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Sunday, September 30, 2018

Cour suprême des États-Unis: un compte-rendu de l'affaire Brett Kavanaugh - Christine B. Ford

Judge Brett Kavanaugh, Dr. Christine Blasey Ford

Pour ceux qui veulent entendre la version audible tout en prenant lecture de l’article, cliquez sur  le player sound cloud ci dessous:


Par:Herve Gilbert

Ce jeudi 27 septembre, durant l’audience du Comité judiciaire du Sénat américain, le public a vu deux témoignages télévisés qui ont été à la fois surprenants, émouvants, instructifs et bouleversants. C’est une affaire qui continue de déchaîner les passions aux États-Unis. Quoi qu’il en soit, cette audience du Comité judiciaire a été décrite par les journalistes américains  comme un grand moment historique. L’ affaire implique Brett Kavanaugh, protégé de Donald Trump et candidat à la Cour suprême des États--Unis, accusé par Christine Blasey Ford, d'agression sexuelle, d'exhibitionnisme et de tentative de viol alors qu'elle avait seulement 15 ans.

Christine Blasey Ford
Oscillant entre retenue et émotion, Christine Blasey Ford  a, pendant plus de quatre heures, raconté avec certains détails la présumée agression sexuelle perpétrée , il y a 36 ans  (en 1982),  par Brett Kavanaugh, actuel candidat à la Cour suprême des États-Unis.  Ce dernier  «l’avait prise par surprise» et avait essayé de la déshabiller, a-t-elle relaté. Au cours de sa réplique,  Kavanaugh s’est lançé dans une volée verbale pathétique et violente, niant en bloc les allégations de Mme Ford tout en  qualifiant le processus de "cirque" et de "honte nationale", sans manquer de s’en prendre aux sénateurs du  Parti démocrate qu’il a accusés de vouloir détruire sa réputation à travers un complot calculé, en guise de vengeance pour les Clinton et aussi pour la perte des élections de 2016. 

Juge Brett Kavanaugh lors de son témoi-
gnage devant le Comité judiciaire.         
Cette procédure  dans un premier temps a eu des retombées différentes de part et d'autre des mouvances politiques :  les supporters  de Ford ont qualifié son témoignage de crédible et un nombre important de femmes du pays avaient été touchées par le caractère poignant de son  témoignage. Quant aux supporters de Kavanaugh, ils ont jugé que  son intervention, quoique perçue comme  défiante ou belliqueuse, a réflété une  colère juste face aux allégations de l’accusatrice.  

En résumé, on peut déduire que c'étaient deux dépositions totalement contradictoires où Christine, d'une part, a déclaré  être à «100 %  sûre » que Brett est celui qui l'a agressée, tandis que ce dernier, d’autre part,  a nié toute participation à cette tentative de viol.

Sénateur Jeff Flake aprés avoir été
confronté par les deux femmes.       
En effet, le  sénateur républicain  de l’Arizona Jeff Flake, qui avait annoncé son intention de soutenir la candidature de Brett Kavanaugh, a alors effectué un revirement complètement inattendu. L’un des ascenseurs conduisant à la salle d’audience qu’avait pris Flake ne pouvait pas  se refermer. Car la porte était  bloquée par deux jeunes femmes qui ont interpellé le sénateur républicain sans ménagement pendant que les caméras enregistraient la scène : 

« Et la première  femme, Ana Maria Archila, de dire: Lundi, je suis allée à votre bureau. Je vous ai relaté l’histoire de mon agression sexuelle. Ce que vous faites va permettre à quelqu’un qui a effectivement violé une femme de siéger à la Cour suprême. Ce n’est pas tolérable. Vous avez des enfants. Pensez à eux. »


Voir la video des deux femmes émues et larmoyantes confrontant le sénateur Flake dans l'ascenseur.
«Ne détournez pas votre regard, enchaîne la seconde, Maria Gallagher, qui fait allusion à la position ambiguë de Brett Kavanaugh sur l’avortement. Regardez-moi et dites-moi que ce qui m’est arrivé n’a pas d’importance, que vous laisserez des gens comme cet homme entrer dans la plus haute cour de justice du pays et dicter à tous les gens ce qu’ils doivent faire de leur corps.» Perturbé, Sénateur Flake a écouté dans le plus grand silence.

Nul ne pouvait supposer le poids qu’allaient avoir ces deux interventions. Mais quelques instants plus tard, avec l’aide de son collègue démocrate Chris Coons (Delaware), le sénateur déclenchait un véritable coup de théâtre. En échange de la promesse de son vote, il a obtenu un sursis d’une  semaine pour une enquête du FBI, enquête que les démocrates demandaient en vain. La veille, en séance publique, Jeff Flake avait déjà longuement fait état du malaise suscité par la procédure de confirmation, invitant ses pairs à manifester du respect à la fois pour la personnalité de l’accusatrice Christine Blasey Ford et celle de Brett Kavanagh. Alors que le camp républicain se portait au secours de Brett Kavanaugh qui stigmatisant les questions des démocrates qu’il a qualifiés de comploteurs, Jeff Flake se contentait de déplorer à nouveau le climat de guerre civile qui déchirait le tissu social du pays. Ce sénateur de l’Arizona, un des rares élus républicains à exprimer son désaccord avec Donald Trump, quittera bientôt le Sénat. Prenant acte du divorce avec les électeurs devenus des inconditionnels du président, il a renoncé à se présenter à nouveau comme sénateur en novembre prochain. Son initiative de vendredi sera peut-être  l’un de ses derniers gestes de parlementaire. Elle peut tout aussi bien conforter Brett Kavanaugh si le FBI se révèle incapable de dire qui de l’accusé ou de l’accusatrice a dit la vérité que mettre un terme aux ambitions du juge si la police fédérale raffermit la thèse de Christine Blasey Ford. Dans les deux cas, Jeff Flake aura le sentiment d’avoir accompli son devoir de parlementaire.

De toute façon, tout peut se résumer à une formalité pour le Sénat dans une semaine, puisque le vote procédural de la commission judiciaire sénatoriale  a déjà été pris pour la poursuite de la nomination de Kavanaugh devant tout le sénat. Et cela,  après que la demande d’investigation du FBI faite par le sénateur Flake ait été acceptée par le Comité judiciaire et approuvée par le président Trump en fin de soirée.

Cette controverse  sur la confirmation du juge Kavanagh à la Cour suprême pèsera certainement  très lourd sur les élections de mi-mandat prévues pour le mois de novembre 2018.

Pour renchérir sur  le commentaire de notre fidèle lecteur (Eddy Cavé ) du Canada que nous venons juste de lire, nous dirions pour conclure que l’affaire Kavanaugh-Ford a en quelque sorte tiré la sonnette d’alarme  (wake -up call) aux votants - surtout les jeunes et les minorités- qui doivent prendre conscience que toute élection aux États-Unis a des conséquences majeures et que chacun de leurs votes est important voire nécessaire  à leur participation de loin ou de près aux décisions politiques de leur gouvernement, comme par exemple le choix d’un juge à la Cour suprême, ont rappelé en ces moments chauds les analystes politiques et autres personnalités comme Michelle Obama. En fait,  l’ex-première Dame est en train de se rendre de ville en ville afin d’encourager l’enregistrement de futurs votants pour les élections de mi-mandat du 6 novembre 2018.


Herve Gilbert herve.gilbert@gmail.com

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