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Sunday, October 30, 2016

La France n’entend pas lâcher l’Afrique (suite de 1)

Par Max Dorismond Mx20005@yahoo.ca


La métamorphose :
La Chine et l'Afrique se retrouvent à Johannesburg lors
du 6ème FOCAC ou sommet Chine-Afrique.               
Mais, un matin, un petit chinois, deux petits chinois, et en définitive, la Chine au complet débarquent avec leurs capitaux. Voilà l’Afrique qui respire autrement. Le besoin des matières premières, tels que les  minerais, les hydrocarbures, le bois, les denrées alimentaires etc …, oblige l’empire du milieu à exécuter ce plongeon sous les baobabs, sans s’immiscer dans les affaires politiques de ses associés et en pratiquant un commerce bilatéral. Les Africains viennent de découvrir un autre modèle économique où ils sont considérés comme des partenaires à part entière. Ce rapprochement inédit est symbolisé depuis 2009  par les désormais très médiatisés et commentés « Forum on China Africa Cooperation (FOCAC) ». En 2015, ce fut le 6ème FOCAC ou Sommet Chine-Afrique, à Johannesburg, en Afrique du Sud. Xi Jinping, le président chinois a  frappé les esprits en octroyant 60 milliards de dollars d’aide au continent pour aider les PME africains, incluant 5 milliards de prêts à taux zéro et 35 milliards à taux préférentiels. Il s’est aussi engagé à « effacer les dettes gouvernementales sans intérêts, échues fin 2015 » pour les pays les moins avancés. 35 chefs d’État étaient présents. Des projets avec la Chine, il y en a à profusion : « Trois réseaux d’infrastructures et industrialisation. Un gigantesque projet qui mêle réseau ferroviaire à grande vitesse, réseau autoroutier et réseau régional d’aviations ». Avec ces centres de formation, 200 000 techniciens africains seront formés et 40 000 iront faire des stages au pays de Mao. 30 000 bourses seront offertes à des étudiants et 200 chercheurs seront invités chaque année à poursuivre leurs travaux là-bas.  Entre temps, la Chine est devenue le premier partenaire commercial de l’Afrique. Et ce n’est pas tout. D’autres acteurs asiatiques (Malaisie, Singapour) et moyens orientaux (Israël, Arabie Saoudite, Koweït) grouillent dans le décor. La France est vraiment supplantée. Le scénario du futur présage d’une compétition accrue. Or, bien longtemps avant, plusieurs spécialistes et analystes avaient averti l’Europe de cette intrusion. Mais, en se cloîtrant avec délice dans la certitude de leur ignominie, leur rapacité et leur confiance leur ont enlevé toute velléité de perspicacité pour y prêter attention. En effet, John Colley en 1965, dans son ouvrage, «East Wind over Africa : Red China’s African offensive », avait écrit : « La Chine s’est installée en Afrique et compte bien y rester… Du Caire à Capetown, des îles de l’Océan indien au Golfe de Guinée, traversant les savanes et les montagnes, un vent nouveau venu d’Orient souffle sur l’Afrique ». Les exploiteurs avaient oublié que le destin n’est pas immuable.

Surprise sur prise
En plus de ce revirement commercial, l’Europe dans son ensemble s’est réveillé en 2014 avec une larme déferlante sur son territoire. Devenue exsangue, asphyxiée économiquement, l’Afrique n’avait rien à offrir à sa jeunesse. Une vague migratoire de gens de toutes les races, de toutes les conditions et religions, venant de ces coins déshérités prennent d’assaut les remparts du vieux continent. Dans leur dessin, cette palette était insoupçonnée. Les identités meurtries par les flétrissures de la colonisation, appâtées par les images de L’eldorado européen, les nouveaux refugiés foncent par grappe sur l’occident pour aller voir ailleurs malgré les dangers inhérents. Ils se sont forgés une philosophie : « Avancer, c’est mourir ; reculer, c’est mourir. Alors mieux vaut avancer et mourir ». Telle est  leur devise. 
Sommet européen de Malte sur l'immigration en 2015
Face à ce surprenant revirement, face au réveil des résignés, face aux brûlants appétits des pays émergeants, Chine, Brésil et Inde, sentant la soupe chaude, la France se lance à son tour dans des sommets de charme en 2015 ; le Sommet de Malte sur l’immigration,  le Sommet des chefs d’État africains tenu  à Paris et « Africa 2016 » toujours à Paris. Au cours de ses instances, les Africains, se croyant au paradis, entendent pour la première fois des sons mélodieux glisser tendrement au fond de leur tympan : « Rapport économique d’égal à égal », « partenariat gagnant-gagnant », et « new-deal », quelques 1,8 milliards d’euros pour confiner leurs citoyens chez-eux, etc... Cette volte-face résulte de la conjoncture et encore de l’arrivée de nouveaux partenaires, au point que Christophe Sirurge, secrétaire d’État français à l’industrie soutient que «  la concurrence est rude avec Pékin mais aussi avec les États-Unis et la Turquie ». Dans les statistiques, le commerce avec la France ne représente plus que 5,8% des échanges internationaux de l’Afrique en 2014 contre 10,1% en 2000. Les Africains en profitent pour réclamer la formation des cadres nationaux pour prendre le relais du personnel étranger et assumer eux-mêmes leur développement économique…etc. Pour François Hollande, «la relation avec l’Afrique ne doit pas être à sens unique », et il continue : « La France avait besoin que les entreprises africaines investissent chez nous ». OH ! Que de considérations. Quelle symphonie ! Il s’est fixé le cap de doubler les échanges économiques entre la France et l’Afrique.  Un peu plus loin, le chef d’État français souligne que « les visas accordés aux entrepreneurs, étudiants ou encore artistes africains ont déjà augmenté de 13% depuis le début de l’année ».

Le bonheur presque parfait 
E les Africains semblent heureux de n’être plus le dindon de la farce car, selon Alain Kouadio, vice-président du patronat de Côte-d’Ivoire, « Ça montre que le regard change à l’égard de l’Afrique ». Toutefois, ils ne sont pas dupes. Ces bons sentiments ne traduisent pas nécessairement leur entière libération. Les réserves monétaires sont encore sous clé en France. Conservateur et prudent, Kouadio s’en souvient et ajoute en définitive que « pour lui, avant d’aller investir en France ou ailleurs, les entreprises africaines doivent déjà consolider leur avantage chez eux et participer à densifier le tissu des PME pour répondre à la demande intérieure ». C’est ainsi, qu’au Sommet de Malte, les 1,8 milliards offerts laissent les Africains indifférents car, c’est trop peu pour la reconstruction du continent. Ils réclament mieux que cela et c’est très fort : qu’on rende à l’Afrique sa totale liberté économique pour qu’elle soit un partenaire intéressant à même de valoriser à son profit son immense potentiel de ressources naturelles et humaines. En un mot, libérer sa réserve et les conditions drastiques supposément liées aux avantages de la colonisation. La France fait la sourde oreille.

A la conclusion de ce texte, j’ai eu une petite pensée pour Haïti, à savoir : Aura-t-elle une semblable chance un jour venu ? Sur ce point, je suis pessimiste. Haïti n’a rien à offrir en terme de matières premières désirables ! « Les pays n’ont pas d’amis. Ils n’ont que des intérêts », dixit Charles De Gaule. L’Afrique s’en souvient toutefois.

Max Dorismond
Mx20005@yahoo.ca


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