il faut croire que l'instruction n'est pas vraiment la clef de la droiture et de l'intelligence.
Je ne verrai pas la renaissance d'Haïti, mais je sais au plus profond de moi-même que mon pays renaitra un jour car ses tentacules sont nombreuses et profondes, s'étendant à travers tous les pays du monde..., à la planète entière.
Grâce à des hommes comme toi, on est, à chacune de vos chroniques, confronté à notre conscience en nous posant la question : que puis-je faire pour sauver mon pays ?
Mon père n'a jamais cessé de nous redire : N'oubliez jamais que le sol de ce pays est imbibé du sang de nos ancêtres, ces combattants qui ont foutu Rochambeau et sa clique à coup de pied hors de ce pays.
Ma cousine qui a célébré ses 100 ans le 12 décembre dernier, m'a dit clairement qu'elle avait la ferme intention de célébrer 10 autres anniversaires. Peut-être verra-t-elle la renaissance de notre Haïti chérie, ce petit coin de terre paradisiaque?
Amitiés,
Janine R.M.
Mon Cher Max,
ReplyDeleteJ'ai bien aimé ta phrase : « Ne cherchons nul coupable, sinon on finirait avec le pays en prison. »
Cela démontre que nous sommes tous coupables de quelque chose. Notre pays est en train de foutre le champ sous les yeux de ses fils qui s'entredéchirent.
Le coup d'état avorté de Mme Louise Gauthier à la demande US. Est-ce que c'est le début d'une prise de conscience de ne pas servir les intérêts étrangers contre nous-même. Si c'est le cas ton texte tombe à point.
Il ne faut pas oublier qu'il y aura toujours des Haïtiens prêts à aider l'étranger à déstabiliser Haïti pour de l'argent et c'est un problème majeur. Nouvelle constitution ou pas, c'est le nœud du problème à résoudre.
Jacques Casimir (Pasteur d'Amoulio)
Pardon... Tous responsables, pas tous coupables....Les coupables sont ceux qui se sont comportés comme d'odieux criminels,en spoliant le peuple, en pillant le pays en collaborant avec les ennemis contre la Nation.
DeleteSalut le retraité
ReplyDeleteC’est de loin un de tes plus réalistes textes
Bravo et merci
Gérald C.
Excellent programme de relèvement de la nation. Travailler dans le marasme pour sortir un document qui nous convient, et mettre fin aux pratiques anarchiques de déchoucages et autres... Bravo cher ami.
ReplyDeleteMon Cher Max
ReplyDeleteJe vois que tu tiens toujours la Barre , MALGRE LA TEMPETE ...
Je te comprends et je t admire dans tes cris de douleurs qui je sais sortent d une ame transpercee par la realite Moi comme tu le sais J ai touche la plaie du doigt pendant plus de 14 ans Le mal est profond et les metastaces sont partout . Le temps est a l action commune non a la comtemplation du desastre ni aux pleurs innutiles ALAEA JACTA ES Il faut agir et frapper fort meme s il faut DONNER LA GARDE Advienne que pourra