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Thursday, March 2, 2023

Ariel Henri rêvait-il d’être le Zelensky des Caraïbes

La communauté des Caraïbes n'a pas mordu à l'hameçon: c'est non!



Par Max Dorismond 

La géopolitique nous arrive parfois avec ces déconvenues qui peuvent nous surprendre les culottes baissées. 

En fait, avant la réunion de la CARICOM1, toute la conjoncture indiquait que les voisins étaient réceptifs et que Haïti allait bénéficier des faveurs des César antillais. Justin Trudeau, Premier ministre du Canada à qui l’Oncle Sam avait confié le «remote control» de la rédemption, était l’invité d’honneur. Les indices des effets pervers du banditisme haïtien sur les îles environnantes se révélaient déjà comme une encombrante épine à extraire des chaussures des membres du groupe, selon les analystes de la région. Toutes les étoiles étaient alignées en faveur de notre Ariel national. 

Coup de tonnerre! Surprise sur prise, la montagne a accouché d’une souris. Notre transitioniste s’est retrouvé le bec à l’eau. Ce fut un échec cuisant, la CARICOM s’est désistée. C’est le retour au bercail sans panache, sans sirène, la queue entre les jambes. Ajustons notre rétroviseur pour saisir l’insaisissable! 

Mi-octobre 2019, au départ de la MINUSTHA qui avait englouti près de 6 milliards de dollars dans l’île, j’avais écrit que la prochaine crise n’attendrait pas 4 ans pour montrer ses couleurs. La nostalgie du «Green back» allait donner des ailes aux faiseurs d’évènements. Ils voudraient continuer à ramer dans le beurre. 

En effet, on ne pourrait noircir d’un coup de pinceau l’eldorado qui avait pignon sur rue pendant 15 ans. Les oligarques et leurs actionnaires avaient investi des millions dans la construction d’hôtels de luxe et de châteaux des mille et une nuits à offrir aux étrangers et à leur famille. La route de la drogue traversait l’île en chantant. Les contrebandiers tant nationaux qu’internationaux étaient aux anges. La prostitution fleurissait, l’argent coulait à flots. Beaucoup de petits propriétaires louaient leur maison aux travailleurs des ONG et dormaient dans l’arrière-cour. Donc un retour des Yankees est souhaité. Une crise sur mesure sera décrétée pour ramener les dollars sous le ciel bleu de Toma. 

Le temps d’y penser, le président Jovenel est assassiné, les kidnappings se multiplient. Les armes de guerre décorent le pavé. Leurs crépitements annihilent la nonchalance. À chacun son gang. C’est le chaos. Finie la romance! 

Entretemps, « le p’tit transit », expression adorée du défunt président, va bon train. Un tweet de l’ambassade des USA a mis la table pour Ariel Henri à titre de Premier ministre. Les gangs ont beau jeu. La police ne fait pas le poids. On étale comme attendu la partition musicale. Ariel appelle au secours et frappe à la porte de l’OEA. Ses courbettes infantilisantes devant le blanc indisposent et font s’esclaffer la nation. Dans sa posture démesurée, il risque de noircir ses lèvres sur les chaussures fraîchement cirées de ses interlocuteurs. Malgré tout, les interpellés résistent et tergiversent : c’est la valse-hésitation et un soupçon de refus sans le nom. 

Entre autres, c’est la guerre en Europe. Un tapis de milliards a été déroulé pour Zelensky, le président de l’Ukraine. Ariel, en « péteur de tête2 », se croit en droit d’insister. C’est peine perdue. Vu que la rumeur rapporte qu’il avait reçu un appel de l’un des assassins de Jovenel dans la nuit du carnage, serait-ce suffisant pour semer le doute et indiquer à ses interlocuteurs étrangers qu’il n’est pas fréquentable? Le ciel nous le dira. 

Par contre, je peux noter que mon pays est un mendiant historique qui ne fonctionne qu’avec l’obole des institutions internationales. Aucun dirigeant ne peut mettre un pied devant l’autre sans présenter sa gamelle au maître blanc. Pour boucler son budget annuel, l’aide étrangère est toujours là à titre de béquilles. Or, à y  voir clair, c’est vraiment un puits sans fond, sans garantie de résultat. La face d’Haïti crie toujours famine au point d’irriter les bailleurs de fonds. 

Toutefois, j’avais tiré la sonnette d’alarme dans un de mes articles, en parodiant un proverbe burkinabé : «On ne marche pas deux fois sur les couilles de l'aveugle ». C’était une façon de souligner que les donateurs ne sont pas des cons, quant à la masse d’argent évaporée, envolée, au nom de la reconstruction de l’île sinistrée, après le séisme de 2010. Peut-on leur reprocher leur inaction? 

De désaveu en désaveu, de courbette en courbette, Ariel se tourne vers les cousins des Antilles : La CARICOM. Il y eut un début d’enthousiasme avant la 44e réunion du 16 février. Notre Premier ministre se voyait déjà en un Zelensky des Caraïbes, récoltant dollars après dollars, aide militaire et policière, etc. 

Pourtant, ce fut un «non» sonore et tonitruant qui est venu réveiller notre premier citoyen. Les 15 de la Caraïbe n’ont pas mordu à l’hameçon. Ils prétendent, en chœur, que le problème haïtien est une affaire interne. Les armes ne seront d’aucune utilité. Qu’ils s’entendent entre eux! 

Qu’est-ce qui est arrivé? L’inconstitutionnalité de notre Ariel, la suspicion dans l’assassinat de Jovenel, le pillage systématique des dons antérieurs, l’échec de l’aide étrangère dans ce trou merdique, sont-ils les raisons de la fermeture de toutes les portes devant nous? 

Si oui, notre chien est mort et enterré! Impossible de remettre le dentifrice dans le tube. Le temps est venu, pour la première fois pour nos dirigeants, depuis Estimé, de gérer la nation sans soutien économique externe. Se rèl kay  Makorèl! 

Max Dorismond


 



–NOTE –

1 - La Communauté caribéenne, ou Communauté des Caraïbes en abrégé CARICOM ou CC

2 – « Péteur de tête » : De quelqu’un qui s’illusionne (en créole Aysyen

8 comments:

  1. Merci du partage ! Interrogation tout à fait pertinente. Ariel rêve en couleur s'il se prend pour un Zelensky. La puissance tutrice le considère simplement comme un "nègre de service", ce qui est différent en ce qui a trait au rôle assigné au prétendu leader de l'Ukraine. Celui-ci joue plutôt pieds et mains pour transformer son pays comme un territoire incontournable sur l'échiquier géopolitique.
    Amitiés, Alain

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  2. Bonsoir Max,

    Trop drôle ton article. Tu m'as fait tellement rire avec ton proverbe africain et tes tournures de phrases. Qu'est-ce que tu veux, on ne peut pas toujours rester sérieux et constipé dans cette situation merdique ! C'est un feuilleton sans fin....et de mauvais goût.
    Merci pour ta correspondance. Bonne nuit et fais de beaux rêves !
    Gabrielle

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  3. Bonjour cher Max,
    Je te remercie encore une fois pour ta réflexion profonde parue hier: « Ariel Henri rêvait-il d’être le Zelensky des Caraïbes » http://haiticonnexion-culture.blogspot.com/2023/03/ariel-henri-revait-il-detre-le-zelensky.html.
    J’en profite pour signaler aux amis ton texte précédent d’égale importance pour notre réflexion: « On ne piétine pas deux fois les couilles de l’aveugle » http://haiticonnexion-culture.blogspot.com/2018/02/haiti-on-ne-pietine-pas-deux-fois-les.html.
    De retour en terre natale depuis exactement une semaine, en signalant la justesse de tes deux textes, je me permets de te transmettre une toute petite dose de l’interpellation de la situation qui se développe, au jour le jour, sur la dégradation de la situation sécuritaire face à l’audace sans non des gangs. Les jours derniers ils se permettent d’exposer au grand jour leur arrogance sans limite dans une cité laissée à elle-même !
    Par exemple: destruction de deux sous-commissariat de police, violation de l’espace scolaire (Institution École Sacré-Cœur de Turgeau) pour kidnapper une enfant, « balle maron » tuant un enfant à l’intérieur d'une salle de classe…..
    Chers amis, plus que jamais, nous devons nous rendre à deux ÉVIDENCES:
    1. le mauvais spectacle de guignol de la Caricom, appuyée par le Canada, des derniers jours doit nous enseigner que personne (même pas les « cousins » de la Caraïbe) ne viendra exposer leurs troupes pour nous retirer dans le trou où nous nous sommes engloutis, et comment demander aux pays amis d’exposer leurs troupes là où ;
    2. c’est donc à nous et à nous seuls, Haïtiennes et Haïtiens (de l’intérieur et de l’extérieur), de nous en sortir, avec « une » assistance internationale certes, mais c’est à nous de déployer l’intelligence et les troupes nécessaires à une telle opération.
    Dans les jours qui suivent je partagerai avec vous un projet de « Conférence nationale » sur la sécurité en Haïti que le HCT va réaliser dans les semaines à venir. Et, à ce titre j’aime rappeler la position de Chantal Isme nous invitant à nous réunir autour d’un projet commun « Haïti », au-delà de nos divergences et oppositions politiques !
    Ce sera une occasion concrète de manifester la solidarité active de la diaspora, notamment du Canada. Nous verrons ensemble comment cette solidarité pourra s’exprimer, mais, croyez moi, nous en avons grandement besoin.
    Cordialement et patriotiquement,
    C.T

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  4. Joseph Félix Badio a visité Ariel Henry quatre mois après la mort de Jovenel Moïse, révèle le New York Times
    Joseph Félix Badio a visité Ariel Henry quatre mois après la mort de Jovenel Moïse, révèle le New York Times
    Le journal américain New York Times a fait de nouvelles révélations concernant l’implication présumée du Premier ministre Ariel Henry dans le crime perpétré contre le président Jovenel Moïse le 7 juillet 2021.
    Une fois de plus, des indices montrent que l’actuel Premier ministre Ariel Henry et le suspect Joseph Félix Badio ont eu des contacts avant et après le crime.
    Selon deux responsables haïtiens dont les noms n’ont pas été révélés, Joseph Félix Badio, recherché par la Police, avait rendu visite à deux reprises au Premier ministre en sa résidence officielle, en novembre dernier, a révélé le journal américain.
    M. Badio s’était rendu chez le Premier ministre dans la nuit. Il n’a pas été gêné par les responsables de sécurité du locataire de la Primature, a poursuivi le média américain. Mais son porte-parole dont l’identité n’a pas été révélée continue de nier son implication dans le meurtre.
    Accusé d’avoir participé dans l’assassinat de M. Moïse, le Premier ministre Ariel Henry avait limogé deux responsables au sein de l’appareil judiciaire, Bed-Ford Claude, commissaire du gouvernement et Rockfeller Vincent, ministre de la Justice.
    (Haïti 24.Net) L.B.

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  5. Max
    Tu as toujours su trouver les bons mots avec un brin d humour, même quand le sujet est sérieux. Tes mots ne font pas guérir nos maux, elles nous font rire pour supporter nos maux. Tout à ton honneur.
    Pasteur D'Amoulio

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  6. Salut Max
    Comme un bon vin
    Tu t’améliores d’années en années. Ouf..nou ban nan.
    A plus
    Gérald

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  7. "Par contre, je peux noter que mon pays est un mendiant historique qui ne fonctionne qu’avec l’obole des institutions internationales. Aucun dirigeant ne peut mettre un pied devant l’autre sans présenter sa gamelle au maître blanc. Pour boucler son budget annuel, l’aide étrangère est toujours là à titre de béquilles. Or, à y voir clair, c’est vraiment un puits sans fond, sans garantie de résultat. La face d’Haïti crie toujours famine au point d’irriter les bailleurs de fonds. "

    Ces bailleurs de fonds sont ceux qui nous ont foutus dans la "M" et qui ne font pas grand chose pour nous en sortir.
    Max, j'ai lu et apprécié ton article, mais ce paragraphe me semble plutôt dégradant pour notre pays. C'est une vérité que nous, enfants de ce pays, n'avons pas le droit de crier sur tous les toits.
    Malgré toutes les critiques qui fusent de partout, nous devons afficher une attitude digne afin que tout étranger sâche que nous avons toujours du respect pour notre bout d'Île. Si ma fille était une pute crois-tu que je permettrais à n'importe qui de me lancer ce fait au visage. "Le linge salle se lave en famille." Entre compatriote nous pouvons tout nous dire, mais soyons discrets avec les étrangers toujours prêts à nous lancer combien nous sommes chanceux d'être ici. Devant l'étranger, Haïti reste pour chacun de nous ce pays conquis par le sang de nos héros qui surent écraser les troupes de Rochambeau.
    Dans les années 1960 un Mauricien venu faire un stage à l'Hôpital Hôtel Dieu de Saint-Georges de Beauce et nous avions invité à souper chez nous, eut à nous dire :
    - Quand on me demande mes origines, je dis que je suis Haïtien, car je ne supporte pas d'appartenir a la Frace ou à l'Engleterre. Haïti est et reste un pays lire et indépendant quoiqu'il arrive. Alors, je préfère être un Haïtien qu'un Mauricien.
    Comme j'étais émue en entendant parler ce médecin !
    Hélas ! Je ne crois pas qu'aujourd'hui il tiendrait les mêmes prpopos.
    S'il te plait Max, n'oublie pas notre histoire, quoi qu'il arrive.
    En toute amitié,
    Janine

    P.S. Je viens de relire ton article "On ne piétine pas deux fois les couilles de l'aveugle.."
    Je te félicite. Là tu lapides avec aisance nos corrupteurs et leurs inélégances à dilapider les sommes destinées à reconstruire le pays après le tremblement de terre de 2010. L'attitude de nos gouvernements face au Venezuela est inqualifiable elle aussi.
    À la tracas pou ti pays ça !

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  8. Salut Max, j'aime la rubrique, et tes réflexions et analyses sont assez justes. Combien de temps encore va durer ce machiavélique burlesque? Serait-ce exagéré de dire que le roman ''Les Comédiens'' de Graham Green aurait été tout à fait d'actualité ces temps-ci. Quel pièce macabre nous ont écrit encore ces dramaturges internationaux, dont nous assistons ouvertement la trop longue répétition? À quand la grande première? Nous sommes en train de constater la mise au rancart de certains acteurs, trop blasés, et qui ne cadrent plus aux techniques modernes de l'art de la scène. Nous attendons donc impatiemment ces nouveaux acteurs triés sur le volet, et plus aptes à nous servir sur la planche ce drame remanié. Bécaud dirait bien '' Et le spectacle continue''. Nous serons encore une fois roulés dans la farine si nous ne nous levons pas en bloc, pas pour applaudir, mais bandés à l'arrière pour dire haut et fort '' tonnè fout''. _Rod

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