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Friday, October 18, 2019

LE JEU FORCE À COUPER : EN FINIR AVEC L’ÈRE PHTK

Par : Antoine Lyonel Trouillot
Quelques-uns se seraient offusqués de l’action d’individus ayant voulu empêcher la tenue d’une séance au Sénat. Comme quelques-uns avaient demandé à la population de ne pas contrarier la rentrée des classes. Ce sont les larmes des derniers esprits chagrins nourris par un conservatisme jouant la carte du formalisme.

Le peuple, les secteurs organisés de la société, l’opposition ne sont pas responsables de cette impossibilité de vivre qu’est devenue la réalité haïtienne. Michel Martelly/Jovenel Moïse/PHTK ont conduit le pays à cette situation insurrectionnelle en considérant le pouvoir politique comme une source d’enrichissement personnel, en soumettant les institutions à une logique de gang, en se montrant les champions de la corruption, de l’incompétence et du mépris de la condition populaire, dans une alliance avec les secteurs les plus corrompus, réactionnaires et prisonniers de leurs préjugés, du monde des affaires. Et quel « intellectuel » ne sait pas que les revendications populaires prennent les formes qui leur sont nécessaires et possibles dans des situations particulières ! Que de rois, présidents, chefs d’État et de gouvernements, que d’institutions l’ont vécu lorsque la contradiction était devenue insupportable pour les peuples.

Des intellectuels, des analystes, de larges secteurs de la population, l’opposition le disaient depuis longtemps : il n’y a pas de réconciliation possible entre le PHTK et la population. Tout ce monde est en train, de manière un peu désorganisée mais probante, d’agir pour obtenir cette fin, et ni les votes achetés ni les armes de la répression et de l’usage politique du banditisme, ne pourront contenir cet élan, cette décision.

J’ai souvent cité ces mots de Léo Ferré, mais jamais ils n’ont été aussi près de la vérité. « Et ils ont mis la république au fond d’un vase, à reposer. Les experts ont analysé ce qu’il y avait au fond du vase : il n’y avait rien qu’un peu de vase ». Là où la phrase ne dit pas toute la vérité, c’est sur la quantité. Martelly/Moïse/PHTK, c’est beaucoup de vases.

Le PHTK, c’est le pouvoir de l’indignité et de l‘outrecuidance, le vice, l’obscurantisme, l’absence d’idéologie politique à part l’enrichissment personnel. Le PHTK, c’est tous les coups sont bons. Le PHTK c’est à moi le luxe, à toi la pénurie. Le PHTK c’est le parlement caverne d’on sait qui, les contrats hors-normes, les cabris à prix d’or, les votes achetés… Le PHTK, c’est Sganarelle et monsieur Lechat ; Cadet Jacques et madame Thazar ; Gwo Moso et maître Beurre-à-chat. Le PHTK, c’est le retour de préjugés sociaux qu’on croyait enterrés, la fête à quelques anciens et nouveaux riches, et ta gueule, monsieur le peuple, laisse-nous faire nos affaires. Le PHTK, c’est mensonge et vérité, comme deux faces d’une même médaille. Le mensonge des promesses non tenues, le mensonge formaliste en violation flagrante des principes dont il se réclame. Et la vérité ne vaut guère meux. Oui, j’ai menti et triché, et alors ? Le PHTK, c’est le scandale au quotidien, chaque jour une nouvelle « affaire » sur un vol ou détournement. Et aujourd’hui des assassins encagoulés qui tirent à hauteur d’homme. Le PHTK, c’est La Saline et Dermalog. Le PHTK, c’est l’expression la plus inculte et la plus ouvertement corrompue d’un système ayant produit et maintenu de inégalités socales inacceptables.

Le PHTK, c’est cette usine à produire du pire à laquelle Haïti aujourd’hui dit non. A quelle dignité citoyenne peut-on prétendre, en tant qu’enseignant ou entrepreneur, en tant que travailleur ou simple citoyen si l’on ne rejoint pas avec sa voix, son action, ce refus salvateur, en se retranchant derrière des considérations formalistes ou des intérêts individuels mesquins !

La fin de l’ère Martelly/Moïse/PHTK est devenue l’élément nécessaire pour atteindre les conditions de possibilité d’une démarche collective vers plus de justice et d’équité. Vers une vie digne de ce nom, tout simplement. Ils ne peuvent rester au pouvoir que par la corruption et la répression. Peut-on encore se donner des raisons d’être complice de cela ? Le silence et l’inaction sont aujourd’hui une complicité objective avec le crime et le vice. Si l’on n’a pas le courage de dire que notre survie collective, voire notre avenir, passent par la fin de cette triste mésaventure, à partir de quel lieu peut-on parler en tant que citoyen ? Le pays a besoin d’un sursaut de la part de tous, des progressistes issus de toutes les classes sociales,  pour sortir de la vase.


Antoine Lyonel Trouillot
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