Me Serge H. Moïse |
Nos grands diplômés qui ne voient pas plus loin que le bout de leur nez et qui se targuent d’être des super-intellectuels, n’ont pas fini d’enfoncer notre pauvre nation, dans des profondeurs abyssales, à la satisfaction de nos ennemis de toujours.
Sont-ils vraiment naïfs à ce point, ou délibérément
complices de ce jeu macabre qui fait la honte de toute la nation et la
maintient depuis si longtemps dans cette situation abjecte, occasionnant les
souffrances les plus atroces à toute une population, sans se rendre compte
qu’ils sont partie prenante d’une forme insidieuse de génocide ni plus ni
moins.
Ils parlent de tout, sauf des causes profondes de cette
horrible situation et avec une légèreté déconcertante. Ils semblent vouloir
s’attaquer simplement aux symptômes, avec l’illusion que ce faisant, les causes
disparaîtront par elles-mêmes.
Aberration s’il en est et qui ne fait pas l’objet de
débats sérieux. Évidemment, puisqu’ils ont d’autres chats à fouetter.
Ceux-là qui s’agitent le plus à soulever tellement de vagues,
les célébrités d’hier et d’aujourd’hui, ont-ils vraiment à cœur les intérêts
supérieurs de la nation ou comme à l’accoutumée, s’agit-il pour eux d’exiger à
leur tour, leur participation effective, à ce cirque séculaire?
Encore une fois, nous n’avons nullement la sotte
prétention de faire la leçon à qui que soit, ce qui ne nous empêche pas de
questionner certains comportements qui nous paraissent vraiment bizarres.
« Seule l’éducation peut sauver le pays » C’est le crédo
à la mode, en faisant semblant d’oublier que « science sans conscience n’est
que ruine de l’âme ». Éducation, oui, mais pas celle qui a fait de nous les
acculturés que nous sommes.
Demandons à tous ceux qui ont dû abandonner le pays s’ils
l’ont fait dans le seul et unique but de parfaire leur éducation. Si oui,
pourquoi ne sont-ils pas retournés mettre leurs connaissances pointues au
service de la mère patrie?
Si la scolarisation garantissait le progrès et s’il est
vrai que les compatriotes les mieux « éduqués » se retrouvent dans la diaspora,
alors comment expliquer que cette diaspora ne soit pas la communauté visible la
plus solidaire et la mieux organisée?
Nous pourrions nous étendre en longueur et poser
d’innombrables autres questions du genre, mais à quoi bon, puisque ce serait
tourner le fer dans la plaie que nous feignons d’ignorer et sans succès
d’ailleurs.
Rappelons, pour l’histoire et la vérité que récemment
Cuba a formé huit cents (800) jeunes médecins haïtiens. Ces derniers sont tous
revenus au pays et en très peu de temps, six cents (600) d’entre eux ont dû
abandonner la barque, faute de pouvoir gagner honnêtement leur vie en
pratiquant leur profession.
Or Haïti manque autant de médecins que de professeurs. La
raison est très simple, soixante dix pour cent (70%) de la population est en
chômage, les éventuels patients n’ont pas la capacité de payer les soins de
santé et, comme il faut vivre, vite un visa! On n’a pas le choix car, il faut
un minimum de bien-être pour pratiquer la vertu, disait St-Thomas d’Aquin.
Nos très chers intellos qui refusent ou sont incapables
de repenser le substrat idéologique de l’enseignement à diffuser aux
générations montantes et qui veulent simplement perpétuer ce qui s’est toujours
pratiqué, confondent leurs petites personnes avec la réalité de l’arrière pays,
dont ils sont, pour la plupart, les ressortissants sur lesquels la population
aurait dû pouvoir compter.
Hélas, tel n’est pas le cas!
Imaginons Carlo Dorléans Juste, Vély Leroy, Dr
Jean-Claude Fouron, Carl Prézeau, Édouard Laurent, Gérard V. Étienne, Émile
Olivier, Dr Claude Jean-François, Dr Yvette Bonny, Dr René Thomas, Dr Etzer
Dorsainvil, Alfred Dorlette, Dr Hugues St-Fort, Aga Jean-Baptiste le
percussionniste, Léopold Molière dit YoYo, Eddy Prophète le virtuose du piano,
Toto Toussaint, Dr Samuel Pierre, Dr Louis-Charles Levros, Georges Anglade, Dr
Dumas Maugile, Monica Ricourt, le professeur et poète Roland Morisseau, Me
Michel Coulanges, l’honorable député Emmanuel Dubourg, l’honorable député
Frantz Benjamin, l’honorable député Dr Lionel Carmant, Mme la ministre
Dominique Anglade, Jean-Ernest Pierre, Maguy Métellus, Me Tamara Thermitus, Me
Isabelle Charles, Régine Laurent, Alexandra Philoctète, Viviane Barbot, Yannick
Rouzier, Eddy Cavé, Jean-Claude Icart, Kettly Beauregard, Frantz Voltaire, Dr
Marie-Françoise Megie, Vladimir Jeanty, Robert Berrouët-Oriol, Max Dorismond,
Dr Jean Fils-Aimé, Lemarec Destin, Anthony Phelps, Nono Lamy, Joe Trouillot,
Kesnel Hall, Pierre-Michel Ménard, Marie-Josée Lord, Yama Laurent, Carl
Fombrun, Jean-Bernard Bayard, Serge Bouchereau et combien d’autres, aussi bien
aux États-Unis qu’ailleurs, qui évolueraient dans l’espace réduit de nos
vingt-sept mille kilomètres carrés, n’offrant pas le cadre approprié au
développement et à l’épanouissement de leurs talents.
On n’aurait jamais entendu parler d’eux, sauf après leur
mort, histoire de nous donner bonne conscience.
La liste est énumérative et non exhaustive. Tout ceci
pour souligner que l’éducation à elle seule ne saurait être une panacée
susceptible de guérir tous les maux.
Il faut donc mettre en place un cadre global qui tienne
compte des potentialités et des spécificités propres au pays. Nos spécialistes
en gouvernance devraient tous le savoir. Et ce cadre devient possible à partir
de la volonté de tous et de chacun d’une part et d’un profond sentiment
d’appartenance à l’alma mater d’autre part.
La réforme judiciaire qui s’avère un paradigme
incontournable du développement durable, personne n’en parle, quant à la
création d’emplois, c’est l’affaire des goujats, pas des intellectuels!
Les Haïtiens, nos sœurs et frères crèvent littéralement
de maladies et de faim, victimes de l’insécurité maintenue à dessein. Nous
sommes à toutes fins pratiques, l’arrière cour de la République Dominicaine et
pour nos intellos, ce n’est pas bien grave puisque dans dix ans ou plus, le
pays comptera des milliers de diplômés, ces derniers auront amplement le temps
de tout rebâtir à coup de technologies modernes. Entre temps ceux qui souffrent
et qui meurent, c’est simplement le prix à payer en termes mathématiques.
Faut-il donc rappeler à ces grands esprits que les besoins primaires non
satisfaits conduisent à la criminalité de manière inexorable.
De plus, embrigader des coopérants ou missionnaires, les
former et les installer dans les colonies pour manipuler le mode de penser des
colonisés coûtent très cher, donc recruter au sein même de ces derniers, les
plus futés, l’équivalent des commandeurs d’autrefois, pour accomplir ce
singulier boulot s’avère moins onéreux et beaucoup plus pratique. Soyez donc
prudents mesdames et messieurs les « éducateurs » afin de ne pas être des «
collabos » à votre insu.
Dans cette conjoncture, pour le moins abjecte et
nauséabonde, le silence des uns et des autres devient : laideur, lâcheté et
apatridie.
Autre questionnement qui nous paraît fondamental, les
grands esprits d’aujourd’hui, les titans de l’intellectualité seraient-ils mal
outillés pour se colleter à l’épineux problème du chômage au pays qui demeure,
répétons-le, « la priorité des priorités ». Comme quoi leurs diplômes ne leur
serviraient donc qu’à répéter, c’est-à-dire transmettre le savoir de l’ancien
colon et non le savoir-faire en adéquation avec les spécificités haïtiennes.
Éducation : oui! Acculturation et/ou Dressage : mille
fois non!
En conclusion, prenons garde de ne former des dizaines,
des centaines, sinon des milliers de « PhD », Perroquets-Hâbleurs-Délirants,
des soi-disant doctes dans tous les domaines qui viendront au fil des ans
gonfler les rangs de la diaspora, faisant ainsi le jeu de l’étranger au
détriment de la mère patrie qui en a assez bavé de cette macabre pratique.
Dr Volvick Rémy Joseph, médecin de son état, doublé d’une
solide formation en sciences juridiques, homme d’une vaste expérience et d’une
grande sagesse nous l’a pourtant répété à maintes reprises : « Le développement
d’Haïti sera endogène ou il ne sera pas ».
Me Serge H. Moïse av.
Me Serge Moïse nous livre souvent d'intéressantes réflexions sur divers sujets, sans compter ses spirituels «Moïkous » qui témoignent d'une recherche appliquée dans leur composition. «NOS ÉDUCATEURS » en est un exemple édifiant. Mais ces derniers temps, il se montre particulièrement intéressé au gros dossier de l'éducation en Haïti. C'est d'ailleurs une des préoccupations majeures de toutes celles et de tous ceux qui sont intéressés à l'avenir du pays, car on ne le dira jamais assez que l'éducation constitue la colonne vertébrale de tout pays. Oui, la démarche de M. Moïse est très louable. À sa façon, il fouette l'orgueil et l'amour-propre des ressortissants haïtiens. Ici, dans ce texte, il fait l'éloge, à travers de brillants professeurs des deux sexes qu'il a connus ou de ceux et de celles dont les noms lui sont rapportés, du système d'éducation dont nous étions très fiers, à part quelques irritants ça et là. Chacun de nous pourrait augmenter sa liste par ceux que nous avions connus au temps où « l'éducation haïtienne était encore une passion », selon l'expression d'une Organisation internationale qui fait dans l'Éducation.
ReplyDeleteLe 20 octobre dernier, un ami de Montréal m'avait fait parvenir un article publié sur Rezo Nòdwès par Me Serge, dont le titre:« Complicité ou naïveté? Les intellectuels et le naufrage de la nation haïtienne » annonçait déjà dans sa formulation ses questionnements et un peu sa mauvaise humeur. Gran moun lontan ta di:« Yon kout dlo cho, yon kout dlo frèt ». D'ailleurs, la phrase suivante et les termes choisis résument bien sa grogne:« Nos très chers intellos qui refusent ou sont incapables de repenser le substrat idéologique de l'enseignement à diffuser aux générations montantes et qui veulent perpétuer ce qui s'est toujours pratiqué...» Dans la première partie de son texte, il donne une longue liste d'éducateurs dont le mien et de plusieurs autres personnalités de divers secteurs, également des États-Unis, à qui ce reproche semble s'adresser... Mais à la fin, il écrit: «Hélas, tel n'est pas le cas.» Il nous félicite pour le travail que nous effectuons... sans quoi, nous ne serions pas connus, dit-il en substance.
Même s'il dit dans son texte de très bonnes choses je m'objecte. Il a mal ciblé sa proie. car tous les noms cités en éducation à tous les niveaux d'enseignement sont en totalité des gens qui travaillent ou ont travaillé au Québec. Le gros de ses reproches devrait s'adresser en totalité au Ministère de l'Éducation nationale et de la formation professionnelle d'Haïti et de ses diverses composantes comme par exemple, l'IPN(s'il existe encore) ou son équivalent. C'est à ce ministère qu'il revient de définir les orientations en éducation nationale, d'élever les standards de formation, d'enrichir les contenus et de les adapter à l'environnement du pays et à l'évolution occidentale des disciplines enseignées, etc...
Je dis quand même merci à Me Serge Moïse pour sa grande préoccupation à l'égard de l'éducation et pour son rappel de quelques noms de profs qui firent la réputation de notre ancien système scolaire.
Je profite de l'occasion mes chers amis pour vous souhaiter une heureuse année 2022, sans Covid, sans Omicron et de leurs dérivés.
Lemarec