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Thursday, August 24, 2017

Il y a 53 ans : les Vêpres de Jérémie

PAGES SOMBRES DE L’HISTOIRE D’HAITI.

Tout bon citoyen doit  bien comprendre son passé pour mieux aborder l’avenir. Surtout pour nous, Haitiens qui cherchons notre voie après bien des soubresauts et des violences de notre histoire. Haïti Connexion Culture continue ses reportages historiques  sur les pages sombres de notre histoire.

Le régime Duvalier (Père et fils)
Après qu’il se fit autoproclamer président à vie, le 14 juin 1964, l’ex-dictateur François Duvalier entreprit une véritable chasse aux sorcières dans plusieurs régions du pays, notamment le Sud-Est et la Grand'Anse. Des massacres ont été commis par les sbires de Duvalier pour asseoir sa dictature. Les plus célèbres ont été ceux de Mapou, Thiotte, Grand-Gosier, Belle-Anse et les Vêpres de Jérémie à partir du 5 Août 1964. Ce 5 Août 2017 ramène le 53e anniversaire de ces massacres. On s’en souvient ! Pour les commettre, François Duvalier utilisa les membres des Forces Armées d’Haïti (FAD’H) et les Tontons macoutes, une autre force paramilitaire établie à cette fin. Voici donc la chronologie des faits pour l’édification du grand public.

Du mois de juin au septembre 1964, à la suite d’une infiltration, le 24 juin 1964, dans la région du Sud-Est, d’une guérilla anti-Duvaliériste basée en République Dominicaine, les macoutes et l’armée déclenchent une vaste opération de répression et exécutent environ 600 personnes dans les localités de Mapou, Thiotte, Grand-Gosier et Belle-Anse. L’une de ces tueries est passée dans la mémoire populaire comme le « massacre des paysans de Thiotte ». Les macoutes exécutent hommes, femmes, enfants, nouveaux-nés et vieillards soupçonnés d’avoir aidé les rebelles ou de ne pas leur avoir résisté. Plusieurs familles comptant des dizaines de membres sont entièrement exterminées. Un enfant, âgé de neuf ans, réussit à s’échapper, mais arrêté quelques jours plus tard puis conduit au Palais National, il aurait été tué personnellement par François Duvalier.

Trois des 27 personnes tuées lors des Vêpres
En août 1964, un autre événement est connu sous le nom de «Vêpres de Jérémie ». À Jérémie, sud-ouest du pays, des soldats de l’ex- Forces Armées d’Haïti menés par l’officier William Regala, les Lieutenants Abel Jérôme et Sony Borges et par les macoutes Sanette Balmir et St.Ange Bontemps tuent 27 personnes (hommes, femmes et enfants), appartenant toutes à des familles de mulâtres éduqués ; alors que tous les exécuteurs sont des proches des personnes tuées. Plusieurs familles de Jérémie dont Sansaricq, Drouin et Villedrouin sont exterminées. Un enfant de quatre ans, Stéphane Sansaricq, est torturé devant sa mère avant d’être tué. Les macoutes Sony Borges et Gérard Brunache éteignent leurs cigarettes dans les yeux d’enfants en pleurs.

Les 13 membres du groupe Jeune Haïti
Le 5 août 1964, à la suite de l'entrée sur le territoire haïtien de treize membres (un noir et douze mulâtres) du groupe « Jeune Haïti » dans le sud du pays, François Duvalier, dans le cadre de sa politique noiriste, va ordonner des représailles contre les mulâtres de la ville de Jérémie. Les haines et rancœurs accumulées au cours des décennies contre ces derniers servent de prétexte aux ordres donnés par Williams Regala aux agents militaires et aux Tontons macoutes de tuer. Vingt-sept personnes, issues de deux familles des membres de Jeunes Haïti, sont massacrées dans la ville de Jérémie. Les treize membres du groupe Jeune Haïti sont traqués, tués sur place ou emmenés et exécutés en public dont deux devant le cimetière de Port-au-Prince. Aux mois d'août, septembre et octobre de nombreuses mulâtresses, femmes, vieillards et enfants sont torturées puis tuées. En récompense, Williams Regala est promu général. En 1986, après le départ de Jean-Claude Duvalier, il est devenu membre de la junte au pouvoir  du général Henri Namphy.

A l’occasion du 50e anniversaire des Vêpres jérémiennes, au début mois d’Août 1964, un comité de devoir de mémoire a été institué par des proches des victimes. Ce Comité a annoncé un ensemble de manifestations pour commémorer cette date sombre dans l’histoire du peuple de Jérémie. Le lundi 4 août 2014, une veillée de prières était organisée à la Cathédrale Saint-Louis à Jérémie. Une messe du souvenir a été aussi célébrée au même endroit, ce mardi 5 août 2014, suivie d’un pèlerinage vers le mausolée des victimes. Une conférence-débats, suivie de l’inauguration d’une exposition-souvenir sur les 13 membres de « Jeune Haïti » et les Vêpres de Jérémie de 1964, est annoncée pour le mercredi 6 août 2014 à la bibliothèque Carl Edward Peters de Jérémie.


Des films documentaires comme « L’homme sur les quais » de Raoul Peck, « Le règne de l’impunité » d’Arnold Antonin et « Wòch nan solèy » de Patricia Benoit ont été projetés à cette bibliothèque, respectivement les 7, 8 et 9 août 2014. Des représailles ont été orchestrées par François Duvalier contre treize membres du groupe « Jeune Haïti », dont des mulâtres, après leur entrée dans la ville de Jérémie, en août 1964.

Lors des massacres, des stylets et des cigarettes ont même été utilisés comme instruments de torture à l’encontre des enfants par des macoutes avides de sang. Capturés par les macoutes, Marcel Numa et Louis Drouin sont torturés et fusillés à Port-au-Prince, en pleine rue, devant le cimetière, en novembre 1964. Duvalier exigea la présence des employés de l’État, du secteur privé, des élèves de toutes les écoles (préscolaire, primaire, secondaire) et des étudiants de différentes facultés sur le lieu de l’exécution pour qu’ils en furent témoins. Quelle horreur ! Des orchestres populaires furent contraints de s’y rendre pour jouer de la musique. Des boissons gratuites furent distribuées en la circonstance. Les cadavres tombés en putréfaction au vu et au su de tous furent détachés des poteaux après seulement plusieurs jours. Ce sont donc là les atrocités commises par des membres des ex-forces Armées d'Haïti sous l’ordre du dictateur François Duvalier.

Auteur Isabelle L Papillon
Illustrations : HCC

Monday, August 21, 2017

UN MOUVEMENT FÉMINISTE EN HAITI

Par Jacques Saint-Surin

Notre monde est patriarcal. C'est une évidence. Tout se concentre autour des hommes et se définit par leur bon vouloir et leur diktat.
Portrait d'une femme haïtienne

Ceci est un fait indéniable, partout dans le monde. Les grandes décisions de ce monde sont dictées par les hommes. Les lois des nations, ne sont-elles pas légiférées et adoptées par le suffrage de la gente masculine, majoritaire dans tous les parlements des pays de la planète ?
Alors il est, tout à fait normal, que les hommes prennent , toujours, des décisions qui les avantagent d'abord avant de penser à celles des femmes.
Les trois religions monothéistes --le Catholicisme, l'Islam et le Judaïsme imposent l’autorité et la supériorité de l'homme sur la femme qui est mise, constamment au second plan de l’échelle sociale.
La bible commande : "Femmes, soyez de même soumises à vos maris, afin que, si quelques-uns n'obéissent point à la parole, ils soient gagnés sans parole par la conduite de leurs femmes" (1 Pierre 3:1). Ou encore dans Éphésiens 5:22-24 : "22 Femmes, que chacune soit soumise à son mari, comme au Seigneur ; 23 car le mari est le chef de la femme, comme Christ est le chef de l'Eglise qui est son corps, et dont il est le Sauveur. 24 Or, de même que l'Eglise est soumise à Christ, les femmes aussi doivent l'être à leur mari en toutes choses".
Le Coran : « Les hommes ont autorité sur les femmes » [Sourate An-Nisa : 34]

« Les femmes vertueuses sont obéissantes (à leurs maris), et protègent ce qui doit être protégé, pendant l’absence de leurs époux, avec la protection d’Allah » [sourate An-Nisa : 34]

« Si une femme prie ses cinq prières (quotidiennes) et préserve ses parties intimes chastes et obéit à son mari, elle entrera au paradis, par la porte qu'elle souhaite. » [Rapporté par Ibn Hibban dans son Sahih].
« Quand un homme appelle sa femme au lit et qu’elle ne lui vient pas et qu’il passe la nuit fâché contre elle, les anges la maudissent jusqu’au matin. » [Rapporté par Al-Bukhari et Muslim]

Femme mère
Le commandement juif en parle. Rambam (Hilchos Ishus 15:20): "Ainsi, nos Sages ont ordonné que la femme honore son mari à un degré extrême et que la peur de lui soit sur elle et qu'elle fasse toutes ses actions selon ce qu'il dit et qu'il devrait être Dans ses yeux comme un souverain ou un roi. Elle devrait orienter ses activités selon ce qu'il désire et rester loin de ce qu'il déteste. C'est la manière des filles d'Israël et des enfants d'Israël qui sont saints et purs dans leurs mariages. De cette façon, la communauté sera agréable et louable."
Qui ont  formulé ces exigences ? Les Arabes et les Juifs, selon leur us et coutumes. Et surtout ce qui avantage  leurs appareils génitaux. Le roi Salomon n'avait-il pas un harem de 365 épouses ? Ne couperait-il pas la tête d'une de ces femmes si elle oserait un flirt d’infidélité avec un autre homme. Un musulman peut avoir plusieurs épouses. Mais la femme musulmane subirait la Charia si elle était infidèle.
La Charia est une Loi canonique islamique régissant la vie religieuse, politique, sociale et individuelle, appliquée de manière stricte dans certains États musulmans. (Larousse).
 David et Bethsabée
Le roi David fut un joueur cruel. Pendant que les Saintes Écritures ordonne aux femmes, la fidélité, David s’était permis de convoiter la femme d'Urie, son soldat, contre qui il trama un complot pour le faire tuer sur le champ de bataille.
On peut lire dans 2 Samuel 11.1-12.25 ceci : "2 Un soir, David se leva de son lit. Comme il se promenait sur le toit du palais royal, il aperçut de là une femme qui se baignait et qui était très belle.

3 David fit demander qui était cette femme et on lui dit: «N'est-ce pas Bath-Shéba, fille d'Eliam et femme d'Urie le Hittite?»

4 David envoya alors des messagers la chercher. Elle vint vers lui et il coucha avec elle, alors qu'elle venait de se purifier après ses règles. Puis elle retourna chez elle."

Allons maintenant en Europe et ouvrons le livre de la grammaire française. N'est-il pas clairement exprimé que "le masculin remporte sur le féminin" ? Machisme et misogynie ! Qui a formulé ces règles chauvinistes, parmi tant d'autres, régissant la vie sociale des Européennes ? Les hommes, bien sur ! Les rois pouvaient, à leur guise, faire guillotiner leurs femmes et concubines pour cause d’infidélité. Les reines n'en pouvaient autant, à ce que je sache.
Pour les Hispaniques des Antilles et de l’Amérique Latine, le terme "macho" stipule bien la liberté des "hombres" de subjuguer les femmes, à leur gré.
Mes cousins de l'Afrique et des continents américains répriment, sévèrement, l'attitude indépendante des femmes affranchies. Car la soumission de la femme est un devoir et les contrevenantes en subissent de cruelles sévices. Le traitement abusif des femmes  est un fait courant de la vie quotidienne. Quoique les mesures drastiques contre la violence féminine soient légiférées et en vigueur, pour palier ce mal, ces cas d'abus abondent, chaque jour et de plus en plus, dans les tribunaux.

La paysanne haïtienne

Haiti n'en est pas exclu. Avant la Constitution de 1987, (peut-être avant), "la femme mariée fut considérée mineure". Elle devait même avoir la permission de son époux pour obtenir un passeport et un visa pour voyager. La plupart des femmes se soumettent à cette mentalité dégradante jusqu’à ce jour. Un fait criant,  la majorité de l’électorat féminin ont voté le candidat Michel Martelly à la présidence d'Haiti, en 2011, versus Mirlande Manigat. Et cela malgré le manque de respect du musicien pour la femme ; ce qui est  flagrant et une constance, avant, durant et après sa présidence. On est en droit de dire que ces votantes ont préféré l'ignominie et la bêtise du "bandi legal" (sic dixit) à la décence et l'intellectualisme d'un érudit.
Un mouvement féministe s'impose, en Haiti. Avec des exigences adaptées aux réalités et à la culture haïtiennes. Couramment, plusieurs personnalités de la Diaspora haïtienne et en Haiti travaillent assidûment et d'arrache-pied, pour démarrer ce mouvement féministe, dans le pays. Très prochainement ! Il y aura bien de détracteurs. Comme à l’accoutumée, l'ostracisme et l’insécurité des obscurantistes, des négligeables, des déplorables, des brutes et des durs à cuire seront à la table de l'opposition pour contrecarrer ce mouvement.
La feuille de route de cette organisation sera centrée sur trois actions spécifiques:
1- l'autonomisation des femmes qui impliquera une dynamique devant assurer leur indépendance financière. Ce faisant, les mères de familles seront économiquement habilitées à assurer l’écolage de leurs enfants, les jeunes filles, en particulier. Ainsi, on peut espérer un frein dans l'exploitation sexuelle de ces jeunes filles en difficultés économiques, obligées à se lier d'affaires de concubinage avec des "sugar daddies" qui paient leur écolage et autres nécessites de survivance.

2- Assurer une éducation solide et appropriée en créant, à travers le pays, des institutions scolaires bien équipées avec du matériel pédagogique adéquat et des professeurs chevronnés pour renforcer les capacites intellectuelles des jeunes femmes ;
3- Encourager les femmes à une plus grande participation dans les grandes décisions et actions de la vie nationale ;
a) Inciter les femmes à prendre une part plus active dans la politique. Bien que le mouvement féministe se voudra apolitique, il épaulera toutes les femmes vaillantes et conséquentes qui viseront les postes politiques les plus importantes telles que Maires, députées, sénatrices, magistrate suprême, etc.

b) Mener une campagne sur le plan judiciaire devant accroître la présence de beaucoup plus de femmes dans le système des ordres de la justice et de l'administration.

c) Organiser, partout dans le pays, des brigades de vigilance qui œuvreront aux cotés des autorités, comme des auxiliaires volontaires de la justice, pour faire respecter les droits de la femme et appliquer les lois contre les abus et la violence perpétrés sur elles.

Les femmes haïtiennes doivent comprendre que l'effectif majoritaire des hommes dans les instances de grandes décisions de la nation n'arrangera, au prime abord, que l’intérêt patriarcal. Il s'impose une balance de l’équation pour que la femme haïtienne ait une voix sonore dans les décisions relatives à ses intérêts et son avancement.
D'autres considérations seront faites pour que le mouvement féministe trouve une atmosphère plus agréable aux femmes dans la société haïtienne. La promotion du respect des droits égalitaires du citoyen haïtien en général et leur promotion doivent être la pierre angulaire pour le progrès, la paix, l'harmonie, en Haiti.
Espérons que la femme haïtienne --ou du moins, la plupart-- se libère, avant tout, de cette mentalité rétrograde que son existence, sa survie et son bonheur dépendent, uniquement, d'un homme !

Chicago le dimanche 23 juillet 2017.
     
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Jacques St-Surin

Friday, August 18, 2017

Malou – Une voix aux accents d’éternité

Par Max Dorismond

Parnel Clédanor allias Malou
Personnage charismatique qui ne vivait que pour sa chanson, son micro et sa guitare, Malou cultivait la joie de vivre. Un sourire enjôleur au coin des lèvres était sa marque de prédilection, son empreinte d’artiste. Il était les mots, les strophes de ses chansons. Il les respirait, les buvait à grande lampée et les concrétisait grâce à la magie de l’électronique en une phrasée sonore qui venait te chercher dans tes rêves les plus secrets. Nul n’aurait imaginé cette subite disparition.

Pour les Grand’Anselais, il était MALOU. Pour les autres, c’était Parnel Clédanor. Nous, Jérémiens de la diaspora, n’avons pas eu le temps de lui dire ce qu’il représentait à nos yeux. Nous avons raté l’occasion de lui dire MERCI, deux fois MERCI. C’est très malheureux. La plupart d’entre nous, commettons souvent cette malencontreuse et regrettable erreur, de ne jamais faire part du vivant de nos bienfaiteurs, de l’amour, du respect que nous leur vouons. Cette symbolique déclaration arrive toujours trop tard, à leur disparition, lors de l’ultime adieu.

Malou, aujourd’hui, malgré les sanglots qui affluent dans nos gorges, malgré les larmes qui déboulent en cascade sur nos visages  et nos cœurs qui sont en lambeau, nous avons l’insigne devoir de décrire au monde la place que tu occupais dans notre album de famille.

Lorsqu’en 1964, la fureur aveugle et inexprimable endeuillait nos rues, défigurait notre cité, ta voix si singulière s’élevait derrière les portes closes dans des ritournelles d’une telle tendresse qu’on en venait à chasser nos peines, à éradiquer nos douleurs, nos chagrins et nos traumatismes. Tu nous avais redonné goût à la vie et à l’espoir. On avait retrouvé un certain équilibre pour continuer notre chemin, même cahoteux. Mais, devant l’horizon hermétique d’un pays exangue et zombifié, où « l’inaptocratie » et l’arbitraire avaient droit de cité, nous, de la jeunesse, avions opté pour l’exil. Sans hésiter, tu nous avais suivi à la trace, même si nous avions voyagé à l’envers du rêve de nos ancêtres, bâtisseurs de nation, même si émigrer, c’était mourir un peu.

Au pays d’accueil, quand nos rêves disputaient l’espace au cauchemar, tu étais toujours là pour nous remonter les ailes. Face à la nostalgie chronique, tu nous chantais nos heureux souvenirs : Jérémie, Versailles, la Place Dumas, l’Anse-d’Azur,  les flots bleus de la Grand’Anse et le sable chaud des Antilles. Au cours de ces agapes fraternelles, tes chansons, à l’image de la jeunesse de l’époque, à la mesure de ton personnage, charmaient et interpellaient à la fois tes fans. Voilà comment je t’ai décrit dans l’un de mes articles : « Chansonnier surdoué, les structures musicales de tes poèmes sont d’une inventivité efficace chargée de rythmes et d’émotions. On écoute tes premières chansons, les yeux embués, et les secondes, un peu éberlué, la tête dans les nuages à la recherche d’un premier amour perdu, d’un premier rêve laissé sur les contreforts de « Versailles Night Club ». À t’entendre dans la chanson éponyme, « A Versailles ce soir », on ne cesse de retourner à ce rendez-vous manqué d’un amour imaginaire… ».

  
Pour saisir l’impact, l’apport psychologique de ce célèbre jérémien sur ses congénères souffreteux, en diaspora, veuillez visionner, juste pour l’histoire, une des vidéos des « Amis de la Place Dumas » captée par Hervé Gilbert de Haïti-Connexion Network, à Palm Coast, en Floride et vous comprendrez. À voir les convives se dandiner ou chanter en chœur, vous aurez deviné le défoulement de ces femmes et de ces hommes qui oublient l’espace d’un refrain les affres de l’exil pour retourner, par la magie du rêve, dans le coin de pays qui avait tant bercé leur jeunesse.



J’avais écrit encore  « que tu étais notre chanteur fétiche.  De ta voix sirupeuse, rappelant celle d’Elvis Presley ou le crooner Frank Sinatra, tu nous as entraînés vers des sommets insoupçonnés. Ton talent nous a permis de nous évader dans des excursions exotiques où la mélancolie a été détrônée et la tristesse désarçonnée. En quatre langues, français, anglais, espagnole et créole, tu nous prenais par la main pour nous entraîner avec toi au septième ciel ». En ces moments de détente, le stress de l’exil, la pression de l’Amérique triomphante étaient loin de nos préoccupations. Tu étais purement et simplement la pilule apaisante qui masquait l’effroi de l’absence, le chagrin de l’isolement. Tu étais le point d’intersection entre notre folie et notre soif du mieux-vivre.

Voilà ! Mon cher Malou. Comme les poètes sont éternels, il ne sera jamais trop tard pour les remercier. Pour toi, notre artiste de prédilection, nous ne cesserons jamais de te dire, mille fois : Merci !

Cher Ami, à la place que tu occupes à la droite de Dieu, nous t’invitons à ne pas lâcher le micro. Car au ciel aussi, nous aurons toujours besoin de ta superbe voix.

Bon voyage frérot !  Ce n’est qu’un au revoir ! Repose en paix !

Monday, August 14, 2017

Les colons avaient aussi des puces et des morpions en partage (2ème partie)

Par Max Dorismond

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Plusieurs poèmes de l’époque chantaient ces actes intimes, ces doux grattages en public sous les épais habits de l’époque. Plusieurs livres en parlaient. L’élite n’était pas à l’abri.  Même Louis XIV, « dont le Journal de Santé, tenu par ses médecins, nous apprend qu’il était troublé par les punaises 5- ».  Selon le pasteur protestant Christian Lesser, « Il n’est point d’homme, depuis le Roi, jusqu’au dernier de ses sujets, qui soit à l’abri de leurs insultes 5- ». En réalité, ces insectes nuisibles n’étaient pas l’apanage du peuple. Les femmes de la haute société qui portaient des manteaux « en fourrures d’animaux carnivores », accompagnées d’un petit chien, ne reflétaient pas simplement un signe de coquetterie, mais de préférence, une technique pour se protéger contre les vermines qui s’attaquent au revers de la fourrure ou se collent au petit chien, véritable piège à puces. « Le parasitologue Jean-Claude Beaucornu signale que leur abondance était telle que pendant la restauration de White Hall en 1962, on aurait trouvé, dans des vêtements datant du règne d’Henri VIII, (Angleterre 1491-1547), des centaines de puces mortes 6- ». En 1668, Étienne Cormus était payé 24 florins mensuellement pour « fumiger, parfumer, purifier  passants et maisons 7- ».
Aussi, plusieurs peintures ou tableaux célèbres du XVII et XVIIIe siècle témoignent de la virulence de ces insectes piqueurs et du romantisme qui y a été accolé. On retrouve la « Chercheuse de puces » du peintre français Nicolas Lancret, La « Servante à la puce » de Georges de la Tour, la « Chasse aux puces » de Gerrit Van Honthorst, s’il ne faut citer que ceux-là. En effet, « Il semble que la chasse aux puces soit un jeu amoureux de l’époque moderne », selon l’auteure Camille le Doz…3- Pas plus tard, qu’hier, au XIXe siècle, c’était malséant de chercher des puces en public, mais dans l’intimité, on ne dédaignait point cette tendre caresse. Et les amoureux s’en délectaient à cœur joie. Plusieurs poètes ont légué leurs odes à la puce. Nous pouvons citer, à preuve, le poème de Claude d’Esternod, « Le Paranymphe de la vieille qui fit un bon office (1619)». L ‘auteur relate les souvenirs de l’intimité d’une maîtresse âgée lors de ses ébats amoureux évoquant les puces à témoins : « Puisses-tu vieille Cibelle / Vivre toujours comme immortelle / Que la puce mal à propos /Le morpion, ni la punaise, / Ne viennent point troubler ton aise, / Ta pasture, ni ton repos 8- »

Ce qui suit va sans nul doute nous laisser avec une pensée pour les premiers Américains, en l’occurrence les indiens, au contact des premiers aventuriers qui y débarquèrent. L’histoire rapporte que ces derniers furent victimes de mauvais traitements, du travail harassant auquel ils n’étaient pas habitués, de maladies importées par les Européens sans en décliner la totalité. Or, cet insecte hématophage fut porteur « de l’agent vecteur du bacille de la peste bubonique ». Cette peste décima l’Europe du VIe  jusqu’au VIIIe siècle 9-. Ensuite, elle refit son apparition en 1347 pour ravager le continent qui a perdu un quart de sa population, soit de 25 à 40 millions de personnes, pendant 5 ans, de 1347 à 1352. Cette époque fut connue sous le vocable de la « mort noire ou la peste noire ». Par des contrecoups sporadiques, cette peste frappa ce continent pour s’affaiblir seulement au XVIIe siècle 10-.

Christophe Colomb, dans son récit à propos des indiens d’Amérique, décrivait cette peuplade comme étant des saints-hommes. « Ils sont très doux et ignorants de ce qu’est le mal. Ce sont les meilleurs gens du monde et les plus paisibles…11- ».  Colomb effectue son premier voyage de retour en Espagne en laissant une garnison en bons termes avec les autochtones. À son retour à St-Domingue, en novembre 1493, ce fut la consternation. Les 39 membres de son fortin furent décimés. Si, et encore si les indiens avaient découvert que ces éléments avaient contaminé leurs femmes et leurs filles avec ces insectes hématophages, ne serait-ce pas, entre autres, une des causes de ce carnage exécuté par ces « hommes si paisibles » ? Là encore, l’histoire a souligné d’autres raisons pertinentes. Nous ne saurons avancer dans ce labyrinthe pour le moment. Car, avec les « SI », nous pourrions converser avec les martiens. Toutefois, dans la chaleur tropicale, la croissance de ces bestioles s’avère plus virulente.  L’auteur de l’ouvrage «  Hortus sanitatis », Joannes de Cuba, (1491) l’a confirmé en ces termes : « La pulce est moult piquante et poignante, memement au temps deste (été) et au temps de pluye 12- ».

Malgré la somme de livres existants consacrés à ce sujet, il y eut un voile épais sur ces épisodes que l’Europe obséquieuse ne voudrait pas révéler. C’est ce qui explique l’absence de ces ouvrages chez les ex-colonisés. Les bons petits Frères de l’Instruction Chrétienne ne s’empressaient pas de les entretenir du ravage de ces bestioles dans leur société d’origine. Pourtant, objet encore brûlant, les écrivains ne désarment point. Michel Braudau, en 1982,  nous a gratifiés du livre, le « Fantôme d’une puce » et Camille Le Doze, en 2010, nous arrive avec « La Puce : De la vermine aux démangeaisons érotiques ».

Dans la réalité, les autochtones ne furent pas seulement tributaires de la langue. Les prédateurs avaient aussi des puces, des morpions, des punaises et d’autres vermines en partage. Les natifs furent victimes d’une kyrielle de maladies innommables. Est-ce que ces derniers et les esclaves importés d’Afrique, à part ceux importés d’Europe (Les Engagés),  en avaient aussi, bien avant ce choc des civilisations? Aucun bouquin connu n’en a fait mention. Je n’ai pas poussé mes recherches assez loin pour répondre à cette interrogation. Cependant nous n’allons pas non plus infirmer l’histoire. L’hygiène laissait à désirer partout, sur tous les continents, à cette époque. Chacun possédait ses petites bibittes et ses simples bobos, connus sous d’autres noms, évidemment. Toutefois, j’ai retracé dans un écrit de l’historien Jacques Casimir, « Le chemin des origines », une référence des autorités coloniales de l’époque, sorte d’appel au secours pour prévenir ou stopper les infections dans les Caraïbes. Elle se lit comme suit : « Les Antilles françaises des Amériques : Guadeloupe, Martinique, Saint-Domingue(Haïti), étaient devenues les déversoirs de toute la racaille de la société française, si bien qu’en 1713, Charles de Corbon Comte de Blénac, gouverneur Général des Antilles françaises et de la Martinique et Jean-Jacques Mithon de Senneville, premier intendant de Saint-Domingue, supplient le Ministre de la Marine « de n’envoyer aucune fille comme à l’ordinaire des mauvais lieux de Paris ; elles apportent un corps aussi corrompu que leurs mœurs. Elles ne servent qu’à infecter les colonies et ne sont nullement propres à la génération 14- » ».

J’ai lu l’ouvrage du Dr. JBR. Pouppé Desportes : « Histoire des maladies de Saint Domingue (1742) 13- ». Il a séjourné au Cap-Haïtien durant quatorze ans. Le mot puce n’y figure pas plus. Par contre, des maladies fulgurantes qui tuent en l’espace de vingt-quatre heures furent répertoriées. Des maladies aux noms bizarres, aux effets dévastateurs pour la plupart, au point de souligner que notre existence aujourd’hui s’avère être le résultat de la sélection naturelle. C’est-à-dire, les plus forts seulement étaient parvenus à survivre dans l’enfer décrit. La chaleur tropicale était impardonnable. Le nouveau monde ne fut pas un itinéraire parsemé de roses écarlates.

Voilà ! Ce fut pour moi, une manière de partager avec vous ces quelques souvenirs coquins sur cette langue qui n’est pas nôtre et que les petits amis de nos ancêtres n’avaient pas jugé nécessaires de leur révéler.

Max Dorismond
NOTE BIBLIOGRAPHIQUE

1-       Remuer la puce à quelqu’un : Autrefois c’est épouillé quelqu’un, lui enlever ses puces. Aujourd’hui, c’est taper, battre, secouer un enfant, un individu… Marché aux puces : Zone commerciale qui fait référence à des vêtements infestés de puces en vente à partir du XIXe siècle. (Hugo Dumas, La Presse du 12-07-2017) – Aujourd’hui : zone commerciale où l’on vend de tout, du neuf comme du vieux. Sorte de foire commerciale. Avoir la Puce à l’oreille : « Cette locution, autrefois, a désigné pendant des siècles, le  tourment et l’agacement amoureux. Aujourd’hui, elle signifie : être au courant de… »
2-       On appelle Moyen Âge, (Ve au XIIIe siècle) ou époque médiévale la longue période d'environ 1000 ans qui, en Europe, sépare la fin de l'Empire romain d'Occident (476 ap. J.-C.) de la découverte de l'Amérique par Christophe Colomb en 1492(ou de la chute du royaume musulman de Grenade en Espagne, la même année)
3-       « La Puce : De la vermine aux démangeaisons érotiques. Camille le Doze » Les Éditions Arkhê, 2010 (France). (page 170)(page 86)