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Wednesday, December 16, 2020

Donald Trump en lutte entre son ombre et la lumière

Par Herve Gilbert

Donald Trump sur la pelouse de la Maison Blanche
 le 12 décembre 2020.                                                   

« Tant va la cruche à l’eau qu’à la fin elle se casse» Cette diatribe énoncée dans les fables de La Fontaine vient de prouver encore une fois que la triste vérité, malgré son effroi, ne peut rester éternellement enfouie dans son écrin. Il faut l'en extraire et crever l'abcès. 

Dans le parti Républicain, il y a eu beaucoup d’hésitations, beaucoup de tergiversations à propos de la chute de l’Aiglon. Tout le monde marchait sur des œufs. Car Trump draîne après lui 75 millions de votants. Ce qui est indéniable et déroutant pour un éventuel challenger. Par conséquent, pas de gaffe dans la relation  avec le supposé perdant qui hésite à reconnaître sa déroute, la fin de son règne. Le roi est mort! Vive le roi! Tel devrait être le slogan du moment. 

Malheureusement, chassez le naturel, il revient toujours au galop, d’où le lapsus, selon Trump, de Mitch McConnell, le leader de la majorité au Sénat qui a enfin coiffé après six semaines  Joe Biden du titre de « Président élu ». Cependant, pas plus tard que la semaine dernière, ce sacré McConnell hésitait encore à reconnaître la chute du lion à la crinière orange. 

Enfin, coincé entre son devoir constitutionnel et la comédie, le chef du Sénat a mis ses pieds sur terre et a choisi son camp. Soulagé, il s’est empressé de déclarer:  « Notre pays a officiellement un président et un vice-président élus. Le Collège électoral a parlé. Donc, je tiens aujourd'hui à féliciter le président élu Joe Biden et la vice-présidente élue Kamala Harris ». Paf ! 

Le chef de la majorité au Sénat, Mitch McConnell, lors de sa
conférence de press au Capitole à Washington, le 15 décembre
Se réveillant, tout en titubant, de son cauchemar légendaire, par ce troublant refrain chanté par le président du Sénat Mitch McConnell, Donald Trump n’en croyait pas ses oreilles. Il a fustigé ce dernier sur Twitter, tôt  ce mercredi matin pour avoir, « par erreur », selon sa lecture, exercé le devoir de sa charge en reconnaissant finalement que le président élu Joe Biden avait bien remporté la course 2020 à la Maison Blanche. La réprimande du président déchu est intervenue plus de 14 heures après que le républicain du Kentucky ait prononcé mardi un discours devant le Sénat au lendemain du vote du Collège électoral officialisant la victoire de Biden. 

En maître chanteur professionnel, Trump s’est réservé le droit d’exercer maintes pressions sur les républicains, en pensant les faire valser par son dernier Tweet publié peu après minuit, par ce sibyllin rappel : « Mitch, 75 millions VOTES, un record pour un président en exercice ( beaucoup de votes ). Trop tôt pour abandonner. Le Parti républicain doit enfin apprendre à se battre. Les gens sont en colère! ». Cela s’appelle en réalité : prendre les gens intelligents pour des macaques à faire danser au son des castagnettes. 

Et ce qui devrait arriver arriva! McConnell, s’appuyant sur son intégrité, a rompu le cordon ombilical qui le rattachait jusqu’à ce mardi à  Trump, en appelant tous les législateurs républicains à effectuer leurs devoirs de citoyens, à ne pas s'opposer aux résultats de l'élection présidentielle lorsqu'ils seront à la session conjointe du Congrès pour la certification du choix de la nation au début de l'année prochaine. 

En dernier lieu, un porte-parole de McConnell a refusé de commenter publiquement les critiques de Trump. Le jeu ne valait plus la chandelle. Au cours des dernières semaines, le président n’a pas raté non plus les gouverneurs républicains et d'autres responsables locaux, qu'il a jugés trop laxistes,  pour n'avoir pas su soutenir ses allégations de fraudes électorales généralisées, balayées d'un revers de main par le judiciaire.

Mais son Tweet de mercredi a marqué un point de rupture. Pour la première fois, il a publiquement dénoncé les plus hauts dirigeants de son parti à Washington  qui ne l'ont pas aidé  à invalider le résultat du vote. Il a tiré à boulets rouges sur tout ce qui bouge. Il était bon à lier. 

Le vote du Collège électoral lundi a également été un point de bascule pour de nombreux autres républicains du Sénat qui jusqu'alors refusaient d'accepter la réalité selon laquelle Trump avait perdu sa campagne pour un second mandat. En fin de compte, ils finissent par se rendre à l’évidence que nul ne peut passer sa vie à lutter contre des moulins à vent. Vox populi! Vox Dei! La voix du peuple doit être respectée. Personne ne s’y trouve au-dessus.

« Je crois comprendre qu’il y a des gens qui sont profondément convaincus du résultat de cette élection », a déclaré à POLITICO le whip de la majorité au Sénat, John Thune (R-S.D.), principal adjoint de McConnell. « Mais à la fin, à un moment donné, il faut faire face à la réalité. Aujourd'hui  que le Collège électoral s'est prononcé, il est temps que tout le monde passe à autre chose. » Ite Missa Est !

Herve Gilbert


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