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Wednesday, August 15, 2018

Le Fond Monétaire International (FMI), un pompier-pyromane ? (Part 1)

Une lecture à froid des émeutes du 06 au 08 juillet 2018
      
      
            Par :Michelet Michel








Introduction : éléments de cadrage
Cet « papier » est produit trois semaines après les émeutes populaires des 06, 07 et 08 juillet 2018 provoquées par la tentative du Gouvernement d’augmenter les prix de l’essence à la pompe, sous la pression du Fonds Monétaire International (FMI).  Cet article n’est pas un « SCOOP ! »    Nous avons plutôt choisi de nous donner un recul suffisant par rapport à l’évènementiel de façon à pouvoir apprécier la situation avec sérénité. Le titre, a priori incendiaire, annonce de préférence une réflexion. Il n'a pas pour objectif de critiquer à l’aveuglette les Programmes d'Ajustement Structurel (PAS) du FMI dans le but d'en évaluer l'efficacité, ni de procéder à une analyse approfondie du « POUR » et du « CONTRE » de la mondialisation et des logiques économiques qui leur sont communes, ni enfin, de présenter une revue exhaustive de leurs caractéristiques spécifiques. 

Nous essaierons plutôt, dans cette observation, d’essayer d’identifier et de mieux comprendre les déterminants de certaines de leurs conséquences sociales, économiques, politiques dans une société dont la population est constituée pour les trois quarts de citoyens vivant en dessous du seuil de pauvreté.

À l’origine des Institutions de Bretton Woods : FMI et Banque mondiale 

Juillet 1944 ! La Seconde Guerre Mondiale n’est pas terminée. La Conférence de Bretton WOODS réunit aux États-Unis les représentants des États et gouvernements alliés contre les puissances de l’Axe (Allemagne, Italie, Japon). Les principaux protagonistes en furent John Maynard Keynes pour le Royaume Uni, et Harry White pour les États-Unis d’Amérique. Le Fonds monétaire international (FMI) et la Banque mondiale, aujourd’hui largement discrédités, en sont issus.

Ces deux institutions dites de « Bretton woods » ont été créées dans une économie d'après-guerre pour compenser les déficits momentanés des balances de paiements des pays membres à l'exception du bloc de l'Est. Elles avaient initialement pour fonctions statutaires de stabiliser les taux de change pour éviter le retour des désordres monétaires des années 1930 et de financer la reconstruction à la suite de la guerre. 

Les problèmes des pays en développement sont difficiles. Le FMI est souvent sollicité dans les pires situations quand il y a crise. Dans de telles circonstances, l’institution propose aux pays endettés ayant des difficultés financières et donc à qui plus personne ne veut prêter sans garantie,- (la République d’Haïti qualifiée de « pays failli » illustre parfaitement ce cas d’espèce), - de fournir sa propre caution qui lui donnera accès aux capitaux internationaux. Toutefois, il y a une condition : l’imposition à ces pays, d’un « Plan d'Ajustement Structurel » ou PAS, dont le but est de dégager des ressources financières pour le remboursement des prêts.

La « médecine amère » du FMI 
Les PAS ont été élaborés par la Banque Mondiale (BM) et le Fonds Monétaire International (FMI) au début des années 1980 avec un double objectif : (i) le premier, aider les Pays en Voie de Développement (PVD) à retrouver une situation économique plus saine ; (ii) le second,- souvent moins exprimé mais qui était sans doute le plus urgent,- visait à assurer la survie du système bancaire international mis en péril par des placements inconsidérés. 

Quand les crises frappent, le FMI prescrit des solutions « standard » mais archaïques et inadaptées, sans tenir compte des effets qu’elles auraient sur les habitants des pays auxquels il est fait injonction de les appliquer. En la matière, il n’y a qu’une ordonnance et une seule, qualifiée de « médecine amère. » Les principales mesures (appliquées de façon mécanique, la seule adaptation étant le nom du pays qui change dans les accords) sont les suivantes :
       abandon des subventions aux produits et services de première nécessité : pain, riz, maïs, lait, sucre, combustible;
       austérité budgétaire et réduction des dépenses, en général baisse drastique des budgets sociaux “non productifs” (santé, éducation, par exemple) ;
       dévaluation de la monnaie locale ; taux d’intérêt élevés pour attirer les capitaux étrangers ;
       production agricole toute entière tournée vers l’exportation (café, coton, cacao, arachide, thé, etc.) pour faire rentrer des devises, donc réduction des cultures vivrières et déforestation pour gagner de nouvelles surfaces ;
       ouverture totale des marchés par la suppression des barrières douanières ; libéralisation de l’économie, notamment abandon du contrôle des mouvements de capitaux et suppression du contrôle des changes;
       fiscalité (franchises en tous genres) aggravant encore les inégalités avec le principe d’une taxe sur la valeur ajoutée (TVA) et surtout la préservation des revenus du capital ;
       privatisations massives des entreprises publiques, etc..
             
Mais, tous ces remèdes ont échoué aussi souvent (ou même plus souvent) qu’ils n’ont réussi. Les PAS -, mesures censées aider un pays à s’ajuster face à des crises et à des déséquilibres chroniques,- ont provoqué dans de nombreux cas des famines et des émeutes. Même quand leurs effets n’ont pas été aussi terribles, même quand elles ont réussi à susciter une maigre croissance pour un temps, une part démesurée des bénéfices est souvent allée aux milieux les plus riches de ces pays en développement, tandis qu’au bas de l’échelle la pauvreté s’est parfois aggravée.
  
D’un point de vue économique notamment, le bien-fondé de la stratégie des PAS doit être décortiqué. Questionné. Contesté. Mis en accusation. Le Prix Nobel d’économie Joseph E. Stiglitz, ancien conseiller de Bill Clinton, ancien vice-président de la Banque Mondiale, est l’un des contempteurs intransigeants des PAS.

Son livre-réquisitoire qui a fait grand bruit (La Grande désillusion, FAYARD, 2002) développe une critique dévastatrice du FMI dont il a démissionné en 1999.  Avec une éloquence passionnée, il élève la voix, gronde, vitupère, tempête, dénonce et accuse « l’autisme idéologique et politique qui sévit parmi les responsables du FMI, mus par un fanatisme du marché combiné à une paranoïa de l’inflation. » 

De l’autre côté de la barrière dialectique en revanche, certains hommes et acteurs politiques « proFMIstes »,- et surtout des économistes et des responsables de la Banque Mondiale,- opposent mordicus l’argumentation contraire : selon eux, seule la stricte application des PAS permettra aux pays du Sud de retrouver une santé économique et d’assurer un développement durable et le mieux-être de leur population. Qu’en penser ? Selon Bernard Maris (Lettre ouverte aux gourous de l’économie qui nous prennent pour des imbéciles, Éditions Albin Michel, 1999) toutes les études réalisées sur les effets de la réduction des dépenses gouvernementales et la suppression des subventions sur le bien-être concernent trois secteurs essentiels : l'électricité, l'énergie et les transports, les services sociaux et produits essentiels.  La gravité des problèmes ci-dessus évoqués est susceptible d'augmenter du fait de leur coexistence avec d'autres problèmes sociaux tels que l'augmentation du degré de pauvreté dans la société, l'impact récurrent des PAS sur les couches pauvres dans le pays, et les disparités évidentes dans les indicateurs de qualité de la vie. 


Michelet Michel, M. Sc. 
Gestionnaire Financier


 Date : 30 juillet 2018   

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