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Tuesday, July 7, 2020

La Cour suprême des États-Unis donne tort aux « grands électeurs déloyaux »


Tous les citoyens américains en âge de voter peuvent exercer leur droit de vote lors de l'élection présidentielle, mais ils ne choisissent pas directement le chef d'État et son colistier.

Un État a le droit d’obliger ses grands électeurs à respecter le vote populaire de cet État lors de la désignation du président, a statué lundi le plus haut tribunal américain.

La décision, l'une des rares prises à l'unanimité, vient ainsi limiter l'indépendance des membres du Collège électoral, à quatre mois du scrutin présidentiel.

Tranchant en faveur du Colorado et de l'État de Washington, qui étaient au centre du litige, le tribunal a de plus statué qu'un État pouvait punir les grands électeurs rebelles ou nommer quelqu'un d'autre à leur place.

Les tribunaux inférieurs qui avaient examiné le dossier étaient arrivés à des conclusions contradictoires.

Plusieurs États voulaient que la Cour règle la question, advenant la possibilité que les résultats de novembre soient suffisamment serrés pour que l'issue de l'élection soit déterminée par ceux qui sont surnommés les «grands électeurs déloyaux».

«Le texte de la Constitution et l'histoire de la nation permettent tous deux à un État de faire respecter l'engagement d'un grand électeur de soutenir le candidat à la présidence de son parti – et le choix des électeurs de l'État», a écrit la juge Elena Kagan, qui a rédigé la décision.

Un État qui oblige ses électeurs à respecter «le vote de millions de citoyens [...] agit en conformité avec la Constitution et avec la confiance d'une nation dans laquelle nous, le peuple, gouvernons», a-t-elle expliqué, faisant référence au préambule de la Constitution.

Le juge Clarence Thomas est parvenu à la même conclusion que ses collègues, invoquant cependant les principes généraux du fédéralisme.

Les représentants du Collège électoral des États qui ne les soumettent pas à une obligation légale demeurent cependant libres de voter comme bon leur semble.

Dans l'histoire du pays, il est arrivé 180 fois que le vote populaire dans un État ne soit pas respecté, soit pour la présidence, soit pour la vice-présidence, a admis la juge Kagan, citant un argument de ceux qui contestaient l'imposition du vote par un État en faveur du candidat gagnant dans cet État.
Il s'agit cependant d'une pratique marginale qui n'a jamais risqué d'avoir un impact sur les résultats, a-t-elle souligné, rappelant qu'il y avait eu 23 000 votes de grands électeurs.

Plus du tiers des votes rebelles se rapportent en outre à un seul événement, soit l'élection de 1872, marquée par la mort d'un candidat après le scrutin, survenue avant que le Collège électoral n'ait pu se rencontrer, a ajouté la magistrate.

La Cour a d'ailleurs reconnu que la perspective de la mort d'un candidat soulevait des enjeux importants.

«Parce que la situation ne se présente pas devant nous, rien dans l'opinion [de cette Cour] ne devrait être interprété comme une permission accordée aux États pour lier les grands électeurs à un candidat décédé», a averti la juge Kagan.

Une complexité du système électoral
Le dossier portait sur une des complexités du système électoral américain : l'élection du président par un collège de grands électeurs désignés par chaque État en fonction du vote des citoyens.
Dans 48 des 50 États, le candidat ayant obtenu le plus de votes dans cet État rafle toutes les voix des grands électeurs.

Trente-deux des 50 États ainsi que le District de Columbia ont des lois obligeant les représentants du Collège électoral à voter en conformité avec l'engagement qu'ils ont pris. Quinze d'entre eux prévoient des dispositions supplémentaires à l'endroit des grands électeurs rebelles, soit le fait de les remplacer ou de leur imposer des pénalités financières.

Le Nebraska et le Maine départagent leurs grands électeurs en se fondant en partie sur le vote exprimé dans l'État et en partie sur celui exprimé dans les districts.
En 2016, cinq grands électeurs sur 538 ont refusé de voter pour la démocrate Hillary Clinton bien qu'elle ait remporté la majorité des suffrages dans leur État, et deux se sont détournés du républicain Donald Trump.

Certains avaient ensuite été punis par les États du Colorado et de Washington et deux avaient contesté leur sanction – une amende de 1000 $ pour l'un, un retrait des fonctions de grand électeur pour l'autre – au nom de leur «liberté de vote».

Même si ces défections n'ont jamais eu d'incidence directe sur l'issue des scrutins, plusieurs magistrats de la Haute Cour s'étaient inquiétés pendant l'audience du risque de «chaos» si les grands électeurs déloyaux faisaient basculer une élection.

Si un vote populaire donne une très courte victoire à un candidat, il pourrait y avoir des campagnes concertées pour changer le résultat en influençant certains grands électeurs, avait notamment souligné le juge conservateur.

Source: Samuel Alito/ Radio-Canada


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