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Saturday, June 20, 2020

Julio Gauthier vient de laisser le train de la vie

Par Max Dorismond

Julio Gauthier
13 Août 1949 - 18 Juin 2020
Ti Jule, pour une surprise, c’en est toute une! Qui aurait pu avoir une pareille vision, une semblable prémonition, voir partir notre Julio aussi abruptement ? Tu étais l’homme de toutes les occasions, un homme de raison. Un être intègre, fier, et sans enflure de l’égo, aussi agréable dans une discussion animée qu’autour d’un barbecue à parler de tout et de rien. Ton charme discret et sympathique plaisait à tout un chacun. Un mot gentil pour lui, un câlin pour elle, une réponse surprenante et comique pour la galerie. De partout, le rire à gorge déployée fusait. Autour de toi, mon Julio, nul ne s’ennuyait. Les petits tourments du quotidien, l’exil, les nouvelles de lakay, noires ou bleues, se prenaient comme un apero... 

Donc, Frérot, qui aurait pensé te voir laisser aussi tôt la caravane. Pétillant d’esprit, remuant des souvenirs de jeunesse, vécus ou glanés çà et là dans l’amphithéâtre jérémien, nous étions toujours suspendus à tes lèvres, écoutant tes narrations, partageant tes analyses sociétales, ou buvant tes anecdotes avec délectation, en attendant la fin toujours rigolote. Tu nous laissais une impression de bonheur éternel, de joie sans bornes que le stress du pays d’accueil n’arrivait pas à ébranler. Nous croyions en ton étoile et ta compagnie était toujours attirante et très recherchée, pour atténuer nos angoisses existentielles et personnelles. Tu aimais le monde et tu carburais à la chaleur humaine.

Dis, qui aurait deviné ce départ hâtif, sans tambours, ni trompettes! Par amour pour tes compatriotes et tes amis, tu as vécu ta maladie en silence. Même tes frères et sœurs n’étaient au courant du drame que tu vivais. Sans te plaindre, tu marchais allègrement vers la porte du débarquement, avec la même gentillesse, le même flegme, le même trait sympathique, sans un dernier au revoir. Sachant que tu seras toujours dans nos cœurs, tu as choisi de ne pas nous dire adieu. Peut-être, est-ce mieux ainsi, tes souvenirs heureux vont continuer à nous délecter pour le meilleur.

Homme affable et tranquille, Julio nous laisse sans voix. Orateur et communicateur hors  pair, il est arrivé très jeune au Québec et s'est très vite intégré à son pays d'adoption. À réfléchir au côté placide de son existence et à son allure débonnaire, je crois avoir trouvé d’où lui est venu ce calme olympien qui lui prodiguait cette allure confiante. Parmi ses anecdotes les plus rocambolesques, je pense avoir retracé la source de cet instinct de gagnant. La voilà!

Julio Gauthier, sa femme Jocelyne, Herve Gilbert, Max
Dorismond, le 13 août 2019 à Montréal, lors du  lance 
ment du livre  de Max Dorismond.                                    
Fils d’un célèbre avocat de la ville de Jérémie, l’un des plus brillants de son époque, Me Félix Philantrope, pour ne pas le nommer, Julio était à la bonne enseigne. Un jour, vers l’âge de 7 ou 8 ans, Julio a commis une maladresse. Son père le gronda et le fit monter seul à l’étage, au grenier, pour y passer la journée en guise de punition. Contrarié, le petit Julio se mit à hurler de toutes ses forces, à ameuter le voisinage, tout en répétant qu’il allait se jeter dans le vide, qu’il allait se tuer.

À bluffeur, bluffeur et demi, Maître Fé, ne fit ni deux, ni trois. Il appela Boss Paisible, un menuisier du quartier, et lui ordonna de monter là-haut et de prendre la mesure du cercueil du pleurnicheur. Boss Paisible s’exécuta et trouva notre Julio debout dans la pièce. Il sortit son ruban à mesurer. À partir du front du futur macchabée, il le déroula verticalement vers son pied en notant sa longueur. Étonné, ce dernier, estomaqué, questionna le menuisier : Pourquoi cette mesure?

C’est pour ton cercueil, mon ami! Ton père t’a entendu crier que tu voulais te tuer, il m’a prié de prendre ta mensuration pour être prêt au cas où tu réalises ton désir!

En entendant le mot cercueil, le petit Julio, pris de panique, péta une coche et dévala l’escalier pour aller demander pardon à son père, et promettre de ne plus jamais menacer de se jeter dans le vide, de ne plus jamais lui déplaire, etc.

Cette leçon de vie d’un père strict a façonné son caractère, a développé sa capacité à reconnaître, qu’en dépit de toutes les différences, les liens humains qui nous unissent sont les plus forts et surpassent tout. Il a choisi d’être toujours gentil avec les autres, de les aider à passer à travers les soubresauts du quotidien, sans heurts et avec bonheur.

C’est sans doute, ce souci de ne pas déranger qui l’a poussé à vivre solitairement sa maladie, avec stoïcisme, sans perturber le bien-être de sa famille, de ses amis et de ses connaissances.

Mon cher Julio, avant de te dire Adieu, nous te disons : M-E-R-C-I pour ton attention constante envers les autres, tout au long de ta vie!

Haïti Connexion Network et moi, présentons nos sincères condoléances à Jocelyne-Frédéric, ta femme, à tes garçons, Jules-André,  Jean-Marc, Hendrick, à tes frères, à tes sœurs, aux familles  alliées : Gauthier, Philantrope, Bazile, Dorismond, Frédéric, Laroche, Clermont, Jacob, Appolon, Binette…et à tous ceux-là, parents et amis et connaissances, que ta soudaine disparition interpelle.

Max Dorismond
Pour Haïti Connexion Network

5 comments:

  1. 💐🙏Que le Seigneur retablisse et soutienne vous tous affectes par ce deuil et puisse vous consoler par son grand amour
    Paix et Courage

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  2. Jean-Robert Léonidas : Mes sympathies à la famille !

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  3. Mon cher Max.

    Je suis tombé, comme par hasard, sur ton beau texte annonçant la triste nouvelle de la mort de feu le sympathique Julio.
    Je m'empresse d'exprimer ma douleur à la famille et aux nombreux amis jérémiens et d'ailleurs en cette pénible circonstance.
    J'en profite pour envoyer mes pensées positives sur JÉRÉMIE ma ville adoptive et dire à toutes les soeurs et à tous mes frères de la ville des poètes que je partage leur peine.

    Maurice CELESTIN-NOEL
    LECHAPEAUTEUR

    rmaurice.celestin@gmail.com

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  4. Ce type était un grand footballer à Jérémie. Je me rappelle que son petit frere Nepthaly jouait au foot également. Que son âme repose en paix!🙏🙏🙏

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