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Tuesday, April 3, 2018

Armée d’Haïti + Assassins financiers = Dette éternelle (2ème Partie)

Les porte-drapeaux lors de la cérémonie d'installation
du nouvel état-major de l'armée d'Haïti.                     

Par Max Dorismond





Non-productivité et chantage éhonté
Tous les économistes sont unanimes à répéter que le pays doit augmenter sa production agricole et manufacturière tout en accroissant ses exportations pour pallier à la dérive de sa monnaie, devenue des « zorèy bouriks » selon la malice populaire. Il doit stimuler la création d’emplois et endiguer sa démographie galopante. Tout est importé : les matières premières, les biens de première nécessité. Les pays voisins y trouvent leur beurre, et Haïti s’enfonce de plus en plus dans le néant. Dépendante de l’aumône internationale et de sa diaspora, nul n’arrive à conjurer cette sordide vocation. C’est une nation sous perfusion.

Quelques officiers de la nouvelle armée d'Haïti
Au lieu d’écouter les conseils des humbles, elle s’endette jusqu’au cou pour plaire à des maîtres-chanteurs de la classe des nantis qui ne rêvent d’une armée que pour quatre importantes raisons : 1 – Contrôler le pouvoir à leur guise. 2 – Perpétuer la contrebande. 3 – Instrumenter le chantage. 4 -  Casser les reins de la masse qui en a marre de leur crapulerie. Si on oublie son passé, nul ne peut prendre sa revanche sur l’histoire et l’idiotie. Les forces occultes se frottent déjà les mains d’aise.  Elles n’attendaient que cet escadron des ténèbres, cet instrument incontournable pour faire chanter les imprudents.

Piste de solutions entre mille
Dans l’actuelle conjoncture, la gouvernance aurait intérêt à faire preuve de rationalité dans l’utilisation de ces milliers de chômeurs instruits. Au lieu de les armer, les barbariser et les abêtir, elle ferait mieux de les humaniser, en invitant Jovenel à investir dans des machineries ou des instruments aratoires, à créer des écoles techniques dans l’agroéconomie, à chausser ses bottes de laboureur des terres et des esprits. Ce serait le plus bel héritage à inscrire dans l’histoire de la production nationale, en guise de suite à la « Caravane du changement ». Et la nation lui en saurait gré.

Un Président imperméable aux leçons quotidiennes
Président Jovenel saluant le commandant de bataillon lors
de la parade militaire du 18 novembre 2017 au Cap-Haitien
En lisant les journaux d’Haïti, le Nouvelliste et Haïti-Liberté, de la semaine écoulée, j’avais pris connaissance de la sainte colère piquée par Jovenel Moïse lorsque la France, ou plutôt la compagnie française « Total SA » lui a retourné le chèque soutenant sa commande de 500 000 gallons d'asphalte pour finir les routes déjà entamées. Sous la combine des arnaqueurs locaux, la commande du président à 1,85$ le gallon a été annulée en raison du non-achat à 3,99$ du produit entre les mains des contrebandiers de Port-au-Prince.

Humilié, M. Moïse a réuni son Conseil des Ministres et ce dernier a octroyé désormais au gouvernement la primauté sur toute commande de matières premières : asphalte, mazout et tous les dérivés du pétrole. Ce qu’un arrêté du journal officiel, Le Moniteur  du 12 janvier, confirme en ces termes : « Il est impérieux de prendre toutes les mesures pouvant contribuer à l’amélioration des conditions de vie de la population à cause du caractère stratégique des produits et dérivés du pétrole, ainsi que ceux liés aux gaz naturels3 »

18 novembre 2017 - Cap-Haïtien
Tout cela, pour contrer le côté vautour de certains bourgeois du pays qui ne reculent devant rien pour assouvir leur soif du gain, sans contraintes. La sortie d’Haïti du trou abyssal  où elle est enfoncée leur passe par dessus l’épaule. L’histoire de l’absence éternelle d’électricité ou la vente du blackout est une autre facette de leur mainmise absolue sur la proie. Le marché des génératrices et des Inverters importés fleurit à vue d’œil.

Autrefois, au temps où l’armée défaisait les rois, cette clique sournoise aurait soudoyé les militaires et un coup d’État aurait envoyé le Premier citoyen sur les bancs de l’exil pour avoir osé jouer dans les plates-bandes des vrais maîtres du pays. Ces derniers ont simplement joué aujourd’hui, à visage découvert, pour humilier Jovenel. Mais, demain, avec cette armée toute neuve, composée d’une jeunesse toxique, qui n’a jamais eu d’autres exemples à ses yeux que des prédateurs toujours très vite sur leurs patins, la pieuvre tentaculaire ne passera point par quatre chemins.  Elle présentera au président, actuel ou à venir, un passeport pour l’exil et une menotte en fer, « cet instrument céleste que portaient les souverains d’Espagne aux heures des grandes cérémonies4 ». Et ce sera la fin des Mohicans!

Chaque pantalon a sa mesure et son tailleur

En Haïti, à chacun son prix! Tous attendent l’appel du rapace qui va les rétribuer pour la sale besogne, pour semer le chaos et déstabiliser l’ordre établi. Ils sont toujours prêts. Ce sont de vrais scouts. Selon la règle prépondérante du milieu, vous êtes nommés le matin, dans l’après-midi, vous roulez déjà carrosse et le lendemain, sans gêne et sans reproche, vous vous offrez des petits châteaux des contes de mille et une nuits. « Yo pa egare ».  Donc, ces jeunes soldats, ces petits héritiers de la gabegie, et les anciens sadiques qui les coiffent, se voient déjà riches. Ils seront simplement des petites marionnettes dédiées entre les griffes des riches  d’Haïti, qui n’hésiteront nullement à concrétiser grassement leur rêve secret, sur un plateau vert, au moment choisi. En créant ce nouveau corps d’armée, le gouvernement vient d’hypothéquer la paix, la stabilité, la sécurité et le retour de sa diaspora investisseur, en ajoutant à la somme des doigts dans le pot de confiture,  5000 à 10 000 affamés de plus. C’est brillant!

J’éprouve un certain malaise avec cet Exécutif qui fonctionne comme un véritable Don Quichotte, sans une miette de pouvoir. Omniprésent, il s’anime comme le diable dans l’eau bénite pour montrer sa bonne foi. Mais, pardieu! Les As du Législatif le font déjà chanter, contrôlent toutes les institutions et mangent à tous les râteliers. Les nantis siphonnent la taxe et profitent des franchises douanières. Toute une clique s’amuse et mange allègrement « à bouche que veux-tu ».  Le voilà, aujourd’hui encore, commettre l’irréparable, en dressant un autel à l’armée, sur lequel la Pieuvre nationale le sacrifiera, le jour venu, pour avoir écouté le chant des sirènes.

Alors Haïti, disons adieu à la démocratie naissante,   adieu à l’espoir bafoué, adieu aux prémices de liberté retrouvée, adieu aux élans de stabilité!  Définitivement, les deux pieds de notre terre natale sont rigidifiés dans la m… le mot de Cambronne.

Max Dorismond



Note 1 - : « Les Assassins Financiers sont des professionnels grassement payés qui escroquent des milliards de dollars à divers pays du globe. Ils dirigent l’argent de la banque Mondiale, de l’Agence américaine du développement international (U.S. Agency for International Development – USAID) et d’autres organisations  « humanitaires » vers les coffres des grandes compagnies et vers les poches de quelques familles richissimes qui contrôlent les ressources naturelles de la planète. Leurs armes principales :… les élections truquées, les pots-de-vin, l’extorsion, le sexe, le meurtre. Ils jouent un jeu vieux comme le monde, mais qui a atteint des proportions terrifiantes en cette époque de mondialisation ». « Je sais de quoi je parle… car j’ai été moi-même un assassin financier » (John Perkins – Auteur de : Les Confessions d’un Assassin Financier)

Note 3 - : Src. Le journal « Le Moniteur » du 12 janvier 2018.

Note 4 - : Phrase célèbre prononcée par l’officier espagnol Alonso de Ojeda, lors de « l’arrestation » par ruse du Cacique indien Caonabo, à Hispañola (St_Domingue). Ce dernier fut invité à prendre place sur la croupe du cheval de Ojeda avec une menotte aux bras, une « façon élégante » de rencontrer le chef, Christophe Colomb, qui se ferait un plaisir de le recevoir. Ce fut pour sa perte.



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