François-Marie Arouet alias M. de Voltaire |
Par Jean Rico Louis
La plupart des gens revendiquent le droit à l’athéisme et se considèrent définitivement comme athée. Mais le sont-ils véritablement?
Le philosophe Voltaire, bien qu'ayant été sceptique toute sa vie quant à l'existence de Dieu, a finalement reconnu, en fin de vie, qu'il ne pouvait concevoir l'univers sans la présence d'un être supérieur à l'origine de sa création. Il écrivit à ce propos :
« L’univers m’embarrasse et je ne puis songer que cette horloge existe et n’ait pas d’horloger. »
Le Dieu évoqué par Voltaire ne correspond toutefois pas aux descriptions formelles proposées par les religions. Voltaire, farouchement critique et souvent sarcastique à l’égard des institutions religieuses, les considérait comme une forme de superstition. Néanmoins, il faisait partie de ces esprits éclairés qui, à l’instar de Spinoza ou du célèbre physicien Albert Einstein, tentaient de concilier raison et foi en une intelligence supérieure.
Le scepticisme de Voltaire, comme celui de nombreux penseurs, reposait sur leur incapacité à admettre comme réel tout ce qui ne peut être vu ou touché. Toutefois, une telle approche limite la compréhension de l’étendue immense du savoir. La connaissance ne se résume pas aux perceptions sensorielles de base ; elle s'épanouit dans le domaine des sciences expérimentales.
Par exemple, bien que nous ne puissions pas voir le courant électrique traverser un fil conducteur, nous ne remettons pas en doute son existence, car nous constatons ses effets tangibles. De même, nous ne percevons pas le vent, mais nous observons ses manifestations à travers les mouvements des arbres ou de la poussière. L'ordre qui régit l'univers témoigne également de la présence d'une intelligence supérieure, que l'on pourrait appeler Dieu, nature ou principe supérieur.
Il semble difficile de prétendre que cet univers harmonieux est le fruit du hasard. Dieu, en tant qu’ultime horizon du savoir, échappe à notre compréhension humaine, car notre finitude nous empêche de saisir l’infini.
Les religions, tout en tentant d'expliquer Dieu, ne parviennent pas à rendre compte de sa nature véritable. Elles représentent plutôt l’expression du désir humain de vénérer un être inconnu, qui reste un mystère insondable pour les créatures de cette terre.
Quant aux athées, leur négation de Dieu semble être davantage un refus qu'une véritable incrédulité. Lorsqu’ils sont confrontés à la mort, beaucoup cherchent une forme de réconciliation avec cette idée divine, comme l'a fait Voltaire avant sa disparition.
Le rejet de Dieu par certains peut souvent s'expliquer par les contradictions observées au sein des religions. Ces dernières peinent à incarner les principes qu’elles prônent, tels que l’amour, la compassion et le pardon. Comment concevoir un Dieu miséricordieux qui condamnerait ses créatures à des souffrances éternelles? Quel Dieu bon permettrait l’injustice, l’esclavage ou la discrimination?
Si nous doutons de l'existence de Dieu ou même de Satan, nous devons reconnaître que les êtres humains oscillent entre bien et mal.
Cependant, n'étant pas certains de la validité de nos propres arguments sur la question de l’existence de Dieu, il serait sage d’aborder cette notion avec plus de modestie. Car, en tant qu’êtres finis, nous sommes encore incapables de saisir l’immensité de cet être infini qui semble être à l'origine de tout.
Il est intéressant de voir comment Voltaire, malgré son scepticisme à l'égard des dogmes religieux, a fini par reconnaître une forme d'intelligence supérieure à l'œuvre dans l'univers. Cependant, il convient de nuancer cette réflexion en considérant que son approche, ainsi que celle d'autres penseurs comme Spinoza ou Einstein, ne visait pas tant à prouver l'existence d'un Dieu tel que décrit par les religions traditionnelles, mais plutôt à souligner l'ordre et la rationalité inhérents à la nature.
ReplyDeleteLa citation de Voltaire sur l'horloger souligne une vision déiste, c'est-à-dire la croyance en une force créatrice rationnelle et non interventionniste. Or, cela ne signifie pas nécessairement une adhésion à l'idée d'un Dieu personnel ou moral tel que les religions le décrivent. Au contraire, Voltaire critiquait vigoureusement les superstitions religieuses, qu'il voyait comme des obstacles à la raison et à la liberté de pensée.
Le raisonnement selon lequel tout ce qui est ordonné implique un ordonnateur est séduisant, mais il repose sur une analogie qui ne s'applique pas nécessairement à l'univers. La complexité et la régularité que nous observons dans la nature ne sont pas forcément des preuves d'une intelligence supérieure, mais peuvent être le résultat de lois physiques et naturelles que nous comprenons de mieux en mieux à travers la science.
En ce sens, comparer l'invisibilité de Dieu à des phénomènes comme l'électricité ou le vent, bien que poétique, reste une simplification. Ces phénomènes peuvent être mesurés, prédits et compris à travers des méthodes scientifiques rigoureuses. En revanche, l'existence d'un Dieu, d'une intelligence supérieure, ou d'un principe créateur relève davantage d'une question philosophique ou métaphysique, qui échappe aux outils d'analyse expérimentale.
Ainsi, si Voltaire, Spinoza, ou même Einstein ont envisagé la possibilité d'une force sous-jacente à l'univers, ils l'ont fait dans une perspective d'émerveillement face à l'ordre naturel, et non en tant que preuve d'une divinité active ou personnelle. La véritable quête de ces penseurs était celle de la compréhension des lois naturelles, plutôt que de la recherche d'une entité divine au sens religieux du terme.