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Friday, November 18, 2016

Présidentielles américaines 2016 : une analyse percutante de Robert Benodin

L'élection surprise de Donald Trump est un seisme politique mondial
et ouvre une période d'incertitude...                                                  

Orlando le 18 novembre, 2016

Le fait que la campagne électorale de 2016 ait été parmi les plus agressives et les plus négatives. Malgré l’intensité de cette campagne tendue et surchauffée, le taux de participation a été paradoxalement plus faible que celui de l’année 2000, avec seulement 54,2% de participation. Au cours de cette campagne qui a duré plus d’une année. Les propos menaçants du candidat républicain, Donald Trump, annonçant le bouleversement de l’ordre mondial, ont provoqué de graves inquiétudes. Perçu comme un caractériel, on a jugé qu’il soit inapte à assumer le rôle et les responsabilités qu’il convoite. Les sondages, du commencement de cette campagne électorale jusqu’au jour des élections le 8 novembre 2016, n’ont fait que prédire une victoire inévitable d’Hillary Clinton. Les résultats ont choqué le monde en produisant exactement le contraire, la victoire des républicains tant à la présidence qu’au législatif. Les républicains ont maintenant la main mise à la fois sur le Congrès et la Maison blanche.

Donald Trump a obtenu 47,3% du vote exprimé, soit 60.350.241 voix et Hillary Clinton 47,8% du vote exprimé, soit 60.981.118 voix. Bien qu’Hillary Clinton ait obtenu 630.877 voix de plus que Donald Trump. Au niveau de l’Electoral College, Donald Trump a obtenu 290 et Hillary Clinton n’a eu seulement que 232. Voilà comment se pratique le suffrage universel américain. C’est le nombre de voix obtenu au niveau de l’Electoral College qui décide du gagnant. Chaque état a un certain nombre de grands électeurs membres de l’Electoral College, égal au nombre d’élus que cet état a aux deux chambres du Congrès, à l’exception du District of Colombia auquel on accorde 3 grands électeurs. Donald Trump a pu obtenir la majorité à l’Electoral College et remporter la victoire sur Hillary Clinton qu’en gagnant un plus grand nombre d’états ayant plus de membres à l’Electoral College, tels que la Floride (29), laPennsylvanie (20) et l’Ohio (18), etc. Cependant, Hillary Clinton ayant gagné dans des états ayant une plus grande population. Elle a gagné le vote populaire.

Hillary Clinton concédant sa défaite face à Donald Trump
le 9 novembre à New York. Derrière elle, son mari et son
colistier Tim Kaine.                                                           
Le fait qu’Hillary Clinton ait gagné le vote populaire, a provoqué une réaction. Ceux qui ont voté pour elle, rejettent la notion que le vote des grands électeurs supplante le leur. On assiste aujourd’hui à quelque chose d’inédite. Dès le 9 novembre 2016, dans plusieurs grandes villes, il y a des contestations électorales constantes, qui rejettent la légitimité de la victoire de Donald Trump. Cette forme de mobilisation inédite, que va-t-elle produire ? Quel niveau de conscientisation, créera-t-elle en anticipation des prochaines joutes, dans deux et quatre ans ? Le prochain recensement aura lieu en 2020, suivi d’un retracé des districts. Qui gagnera la course pour les sièges de gouverneur ? Après cette défaite, le parti démocrate se rend déjà compte du besoin immédiat d’une politique rurale au niveau des 50 états, parce que le parti démocrate a été perçu dans ces milieux, au cours de ces dernières élections, comme un parti élitiste, un parti de l’establishment, un parti du statu quo. Hillary Clinton ayant 30 ans de carrière politique, est considérée comme une « insider ».

Comment en est-on arrivé là, malgré les prédictions de tous les sondages ? Pour tracer un cheminement plus ou moins logique et rationnelle à ce paradoxe, il faudrait remonter aux effets nocifs que la cristallisation de la mondialisation, a eu sur les classes moyennes, le prolétariat, le milieu rural, les plus démunis et les laissés pour compte, pas seulement aux Etats-Unis, mais à travers le monde entier. Le secteur financier s’étant émancipé par le biais de la mondialisation, des contraintes des frontières et du contrôle fiscal, n’étant voué qu’à lui-même. Incapable de s’autorégulé, il a inventé par cupidité toutes sortes de voies et moyens pour accumuler le plus rapidement possible, plus de richesses. En exagérant dans sa cupidité, ce secteur a pris des risques, dont il ne soupçonnait aucunement leurs conséquences, tel que, les dérivées, le sub-prime, etc., qui ont abouti à l’effondrement du secteur financier et de l’économie mondiale en 2008.

Puisque les grandes institutions du secteur financier, ne sont contrôlées exclusivement que par les puissances occidentales. Ces puissances occidentales ne voulant pas perdre la prédominance mondiale que leurs garantissent le fait d’en être les propriétaires. Les gouvernements des puissances occidentales, ont dû consentir à augmenter leursdettes publiques, pour opérer le sauvetage du secteur financier de la catastrophe, pour conserver, en l’occurrence, la prépondérance de l’occident sur la finance mondiale.

Les effets des conséquences de cette décision d’absorber les exactions du secteur financier, ont été ressentis au niveau de l’économie mondiale, par la dépression, par une énorme augmentation du chômage, par le déclin rapide des classes moyennes, par la stagnation et le déclin salarial, etc. Ce n’est pas étonnant, face aux effets nocifs de cette catastrophe financière et économique qui perdurent jusqu'à présent, que le changement, thème de la campagne électorale de Barack Obama depuis 2007, soit encore pertinent. Et que Donald Trump9 ans plus tard, en a fait sien, en 2016. Alors que l’élite financière et les CEO des grandes firmes, après la catastrophe financière de 2008, dont ils sont les vrais auteurs, se partageant aujourd’hui des salaires et des bonus scandaleux qui se chiffrent à des centaines de millions de dollars l’an. Tandis qu’au niveau des classes moyennes, du prolétariat, du milieu rural et des plus démunis, c’est la stagnation, le chômage, l’anxiété, la frustration et le désespoir, qui sont leurs cauchemars.

En 2007, espérant devenir plus compétitif dans la campagne présidentielle, face à Barack Obama, et à la coïncidence malheureuse des fardeaux que charrie le parti républicain dans cette conjoncture, tel que, l’échec de George W. Bush, les guerres au Moyen-Orient, l’effondrement du secteur financier et de l’économie mondial, etc. Le candidat à la présidence pour les républicains,John McCaine, a choisi pour candidate à la vice-présidence, une populiste, ancienne gouverneur de l’état de l’Alaska,Sarah Palin, pour donner plus de vie et de pertinence à sa campagne. Cependant, l’engouement pour le changement contre le maintien du statu quo, était telle, qu’elle a permis à Barack Obama, malgré le fait qu’il soit nègre, de vaincre les deux candidats de l’establishment, Hillary Clintonaux primaires et John McCaineaux présidentielles.

Après sa défaite, John McCaine est retourné au Sénat. Enthousiasmée par l’accueille chaleureux reçu au cours de la campagne présidentielle, Sarah Palin a choisi de poursuivre sans relâche sa campagne populiste au sein du parti républicain, d’où a émané en 2009, un mouvement populiste, revendicateur, le Tea Party, ayant l’adhésion de plusieurs leaders influents du parti. Ce mouvement a capturé comme base, des blancs frustrés par l’avènement du premier président noir des Etats-Unis, des ouvriers blancs âgés et jeunes dépassés, incapables de gérer la transition vers les nouvelles technologies, où se trouvent aujourd’hui les opportunités, les blancs frustrés de la stagnation et du déclin salarial, les chômeurs blancs, etc. Le Tea Party a construit et obtenu sa cohésion dans une campagne acharnée contre le premier président noir, Barack Obama. Cette campagne acharnée a donné des résultats positifs pour les républicains. Ils ont repris une majorité perdue depuis 2006, en gagnant 63 sièges de plus à la chambre basse. Ce gain de 63 sièges à la chambre basse étant le plus élevé depuis1938 pour les républicains. Ce fait a consacré la validité du Tea Party, en tant qu’instrument politique viable.

Grace au mouvement Tea Party, après le recensement de 2010, les républicains ont eu la majorité des gouverneurs, soit 29 contre 21. La coïncidence du recensement a permis à ces gouverneurs d’exploiter le gerrymandering en retraçant les districts qui sont l’équivalant de nos circonscriptions en Haïti, pour augmenter leur gain au Congrès et reprendre son contrôle. C’est de là qu’est venue l’efficacité du blocage républicain au Congrès, contre le gouvernement de Barack Obama. Ce qui l’a contraint en dernier recours, à utiliser le décret présidentiel pour accomplir d’autres changements qu’il a pu réaliser. Aux présidentielles de 2012Mitt Romney candidat des républicains, néoconservateur, riche, un peu guindé, le fait qu’il s’est éloigné de la populiste Sarah Palin. Sa popularité a périclité. Cependant, le Tea Party ayant perdu son leader, a tout de même maintenu son contrôle du Congrès, après avoir perdu pour la seconde fois, les présidentielles face à la prépondérance du changement, comme thème de campagne électoral.

Bernie Sanders avait scellé sa réconciliation avec Hillary
Clinton le 12 juillet 2016, à Portsmouth.                       
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En 2015, les promesses de changements espérées depuis 2008 et 2012, n’ayant pas été toutes comblées. Deux candidats ont fait irruption à l’avant-scène politique, brandissant à nouveau l’étendard du changement contre le maintien du statu quo. Ceux sont, Bernie Sanders et Donald Trump. Ils ont fait campagne articulant toutes les revendications et frustrations contre l’establishment, contre les élites, contre la mondialisation, contre la stagnation, contre le déclin salarial, etc. Mais avec des nuances qui permettent de distinguer leurs tendances politiques. Donald Trump a embrassé toutes les revendications du Tea Party, ainsi que le racisme, la xénophobie anti-immigrante. Et comme tout leader politique populiste qui se respect, la propagation de la haine, l’idéalisation et la sacralisation des masses, l’absence de doctrine et d’idéologie, la mobilisation tribunicienne et protestataire, l’articulation constante des revendications, l’exploitation constante des ressentiments, etc. Tandis que le sénateur Bernie Sanders a fait une toute autre campagne, avec une politique de gauche antimondialiste, pour un état providence au profit des classes moyennes, du prolétariat, du milieu rural et des plus démunis, contre les inégalités sociales, l’éducation supérieur gratuite au niveau des « states colleges », la réparation des infrastructures pour la création d’emploi, la taxation adéquate et équitable, contre la réduction des taux de taxation au profit des riches, etc.

Parce qu’Hillary Clinton n’a mené qu’une campagne conservatrice, traditionnelle, méthodique, centriste, sans message captatif, percutant, provoquant la passion et l’adhésion. Elle a gagné la majorité du vote populaire, certes. Mais elle a perdu l’Electoral College, face au charisme d’un leader populiste, ayant l’expérience et la maîtrise du spectacle télévisé, clamant un message galvanisant, le changement. Il faut se rendre à l’évidence qu’au bout du compte cette campagne électorale, a été transformée par Donald Trump, qu’en un spectacle télévisé à haute intensité d’hostilité et d’affrontement très négatif. Cette campagne n’a jamais été à aucun moment de la durée, un lieu, ni de compétition d’idées, ni de débat idéologique, ni de comparaison de projets de gouvernement. On s’est engagé plutôt dans une course folle d’attaques personnelles, même mensongère. Comment découvrir dans le passé de l’un ou l’autre candidat, les informations les plus accablantes.

Hillary Clinton, aux traits tirés et
à la mine fatiguée , a refait surface
le mercredi 16 novembre 2016, lors
d'un acte de charité pour les enfants  
Le message d’Hillary Clinton n’a pas été assez percutant pour convaincre ceux qui se sont engagés dans cette lutte acharnée pour le changement, contre la mondialisation, contre les inégalités sociales, contre les privilèges criards des élites et contre le maintien du statu quo. Après avoir passé 30 ans au service du système. Ce n’est pas étonnant qu’elle ait été perçue comme un élément de l’establishment. Les bases de Barack Obama et de Bernie Sanders n’ont pas voté pour Hillary Clinton. Les protestants, contre le mariage pour tous et l’avortement, ont paradoxalement voté en masse pour Donald Trump, malgré sa faillite morale incontestable. Malgré la misogynie de Donald Trump d’une part, et de l’autre le moment historique qu’aurait dû être l’avènement de la première femme présidente des Etats-Unis. Ceux qui auraient dû mobiliser toutes les femmes. L’importance de ces deux faits, n’a pas pu inciter la majorité des femmes à voter pour Hillary Clinton. Malgré le racisme et la xénophobie anti-immigrante de Donald Trump, tous les noirs et tous les hispaniques, n’ont pas voté pour elle. La prépondérance du message percutant du changement, la passion qu’il a insufflée, l’ont emporté !

Tenant compte du message « Drane the swamp pledge », on constate déjà que l’entourage qui gère la transition pour Donald Trump, est parsemé d’éléments de l’establishment et de lobbyistes. Alors que les actes de violence commencent à poindre contre les minorités. Stephen Bannon, un xénophobe et un raciste radical, prônant le « racial cleansing », la supériorité et la suprématie de la race blanche, a intégré le cercle des conseillers de Donald Trump à la Maison blanche, avec une autorité équivalente à celle du Chief of Staff, Reince Priebus. La question est de savoir combien de temps prendra-t-il à l’establishment pour récupérer Donald Trump, d’une part ? Et de l’autre, avec la présence de Stephen Bannon et consorts, de quel changement en sera-t-il question ?

Par : Robert Benodin r.benodin9@att.net

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