Discours d'Etzer Vilaire à la mémoire des héros de l'Indépendance, de Charlemagne Péralte... 

Thursday, March 14, 2013

Les larmes de Ti Amélie (Documentaire)

 Les Larmes de Ti Amélie
Par :Jean Erich René erichrene@bell.net


Ti Amélie dont l'image ne s'efface jamais de
  nos rétines.   . .                                                
Sur sa tête trône le plateau des souvenirs de plusieurs générations d'hommes et de femmes de Jérémie, la mémoire collective d'une ville. Postée presque nue sur la Place Dumas, elle est le témoin à la fois oculaire et auriculaire de tous les événements fastes et néfastes. Une vue synoptique à travers le temps et l'espace lui offre le panorama de tous les acteurs qui ont défilé sur cette scène. Aujourd'hui, elle se lasse de tant de décrépitudes et se plaint de l'état de délabrement de nos structures physiques. Où sont les fleurs d'antan , s'nterroge-t-elle ?

Beaucoup d'entre elles se sont fânées. D'autres se sont expatriées pour agrémenter d'autres parterres, sans jamais pouvoir étaler leurs pétales ni exuder le parfum de leur terroir. Cette vie pratiquement en serre, sous les climats tempérés et froids, diminue leur rendement et les empêche de s'épanouir dans toule leur splendeur. En effet, rien n'est plus grand ni plus beau que son chez soi. Nous avons parcouru presque toutes les Capitales du Monde. Nous avons vu des sites merveilleux mais un seul demeure inoubliable : Jérémie notre ville natale symbolisée par Ti Amélie dont l'image ne s'efface jamais sur nos rétines.

Dans les plis de son cache-sexe s'inscrivent des pages d'histoires qu'aucun écrivain n'arrive encore à décrypter. En contemplant ses rues et ses maisons, se défilent dans nos têtes les fresques d'un passé riche de souvenirs et d'émotions. Chaque maison a non seulement un numéro mais porte aussi dans notre imaginaire le nom de la personne qui l'occupait. On y attache également certaines histoires qui touchent les frontières du rêve et de la réalité qu'aucun romancier n'arrive encore à atteindre. Pourtant les personnages ne sont pas fictifs, les récits non plus ne sont pas inventés mais brodés de l'émotion et de la sensiblerie caractéristiques de tous les Jérémiens et de toutes les Jérémiennes.

Il y en a qui sont partis vers de lointains continents sans laisser leurs sillages mais immortalisent leurs témoignages enrichissants, grâce à la mémoire de l'écriture. Pourtant la plupart d'entre nous n'ont pas besoin d'un papyrus ni d'un video pour se remémorer les moindres recoins de la ville. Que ces Jérémiens et ces Jérémiennes perdus à travers le temps et l'espace sachent, qu'en dépit de toute hypocrisie humaine, ils ne sont jamais oubliés. Leurs images demeurent indélébiles dans la mémoire collective.Leurs concitadins, apparemment les plus indifférents, ruminent souvent leurs souvenirs. Tout le monde se souvient encore de certains acteurs riches ou pauvres ignorants ou savants qui ont agrémenté la vie de la cité, chacun à sa façon. De manière inattendue, souvent ils surgissent du décor pour continuer le film de notre existence, là ou ils se trouvent. "L'imagination est la plus grande richesse de l'homme" disait Einstein.

Herve Gilbert
Certains(es) Jérémiens(es) ne résistent pas à la tentation d'y retourner. D'autres, au moins chaque 25 août ,à l'occasion de la St Louis, regagnent leur patelin pour un regain d'énergie, une cure de santé qu'aucune médecine au monde ne puisse leur procurer. Cependant cette redécouverte de Jérémie brasse les souvenirs d'antan et laisse un goût amer sur leurs lèvres. Ils éprouvent un sentiment de culpabilité vis à vis du délabrement de leur ville qui leur a procuré une enfance et une jeunesse heureuse. En dépit de son éloignement et de la faiblesse de sa structure, on peut s'enorgueillir d'avoir vécu dans un cadre enchanteur et à l'abri de ce monde pervers. Quant aux études classiques, la Ville de Jérémie était dotée de bonnes écoles tant au niveau primaire que secondaire. On avait même un embryon d'Université avec l'Ecole Libre de Droit. Nos échantillons d'hommes et de femmes brillent dans toutes branches de la formation professionnelle dans toutes les grandes Universités du Monde.

Emile Roumer
Il devient impérieux pour tous les Jérémiens et toutes les Jérémiennes, quel que soit le lieu où ils se trouvent, de manifester leur sentiment de gratitude envers leur patelin. Ils ne peuvent pas rester indifférents face au dépérissement de ses infrastructures. L'Ecole Frère Paulin qui a formé tant de générations a été fermée vers la fin des années 1990 par l'Evêque de Jérémie, Mgr Willy Romélus. Faute de bâtiment, les Ecoles Clévrain Hilaire et Hortensius Merlet partagent le même local, sans aucune commodité . Pour vous donner une idée beaucoup plus concrète nous illustrons la situation lamentable de notre ville en hébergant des photos qui, mieux que des mots, soient capables de sensibiliser ses fils et ses filles sur les ruines de Jérémie.


Partons à la découverte de Jérémie en vidéo




Le pont de la Grande Anse, trait d'union entre la ville de Jérémie et les autres localités situées de l'autre côté de la rivière, l'un de ses poumons économiques, est dans un piteux état. Son tablier est percé de trous qui comme des traquenards piègent les piétons et déséquilibrent les camions de fort tonnage qui l'empruntent comme un passage obligé.

Le Doyen d'âge Eddy Cavé, dans ses pages illustrées intitulées « De mémoire de Jérémiens », inscrit dans son baptistère 29 avril 1950 comme sa date d'inauguration par le Présent Dumarsais Estimé qui devait partir pour l'exil peu de temps après. Selon la firme de construction, sa durée de vie est de 50 ans. Grâce à des travaux d'entretien, il a pu franchir ce cap. Cependantdurant ces 25 dernières années , il n'a jamais reçu une couche de minium pour le protéger. Dans l'indifférence de l'Etat haitien et au grand risque des usagers et des poids lourds qui l'empruntent régulièrement, sa défaillance est imminente. Ce sera un bond de 61 ans en arrière avec la restitution de la dangereuse barque d'autrefois.

La structure métallique du pont de la Grande Anse est couverte de rouille

Actuellement la structure métallique du pont de la Grande Anse est couverte de rouille qui la ronge comme une verrue. Sans aucune intervention d'urgence bientôt le pont de la Grande Anse sera réduit à un squelette vétuste qui cèdera sous le poids de sa vieillesse. En principe on devrait en construire un autre. Devant son état lamentable nous mêlons notre voix à tous les Jérémiens(es)qui se sentent concernés(es) pour lancer un cri de détresse aux autorités responsables. La percée de la nouvelle route Cayes Jérémie, sans le pont de la Grande Anse est un projet tronqué. La ville de Jérémie sera paralysée faute de ne pouvoir entrer en contact par voie terrestre avec Port-au-Prince, les Cayes aussi bien que les Communes et Sections Communales de l'autre côté de la rive.

Le constat le plus triste c'est de cheminer dans les rues de Jérémie entre des maisons délabrées, manquant des poteaux, des portes et des fenêtres. Certaines sont fermées et n'abritent personne tandis que le problème de logement devient très crucial en ville. D'où l'extension du côté de Numéro 2, Nan Lundi, Bonbon etc. D'autres préfèrent Gébeau, Caracoli, Fond Rouge, Carrefour Sanon etc. Le Centre ville de Jérémie suite à un phénomène d'absentéisme est quasiment vide. En effet, le tissu social de la Grande Anse souffre de certaines lacunes dues au déplacement intégral de certaines familles à Port-au-Prince et ailleurs. Elles refusent de vendre et de louer leurs maisons afin de conserver le souvenir impérissable de leurs Grands-Parents. Un sentiment d'appartenance aussi fort a fait de Jérémie une ville aux portes fermées. Pourtant le Tremblement de Terre de 2010 a considérablement augmenté l'effectif de la population et le coût du loyer. Actuellement les maisons qu'occupaient une seule famille sont transformées en plusieurs appartements sans les commodités d'usage.



Notons que le Service de la Voirie est vacant de puis près de 25 ans. Le Bureau des Services d'Hygiène est fermé depuis la fin des années 1980 et les agents sanitaires renvoyés. Les rigoles sont bondées de fatras. Avec l'augmentation de la population, le Service de distribution d'eau potable n'arrive pas à satisfaire tout le monde. Même lorsqu'on paie un abonnement les robinets sont à sec. Chaque jour on observe un vérirable périple en quête du précieux liquide.


Quant à l'électricité, vaut mieux ne pas en parler. Port-au-Prince la Capitale est plongée dans le blackout. A Jérémie on est en train de revivre les souvenirs de l'IDAI et de l'EDH . La privatisation de la Teleco a entrainé une dangereuse dérive vers le cellulaire qui appauvrit cette populaation qui s'accroche à la modernité de la communication sans fil au détriment de ses besoins primaires. C'est la pagaille !



A noter aussi qu'avec l'élargissement de la famille suite à la naissance dans la diaspora des petits fils sans aucun lien avec Jérémie, le prix de vente d'une ancienne maison devient exhorbitant, au point de dépasser le coût de construction d'une nouvelle bâtisse. Tous les héritiers veulent tirer un profit substantiel des biens de leurs Grands-Parents. Ce dilemme est plutôt courant chez l'ancienne bourgeoisie jérémienne qui séjourne dans la diaspora. Leurs maisons deviennent de véritables musées familiaux.Il faut se défaire de certains préjugés mesquins. On ne peut pas fermer les portes des maisons et faire de Jérémie une cité interdite aux nouveaux habitants. Qui pis est, on ne se donne pas la peine de leur donner une couche de peinture voire de les réparer. Il suffit de faire un tour à la place Dumas pour faire ce triste constat des maisons aux portes condamnées. Le duplex de Mme Béliard Mignon au Carrefour du Marché, la Maison des Vilaire près du Tribunal, l'ancienne Maison des Jabouin à coté de l'Eglise St Louis, le local de l'ancienne Inspection Scolaire de Jérémie sont condamnés. En principe, les propriétaires des maisons qui sont fermées et délabrées à Jérémie doivent débloquer la ville. Dans le cas contraire, il revient au Maire de prendre certaines mesures administratives. Les autorités locales sont-elles imbues de leur rôle pour réanimer cette ville moribonde ? Ce sombre tableau déclenche chaudement les larmes de Ti Amélie .


Jean Erich René
26 octobre 2011






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